L’économiste et banquier international Jacques Bernard,
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L’économiste et banquier international Jacques Bernard,
Jacques Bernard, nous vous souhaitons la bienvenue sur les ondes de Radio Classique Inter.
RB : Comte tenu du fait, que paradoxalement Préval soit retourné au pouvoir sans programme, ni projet de gouvernement. Que la précarité de la situation sociale, économique et politique, soit au bord de l’éclatement. Vu l’importance de la délégation qui accompagne le Secrétaire général des Nations-Unies pour sa visite en Haïti.
Pensez-vous qu’avec le rapport de l’économiste Paul Collier, on vient pour imposer une solution d’urgence, ou simplement faire des suggestions bienveillantes à Préval ?
JB : Je crois que le mot clef de la question est la précarité de la situation d’Haïti. Comme vous le savez Haïti a été frappé par 4 cyclones. Un million d’Haïtiens ont été sinistrés. Des dommages sévères ont été infligés à l’infrastructure et à l’agriculture. On estime qu’Haïti a eu des dommages de l’ordre de plus d’un milliard de dollars. En outre, nous avons une crise financière globale qui a un impact sévère sur les transfères venant des Haïtiens de la Diaspora. Certains disent que ces transfères peuvent subir un déclin de 50%. Ce qui équivaut à une perte de 800 millions de dollars US pour l’économie haïtienne. Des élections prévues pour le renouvellement d’un tiers du Sénat en avril, vont surcharger la tension dans une atmosphère politique déjà tendue. Haïti se trouvant à un carrefour extrêmement difficile, le gouvernement et la communauté internationale doivent démontrer leur capacité de gestion pour arriver à des résultats concrets pour éviter une explosion sociale. Je crois que c’est dans ce sens qu’une importante délégation visitera Haïti la semaine prochaine.
Je voudrais cependant ajouter que pendant les 14 mois de bénévolat que j’ai passé au CEP comme directeur général pour la réalisation des élections de 2006, j’ai collaboré très étroitement avec la Minustah et participé à beaucoup de rencontres au plus haut niveau entre les autorités haïtiennes et la Minustah. Je dois dire en toute franchise, que la Minustah a toujours fait preuve du plus grand respect et de la plus grande sensibilité vis-à-vis des autorités haïtiennes. Je crois que c’est dans un esprit de collaboration et d’intérêts communs que cette délégation se rendra en Haïti. Le secrétaire général des Nations-Unies, monsieur Ban Ki-moon est très impressionné par le rapport de Paul Collier. Et pense que les mesures proposées peuvent apporter des résultats positifs et bénéfiques au peuple haïtien à très court terme. C’est dans cet esprit que la délégation se rend en Haïti.
RB : Etes-vous d’accord avec les critères de comparaison utilisés par Paul Collier, mesurant Haïti à l’aune de la région des Grands Lacs d’Afrique et d’Asie centrale pour établir le degré de fragilité de l’Etat haïtien ?
JB : Je dois dire qu’à la première lecture du rapport, j’ai cru qu’il comparait Haïti aux pays de la région des Grands Lacs d’Afrique et d’Asie centrale en situation de post-conflit. Cependant j’ai relu le texte avec plus d’attention, et je me suis rendu compte qu’il différenciait Haïti de ces autres pays. Il est très malheureux que dans la classification des pays en post conflit des auteurs inclus Haïti. Or Haïti n’est pas un pays en situation de post-conflit. Cependant Haïti est un Etat fragile à l’instar d’autres pays en situation de post-conflit, mais pour des raisons totalement différentes. Collier d’ailleurs a lui-même remarqué, que nous n’avons pas de conflit armé, ni de voisins qui alimentent une force de guérilla, ni de problème ethnique.
RB : Vu le rapport concernant Haïti qui vient d’être publié par le Département d’Etat sur le trafic de la drogue et le blanchiment, ne croyez-vous pas que la présence active de ces trafiquants de drogue en Haïti depuis des décennies, soit une preuve irréfutable que pour se garantir l’impunité aussi longtemps, ils sont obligés d’avoir des tentacules profondes au sein du pouvoir politique ?
