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Message  Joel Jeu 25 Juin 2015 - 5:19

HUGHES ST FORT refere ak TEZ yon "DOKTORAN" GIYANE pou l bay yon EKSPLIKASYON sou ki kote PRATIK sa yo soti:



Survivances africaines dans la culture haïtienne:
tchwipe et koupe kout je

Hugues Saint-Fort



Poursuivant inlassablement le travail de vulgarisation de la science linguistique, ainsi que de la culture et de la langue créoles que je mets à la disposition de mes compatriotes depuis plusieurs années maintenant, j’aborde aujourd’hui deux aspects des survivances africaines dans la culture haïtienne: il s’agit de deux gestes/mots naturels pratiqués tous les jours par les Haïtiens de toutes les couches sociales en Haïti et dans l’émigration. Ils représentent à mon sens des témoignages remarquables de l’héritage africain dans notre culture créole. Ce sont, parmi d’autres, des survivances africaines dans la culture haïtienne. Cet article est une description des mots/gestes kreyòl: tchwipe et koupe kout je, une recherche de leurs origines africaines et une analyse de leur disponibilité/usage dans les cultures créoles de la Caraïbe.

Introduction à la description de tchwipe et koupe kout je

Pendant longtemps après l’indépendance d’Haïti en 1804, l’héritage africain de ce pays fut quelque peu méprisé par les classes dominantes haïtiennes, héritières du pouvoir colonial français. Selon le célèbre intellectuel haïtien Jean Price-Mars (1876-1969), «le terme «Africain» a toujours été, est l’apostrophe la plus humiliante qui puisse être adressée à un Haïtien.» (Ainsi parla l’oncle 1928: 45). C’est Price-Mars qui ouvrit les yeux des élites haïtiennes en leur faisant prendre conscience qu’elles faisaient fausse route à vouloir se faire passer pour ce qu’elles ne sont pas, c’est-à-dire des Européens. Aujourd’hui, plusieurs décennies après l’éveil à une conscience nationale initié par Price-Mars, il ne fait pas de doute que beaucoup reste encore à faire. Par exemple, sommes-nous conscients de la profondeur de l’héritage africain dans notre vision du monde, ou dans les petits gestes que nous faisons indifféremment, ou des subtilités dans l’usage de notre langue maternelle, le kreyòl (même si les chercheurs en créolistique nous ont beaucoup fait avancer sur ce point…)? Prenons par exemple le lexème créole «tchwipe» [tʃwipe]1 et l’expression idiomatique «koupe kout je» [koupekoutje]. Ce sont deux gestes que n’importe quel locuteur haïtien fait inconsciemment sans se douter qu’ils ont une longue histoire derrière eux et qu’ils constituent des survivances africaines qui nous relient à une culture que certains croyaient pouvoir rejeter. Qu’en est-il de ces gestes/expressions?

L’unité lexicale tchwipe2 fonctionne en créole haïtien en tant que nom et en tant que verbe. Sa prononciation subit plusieurs variations phonétiques: certains locuteurs disent tchipe, d’autres disent tuipe, ou twipe, kwipe, ou kuipe lorsque c’est un verbe. En tant que nom, il est prononcé tchwip, ou tchip, ou tuip, ou twip. La variation étant un phénomène central et incontournable dans les langues créoles en général et en créole haïtien en particulier, la liste des réalisations phonétiques est loin d’être immuable.

L’expression koupe kout je (jye, zye) ne connait pas de variations sauf en ce qui concerne la dernière unité je qui peut devenir jye ou zye. Littéralement, il signifie «couper un coup d’œil» (à quelqu’un), c’est-à-dire «regarder quelqu’un avec mépris, hostilité, malveillance». Il n’y a pas de traduction littérale pour tchwipe, étant donné que ce mot est d’abord une onomatopée lexicalisée.

TCHWIPE dans la culture haïtienne

Le texte qui a servi de point de départ à cet article est une recherche conduite par deux linguistes d’origine guyanaise (Guyane anglaise), John et Angela Rickford en 1971 à l’époque où ils étaient doctorants à l’université de Pennsylvanie. Le texte s’intitule «CUT-EYE AND SUCK-TEETH: AFRICAN WORDS AND GESTURES IN NEW WORLD GUISE» (1979). On notera que ces deux termes anglais constituent les équivalents anglais presque parfaits des termes kreyòl: koupe kout je (cut-eye) et tchwipe (suck-teeth).

