Le Monde Diplomatique : Bataille humanitaire à Haïti
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Le Monde Diplomatique : Bataille humanitaire à Haïti
Bataille humanitaire à Haïti
La communauté internationale a immédiatement réagi à la catastrophe du 12 janvier en faisant part de sa vive « émotion » et en décidant de débloquer des moyens matériels et humains exceptionnels. Les pays du Nord, Etats-Unis en tête, ont multiplié les déclarations d’« amitié » envers le pays sinistré, le plus pauvre de l’hémisphère occidental, mais aussi la première République libre de l’Amérique coloniale et esclavagiste. « Deuxième nation libre d’Amérique », rectifie M. William Clinton, rapporteur spécial pour la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah) depuis 2009 — celui que l’humour créole surnomme déjà le « pakapala », « l’incontournable » du « problème haïtien ». Car si l’Organisation des Nations unies se présente comme l’instance la plus légitime pour diriger la coordination de l’aide, les Etats-Unis ont rapidement pris les rênes des opérations. Quatre mille six cents hommes sur le terrain, dix mille cinq cents en mer pour les appuyer, 167 millions de dollars d’aide (118 millions d’euros) ont été déployés par le puissant voisin.
Le président Barack Obama ne pouvait laisser l’occasion d’affirmer sa solidarité dans le drame. Ni celle de renouer avec l’image d’un interventionnisme basé sur l’assistance plutôt que sur l’affrontement armé. Au-delà de l’émotion du peuple américain et de son dirigeant pour une tragédie qui se déroule à moins d’un millier de kilomètres de ses côtes, l’urgence humanitaire représente l’opportunité pour M. Obama de marquer une rupture avec la ligne gouvernementale de ses prédécesseurs, qui avait considérablement terni l’image des Etats-Unis dans l’opinion internationale : la gestion calamiteuse du désastre engendré par le cyclone Katrina et, en politique étrangère, l’invasion militaire de l’Afghanistan et de l’Irak, fondées sur des mensonges d’Etat avérés et justifiés par une doctrine de guerre contre l’« axe du Mal ».
Cette prise en main des opérations a néanmoins provoqué la protestation d’un certain nombre d’acteurs, officiels ou organisations non gouvernementales (ONG), dont le travail d’urgence a été compliqué par la centralisation des décisions, notamment de l’autorité aéroportuaire de Port-au-Prince, sous administration américaine. Elle suscite également des inquiétudes de la part de plusieurs observateurs de la région qui craignent une nouvelle démonstration de la « doctrine Monroe », par laquelle l’ « Oncle Sam » s’octroie depuis 1823 le droit d’intervenir sur l’ensemble du continent.
Le déploiement militaire massif rappelle en effet de sombres heures de l’histoire. Celles de l’invasion et de l’occupation armée de l’île, entre 1915 et 1934, par la « première nation libre », au nom de la démocratie ; celle du renversement du président Jean-Bertrand Aristide, en 1991, par une junte militaire, dont les liens avec l’administration du président George Bush n’est pas éclaircie ; son rétablissement au pouvoir, en 1994, par l’administration de M. Clinton, puis de nouveau sa destitution en 2004 lors d’un nouveau débarquement armé décidé par Washington (avec la collaboration de Paris).
M. Obama a promis une nouvelle fois au peuple haïtien que « les Américains seraient à leurs côtés, dans l’urgence et dans la reconstruction ». Mais son pays aura du mal à faire oublier sa responsabilité dans l’instabilité politique chronique dans laquelle est plongée Haïti depuis son indépendance.
Responsabilité qu’il partage avec d’autres pays qui n’hésitent pas à se proclamer « amis » d’Haïti et solidaires de son malheur. Le ministre français des affaires étrangères Bernard Kouchner invoque un engagement envers le peuple haïtien « que l’histoire a rapproché du peuple français ». Rapproché ? En mettant en déroute, en 1804, l’armée napoléonienne, Haïti a été en retour isolé par les empires esclavagistes afin que sa révolution ne s’étende pas au-delà de ses frontières. Le pays a ensuite dû rembourser à Paris une dette impayable (150 millions de francs-or réclamés en 1825, équivalents à 15 milliards d’euros actuels) pour prix de la reconnaissance de son indépendance et du renoncement à une nouvelle invasion.