JB : Je dirai que deux des caractéristiques majeures des Etats fragiles, sont la corruption et la faiblesse extrême du système judiciaire. Etant un Etat fragile, Haïti a énormément de corruption et un système judiciaire assez faible. Toutes sortes d’activités illégales existent ainsi que la drogue. Géographiquement Haïti est situé à mi-chemin entre les producteurs traditionnels de l’Amérique Latine et le marcher américain de la drogue. Les narcotrafiquants s’y sont installés impunément. Le rapport, dont vous faites référence, indique clairement que la prolifération du trafic de la drogue en Haïti, comme point de transite, a atteint des proportions alarmantes. Environ 20% de la production de cocaïne passe par Haïti. En outre le rapport indique que durant l’année 2008, le gouvernement a obtenu très peu de résultat dans sa lutte contre ce fléau. Le trafic de la drogue est en pleine expansion en Haïti.
Quand aux tentacules profondes que les narcotrafiquants ont au sein du pouvoir politique pour se protéger, je vous réfère à une entrevue donnée par le premier ministre récemment, où il a indiqué que les narcotrafiquants ont investi les avenues du pouvoir politique, en se faisant élire pour pouvoir jouir de l’immunité parlementaire. Je fais une remarque. L’immunité parlementaire ne protége pas en matière de crime de droit commun, pour lequel un jugement a été prononcé.
Si le premier ministre a pu faire une telle déclaration, il l’a fait en connaissance de cause. Alors va-t-il mettre l’action publique en branle contre ces élus ?
RB : Pensez-vous que dans le cadre de ce régime, le premier ministre aurait dû prendre ce risque ?
JB : Absolument ! Si on gouverne, il faut en avoir le courage !
RB : Comte tenu du fait, que paradoxalement Préval soit retourné au pouvoir sans programme, ni projet de gouvernement. Que la précarité de la situation sociale, économique et politique, soit au bord de l’éclatement. Vu l’importance de la délégation qui accompagne le Secrétaire général des Nations-Unies pour sa visite en Haïti.
Pensez-vous qu’avec le rapport de l’économiste Paul Collier, on vient pour imposer une solution d’urgence, ou simplement faire des suggestions bienveillantes à Préval ?
JB : Je crois que le mot clef de la question est la précarité de la situation d’Haïti. Comme vous le savez Haïti a été frappé par 4 cyclones. Un million d’Haïtiens ont été sinistrés. Des dommages sévères ont été infligés à l’infrastructure et à l’agriculture. On estime qu’Haïti a eu des dommages de l’ordre de plus d’un milliard de dollars. En outre, nous avons une crise financière globale qui a un impact sévère sur les transfères venant des Haïtiens de la Diaspora. Certains disent que ces transfères peuvent subir un déclin de 50%. Ce qui équivaut à une perte de 800 millions de dollars US pour l’économie haïtienne. Des élections prévues pour le renouvellement d’un tiers du Sénat en avril, vont surcharger la tension dans une atmosphère politique déjà tendue. Haïti se trouvant à un carrefour extrêmement difficile, le gouvernement et la communauté internationale doivent démontrer leur capacité de gestion pour arriver à des résultats concrets pour éviter une explosion sociale. Je crois que c’est dans ce sens qu’une importante délégation visitera Haïti la semaine prochaine.
Je voudrais cependant ajouter que pendant les 14 mois de bénévolat que j’ai passé au CEP comme directeur général pour la réalisation des élections de 2006, j’ai collaboré très étroitement avec la Minustah et participé à beaucoup de rencontres au plus haut niveau entre les autorités haïtiennes et la Minustah. Je dois dire en toute franchise, que la Minustah a toujours fait preuve du plus grand respect et de la plus grande sensibilité vis-à-vis des autorités haïtiennes. Je crois que c’est dans un esprit de collaboration et d’intérêts communs que cette délégation se rendra en Haïti. Le secrétaire général des Nations-Unies, monsieur Ban Ki-moon est très impressionné par le rapport de Paul Collier. Et pense que les mesures proposées peuvent apporter des résultats positifs et bénéfiques au peuple haïtien à très court terme. C’est dans cet esprit que la délégation se rend en Haïti.