Le mot «tchwipe» ou «tuipe» ou «kuipe» est bien connu en kreyòl. Il désigne un son produit par un locuteur faisant passer l’air dans un geste de succion à travers la bouche avec le dos de la langue s’élevant vers la partie molle du palais. La durée et l’intensité de ce son peuvent varier selon les habitudes personnelles ou selon les sentiments du locuteur ou selon l’endroit où il se trouve. Dans la culture créole haïtienne, «tchwipe» exprime une colère difficilement contenue, une impatience particulière, une irritation, ou une forte réprobation. En général, dans la bonne éducation standard que recevaient dans le temps les jeunes enfants en Haïti, il leur était défendu de «tchwipe» en présence d’un adulte ou des parents.

Pour John et Angela Rickford qui traitent des usages et des significations de “tchwipe” dans le contexte de la société guyanaise et dans la Caraïbe créole anglophone3 en général «The prohibitions against the use of this gesture are sometimes justified by the claim that it means «kiss my ass» or “kiss my private parts”. .(Les interdictions à l’encontre de l’usage de ce geste se justifient parfois par la déclaration qu’il signifie «lèche mon cul !», «va chier», ou «va te branler!».). [ma traduction].

Le lexicographe Bryant C. Freeman, dans son Haitian-English Dictionary (2004: 896) présente une dizaine de variations phonétiques de l’entrée «tchwipe»: chwip, chwipe, kipe, kwipe, tchip, tchipe, tchoupe, tchwip, twipe, définie ainsi: noun: disdainful noise made with the mouth; verb: to make a disdainful nose with the mouth, smack one’s lips disdainfully or contemptuously ; to scorn, mock. (non: bruit exprimant du dédain produit avec la bouche ; verbe: produire avec la bouche un bruit exprimant du dédain, produire un petit bruit sec avec les lèvres d’une manière dédaigneuse ou méprisante ; mépriser, ridiculiser). Freeman ne donne pourtant aucun exemple pour cette entrée.

Valdman et alii (2007) distinguent le verbe transitif: tchwipe et ses variations phonétiques (tchwip, tchip, twipe, tuipe, tuip, kwipe, kuipe) avec sa signification: smack one’s lips disdainfully or contemptuously. (Produire un petit bruit sec avec les lèvres d’une manière dédaigneuse ou méprisante) [ma traduction]. Ils donnent un exemple: Apa w ap tchwipe, ou gen lè pa kontan travay la ! You’re smacking your lips with disdain, you seem not to be pleased with the work! (La façon dont tu frappes tes lèvres dédaigneusement, tu n’es pas satisfait du travail!) [ma traduction].

La deuxième entrée de Valdman et alii présente le nom «tchwipe» et ses variations phonétiques (tchwip, tchwipe, twipe, tuipe, tuip, kwipe, kuipe) avec sa signification: smacking sound made with lips to express annoyance or disdain. Valdman et alii proposent l’exemple suivant: M fè yon kout tchwip paske l t ap plede anmède m. (I expressed my annoyance by smacking my lips with disdain because he was continuing to bother me.) Un autre exemple proposé par Valdman et alii: Poukisa ou ban m tchwipe sa a? M pa fè ou anyen la pou ou fache. (Why are you smacking your lips with disdain? I didn’t do anything to make you angry). (Pourquoi tu fais ces bruits d’une manière si dédaigneuse? Je n’ai rien fait pour te mettre en colère) [ma traduction].

Donc, le geste ou le bruit de tchwipe dans la culture créole d’Haïti exprime plusieurs sentiments négatifs: le dégoût, la frustration, la provocation, le mépris, le défi…

KOUPE KOUT JE dans la culture haïtienne

Si «tchwipe» en tant que production d’un bruit de succion réalisé par le locuteur est un phénomène de créativité lexicale, «koupe kout je» relève d’une toute autre forme de création. C’est un groupe de mots dont le sens est ici métaphorique. Bryant C. Freeman dans son Haitian-English Dictionary (2004: 491) le traduit par «to give a dirty or haughty look; to snub» mais ne donne aucun exemple.

