Michaelle Jean rend hommage à M. Alphonse Desjardins
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Michaelle Jean rend hommage à M. Alphonse Desjardins
Son Excellence la très honorable Michaëlle Jean
Discours à l’occasion du déjeuner avec la direction du Mouvement Desjardins
Lévis, le mercredi 12 septembre 2007
C’est une joie de me retrouver en compagnie de celles et de ceux qui travaillent à perpétuer la vision et l’œuvre d’Alphonse Desjardins.
Plus tôt ce matin, alors que je visitais la Maison historique Alphonse Desjardins, je me disais : ce qu’il y a de plus fascinant dans la vie de ce bâtisseur, c’est comment le rêve d’un seul homme a pu changer à ce point le cours de l’histoire et, par le fait même, d’un nombre incalculable de vies.
Il ne faut pas oublier qu’au tournant du 20e siècle, la majorité des femmes et des hommes qui composaient le Québec vivaient dans la précarité, pour ne pas dire la pauvreté. Écoutez les personnes âgées raconter leur enfance. Une orange dans un bas de laine, à Noël, et c’était la fête!
Je me souviens — il n’y avait pas si longtemps que j’étais arrivée au Québec — quelqu’un avait utilisé une expression qui remonte probablement à cette époque de notre histoire : «Vous savez, quand on est né pour un petit pain…» Ça m’avait bouleversée. Il y avait dans ces paroles quelque chose d’irrémédiable, d’irrévocable, comme s’il n’y avait d’autre choix que d’accepter son sort.
C’est justement contre cette fatalité du destin qu’Alphonse Desjardins a lutté. Issu, lui aussi, d’un milieu modeste, il était convaincu que la société québécoise n’était pas « née pour un petit pain », qu’elle avait tout ce qu’il fallait pour prospérer.
Il savait que, si on leur en donnait les moyens, l’agriculteur, l’ouvrier, l’artisan, réussiraient à améliorer leurs conditions de vie et à prendre leur destinée en main.
Il a suffit d’un discours, celui du député de Montréal-Saint-Anne, Michael Quinn, pour qu’Alphonse Desjardins passe à l’action. Le député dénonçait les pratiques usuraires qui empêchaient les gagne-petit d’emprunter.
Un livre l’a mis sur la piste. Celui d’Henry Wolff, président de l’Alliance coopérative internationale.
Ce fut le point de départ d’une grande aventure. Si Desjardins savait qu’il fallait rendre le crédit accessible et favoriser l’épargne, il avait maintenant acquis la certitude qu’il existait un moyen efficace d’y parvenir : la coopération.
En bon financier, Alphonse Desjardins devait sûrement avoir un don de persuasion. Car nombreux sont celles et ceux qui, aux quatre coins du Québec, du Canada et jusqu’aux États-Unis, ont accepté de se lancer dans cette aventure. À commencer par les gens ordinaires, les petits épargnants. Cela n’a pas dû être facile car, au début du siècle dernier, l’argent et les emplois étaient rares.
Pour Alphonse Desjardins, le mieux-être des classes ouvrières passait par la mise en commun des forces et des avoirs de chacun. Les idées qu’ils préconisaient ne sont pas tombées dans l’oreille d’un sourd. Un de mes prédécesseurs, Lord Grey, a répondu à l’appel avec enthousiasme.
Lord Grey partageait la vision de Desjardins bien avant d’être nommé gouverneur général du Canada. Il connaissait les ravages de l’industrialisation féroce et croyait lui aussi en la nécessité pour la société de l’époque de miser sur la coopération. C’est donc avec plaisir et empressement qu’il a accepté de devenir membre honoraire de la Caisse, à l’invitation de Desjardins.
J’aurais aimé poursuivre la tradition à titre de 27e gouverneure générale du Canada et devenir membre des Caisses Desjardins, mais il y a longtemps que c’est fait. Mon mari Jean-Daniel Lafond et moi-même avons donc pensé ouvrir aujourd’hui un compte au nom de notre fille, Marie-Éden à la Caisse populaire de Lévis. Elle devient ainsi, comme 15 millions de personnes au Canada, membre de ce mouvement. Et j’y crois tellement que j’accepte votre invitation de devenir moi aussi membre de la Caisse populaire de Lévis.
