Flashback sur la ville de Jérémie
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Flashback sur la ville de Jérémie
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Flash-back sur la ville de Jérémie avec l'historien et Jérémien Georges Corvington
Une adaptation de Haïti Connexion Culture
Jérémie! ville coquette qui fascine par son rayonnement.
Le Département de la Grand'Anse occupe la partie nord de la grande presqu'Ile du Sud. Sa population actuelle approche les 700,000 habitants pour une superficie de 3,308.99 km2 (Rapport IHSI, Institut Haïtien de Statistiques - 1998). Les principales productions du département sont le café, le cacao, le caoutchouc. On y trouve également de vastes plantations de figues-bananes. L'arbre a pin et l'arbre véritable constituent les denrées alimentaires de base de la population.
La pèche est l'une des principales activités économiques du département. L'étang de Miragoâne est connu pour la richesse de sa flore et de sa faune. On y trouve treize variétés de poissons et toutes sortes d'oiseaux aquatiques comme la poule d'eau, le héron et la bécassine. Les montagnes de ce département sont connues pour avoir servi de refuge aux esclaves marrons durant l'époque coloniale.
JEREMIE
Chef-lieu du département de la Grand’Anse.
La cartographie de Jérémie
Vers 1673, les boucaniers établis dans la région de Nippes, poursuivant l’exploration de la partie sud de Saint-Domingue, parvinrent à une haie qu’ils appelèrent, en raison de sa largeur, Grande Anse. Appellation qui fut transmise au territoire qu’elle baignait et au grand cours d’eau qui le traversait. Installés d’abord sur la position limitée aujourd’hui par les rivières Voldrogue et la Grande Rivière, et qu’on désigne encore sous le nom de Vieux Bourg, les boucaniers, dont beaucoup d’entre eux pratiquaient la pêche, abandonnèrent peu à peu le Vieux Bourg, dont il ne subsiste que le cimetière, et s’établirent au lieu-dit Trou Jérémie, mieux protégé des vents, et qui tenait cette dénomination d’un pêcheur de ce nom qui y avait pris gîte. C’est sur ce lieu qui jouissait d’un climat sain et salubre et d’un cadre merveilleux que le gouvernement français porta son choix pour la fondation d’une nouvelle ville dont le tracé s’effectua au cours de l’année 1756.
Vue aérienne de la ville de Jérémie
Jérémie, qu’on atteint plus commodément par avion que par la voie maritime ou la voie terrestre, est bâtie en demi-cercle aux pieds des hautes collines verdoyantes du Bas Fond Rouge, dernières rampes orientales de la chaine des Castaches. Les maisons s’étagent en gradins, sur le flanc des collines.
La ville est formée de deux zones bien distinctes : la Basse Ville et la Haute Ville et, les jouxtant, le Vallon du Fond Augustin. La partie basse est peu étendue et ne comporte que quelques rues. Elle est le siège d’un trafic commercial intense et varié. La Haute Ville est un plateau de forme rectangulaire, allonge du nord au sud. S’y sont établis, les bureaux administratifs, les tribunaux, la police, la prison, l’hôpital. Contrairement aux rues de la Basse Ville, longues et étroites, celles de la Haute Ville sont larges et praticables en toutes saisons.
Cité administrative de Jérémie à Bordes
Au-delà de la Haute Ville, s’étendent deux grands quartiers résidentiels : Bordes et Rochasse. De spacieuses et confortables villas agrémentées d’admirables jardins et ombragées d’arbres aux riches frondaisons s’y succèdent. Parmi elles, l’Evêché, d’une architecture simple et fonctionnelle. De là, on contemple, sur fond bleuâtre de l’immense océan, le panorama de la blanche cité piquetée du teint rouge de quelques toitures. Dans la banlieue, Sainte-Hélène offre le spectacle de ses maisonnettes sordides ou vit une population laborieuse mais démunie.
Les maisons de la basse ville
Sauf à la Grand’ Rue ou s’alignent des édifices à arcades d’une belle prestance, la plupart des immeubles de la Basse et de la Haute Ville sont du style classique des anciennes maisons coloniales. Ils sont de plus en plus remplacés par des immeubles en béton, pas du meilleur goût. A la rue Saint-Léger subsistent encore quelques maisons de style gingerbread relevées de touches créoles.
Vue partielle de la place Dumas
Deux places publiques s’offrent à la détente des Jérémiens. La plus ancienne et la plus étendue, la place d’Armes ou place Alexandre Dumas, au cœur de la Haute Ville, est ornée de beaux jardins, d’arbres aux ramures vigoureuses et d’une jolie fontaine métallique à bassin surmontée d’un poupon joufflu et datant de 1861. On y remarque la statue en pied de Goman, leader de la résistance paysanne des années 1809-1820., inaugurée en aout 2003, et le buste en bronze d’Alexandre Dumas père.