Valdman et alii (2007:380) traduisent l’expression koupe yon moun kout je ainsi: «to give somebody a dirty or scornful look, glare at» et donne cet exemple: Sanble gen yon pwoblèm nan mitan de medam sa yo paske youn ap koupe lòt kout je. It looks like there’s a problem between these two women because they look at each other with scorn. (Il semble qu’il y ait un problème entre ces deux femmes parce qu’elles se regardent dédaigneusement) [ma traduction].

Il convient de signaler cependant que les définitions proposées par les deux lexicographes américains ne véhiculent pas toutes les nuances exprimées dans l’expression «koupe kout je» en usage dans la culture haïtienne. John et Angela Rickford (1979: 358) dans leur article mentionné plus haut sont beaucoup plus complets dans leur description:

In Guyana, cut-eye is a visual gesture which communicates hostility, displeasure, disapproval, or a general rejection of the person at whom it is directed…The basic cut-eye gesture is initiated by directing a hostile look or glare in the other person’s direction. This may be delivered with the person directly facing, or slightly to one side. In the latter position, the person is seen out of the corners of the eyes, and some people deliberately turn their bodies sideways to achieve this effect. After the initial glare, the eyeballs are moved in a highly coordinated and controlled movement down or diagonally across the line of the person’s body. This “cut” with the eyes is the heart of the gesture, and may involve the single downward movement described above, or several sharp up-and-down movements. Both are generally completed by a final glare, and the entire head may be turned away contemptuously from the person, to the accompaniment of a loud suck-teeth.”

(«En Guyane anglaise, “cut-eye” est un geste visuel qui traduit une hostilité, un mécontentement, une désapprobation, ou un rejet général de la personne vers laquelle il est dirigé. Le geste de base du «cut-eye» s’affiche quand on dirige un regard hostile ou furieux en direction de l’autre personne. Cela peut être fait avec la personne qui lance le regard hostile faisant face directement ou légèrement penchée d’un côté. Dans cette dernière position, la personne est vue du coin des yeux, et certains délibérément se tournent latéralement afin de bien marquer l’effet qu’ils veulent produire. Après le regard furieux du début, les yeux bougent au prix d’un mouvement hautement coordonné de bas en haut ou diagonalement tout au long du corps de la personne. Ce «coup» par les yeux représente le cœur du geste, et peut impliquer le mouvement de bas en haut décrit plus haut, ou plusieurs mouvements précis exécutés du haut vers le bas. Généralement, les deux mouvements sont complétés par un dernier regard furieux, avec la tête tournée loin de la personne, dédaigneusement, le tout accompagné d’un retentissant bruit de succion») [ma traduction].

Cette description détaillée de John et Angela Rickford pour la réalisation du «cut-eye» tel qu’il se pratique en Guyane ressemble fort au «tchwipe» haïtien. En fait, il n’y a pas de différence si ce n’est que le nom (l’un anglais, l’autre kreyòl) entre les deux gestes. Il semble que le «koupe kout je» se réalise en Haïti beaucoup plus entre deux femmes (le plus souvent deux rivales) qu’entre deux hommes. Cependant, John et Angela Rickford rapportent que «The gesture of cut-eye is performed most frequently (and most skillfully!) by women. Men do not use this gesture as often and may experience real difficulty in trying to imitate the darting, highly coordinated movement which women can control.” (Le geste du «cut-eye» (koupe kout je) est réalisé plus fréquemment (et le plus talentueusement!) par les femmes. Les hommes ne font pas usage de ce geste aussi souvent que les femmes et peuvent éprouver de réelles difficultés en essayant d’imiter le regard perçant, le mouvement hautement coordonné que les femmes contrôlent si bien.) [ma traduction]. Il est tout de même exceptionnel que les mêmes morphèmes constituant l’expression idiomatique haïtienne se retrouvent aussi en Guyane anglaise et dans la Caraïbe anglophone. C’est le moment d’évoquer les sources africaines de ces deux gestes/expressions.