RB : Etes-vous d’accord avec les critères de comparaison utilisés par Paul Collier, mesurant Haïti à l’aune de la région des Grands Lacs d’Afrique et d’Asie centrale pour établir le degré de fragilité de l’Etat haïtien ?
JB : Je dois dire qu’à la première lecture du rapport, j’ai cru qu’il comparait Haïti aux pays de la région des Grands Lacs d’Afrique et d’Asie centrale en situation de post-conflit. Cependant j’ai relu le texte avec plus d’attention, et je me suis rendu compte qu’il différenciait Haïti de ces autres pays. Il est très malheureux que dans la classification des pays en post conflit des auteurs inclus Haïti. Or Haïti n’est pas un pays en situation de post-conflit. Cependant Haïti est un Etat fragile à l’instar d’autres pays en situation de post-conflit, mais pour des raisons totalement différentes. Collier d’ailleurs a lui-même remarqué, que nous n’avons pas de conflit armé, ni de voisins qui alimentent une force de guérilla, ni de problème ethnique.
RB : Vu le rapport concernant Haïti qui vient d’être publié par le Département d’Etat sur le trafic de la drogue et le blanchiment, ne croyez-vous pas que la présence active de ces trafiquants de drogue en Haïti depuis des décennies, soit une preuve irréfutable que pour se garantir l’impunité aussi longtemps, ils sont obligés d’avoir des tentacules profondes au sein du pouvoir politique ?
JB : Je dirai que deux des caractéristiques majeures des Etats fragiles, sont la corruption et la faiblesse extrême du système judiciaire. Etant un Etat fragile, Haïti a énormément de corruption et un système judiciaire assez faible. Toutes sortes d’activités illégales existent ainsi que la drogue. Géographiquement Haïti est situé à mi-chemin entre les producteurs traditionnels de l’Amérique Latine et le marcher américain de la drogue. Les narcotrafiquants s’y sont installés impunément. Le rapport, dont vous faites référence, indique clairement que la prolifération du trafic de la drogue en Haïti, comme point de transite, a atteint des proportions alarmantes. Environ 20% de la production de cocaïne passe par Haïti. En outre le rapport indique que durant l’année 2008, le gouvernement a obtenu très peu de résultat dans sa lutte contre ce fléau. Le trafic de la drogue est en pleine expansion en Haïti.
Quand aux tentacules profondes que les narcotrafiquants ont au sein du pouvoir politique pour se protéger, je vous réfère à une entrevue donnée par le premier ministre récemment, où il a indiqué que les narcotrafiquants ont investi les avenues du pouvoir politique, en se faisant élire pour pouvoir jouir de l’immunité parlementaire. Je fais une remarque. L’immunité parlementaire ne protége pas en matière de crime de droit commun, pour lequel un jugement a été prononcé.
Si le premier ministre a pu faire une telle déclaration, il l’a fait en connaissance de cause. Alors va-t-il mettre l’action publique en branle contre ces élus ?
RB : Pensez-vous que dans le cadre de ce régime, le premier ministre aurait dû prendre ce risque ?
JB : Absolument ! Si on gouverne, il faut en avoir le courage !
piporiko- Super Star
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Nombre de messages : 4753
Age : 54
Localisation : USA
Opinion politique : Homme de gauche,anti-imperialiste....
Loisirs : MUSIC MOVIES BOOKS
Date d'inscription : 21/08/2006
Feuille de personnage
Jeu de rôle: L'impulsif
Re: L’économiste et banquier international Jacques Bernard,
RB : L’évaluation de la situation économique haïtienne, tel que décrite par Paul Collier, êtes-vous d’accord avec ces prémices ? A quoi attribuez-vous vraiment le problème du sous-développement en Haïti ?