L’affront du pays révolté à la grandeur de l’ancien empire pourrait expliquer que, de toute son histoire, jamais un chef d’Etat français n’ait mis le pied sur le sol Haïtien. Cela n’a (peut-être) pas échappé à M. Nicolas Sarkozy qui a immédiatement demandé à prendre part à l’opération montée par Washington et s’est engagé à se rendre en visite dans l’île au printemps. En profitera-t-il pour remettre en cause le durcissement des règles d’obtention du droit d’asile, l’augmentation drastique des expulsions qui concerne un grand nombre d’Haïtiens, principalement dans les départements des Antilles et de Guyane ? Selon le Collectif Haïti de France, sur les cinquante mille migrants reconduits à la frontière en 2007, la moitié l’ont été à partir des départements et territoires d’outre-mer ; 67 % des personnes expulsées de la Guadeloupe étaient de nationalité haïtienne.
L’amitié franco-haïtienne s’était également manifestée d’une étrange façon, lorsque la France accorda le refuge, en 1986, au dictateur Jean Claude Duvalier, chassé par son peuple après une dictature sanglante inaugurée par son père François et qui dura presque trente ans (1). Duvalier fils s’exila avec une fortune évaluée à 900 millions de dollars extraite des caisses de l’Etat haïtien, soit une somme alors supérieure à la dette externe du pays. Malgré les demandes répétées, il ne fut jamais livré à la justice de son pays. La famille Duvalier avait pourtant détourné à son profit 80 % de l’aide économique versée à Haïti, mais constituait en ce temps une précieuse alliée pour ses amis Occidentaux dans la lutte contre le « péril communiste ».
Il serait aussi avisé de relativiser la bienveillance du Canada, qui a pour sa part favorisé l’accueil des haïtiens diplômés, privant de ses cadres le pays qui souffre certainement le plus de la fuite des cerveaux et des compétences, et où le manque d’éducation est un problème majeur.
Au vu de cette histoire d’amitié pour le moins houleuse, la reconstruction devrait être placée en priorité aux mains d’organisations supranationales. Alors que la position de l’Union européenne se fait attendre, le directeur général du Fonds monétaire international (FMI), M. Dominique Strauss-Kahn a d’ores et déjà avancé l’idée d’un immense plan Marshall (2) destiné à financer sur le long terme la reconstruction de l’Etat détruit, et annoncé — pour cinq ans, en… attendant mieux — l’annulation de la dette extérieure haïtienne, dont le FMI détient 80 % avec la Banque mondiale.
Là encore, la « générosité » des bailleurs de fonds ne saurait occulter que ce sont ces mêmes institutions financières internationales qui, en échange d’allègements de la dette contractée sous la dictature, imposèrent dans les années 1990 des « plans d’ajustements structurels » à Haïti. Ceux-ci ont miné les fondements de l’économie agricole et des services publics, poussant des millions d’Haïtiens vers les bidonvilles de la capitale et les usines de sous-traitance multinationales, permettant le « dumping » des produits agricoles américains et menant à une crise alimentaire sans précédant dont témoignèrent les émeutes de la faim en 2008.
Quand bien même le FMI tente de regagner une crédibilité dans sa mission de développement des pays pauvres, il est difficile de ne pas éprouver d’inquiétude lorsque son directeur réaffirme qu’il « se tient prêt à jouer son rôle » dans ses « domaines de compétence ».
Une conférence internationale sur l’aide à Haïti se tiendra en mars, à New York, au siège de l’ONU, afin de coordonner les efforts immédiats pour faire face aux suites du séisme et préparer l’action à long terme ont décidé, le 26 janvier, réunis à Montréal, les « pays amis » – Etats-Unis, Union européenne, France, Espagne, Japon, Brésil, mais aussi… Banque interaméricaine de développement, Banque mondiale, FMI ! A cette occasion, le premier ministre haïtien Jean-Max Bellerive a remercié tous ceux qui sont venus en aide à ses compatriotes, en citant notamment Cuba et le Venezuela, alors que ces deux pays, qui ont dénoncé la présence militaire américaine en Haïti, n’avaient pas été invités à la conférence.