L’autre place, jadis très affectionnée des Jérémie, la place de La Pointe, sur la langue de terre qui s’avance sur la mer, a aujourd’hui perdu tout le charme qui avait fait sa célébrité.
L'éblouissement baie de Jérémie, objet de tant d'attention
« Dans cette riche symphonie qu’est Jérémie, écrit le poète Timothée Paret, la mer est l’instrument dominant ». Hélas, cette mer de saphir qu’on aime tant admirer, devient parfois dangereuse quand, de décembre à mai, le nordé (corruption de vent du Nord-est) se met à souffler.
Le port est peu protégé et seul le côté nord offre un mouillage plus ou moins sûr en raison de la profondeur de ses eaux. Dans la baie, aucun abri contre les vents capricieux. Les récifs qui affleurent au nord-est rendent périlleux ce secteur de la baie. Pendant l’hivernage, les raz de marée qui se forment ne constituent un danger que pour les embarcations qui se sont laissé surprendre. En revanche, comme tout le sud d’Haïti, le département de la Grand’ Anse est très vulnérable aux ouragans, dont la saison s’étend de mai à novembre.
Jérémie et sa région ne comptent pas beaucoup de plages, mais, celles qui existent sont un attrait pour les yeux … et les baigneurs : plages de Gommier, de la Guinaudée est sur la Grande Cayemitte, l’île la plus importante de l’archipel des Cayemittes aux 59 îlots, émergeant du canal de la Gonâve, face à Jérémie, la superbe plage d’Anse Blanche.
L'Anse d'Azur au rivage doré et aux eaux turquoises
L’Anse d’Azur, à quelques kilomètres de la ville, est la plus réputée des stations balnéaires de la région jérémienne. Le rivage de sable doré que surplombent des rochers abrupts ou de petites falaises tapissées de lichen ou de lierre, côtoie une mer toujours bleue.
La rivière de la Grand’ Anse qui prend sa source dans la chaîne de la Hotte, occupe, grâce à l’apport de nombreux affluents, au volume de son débit et à la longueur de son cours, la troisième place en importance après l’Artibonite et les Trois-Rivières de Port-de-Paix. A son embouchure, à l’est de la Basse Ville, une profusion d’oiseaux aquatiques prend leurs ébats. Jérémie s’enorgueillit du beau pont suspendu érigé en 1949 à l’entrée de la ville et qui relie les deux rives de la Grand’ Anse. Les rivières de la région sont réputées pour leur limpidité et font les délices des excursionnistes.
Ce qui capte l’attention quand on parcourt la campagne jérémienne, c’est la luxuriance de la végétation et la verdure qui s’étale partout : verdure des plantations, des paysages. Au nombre des campagnes les plus visitées et les plus prisées, Buvette, la Passe, la Digue, Kanon, la Source, Testas-sur-Mer, tiennent la première place.
Thomas Alexandre Dumas
L’habitation Madère, une des plus pittoresques d’Haïti, située dans la section communale de la Basse Guinaudée, est le lieu où naquit, le 25 mars 1762, Thomas Alexandre Dumas, père de la lignée des Dumas. Les sites de la Guinaudée sont prodigues en panoramas merveilleux et grandioses.
L’environnement de la ville est pauvre en cavernes dignes d’intérêt. La grotte la plus importante, la Voûte Laforest, du nom de l’habitation où elle se trouve, s’élève en arcades à 45 pieds de haut. De bizarres stalactites et stalagmites s’y profilent. L’accès est difficile et l’humidité incommodante.
Des fortifications de l’époque coloniale, il ne reste que des ruines. Au morne Bergenier, qui domine la rade, s’élevait la Batterie d’Estaing. Sous l’administration haïtienne, elle devient le Fort Télémaque. Plus près de la ville, dans le voisinage des anciennes casernes de l’armée, la Batterie de l’Anse avait pour mission de surveiller l’entrée du port. Sur le promontoire de la Pointe, se dressait le Fort La Pointe qui croisait ses feux avec ceux de la Batterie d’Estaing. De sa nombreuse artillerie, seuls ont survécu quelques canons presque enfouis dans le sol et qui servent aujourd’hui de sièges aux promeneurs et le « Madan Brise », grosse pièce de 90, installée dans le fort en 1869, par Brice Ainé, chef du 1er corps d’armée du Sud en guerre contre Salnave.