JB : Il a décrit quelques atouts économiques du pays. Telle que la position géographique dans une zone prospère et tranquille. Nous n’avons pas de problème ethnique. On a un gouvernement constitutionnelleme nt élu. Une Diaspora proactive qui envoie des transfères de plus d’un milliard de dollars US. Et aussi des avantages tarifaires de grande importance. Il s’est concentré sur ces avantages comparatifs pour justifier son choix de priorités à impact rapide. Il reconnaît que pour le maintien de l’ordre social, la sécurité militaire doit rapidement céder la place à la sécurité économique. Ce qu’il propose n’est pas un programme économique de développement. Mais des interventions ponctuelles dans certains secteurs distincts de l’économie pour apaiser la pression sociale. Ces actions constitueraient une soupape de sûreté, pour donner du temps au gouvernement pour établir des stratégies de développement à long terme. Il est conscient de la pauvreté extrême qui sévit dans le pays. Il n’a pas analysé les causes de notre sous-développement.
Puisque la question est posée ici, on se demande comment un pays qui jouit de multiples avantages économiques, ait pu arriver à ce point de dégradation, pour devenir un Etat faible à l’instar des pays en situation de post-conflit ? L’extrême pauvreté et la détérioration quasi-totale de l’environnement, ne sont pas l’effet du hasard. Elles sont la conséquence logique des politiques des différents gouvernements qui se sont succédés au pouvoir. Elles ne sont que la résultante de la mauvaise gouvernance des gouvernants. La question de la gouvernance me parait essentielle dans toute recherche de solution au problème haïtien.
RB : Etes-vous d’accord que le tandem Préval/Pierre- Louis soit aussi profondément concerné par le maintien de la paix sociale comme l’insinue Paul Collier dans son rapport ?
JB : Je veux bien le croire. Je veux croire qu’ils sont particulièrement concernés par la paix sociale. Ils sont au pouvoir. Ne serait-il pas suicidaire pour un gouvernement d’encourager le cahot social. Si c’est le cas, le gouvernement peut être emporté par les conséquences de ses propres actions. Je veux plutôt croire que le président et le premier ministre sont mal conseillés. Et que leurs priorités ne concordent pas avec les réalités haïtiennes.
Je citerais par exemple, la priorité accordée aux amendements de la Constitution, qui est vu par la présidence comme une source d’instabilité. On doit se demander, est-ce que ces amendements vont donner à manger à ceux qui ont faim ? Est-ce que ces amendements vont donner un toit aux Haïtiens qui n’ont pas d’abri ? Est-ce que ces amendements vont assurer les soins médicaux aux plus démunis etc. ? Ce sont ces facteurs qui constituent la source d’instabilité sociale et qui ont réduit notre pays au titre dénigrants d’Etat en faillite.
Certes la Constitution a besoin d’être amendée. Mais ça ne peut pas être la priorité du moment. Le peuple crève de faim. La constitution de 1987, n’est pas une source d’instabilité. Elle nous a protégé contre la dictature pendant les moments les plus difficiles des 22 dernières années. D’ailleurs le premier ministre lui-même a identifié le trafic de la drogue, comme étant la plus grande menace de déstabilisation en Haïti.
RB : On a eu il y a presque un an, les émeutes de la faim. On a eu aussi la crise post-cyclonique qui a détruit la production agricole etc. Si Prévale et Pierre-Louis sont tellement concernés par la paix sociale, il y a-t-il aucune intervention de leur part dans ce sens ?
JB : C’est ce que je dis. Ils sont très mal conseillés. C’est le sens du rapport Collier qui suggère des interventions ponctuelles dans des secteurs spécifiques de l’économie haïtienne, qui peuvent avoir un impact immédiat dans la création d’emploi et part voie de conséquence un apaisement de la pression sociale.
RB : Où se trouvent donc ces forces d’inertie dont parle Paul Collier dans son rapport ?
JB : Il n’a pas énuméré les forces d’inertie. Il faut se rappeler que tout Etat fragile a des forces d’inertie qui empêchent un développement harmonieux de l’économie et de la justice, pour un retour à la normalité. Le opérateurs d’un Etat fragile vont certainement résister à toute politique qui tend à réduire la corruption et renforcer le système judiciaire. Si non ils ne pourront plus opérer en toute impunité. Malheureusement les opérateurs tel que les narcotrafiquants, les contrebandiers, les kidnappeurs etc. ont envahi toutes les couches sociales de la population et inclus des élus aux dires du premier ministre. Ce sont des forces réelles qu’il faut combattre avec conviction et fermeté.