Le plan de reconstruction attise déjà de nombreuses convoitises du côté des firmes privées. Le groupe International Peace Operations Association(IPAO), qui associe des entreprises spécialisées dans la réponse aux catastrophes et aux situations de guerre, a déjà offert ses services pour appuyer l’effort de reconstruction. Parmi ces firmes figure Triple Canopy, société militaire privée (SMP) présente en Irak et en Afghanistan (lire dans Le Monde diplomatique de février 2010, « Mercenaires d’Etat en Afghanistan »). Dès le 14 janvier, la Heritage Foundation, l’un des plus influents « think-tank » conservateurs des Etats-Unis, écrivait sur son site : « Au milieu de la souffrance, la crise en Haïti offre des opportunités aux Etats-Unis. En plus de fournir une aide humanitaire immédiate, la réponse des États-Unis face au tragique tremblement de terre donne l’occasion, en plus d’améliorer l’image des Etats-Unis dans cette région, de restructurer le gouvernement et l’économie d’Haïti qui dysfonctionnent depuis un certain temps (3) ».
Plusieurs fois évoquée lors des troubles politiques qui secouèrent l’île, la mise sous tutelle internationale n’avait jamais été acceptée par un peuple qui s’est libéré seul de ses chaînes et a trop expérimenté les trahisons. Lors de la réunion de Montréal, pour faire taire inquiétudes et critiques, le premier ministre Jean-Max Bellerive a dû affirmer haut et fort que l’Etat haïtien jouerait un rôle central de coordination dans la distribution de l’aide « et qu’il n’avait pas l’intention de céder une part de sa souveraineté à qui que ce soit (4</I> ».
Ironie de l’histoire, le festival de littérature internationale « Etonnants voyageurs », qui devait commencer le jour du drame et réunir une cinquantaine d’écrivains à Port-au-Prince, s’intitulait « Le monde au miroir d’Haïti, Haïti au miroir du monde ». Depuis ce jour, le monde se regarde dans la tragédie haïtienne et les nations puissantes tentent de recomposer leur image dans le reflet haïtien.
Benjamin Fernandez.
Source : Le Monde Diplomatique de février 2010.
La communauté internationale a immédiatement réagi à la catastrophe du 12 janvier en faisant part de sa vive « émotion » et en décidant de débloquer des moyens matériels et humains exceptionnels. Les pays du Nord, Etats-Unis en tête, ont multiplié les déclarations d’« amitié » envers le pays sinistré, le plus pauvre de l’hémisphère occidental, mais aussi la première République libre de l’Amérique coloniale et esclavagiste. « Deuxième nation libre d’Amérique », rectifie M. William Clinton, rapporteur spécial pour la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah) depuis 2009 — celui que l’humour créole surnomme déjà le « pakapala », « l’incontournable » du « problème haïtien ». Car si l’Organisation des Nations unies se présente comme l’instance la plus légitime pour diriger la coordination de l’aide, les Etats-Unis ont rapidement pris les rênes des opérations. Quatre mille six cents hommes sur le terrain, dix mille cinq cents en mer pour les appuyer, 167 millions de dollars d’aide (118 millions d’euros) ont été déployés par le puissant voisin.
Le président Barack Obama ne pouvait laisser l’occasion d’affirmer sa solidarité dans le drame. Ni celle de renouer avec l’image d’un interventionnisme basé sur l’assistance plutôt que sur l’affrontement armé. Au-delà de l’émotion du peuple américain et de son dirigeant pour une tragédie qui se déroule à moins d’un millier de kilomètres de ses côtes, l’urgence humanitaire représente l’opportunité pour M. Obama de marquer une rupture avec la ligne gouvernementale de ses prédécesseurs, qui avait considérablement terni l’image des Etats-Unis dans l’opinion internationale : la gestion calamiteuse du désastre engendré par le cyclone Katrina et, en politique étrangère, l’invasion militaire de l’Afghanistan et de l’Irak, fondées sur des mensonges d’Etat avérés et justifiés par une doctrine de guerre contre l’« axe du Mal ».