Origines africaines des deux gestes/expressions

Sources africaines ou sources européennes? La question des origines des langues créoles n’en finit pas de diviser les linguistes spécialisés dans la genèse des créoles. Ce qui est sûr cependant, c’est que les langues créoles possèdent un héritage double: à la fois européen et africain. En ce qui concerne les origines africaines de ces deux gestes/expressions, la difficulté est de déterminer clairement la langue ou les langues qui en sont à l’origine. Mais ils portent les traits généraux de certaines langues de l’Afrique de l’Ouest. Pour John et Angela Rickford (1979: 364), qui ont travaillé à partir de données recueillies auprès d’informateurs africains natifs, «the concept of a cut-eye or suck-teeth gesture is familiar in several areas of both West and East Africa, and it is described by a verbal label in many of the languages spoken there.» (le concept de “cut-eye” ou le geste de “suck-teeth” est bien connu dans plusieurs régions de l’Afrique de l’Ouest et de l’Est, et il est décrit par un label verbal dans beaucoup de langues parlées là-bas.) [ma traduction]. Rickford et Rickford (1979:364) signalent que tous les informateurs africains qu’ils ont rencontrés ont identifié tout de suite le geste de «cut-eye» (koupe kout je) et signalé ces expressions équivalentes:

Twi:
Yoruba:

Cameroon Pidgin:

Banyang:

Luo:

Swahili:
obu ma ni kyi __ «He breaks the backs of the eye on me»
moloju--- “making expressions with your eyes to show disapproval”

no kɔ t yɔ ai fɔmi ---“Don’t cut your eyes on me.”

a kpot a mek ne me ---“She cut her eyes on me.”

kik ilokna wangi ---“he is cutting his eyes,”

usinioloka macho---“to roll one’s eyes.”


Comme cela se passe dans la culture haïtienne ou dans la Caraïbe anglophone, les informateurs africains de Rickford et Rickford rapportent que le fait de tchwipe (sucking your teeth) en présence des parents était considéré très grossier et pouvait vous garantir une claque ou une fessée. Rickford et Rickford (1979: 369) rapportent les termes africains équivalents à suck-teeth:

Mende:
Temne:

Igbo:

Yoruba:



Luo:



Krio:

Cameroon Pidgin:
i ngi yongi yofoin lɔ nya ma ---«He sucked his teeth on me»
tòs nè ---“to suck to self”

ima osò---“to make a sucking noise with the mouth”

kpòʃe---vb. “to make a sucking noise with the mouth”

òʃe ----(n.) “sucking noise made with the mouth”

ichiya --- (vb.) “to make suck-teeth noise”

chiyo ---(n) “suck-teeth noise”

no sɔk yu tit mi ---“Don’t suck-teeth me”

no sɔk yɔ tif fɔ mi---Don’t suck your teeth on me”.


Disponibilité/usage de tchwipe et koupe kout je en Haïti

Il ne fait pas de doute que ces deux gestes et expressions sont toujours disponibles pour l’utilisation des locuteurs haïtiens en Haïti. Le président haïtien l’a utilisé en public récemment et cela a causé un tollé dans la presse haïtienne. Pendant combien de temps encore l’usage de ces deux gestes et expressions se maintiendra-t-il chez les locuteurs haïtiens? Tant qu’il y a un besoin de leur utilisation dans la société haïtienne, dirions-nous. En fait, il n’y a pas que les locuteurs haïtiens qui les utilisent abondamment. Ils sont disponibles dans les situations appropriées et sont donc utilisés par tous les membres des diasporas noires. L’actuelle ministre de la justice française, Christiane Taubira, originaire de la Guyane française, en a donné une démonstration remarquable récemment, le 21 février 2015 à la télévision française quand, questionnée par la chaine BFM4 au sujet des insultes proférées à son encontre par le parti d’extrême-droite, le Front national, elle répondit ainsi: «Il y a quelque chose que l’on fait dans les sociétés créoles, en Guyane et ailleurs. C’est un langage très féminin, et c’est ce que ça m’inspirerait: ça s’appelle un «tchip», et c’est un concentré de dédain».