RB : N’y a-t-il dans la loi électorale l’article 94 qui sert de garde-fou contre l’infiltration des criminels dans les postes électifs ? Comment se fait-il que l’on ait pu élire des narcotrafiquants au parlement ?
JB : L’institution électorale, n’a pas le pouvoir d’investigation. Le CEP ne demande aux candidats que de présenter des certificats de bonne vie et mœurs et de police. Le candidat qui se présente avec un certificat authentique est présumé être un citoyen honnête qui respecte la loi. Il faut qu’il y ait un système pour identifier les criminels et protéger l’intégrité des institutions.
RB : Il y a-t-il des offres concrets d’ouverture faits à Haïti sur le marcher des Etats-Unis et du Canada ? Quels sont-ils ?
JB : Il y a aujourd’hui le HOPE II qui ouvre le marcher américain. Il y a eu dans le passé HOPE I et aussi CBI. Il y a des produits haïtiens qui peuvent entrer aux Etats-Unis et au Canada en payant un minimum de tarif. Le problème est, nous ne produisons presque rien. C’est un problème haïtien au lieu d’un problème de protection du marcher canadien ou américain.
RB : ON exportait dans le temps, le café, le cacao, le coton, la figue banane, le vétiver etc. Il y a-t-il une production même marginale de ces produits ?
JB : C’est là la tragédie. Quand on remonte jusqu’au début des années 50, Haïti était au même niveau de développement économique per capita que beaucoup de pays de l’Amérique latine et de l’Amérique centrale. A partir de la fin des années 50, la mauvaise gouvernance qui s’y est installée avec le gouvernement de Duvalier, a fait que l’économie haïtienne a commencé à chuter, la production nationale a décliné rapidement. Et depuis, il n’y a jamais eu de mesure de redressement pour relancer la production nationale. Les gouvernants ont fait des très beaux discours à ce sujet. Mais dans la réalité il n’y a jamais eu de programme systématique de relance de la production agricole. Nous n’exportons presque plus rien.
RB : Selon le rapport de Paul Collier, les éléments fondamentaux de l’économie haïtienne, malgré les sévères difficultés qu’on est en train d’affronter, sont plus attrayants que ceux des autres Etats fragiles.
JB : Il a décrit quelques atouts économiques du pays. Telle que la position géographique dans une zone prospère et tranquille. Nous n’avons pas de problème ethnique. On a un gouvernement constitutionnelleme nt élu. Une Diaspora proactive qui envoie des transfères de plus d’un milliard de dollars US. Et aussi des avantages tarifaires de grande importance. Il s’est concentré sur ces avantages comparatifs pour justifier son choix de priorités à impact rapide. Il reconnaît que pour le maintien de l’ordre social, la sécurité militaire doit rapidement céder la place à la sécurité économique. Ce qu’il propose n’est pas un programme économique de développement. Mais des interventions ponctuelles dans certains secteurs distincts de l’économie pour apaiser la pression sociale. Ces actions constitueraient une soupape de sûreté, pour donner du temps au gouvernement pour établir des stratégies de développement à long terme. Il est conscient de la pauvreté extrême qui sévit dans le pays. Il n’a pas analysé les causes de notre sous-développement.
Puisque la question est posée ici, on se demande comment un pays qui jouit de multiples avantages économiques, ait pu arriver à ce point de dégradation, pour devenir un Etat faible à l’instar des pays en situation de post-conflit ? L’extrême pauvreté et la détérioration quasi-totale de l’environnement, ne sont pas l’effet du hasard. Elles sont la conséquence logique des politiques des différents gouvernements qui se sont succédés au pouvoir. Elles ne sont que la résultante de la mauvaise gouvernance des gouvernants. La question de la gouvernance me parait essentielle dans toute recherche de solution au problème haïtien.
RB : Etes-vous d’accord que le tandem Préval/Pierre- Louis soit aussi profondément concerné par le maintien de la paix sociale comme l’insinue Paul Collier dans son rapport ?