Cette prise en main des opérations a néanmoins provoqué la protestation d’un certain nombre d’acteurs, officiels ou organisations non gouvernementales (ONG), dont le travail d’urgence a été compliqué par la centralisation des décisions, notamment de l’autorité aéroportuaire de Port-au-Prince, sous administration américaine. Elle suscite également des inquiétudes de la part de plusieurs observateurs de la région qui craignent une nouvelle démonstration de la « doctrine Monroe », par laquelle l’ « Oncle Sam » s’octroie depuis 1823 le droit d’intervenir sur l’ensemble du continent.
Le déploiement militaire massif rappelle en effet de sombres heures de l’histoire. Celles de l’invasion et de l’occupation armée de l’île, entre 1915 et 1934, par la « première nation libre », au nom de la démocratie ; celle du renversement du président Jean-Bertrand Aristide, en 1991, par une junte militaire, dont les liens avec l’administration du président George Bush n’est pas éclaircie ; son rétablissement au pouvoir, en 1994, par l’administration de M. Clinton, puis de nouveau sa destitution en 2004 lors d’un nouveau débarquement armé décidé par Washington (avec la collaboration de Paris).
M. Obama a promis une nouvelle fois au peuple haïtien que « les Américains seraient à leurs côtés, dans l’urgence et dans la reconstruction ». Mais son pays aura du mal à faire oublier sa responsabilité dans l’instabilité politique chronique dans laquelle est plongée Haïti depuis son indépendance.
Responsabilité qu’il partage avec d’autres pays qui n’hésitent pas à se proclamer « amis » d’Haïti et solidaires de son malheur. Le ministre français des affaires étrangères Bernard Kouchner invoque un engagement envers le peuple haïtien « que l’histoire a rapproché du peuple français ». Rapproché ? En mettant en déroute, en 1804, l’armée napoléonienne, Haïti a été en retour isolé par les empires esclavagistes afin que sa révolution ne s’étende pas au-delà de ses frontières. Le pays a ensuite dû rembourser à Paris une dette impayable (150 millions de francs-or réclamés en 1825, équivalents à 15 milliards d’euros actuels) pour prix de la reconnaissance de son indépendance et du renoncement à une nouvelle invasion.
L’affront du pays révolté à la grandeur de l’ancien empire pourrait expliquer que, de toute son histoire, jamais un chef d’Etat français n’ait mis le pied sur le sol Haïtien. Cela n’a (peut-être) pas échappé à M. Nicolas Sarkozy qui a immédiatement demandé à prendre part à l’opération montée par Washington et s’est engagé à se rendre en visite dans l’île au printemps. En profitera-t-il pour remettre en cause le durcissement des règles d’obtention du droit d’asile, l’augmentation drastique des expulsions qui concerne un grand nombre d’Haïtiens, principalement dans les départements des Antilles et de Guyane ? Selon le Collectif Haïti de France, sur les cinquante mille migrants reconduits à la frontière en 2007, la moitié l’ont été à partir des départements et territoires d’outre-mer ; 67 % des personnes expulsées de la Guadeloupe étaient de nationalité haïtienne.
L’amitié franco-haïtienne s’était également manifestée d’une étrange façon, lorsque la France accorda le refuge, en 1986, au dictateur Jean Claude Duvalier, chassé par son peuple après une dictature sanglante inaugurée par son père François et qui dura presque trente ans (1). Duvalier fils s’exila avec une fortune évaluée à 900 millions de dollars extraite des caisses de l’Etat haïtien, soit une somme alors supérieure à la dette externe du pays. Malgré les demandes répétées, il ne fut jamais livré à la justice de son pays. La famille Duvalier avait pourtant détourné à son profit 80 % de l’aide économique versée à Haïti, mais constituait en ce temps une précieuse alliée pour ses amis Occidentaux dans la lutte contre le « péril communiste ».
Il serait aussi avisé de relativiser la bienveillance du Canada, qui a pour sa part favorisé l’accueil des haïtiens diplômés, privant de ses cadres le pays qui souffre certainement le plus de la fuite des cerveaux et des compétences, et où le manque d’éducation est un problème majeur.