C’est une part de notre patrimoine collectif que je transmets aujourd’hui à ma fille. Le mouvement coopératif fait partie de ce que nous sommes, de notre façon de faire, de penser et de voir le monde.
Ce mouvement puise sa source dans des valeurs et des principes sur lesquels ce pays repose et qui sont chères à nos cœurs, telles que l’égalité, l’entraide, la solidarité, l’engagement social.
C’est un mouvement qui m’apparaît d’autant plus nécessaire à notre époque qu’il donne un visage humain à la mondialisation.
Déjà, au début du siècle dernier, Alphonse Desjardins avait le regard tourné vers le monde. Il a importé d’Europe le concept de coopératives d’épargne et de crédit et s’est acquis une réputation enviable au sein du mouvement coopératif international.
Un siècle plus tard, cette ouverture fait toujours partie de votre philosophie. Vous avez à cœur de partager avec les pays en développement votre savoir-faire en matière de coopération.
En Haïti, où je suis née, le mouvement appuie une soixantaine d’institutions financières à propriété collective qui sont enracinées dans les communautés.
Au Mali, où j’ai effectué une visite d’État l’an dernier, plus précisément à Bamako, je suis allée rencontrer les membres de la caisse d’épargne et de crédit de la Commune 6. C’est un projet auquel Développement international Desjardins participe.
J’ai eu le bonheur de m’entretenir avec trois femmes qui ont partagé leur expérience avec moi. La détermination avec laquelle elles ont travaillé pour améliorer leur quotidien et celui de leur famille m’a vivement impressionnée.
Chacune a reconnu qu’elle ne disposait pas des garanties nécessaires pour effectuer un emprunt dans le circuit bancaire habituel. Sans les microcrédits, aucune d’elles n’aurait pu s’en sortir.
La micro-finance est un instrument indispensable pour contrer la paupérisation partout où elle sévit. Elle est une prime d’encouragement pour celles et ceux dont le travail et le courage deviennent souvent le moteur de l’économie locale.
À voir les fruits du mouvement coopératif, ici et au-delà de nos frontières, on peut dire qu’Alphonse Desjardins était à la fois de son temps et en avance sur son temps. Il nous a donné les moyens de voir et de rêver grand, en misant sur la force du nombre. Et ces moyens sont toujours aussi efficaces et pertinents dans le monde d’aujourd’hui.
Face à la concurrence accrue sur les marchés internationaux, l’ensemble du mouvement Desjardins est désormais appelé à relever un grand défi : celui d’assurer sa rentabilité, tout en préservant les valeurs de partage, d’entraide et d’inclusion sur lesquelles il se fonde.
Si le passé est garant de l’avenir, je suis convaincue que vous saurez tracer la voie, comme l’a fait lui-même le père du mouvement coopératif au Canada, Alphonse Desjardins.
Je compte sur vous pour faire en sorte que le nom de « Desjardins » continue d’être synonyme de solidarité, d’engagement et d’humanité.
Merci.
Discours à l’occasion du déjeuner avec la direction du Mouvement Desjardins
Lévis, le mercredi 12 septembre 2007
C’est une joie de me retrouver en compagnie de celles et de ceux qui travaillent à perpétuer la vision et l’œuvre d’Alphonse Desjardins.
Plus tôt ce matin, alors que je visitais la Maison historique Alphonse Desjardins, je me disais : ce qu’il y a de plus fascinant dans la vie de ce bâtisseur, c’est comment le rêve d’un seul homme a pu changer à ce point le cours de l’histoire et, par le fait même, d’un nombre incalculable de vies.
Il ne faut pas oublier qu’au tournant du 20e siècle, la majorité des femmes et des hommes qui composaient le Québec vivaient dans la précarité, pour ne pas dire la pauvreté. Écoutez les personnes âgées raconter leur enfance. Une orange dans un bas de laine, à Noël, et c’était la fête!
Je me souviens — il n’y avait pas si longtemps que j’étais arrivée au Québec — quelqu’un avait utilisé une expression qui remonte probablement à cette époque de notre histoire : «Vous savez, quand on est né pour un petit pain…» Ça m’avait bouleversée. Il y avait dans ces paroles quelque chose d’irrémédiable, d’irrévocable, comme s’il n’y avait d’autre choix que d’accepter son sort.