JB : Je veux bien le croire. Je veux croire qu’ils sont particulièrement concernés par la paix sociale. Ils sont au pouvoir. Ne serait-il pas suicidaire pour un gouvernement d’encourager le cahot social. Si c’est le cas, le gouvernement peut être emporté par les conséquences de ses propres actions. Je veux plutôt croire que le président et le premier ministre sont mal conseillés. Et que leurs priorités ne concordent pas avec les réalités haïtiennes.
Je citerais par exemple, la priorité accordée aux amendements de la Constitution, qui est vu par la présidence comme une source d’instabilité. On doit se demander, est-ce que ces amendements vont donner à manger à ceux qui ont faim ? Est-ce que ces amendements vont donner un toit aux Haïtiens qui n’ont pas d’abri ? Est-ce que ces amendements vont assurer les soins médicaux aux plus démunis etc. ? Ce sont ces facteurs qui constituent la source d’instabilité sociale et qui ont réduit notre pays au titre dénigrants d’Etat en faillite.
Certes la Constitution a besoin d’être amendée. Mais ça ne peut pas être la priorité du moment. Le peuple crève de faim. La constitution de 1987, n’est pas une source d’instabilité. Elle nous a protégé contre la dictature pendant les moments les plus difficiles des 22 dernières années. D’ailleurs le premier ministre lui-même a identifié le trafic de la drogue, comme étant la plus grande menace de déstabilisation en Haïti.
RB : On a eu il y a presque un an, les émeutes de la faim. On a eu aussi la crise post-cyclonique qui a détruit la production agricole etc. Si Prévale et Pierre-Louis sont tellement concernés par la paix sociale, il y a-t-il aucune intervention de leur part dans ce sens ?
JB : C’est ce que je dis. Ils sont très mal conseillés. C’est le sens du rapport Collier qui suggère des interventions ponctuelles dans des secteurs spécifiques de l’économie haïtienne, qui peuvent avoir un impact immédiat dans la création d’emploi et part voie de conséquence un apaisement de la pression sociale.
RB : Où se trouvent donc ces forces d’inertie dont parle Paul Collier dans son rapport ?
JB : Il n’a pas énuméré les forces d’inertie. Il faut se rappeler que tout Etat fragile a des forces d’inertie qui empêchent un développement harmonieux de l’économie et de la justice, pour un retour à la normalité. Le opérateurs d’un Etat fragile vont certainement résister à toute politique qui tend à réduire la corruption et renforcer le système judiciaire. Si non ils ne pourront plus opérer en toute impunité. Malheureusement les opérateurs tel que les narcotrafiquants, les contrebandiers, les kidnappeurs etc. ont envahi toutes les couches sociales de la population et inclus des élus aux dires du premier ministre. Ce sont des forces réelles qu’il faut combattre avec conviction et fermeté.
RB : N’y a-t-il dans la loi électorale l’article 94 qui sert de garde-fou contre l’infiltration des criminels dans les postes électifs ? Comment se fait-il que l’on ait pu élire des narcotrafiquants au parlement ?
JB : L’institution électorale, n’a pas le pouvoir d’investigation. Le CEP ne demande aux candidats que de présenter des certificats de bonne vie et mœurs et de police. Le candidat qui se présente avec un certificat authentique est présumé être un citoyen honnête qui respecte la loi. Il faut qu’il y ait un système pour identifier les criminels et protéger l’intégrité des institutions.
RB : Il y a-t-il des offres concrets d’ouverture faits à Haïti sur le marcher des Etats-Unis et du Canada ? Quels sont-ils ?
JB : Il y a aujourd’hui le HOPE II qui ouvre le marcher américain. Il y a eu dans le passé HOPE I et aussi CBI. Il y a des produits haïtiens qui peuvent entrer aux Etats-Unis et au Canada en payant un minimum de tarif. Le problème est, nous ne produisons presque rien. C’est un problème haïtien au lieu d’un problème de protection du marcher canadien ou américain.
RB : ON exportait dans le temps, le café, le cacao, le coton, la figue banane, le vétiver etc. Il y a-t-il une production même marginale de ces produits ?
