Haiti en Marche: Les " pèpè " menacés par la crise

gwotoro Mar 10 Fév 2009 - 23:15

ECONOMIE</B>

Les " pèpè " menacés par la crise

PORT-AU-PRINCE, 1er Février - Un secteur chez nous qui risque d'être victime de la crise économique aux Etats-Unis c'est celui des vêtements usagés communément appelés " pèpè. "

Nous parlons des dizaines de milliers de tonnes de vêtements de seconde ou de énième main qui débarquent chaque semaine dans le pays par cargos entiers venant de Miami.

Les " pèpè " constituent depuis lors en Haïti non seulement un pan important du commerce de gros et de détail (vendus aussi bien par balles que par unité de vêtement) mais aussi une pseudo modernisation. La petite couture locale et artisanale a été rapidement détrônée par ces modèles dernier cri venues du grand nord et qui font l'actualité aussi bien dans les magazines mondains (genre " Ticket ") que dans les télénovélas dont le public haïtien devenait en même temps des plus friands.

Le " tanga " fait aussitôt fureur dans une chanson du carnaval.

D'un jour à l'autre c'est tout le pays qui est conquis. Mine de rien, et en un rien de temps, Haïti est à l'image de Park Avenue (New York) ou de Carnaby Street (Londres) avec les filles aux quatre coins de notre pays aussi belles que la top model Naomy Campbell et toutes déambulant le téléphone cellulaire vissé à l'oreille.

Qu'elles soient marchandes de légumes de Kenscoff ou autre profession aussi modeste dans le privé...

Le pays a échappé à ses décideurs...

Une véritable révolution et pas si petite que ça comme le gouvernement vient de l'apprendre à ses dépens dans sa récente tentative d'augmenter la taxe sur les appels téléphoniques.

Une autre preuve s'il le fallait que le pays a échappé à ses décideurs politiques. Ou mieux, ceux-ci sont trop distancés par la réalité sociale.

Nous sommes même devenu un pays exportateur de vêtements. En effet, nos voisins dominicains en font aussi grande consommation, et comme leur pays en interdit l'importation pour ne pas faire du tort à leur industrie locale de l'habillement, c'est chez nous qu'ils se fournissent. Comme on sait, Haïti est le pays le plus " néo-libéral " de toute la région. Hélas!

Cachez ce sein ma fille...

Toujours est-il que c'est cette véritable métamorphose, cette espèce de démocratisation au sein d'une société demeurée trop vieillotte et où justement l'habit a toujours fait le moine (même si on peut se questionner sur le véritable intérêt économique des " pèpè ", mais c'est un autre débat), c'est cela que menace une crise économique bien que se déroulant à plusieurs milles de nos côtes, au propre comme au figuré, davantage encore des villages de Grand Gosier ou de Grand Boucan mais où les filles comme à la capitale s'habillent aujourd'hui à la dernière mode.

Sauf les pires hypocrites qui trouveraient à redire: " cachez ce sein ma fille, que je ne saurais voir! "

En effet, toutes ont la poitrine gonflée comme au bal chez la reine Marie-Antoinette.

Hélas, tout cela risque de finir aujourd'hui car les Américaines et Américains vont devoir renoncer à la vie facile leur permettant de se débarrasser de leurs vêtements aussitôt après les avoir acheté comme les héroïnes de la série " Sex and the City ".

Les " pèpè " étant avant tout un produit de la grande société de consommation connue pendant ces vingt dernières années avec les Etats-Unis en tête, et où l'on jette les choses avant même d'avoir eu le temps de les utiliser. Aussi bien les vêtements que les téléviseurs, lap tops, I-pods etc...

Une opportunité inespérée pour la petite couture haïtienne...

Or la crise économique semble devoir mettre fin à tout ce gaspillage. Le nouveau président Barack Obama a appelé ses concitoyens à se serrer la ceinture. La croissance dans les pays développés en général ne dépassera pas 0,5 pour cent en cette année horrible de 2009, selon le FMI. Et les Etats-Unis devraient être les premiers touchés. Evidemment l'industrie de l'habillement va devoir mettre elle aussi un frein à ses excès.

Un de ces jours nous irons nous poster au terminal du port de Miragoâne (sud) pour voir si le tonnage des " pèpè " a diminué.

Ou tout simplement, comme dit une chanson, rester au coin à regarder passer les filles pour voir si leurs poitrines en balcon reflètent aussi le cours des marchés boursiers quand ceux-ci sont à la baisse.

Mais ceci est peut-être une opportunité inespérée pour la petite couture haïtienne de reprendre ses droits. Sauf qu'elle devra sortir de son esprit trop insulaire pour embrasser elle aussi les nouvelles modes.

Marcus, 1 février 2009

Nickie Mar 10 Fév 2009 - 23:30

Hummmm Gwotoro, je ne suis pas très certaine que le pèpè va être banni en Haiti. Il y en aura toujours; seulement, on peut imaginer que le pourcentage va chuter considérablement. Avec la situation de misère qui sévit en Haïti, je me demande si ces gens démunis qui ont l'habitude de se vêtir de pèpè pourront acheter un morceau de toile dispendieux pour ensuite le faire confectionner chez un (e) couturier (ère). Je préfère dire que ce sont ces gens là qui subiront en premier cette baisse.

C'est sur que les couturiers se rejouiront de cette situation, mais est ce que leur chiffre d'affaires vont grimper pour autant?. C'est à suivre.

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