La ministre française, pour terminer, mime le bruit de succion si caractéristique de ce «concentré de dédain», comme elle le définit.

Conclusion

Comment les diasporas noires ont-elles pu conserver ces deux gestes et expressions après tant de siècles? C’est la force de la culture en tant que pièce maitresse de notre identité de nous donner la possibilité de préserver des traits de notre héritage ethnique malgré la pression pour se conformer aux modèles dominants, spécialement dans les anciennes sociétés coloniales. En ce sens, les langues créoles témoignent admirablement de la capacité à résister aux pressions de toutes sortes, qu’elles proviennent de forces non-linguistiques ou linguistiques. Mais, toute culture est sujette à évolution, est appelée à se transformer quand elle rencontre d’autres cultures, d’autres visions du monde. Que deviendra la culture haïtienne en diaspora dans cinquante ans?

Hugues Saint-Fort
New York, juin 2015

Notes
1.Les mots entre crochets sont écrits en alphabet phonétique international (API)

2.La consonne affriquée [tʃ] du kreyòl dans le mot tchwipe possède un faible rendement phonologique dans le système consonantique du kreyòl. Pompilus (1973:1) signale qu’il sert à distinguer [jõ tʃak] (maladie de l’espèce gallinacée, et [Jõ tƷak] (un cric), l’onomatopée [tʃɔk] et le nom [dƷɔk] (mauvais sort).

3.Suck-teeth est l’équivalent anglais du kreyòl tchwipe. Il est aussi connu dans l’usage populaire comme stchoops (-teeth) or chups (-teeth) dans toute la Caraïbe anglophone.

4.http://www.bfmtv.com/politique/quand-christiane-taubira-tchipe-le-front-national-862879.html

Références citées
• Freeman, C. Bryant (2004) Haitian-English Dictionary. Fifth Edition, Volume1. Institute of Haitian Studies, University of Kansas/ La Presse Évangélique.

• Pompilus, Pradel (1973) Contribution à l’étude compare du créole et du français à partir du créole haïtien. Phonologie et lexicologie. Port-au-Prince: Éditions Caraïbes.

• Price-Mars, Jean (1973) [1928] Ainsi parla l’oncle. Ottawa: Leméac.

• Rickford, John A. et Rickford, Angela E. (1979) Cut-eye and Suck-teeth: African words and gestures in New World guise. Readings in American Folklore, pps. 355-373 edited by Jan Harold Brunvand. New York: W.W. Norton & Company, Inc.

• Valdman, Albert et alii (2007) Haitian Creole-English Bilingual Dictionary. Indiana University, Creole Institute.

Sur Potomitan
•Le TCHIIIIIIIIIPPPPPPPP


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Message  Joel Jeu 25 Juin 2015 - 7:21

CHRISTIANE TAUBIRA ki ap LANSE MISIL medam lan KARAYIB yo ,lan direksyon MARINE LEPEN ak FWON NASYONAL:
TAUBIRA K AP TCHWIPE MARINE LEPEN:

http://www.bfmtv.com/politique/quand-christiane-taubira-tchipe-le-front-national-862879.html


[b]
Quand Christiane Taubira "tchipe" le Front national
 
 
La ministre de la Justice, en déplacement aux Etats-Unis, a mimé le "concentré de dédain" que lui inspirent ses détracteurs au sein du FN.
 


Christiane Taubira est l'une des cibles préférées de la droite, et plus particulièrement de l'extrême droite, parmi les membres du gouvernement. Cela ne semble toutefois pas atteindre la garde des Sceaux, à en croire sa réaction lors d'une interview pour I-Télé. En déplacement aux Etats-Unis, Christiane Taubira a répondu aux questions de la correspondante de la chaîne d'info, dans une ambiance feutrée et très typique des entretiens à l'américaine, propice à la confidence, comme le note Le Lab.

"Vous pleurez, parfois?", lui demande la journaliste, après lui avoir rappelé la violence des attaques de certains membres du Front national. Une candidate FN aux municipales l'avait comparée à un singe. La réponse de Christiane Taubira fuse: "Pas pour des âneries pareilles, non. Je pleure de joie, de tristesse ou de compassion, mais je ne pleure pas parce que des imbéciles arriérés me traitent de tous les noms".