JB : C’est là la tragédie. Quand on remonte jusqu’au début des années 50, Haïti était au même niveau de développement économique per capita que beaucoup de pays de l’Amérique latine et de l’Amérique centrale. A partir de la fin des années 50, la mauvaise gouvernance qui s’y est installée avec le gouvernement de Duvalier, a fait que l’économie haïtienne a commencé à chuter, la production nationale a décliné rapidement. Et depuis, il n’y a jamais eu de mesure de redressement pour relancer la production nationale. Les gouvernants ont fait des très beaux discours à ce sujet. Mais dans la réalité il n’y a jamais eu de programme systématique de relance de la production agricole. Nous n’exportons presque plus rien.
RB : Selon le rapport de Paul Collier, les éléments fondamentaux de l’économie haïtienne, malgré les sévères difficultés qu’on est en train d’affronter, sont plus attrayants que ceux des autres Etats fragiles.
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Opinion politique : Homme de gauche,anti-imperialiste....
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Feuille de personnage
Jeu de rôle: L'impulsif
Re: L’économiste et banquier international Jacques Bernard,
Pouvez-vous énumérer ces éléments fondamentaux ?
JB : Il a énuméré 5 éléments dans son rapport, la position géographique, une zone tranquille, sans conflit ethnique, un gouvernement constitutionnel, une Diaspora très attachée à son pays et la loi HOPE II. Nous avons d’autres atouts, pour n’en citer qu’un, c’est l’ouvrier haïtien du secteur privé. Ma propre expérience, pendant 14 ans j’ai eu des usines électroniques en Haïti. Je dis que l’ouvrier haïtien une fois formé est aussi productif que n’importe quel ouvrier du monde. Ceci représente l’un des grands atouts économiques que nous possédons en Haïti.
RB : En gros, Paul Collier n’est-il pas en train de suggérer à la communauté internationale d’inclure dans leurs efforts envers Haïti, un volet de stratégie économique en plus des volets de sécurité et de paix politique ?
JB : C’est peut être le point le plus important du rapport. Le fait d’identifier quatre volets de développement à impacte rapide est très intéressant. Il va beaucoup plus loin que cela. Il nous dit que la grande erreur des bailleurs de fonds est de croire que la stratégie du développement économique est du domaine exclusif du gouvernement. Et il dit d’ailleurs que ce gouvernement n’a pas la capacité technique d’accomplir cet exercice seul. Ceci nous ramène à la question de la gouvernance mentionnée ci-dessus. Il préconise une gestion conjointe de l’économie avec les acteurs locaux avec la communauté internationale. Comme vous l’avez si bien dit, un volet de stratégie économique viendra s’ajouter aux volets de sécurité et de paix politique.
RB : Comment voyez-vous l’aspect technique de la mise en place du volet économique, quand Collier affirme qu’il n’y a pas cette capacité dans le gouvernement actuel ?
JB : C’est pour cela qu’il suggère une gestion conjointe de ce volet, entre les acteurs locaux et la communauté internationale. C’est quelque chose de nouveau. Ceci va faire partie des discussions qui auront lieu lors de la visite de cette importante délégation.
RB : En d’autres termes, quel sera le degré de participation et à quel niveau se fera l’intervention de la communauté internationale ?
JB : Je l’ai déjà dit que le problème de la pauvreté et du sous-développement en Haïti, c’est la mauvaise gouvernance. Les gouvernants haïtiens ne savent pas choisir les priorités qui correspondent aux réalités du pays. La communauté internationale qui dépense énormément d’argent. Les 5 ans de la Minustah vont coûter à peu près 5 milliards de dollars. En plus, il y a toute l’aide étrangère qui entre en Haïti et les transfères de 1 milliards 6oo millions de dollars de la Diaspora qui entrent annuellement en Haïti. Malgré ce volume impressionnant d’argent, voyez l’état de pauvreté et de misère du pays. Il faut que cela change.