Au vu de cette histoire d’amitié pour le moins houleuse, la reconstruction devrait être placée en priorité aux mains d’organisations supranationales. Alors que la position de l’Union européenne se fait attendre, le directeur général du Fonds monétaire international (FMI), M. Dominique Strauss-Kahn a d’ores et déjà avancé l’idée d’un immense plan Marshall (2) destiné à financer sur le long terme la reconstruction de l’Etat détruit, et annoncé — pour cinq ans, en… attendant mieux — l’annulation de la dette extérieure haïtienne, dont le FMI détient 80 % avec la Banque mondiale.
Là encore, la « générosité » des bailleurs de fonds ne saurait occulter que ce sont ces mêmes institutions financières internationales qui, en échange d’allègements de la dette contractée sous la dictature, imposèrent dans les années 1990 des « plans d’ajustements structurels » à Haïti. Ceux-ci ont miné les fondements de l’économie agricole et des services publics, poussant des millions d’Haïtiens vers les bidonvilles de la capitale et les usines de sous-traitance multinationales, permettant le « dumping » des produits agricoles américains et menant à une crise alimentaire sans précédant dont témoignèrent les émeutes de la faim en 2008.
Quand bien même le FMI tente de regagner une crédibilité dans sa mission de développement des pays pauvres, il est difficile de ne pas éprouver d’inquiétude lorsque son directeur réaffirme qu’il « se tient prêt à jouer son rôle » dans ses « domaines de compétence ».
Une conférence internationale sur l’aide à Haïti se tiendra en mars, à New York, au siège de l’ONU, afin de coordonner les efforts immédiats pour faire face aux suites du séisme et préparer l’action à long terme ont décidé, le 26 janvier, réunis à Montréal, les « pays amis » – Etats-Unis, Union européenne, France, Espagne, Japon, Brésil, mais aussi… Banque interaméricaine de développement, Banque mondiale, FMI ! A cette occasion, le premier ministre haïtien Jean-Max Bellerive a remercié tous ceux qui sont venus en aide à ses compatriotes, en citant notamment Cuba et le Venezuela, alors que ces deux pays, qui ont dénoncé la présence militaire américaine en Haïti, n’avaient pas été invités à la conférence.
Le plan de reconstruction attise déjà de nombreuses convoitises du côté des firmes privées. Le groupe International Peace Operations Association(IPAO), qui associe des entreprises spécialisées dans la réponse aux catastrophes et aux situations de guerre, a déjà offert ses services pour appuyer l’effort de reconstruction. Parmi ces firmes figure Triple Canopy, société militaire privée (SMP) présente en Irak et en Afghanistan (lire dans Le Monde diplomatique de février 2010, « Mercenaires d’Etat en Afghanistan »). Dès le 14 janvier, la Heritage Foundation, l’un des plus influents « think-tank » conservateurs des Etats-Unis, écrivait sur son site : « Au milieu de la souffrance, la crise en Haïti offre des opportunités aux Etats-Unis. En plus de fournir une aide humanitaire immédiate, la réponse des États-Unis face au tragique tremblement de terre donne l’occasion, en plus d’améliorer l’image des Etats-Unis dans cette région, de restructurer le gouvernement et l’économie d’Haïti qui dysfonctionnent depuis un certain temps (3) ».
Plusieurs fois évoquée lors des troubles politiques qui secouèrent l’île, la mise sous tutelle internationale n’avait jamais été acceptée par un peuple qui s’est libéré seul de ses chaînes et a trop expérimenté les trahisons. Lors de la réunion de Montréal, pour faire taire inquiétudes et critiques, le premier ministre Jean-Max Bellerive a dû affirmer haut et fort que l’Etat haïtien jouerait un rôle central de coordination dans la distribution de l’aide « et qu’il n’avait pas l’intention de céder une part de sa souveraineté à qui que ce soit (4</I> ».
Ironie de l’histoire, le festival de littérature internationale « Etonnants voyageurs », qui devait commencer le jour du drame et réunir une cinquantaine d’écrivains à Port-au-Prince, s’intitulait « Le monde au miroir d’Haïti, Haïti au miroir du monde ». Depuis ce jour, le monde se regarde dans la tragédie haïtienne et les nations puissantes tentent de recomposer leur image dans le reflet haïtien.
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