"Marine Le Pen, c'est qui ça?"

La ministre de la Justice se lance ensuite dans une explication tout personnelle qui ne manque pas de saveur: "Il y a quelque chose que l'on fait dans les sociétés créoles, en Guyane et ailleurs. C'est un langage très féminin, et c'est ce que ça m'inspirerait: ça s'appelle un 'tchip', et c'est un concentré de dédain", lance la ministre, avant de mimer le bruit de succion si caractéristique.

La dernière salve arrive ensuite lorsque la journaliste rebondit en lui demandant si c'est aussi ce que lui inspire Marine Le Pen: "C'est qui ça?", tance Christiane Taubira, sourcils froncés. Victoire par KO.




Par A. G.  

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Message  Antitétanix Dim 28 Juin 2015 - 22:21

A vrai dire, certains traits culturels ne disparaissent pas. Un jour comme ça, j'ai observé que ce geste était particulier chez les personnes de souche africaine. Ce que je n'aime pas dans certains contextes, c'est une marque d'ignorance. Comme quand je venais de montrer à une proche ses torts dans une affaire. Cela dit, il est plutôt drôle quand une femme fait la fière... à l'abordage. (lol)

Pour le koupe kout je, je ne pense pas. Les blanches le font aussi.
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Message  Joel Lun 29 Juin 2015 - 6:35

Yon MATINIKE ki ap fe yon LODYANS ak zafe TCHWIPE sa a :

La Belle Histoire du TCHIP ! un peu de lecture ! !

- Mademoiselle? Mademoiselle?

- Oui? C'est pour quoi?

- Pardonnez mon audace, mais vos parents ne seraient-ils pas de grands voleurs par hasard? Car ils ont pris toutes les étoiles du ciel pour les mettre dans vos yeux... TCHIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIPPP ! ! !

Cette scène ne vous rappelle rien? Non, vraiment? Et pourtant elle est bien fréquente chez nous aux Antilles. Elle met en évidence d'ailleurs, cet outil indispensable à la ponctiation kréolite: le tchip. Pourquoi? Pourkwaaaaa? Me direz vous.

C'est simple en fait. Le français moderne néo-montesquien du XXIème siècle, ne donne à ses phrases, n'ayons pas peur des mots, aucun feeling. Le créole, lui, parvient à accentuer la signification des différentes propositions selon l'humeur des interlocuteurs. Et cela, grâce à un outil linguistique exceptionnel, qui parvient à remplacer une lourde ponctiation, et exprimer dans le même temps une série d'impressions liées au contexte général: d'où une nouvelle économie de mots.

Disons le haut et fort le tchip est l'outil linguistique contemporain le plus fabuleux qui soit! Mais comment l'utliser?

Sa prononciation: Le tchip est le résultat d'une prouesse labiale époustouflante. La bouche semi-ouverte (certaines femmes très entraînées parviennent à le faire la bouche fermée), il provient d'une pression de la langue sur le palais, suivie d'une succion du stock salivaire situé juste en dessous. La portée elle, s'obtient par un décollement progressif des lèvres inférieures et supérieures, accentuer le son.

Du reste, le tchip peut être long, court, semi-long, sec, ou saliveux, tout dépend de l'effet linguistique qu'on lui destine.

Voyons donc quelques points grammaticaux essentiels à sa correcte utilisation dans la phrase.

Le tchip court, ou tchip de transition

Le plus simple, il est d'usage courant et fréquent.


Où sont passées mes chaussures -tchip- Ha! Mi yo. (Ahh les voici)

Remarquez la place du tchip, entre deux propositions; il remplace le point au même titre qu'un "hein", ou un "ha ha", mais possède contrairement à eux moins de portée exclamative.

En réalité, son rôle est plus subtil. Il se prononce rapidemment; il est sec et parfois (ça vaut mieux dans un discours devant le préfet) presque inaudible. Il exprime l'agacement léger, sans conséquences.