C’est justement contre cette fatalité du destin qu’Alphonse Desjardins a lutté. Issu, lui aussi, d’un milieu modeste, il était convaincu que la société québécoise n’était pas « née pour un petit pain », qu’elle avait tout ce qu’il fallait pour prospérer.
Il savait que, si on leur en donnait les moyens, l’agriculteur, l’ouvrier, l’artisan, réussiraient à améliorer leurs conditions de vie et à prendre leur destinée en main.
Il a suffit d’un discours, celui du député de Montréal-Saint-Anne, Michael Quinn, pour qu’Alphonse Desjardins passe à l’action. Le député dénonçait les pratiques usuraires qui empêchaient les gagne-petit d’emprunter.
Un livre l’a mis sur la piste. Celui d’Henry Wolff, président de l’Alliance coopérative internationale.
Ce fut le point de départ d’une grande aventure. Si Desjardins savait qu’il fallait rendre le crédit accessible et favoriser l’épargne, il avait maintenant acquis la certitude qu’il existait un moyen efficace d’y parvenir : la coopération.
En bon financier, Alphonse Desjardins devait sûrement avoir un don de persuasion. Car nombreux sont celles et ceux qui, aux quatre coins du Québec, du Canada et jusqu’aux États-Unis, ont accepté de se lancer dans cette aventure. À commencer par les gens ordinaires, les petits épargnants. Cela n’a pas dû être facile car, au début du siècle dernier, l’argent et les emplois étaient rares.
Pour Alphonse Desjardins, le mieux-être des classes ouvrières passait par la mise en commun des forces et des avoirs de chacun. Les idées qu’ils préconisaient ne sont pas tombées dans l’oreille d’un sourd. Un de mes prédécesseurs, Lord Grey, a répondu à l’appel avec enthousiasme.
Lord Grey partageait la vision de Desjardins bien avant d’être nommé gouverneur général du Canada. Il connaissait les ravages de l’industrialisation féroce et croyait lui aussi en la nécessité pour la société de l’époque de miser sur la coopération. C’est donc avec plaisir et empressement qu’il a accepté de devenir membre honoraire de la Caisse, à l’invitation de Desjardins.
J’aurais aimé poursuivre la tradition à titre de 27e gouverneure générale du Canada et devenir membre des Caisses Desjardins, mais il y a longtemps que c’est fait. Mon mari Jean-Daniel Lafond et moi-même avons donc pensé ouvrir aujourd’hui un compte au nom de notre fille, Marie-Éden à la Caisse populaire de Lévis. Elle devient ainsi, comme 15 millions de personnes au Canada, membre de ce mouvement. Et j’y crois tellement que j’accepte votre invitation de devenir moi aussi membre de la Caisse populaire de Lévis.
C’est une part de notre patrimoine collectif que je transmets aujourd’hui à ma fille. Le mouvement coopératif fait partie de ce que nous sommes, de notre façon de faire, de penser et de voir le monde.
Ce mouvement puise sa source dans des valeurs et des principes sur lesquels ce pays repose et qui sont chères à nos cœurs, telles que l’égalité, l’entraide, la solidarité, l’engagement social.
C’est un mouvement qui m’apparaît d’autant plus nécessaire à notre époque qu’il donne un visage humain à la mondialisation.
Déjà, au début du siècle dernier, Alphonse Desjardins avait le regard tourné vers le monde. Il a importé d’Europe le concept de coopératives d’épargne et de crédit et s’est acquis une réputation enviable au sein du mouvement coopératif international.
Un siècle plus tard, cette ouverture fait toujours partie de votre philosophie. Vous avez à cœur de partager avec les pays en développement votre savoir-faire en matière de coopération.
En Haïti, où je suis née, le mouvement appuie une soixantaine d’institutions financières à propriété collective qui sont enracinées dans les communautés.
Au Mali, où j’ai effectué une visite d’État l’an dernier, plus précisément à Bamako, je suis allée rencontrer les membres de la caisse d’épargne et de crédit de la Commune 6. C’est un projet auquel Développement international Desjardins participe.