Anaise Chavenet et Ketly Mars posant sur le canon du fort de
Marfranc lors de leur tournée au festival national de la poésie
Répondant aux vœux de Dessalines d’ériger des places fortes pour contrer toute tentative d’agression étrangère, Martial Besse éleva sur une position apparemment inexpugnable, à 25 minutes de Jérémie, le Fort Marfranc. Quelques spécimens de canons, héritage de l’Occupation britannique, s’y trouvent encore. Le général Laurent Férou, héros de l’indépendance, y repose depuis 1806. Si l’on excepte le Fort Salomon, assis sur un monticule à l’entrée de la ville, construit par Salnave, restauré par Salomon, et qui n’est qu’un blockhaus, le Fort Marfranc est semble-t-il, le seul ouvrage fortifié d’importance à avoir été édifié dans la région, après le départ des Français.
La pêche est l'une des activi
tés économiques de Jérémie
Les principales productions agricoles de la région jérémienne sont le café, le cacao, la figue-banane, l’arbre à pain, l’arbre véritable et le vétiver. Les activités industrielles se concentrent sur la production du miel, de la cire d’abeille, de l’alcool et sur la préparation des peaux de bœufs et de chèvres. La pêche se classe parmi les activités économiques les plus intenses de la zone.
Sur ce territoire fertilisé par l’abondance des pluies, s’épanouit une grande variété d’arbres fruitiers. En ce qui concerne la mangue, on n’en compte pas moins de 22 espèces différentes, et parmi les plus renommées, la saraphine, le zabricot, la cannelle et le camphre. L’igname de France, le couche-couche, le beurre frais, le fromage à la crème, le sirop miel sont excellents. Le « konparet », la friandise spécifique de la Grand’ Anse, est apprécié de tous.
La fontaine de Ti-Amélie
s'est asséchée, mais ses lar
mes ne cesseront de couler.
La ville de Jérémie jouit d’un climat des plus agréables et des plus sains. Jamais de fortes chaleurs. En été, l’air se renouvelle, grâce à une brise constante. Cette même brise rafraîchit l’atmosphère en hiver et entretient une température comparable à celle du printemps des pays de la zone tempérée.
La vie religieuse est animée par l’Eglise Catholique et de nombreuses confessions protestantes, dont la plus ancienne est l’Eglise Wesleyenne. Sur la place Dumas, se dresse l’église paroissiale qui, avec l’érection de la Grand’ Anse en diocèse, en 1972, est devenue cathédrale. L’actuel édifice remplace l’ancien temple incendié en 1874. En 1879, un crédit de 30.000 gourdes voté par les Chambres permit de mettre en train sa reconstruction. Les travaux ne prirent fin qu’en 1901. Dédiée à Saint Louis, roi de France, l’église de Jérémie est remarquable par ses robustes contreforts et par la superbe rosace qui rayonne sur sa façade. Depuis quelques années a été entamée, proche de l'Evêché, la construction d’une nouvelle cathédrale de forme circulaire qui promet d’être imposante.
Dans le domaine culturel, de grands efforts sont accomplis pour annihiler les retombées négatives encore perceptibles des malheureux événements de 1963. Cette campagne est principalement conduite par l’Eglise Catholique, les sectes protestantes et l’Alliance Française … De nombreux bars, restaurants, discos, un centre culturel, propriété de l’Evêché, un terrain de sport, le parc St Louis, permettent aux habitants de se détendre et de sortir de leur isolement.
La Cabane offre une vue panoramique
sur l'océan ou sur le jardin .
De petits hôtels, « de qualité acceptable », accueillent les visiteurs. Parmi eux, La Cabane, l’Hôtel des Trois Dumas, l’Auberge Inn, Le Bon Temps, tous dans le quartier résidentiel de Bordes.
Trois faits majeurs ont marqué l’histoire de Jérémie : le siège de la ville par les Piquets en 1869 et par l’armée gouvernementale en 1883, et les Vêpres jérémienne de 1963 qui sonnèrent le massacre de familles bourgeoises, par représailles pour la participation de certains des leurs à l’insurrection anti-duvaliéristes du groupe Jeune Haïti.
Malgré ses malheurs, la capitale de la Grand’ Anse est restée une ville cordiale et hospitalière, d’un charme captivant. Redeviendra-t-elle cette « cité des Poètes » ou cette « Athènes d’Haïti », titres dont elle s’était réclamée dans le passé, pour avoir donné naissance à d’illustres fils, tels que Linstant de Pradine, Edmond Paul, Edmond Laforest, Etzer Vilaire ?... La renaissance qui s’est amorcée ravive les espoirs.
La distance de Jérémie à Port-au-Prince est de 224 kilomètres.
Edition et adaptation: Herve Gilbert
Source de référence :Georges Corvington
Georges Corvington
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