Le tchip semi-long, ou tchip d'exclamation

Plus significatif, Josef a effectivement trouvé ses chaussures:


Mésieuuuu, gay sa chien la fè èvè soulié en mwen -tchiiiiip- (Bordel! Regardez ce que le chien a foutu avec mes chaussures! !)

Ici, le tchip est en fin de phrase. Il remplace un point d'exclamation inutile parce que muet; le ton de la phrase étant descendant, ce tchip paraît tout à fait approprié pour achever la proposition de Josef qui a accumulé dans la bouche son stock de salive. Il est donc très liquide, et exprime de ce fait l'exaspération certaine vis à vis du chien parce que bèt la kouyon menm. (le chien est con qd même)

Le tchip retourné, ou tchip interrogatif


Josef, ou ké di mwen a ki kalité lan mès ou kay èvè sé soulié la sa (Josef, tu vas à quelle messe, là, avec des chassures aussi sales?) -tchiiip-

Très similaire en apparence au tchip exclamatif; toute la différence tient dans l'intonation.

Celui-ci est légèrement plus court que le précédent, et moins saliveux, mais il est de toute évidence plus sonore, et intervient sur un ton aussi montant que l'agacement de la mère de Josef qui constate chez son fils un manque cruel de respect pour le Seigneur.

Le tchip direct, ou tchip dubitatif


Sa ki ni les zom, je vous présente ma copine Caroline (Josef au sortir de la messe) Arresté frèw, sé copin aw k i la? -kitchiiiiiiiiip- (Arrête de déconner frère, c'est ta copine, elle? ?)

Waaaayyyy! Me direz vous. Mais l'orthographe change en plus!

Hé oui, car ce tchip est plus compliqué !!! Il est introduit par un demi-tchip coupé, ce qui le rend plus long (remarquez le temps de préparation qu'il lui faut pour le sortir :"?") et plus lourd de significations. Car ce tchip, extrêmement bruyant, exprime l'incrédulité totale de l'ami de Josef, qui ne peut concevoir pareille chabine succombant au charme de macomère à trois francs cinquante du brave Josef. Ce tchip est si fort qu'il peut déjà remplacer toute une proposition:


Je vous présente ma copine Caroline (Josef, toujours au sortir de la messe) -Kitchiiiiiiiiip-

Le tchip long ou tchip de mépris
Un tchip d'anthologie.

Caroline, toisant à l'antillaise les amis de Josef:


Alors Josef, mwen lévé gran bonè matin -tchip- é sé pou rencontré dé kalité chyen malprop' kon sa, ki pa sa kimbé grenn a yo adan on menm islip lè yo ka vwè fanm ka pasé? TCHIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIPPP (Alors Josef, je me suis reveillé de bon matin pour rencontrer des vieux gars qui savent même pas se tenir quand ils voient une femme passer? ?)

(silence des amis de Josef ki ja ni la wront) (qui ont déjà la honte)

Dois-je faire un commentaire? Si peut être, car il faut le préciser, le tchip long est une spécialité féminine. Sentez la charge de mépris qui réside dans la longeur saliveuse de ce tchip. Et encore, car de là, vous ne pouvez apprécier la contorsion de la bouche en arc de cercle, nécessaire à Caroline pour envelopper sa phrase de dédain supérieur et culpabilisant.

Il demeure inutile de vous préciser que ce genre d'exclamation s'entend à 130 mètres à la ronde en moyenne(record à 556 mètres) et que l'effet de honte est total.

Voilà, cette liste est dans les grandes lignes, assez exhaustive. Elle englobe les formes les plus usitées de tchip qui existent en ce bas monde. Mais l'univers de cette clef de voute du kréole moderne est très évolutif. Si vous entendez des formes inédites d'utilisation du tchip ou des versions remixées (voire remasterisées), n'hésitez pas à nous les envoyer! !



boule boule boule

Réactions

Je viens de lire l'article sur le TCHIP, très bel article, mais énorme faute, ou du moins méconnaissance:
Le Tchip n'est absolument pas typiquement antillais, ni issu de la langue créole.

Je suis moi même antillaise, mais également camerounaise, et je peux vous assurer qu'on retrouve le fameux Tchip là bas.

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