J’ai eu le bonheur de m’entretenir avec trois femmes qui ont partagé leur expérience avec moi. La détermination avec laquelle elles ont travaillé pour améliorer leur quotidien et celui de leur famille m’a vivement impressionnée.
Chacune a reconnu qu’elle ne disposait pas des garanties nécessaires pour effectuer un emprunt dans le circuit bancaire habituel. Sans les microcrédits, aucune d’elles n’aurait pu s’en sortir.
La micro-finance est un instrument indispensable pour contrer la paupérisation partout où elle sévit. Elle est une prime d’encouragement pour celles et ceux dont le travail et le courage deviennent souvent le moteur de l’économie locale.
À voir les fruits du mouvement coopératif, ici et au-delà de nos frontières, on peut dire qu’Alphonse Desjardins était à la fois de son temps et en avance sur son temps. Il nous a donné les moyens de voir et de rêver grand, en misant sur la force du nombre. Et ces moyens sont toujours aussi efficaces et pertinents dans le monde d’aujourd’hui.
Face à la concurrence accrue sur les marchés internationaux, l’ensemble du mouvement Desjardins est désormais appelé à relever un grand défi : celui d’assurer sa rentabilité, tout en préservant les valeurs de partage, d’entraide et d’inclusion sur lesquelles il se fonde.
Si le passé est garant de l’avenir, je suis convaincue que vous saurez tracer la voie, comme l’a fait lui-même le père du mouvement coopératif au Canada, Alphonse Desjardins.
Je compte sur vous pour faire en sorte que le nom de « Desjardins » continue d’être synonyme de solidarité, d’engagement et d’humanité.
Merci.
Dernière édition par le Dim 16 Sep 2007 - 23:01, édité 1 fois
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Solidarité et Unité pour sauver Haiti
Re: Michaelle Jean rend hommage à M. Alphonse Desjardins
Faits saillants du discours;
Aurons-nous un jour un Alphonse Desjardins Haitien ?
En Haïti, où je suis née, le mouvement appuie une soixantaine d’institutions financières à propriété collective qui sont enracinées dans les communautés.
La micro-finance est un instrument indispensable pour contrer la paupérisation partout où elle sévit. Elle est une prime d’encouragement pour celles et ceux dont le travail et le courage deviennent souvent le moteur de l’économie locale
Ce mouvement puise sa source dans des valeurs et des principes sur lesquels ce pays repose et qui sont chères à nos cœurs, telles que l’égalité, l’entraide, la solidarité, l’engagement social.
Aurons-nous un jour un Alphonse Desjardins Haitien ?
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Solidarité et Unité pour sauver Haiti
Re: Michaelle Jean rend hommage à M. Alphonse Desjardins
Pas un Alphonse Desjardins mais plusieurs.je felicite Mme Michaelle Jean pour son sens de communication et l'emploi d'un style vraiment efficace qui n'utilise pas la pedanterie.J'aime cette phrase;
"le mieux-etre des classes ouvrières passait par la mise en commun des forces et des avoirs de chacun."
Certains politiciens haitiens devraient etudier les textes de la Gouverneure du Canada pour apprendre à ecrire des discours adressés au peuple haitien.
"le mieux-etre des classes ouvrières passait par la mise en commun des forces et des avoirs de chacun."
Certains politiciens haitiens devraient etudier les textes de la Gouverneure du Canada pour apprendre à ecrire des discours adressés au peuple haitien.
Rodlam Sans Malice- Super Star
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Nombre de messages : 11114
Localisation : USA
Loisirs : Lecture et Internet
Date d'inscription : 21/08/2006
Feuille de personnage
Jeu de rôle: Stock market
Re: Michaelle Jean rend hommage à M. Alphonse Desjardins
Visite à la Caisse populaire Desjardins à Lévis
Son Excellence la très honorable Michaëlle Jean avec Alban d'Amours, Président et chef de la direction, des membres du Conseil d'administration et des membres du comité de direction de Caisses Desjardins lors d'une visite à Lévis, Québec
Son Excellence la très honorable Michaëlle Jean avec Alban d'Amours, Président et chef de la direction, des membres du Conseil d'administration et des membres du comité de direction de Caisses Desjardins lors d'une visite à Lévis, Québec
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Solidarité et Unité pour sauver Haiti
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