Les Indiens d'Haiti et nous

LES INDIENS D'HAITI ET NOUS

Par Ghislaine Charlier

Ce n'est pas sans raison que nos peres, apres avoir terrasse l'ennemi esc1avagiste, ont redonne a notre patrie nouvellement conquise, son nom indien : HAITI.

Ce n'est pas sans raison que tant d'Hartiens, noirs ou muhltres portent encore dans leurs traits des signes evidents d'ascendance indienne.

Ce n'est pas sans raison que sur les autels vaudoux, les objets indiens que l'on retrouve encore sur notre terre, tiennent une place d'honneur a cote des symboles africains ou des images chretiennes.

Nous sommes les heritiers de trois civilisations. Tout illettre qu' est e peuple haitien, il n'a rien renie de ses origines.

Nous devons aux Indiens Cyboneys, Tainos et Arrawaks d'Halti, une partie de notre vocabulaire, maints objets d'usage courant. Ils nous ont appris a manger leurs fruits et legumes, a preparer grains et racines pour la consommation, et a gouter mets et boissons exquis, bref, a nous acclimater.


Nos poetes se sont souvenus d'eux dans leurs chants. Ainsi, Anthony Phelps:

Sur mon visage j' ai dessine les signes du Samba et je remonte lentement
o mon pays le lit de ton Histoire
Parmi la pierre a feu et le silex taille.
Et l' odeur acre de la poudre
Se mele a la senteur douceatre des abricots,
Tu ne connaissais point Ie sacrificateur au couteau d' obsidienne
et qui ouvrait au valeureux guerrier Ie chemin du soleil
Par la voix des Butios l' oracle des Zemes
gouvernait Ie pays des cent grottes
et les Chemis maitres des destinees humaines
se partageaient l' espace
veillant sur ton enfance o mon Pays

Et voici les premiers massacreurs :

Mais un matin ils sont venus par la route salee
Jetant I' effroi au creur de tes enfants
***
Ils sont venus
Avec en main
Colliers de verre
Et menottes d'argent...
* * *
Ils sont venus
Avec la croix
Avec la pioche
Avec la trique
Avec leurs chi ens
A la voix rauque
Par la route salee
ils sont venus
sur leurs vaisseaux ...
* * *
Ils sont venus a la recherche de leur dieu
Le pur metal aux reflets jaunes
Et Ie tonnerre se faisait leur complice

Nous savons tous que les femmes et les hommes qui ont creur et courage sont d'emblee du cote des opprimes et jamais dans le camp des oppresseurs.

Nous aimons rappeler avec les lndiens de notre pays d'adoption, les amis quebecois et canadiens de l'humanite, Ie souvenir du genocide des premiers habitants de notre Ile, de ses combattants, de ses heros: Caonabo, Manicatex, Guarionex, Mayobanex, la Fleur d'Or Anacaona et Ie cacique Henri.

Et ils sont morts o mon Pays
Tes premiers fils
Au fond des mines
Pour que les grands aient couche molle
Et vaisseaux bien grees

Arborigenes des grandes chasses
Et du pays des abricots
Drapes dans la douceur
Et la fierte de votre race
Transmettez-nous votre croyance
Au paradis sur notre terre.

Les indigenes croyaient qu'apres leur mort ils iraient vivre au bout de la presqu'ile du Sud ou le mamey abonde, ou il est gros, juteux, succulent et parfume. Le mamey que nous appelons aujourd'hui abricot, est un fruit indigene dont Ia couleur est, en effet, d'un abricot rougeatre. Sa pelure est brune, epaisse et suivie d'une fine membrane presque blanche. On fait de ce fruit une marmelade et une confiture egalement esquises.

Les femmes indiennes portaient sur le bras de petits chiens muets qui ont egalement disparus comme les Indiens. Les dogues importes pour massacrer Aborigenes et Africains ont du les trouver aussi a leur gout.