Le fait que la communauté internationale est consciente qu’Haïti représente un danger, elle s’est dite qu’il faut aller un peu plus loin. Il faut aller au-delà des volets de sécurité et de paix politique. Il faut combler la lacune évidente, l’incapacité de ce gouvernement de développer une stratégie économique. Il faut s’impliquer directement dans le développement de la stratégie économique. Avec tous ces malheurs qui ce sont abattus sur Haïti. La crise post-cyclonique qui est venue par surcroît. On est évidemment aux abords d’une explosion sociale. Et la seule façon d’éviter cette explosion, c’est de créer des emplois le plus rapidement que possible. C’est un peu ça le sens du rapport de monsieur Paul Collier. Le seul problème que j’ai avec ce rapport, est qu’il veut que tout passe par le gouvernement. Ce qui alourdirait le processus. Et diminuerait l’impact rapide qu’il veut lui-même créer. Il a parlé de l’agriculture. Il a parlé de la sécurité alimentaire. Qui pour moi a beaucoup plus de potentiel de création d’emploi que les infrastructures et HOPE II. Il croit que la communauté internationale doit être impliquée directement dans le développement d’une telle stratégie.
RB : Si ces suggestions ont acceptées, allons-nous voir l’arrivée de techniciens dans ce domaine ?
JB : C’est certain ! Ils devront envoyer des techniciens pour s’assurer de la bonne marche de l’implantation et de la matérialisation de la stratégie économique.
JB : Il a énuméré 5 éléments dans son rapport, la position géographique, une zone tranquille, sans conflit ethnique, un gouvernement constitutionnel, une Diaspora très attachée à son pays et la loi HOPE II. Nous avons d’autres atouts, pour n’en citer qu’un, c’est l’ouvrier haïtien du secteur privé. Ma propre expérience, pendant 14 ans j’ai eu des usines électroniques en Haïti. Je dis que l’ouvrier haïtien une fois formé est aussi productif que n’importe quel ouvrier du monde. Ceci représente l’un des grands atouts économiques que nous possédons en Haïti.
RB : En gros, Paul Collier n’est-il pas en train de suggérer à la communauté internationale d’inclure dans leurs efforts envers Haïti, un volet de stratégie économique en plus des volets de sécurité et de paix politique ?
JB : C’est peut être le point le plus important du rapport. Le fait d’identifier quatre volets de développement à impacte rapide est très intéressant. Il va beaucoup plus loin que cela. Il nous dit que la grande erreur des bailleurs de fonds est de croire que la stratégie du développement économique est du domaine exclusif du gouvernement. Et il dit d’ailleurs que ce gouvernement n’a pas la capacité technique d’accomplir cet exercice seul. Ceci nous ramène à la question de la gouvernance mentionnée ci-dessus. Il préconise une gestion conjointe de l’économie avec les acteurs locaux avec la communauté internationale. Comme vous l’avez si bien dit, un volet de stratégie économique viendra s’ajouter aux volets de sécurité et de paix politique.
RB : Comment voyez-vous l’aspect technique de la mise en place du volet économique, quand Collier affirme qu’il n’y a pas cette capacité dans le gouvernement actuel ?
JB : C’est pour cela qu’il suggère une gestion conjointe de ce volet, entre les acteurs locaux et la communauté internationale. C’est quelque chose de nouveau. Ceci va faire partie des discussions qui auront lieu lors de la visite de cette importante délégation.
RB : En d’autres termes, quel sera le degré de participation et à quel niveau se fera l’intervention de la communauté internationale ?
JB : Je l’ai déjà dit que le problème de la pauvreté et du sous-développement en Haïti, c’est la mauvaise gouvernance. Les gouvernants haïtiens ne savent pas choisir les priorités qui correspondent aux réalités du pays. La communauté internationale qui dépense énormément d’argent. Les 5 ans de la Minustah vont coûter à peu près 5 milliards de dollars. En plus, il y a toute l’aide étrangère qui entre en Haïti et les transfères de 1 milliards 6oo millions de dollars de la Diaspora qui entrent annuellement en Haïti. Malgré ce volume impressionnant d’argent, voyez l’état de pauvreté et de misère du pays. Il faut que cela change.
Le fait que la communauté internationale est consciente qu’Haïti représente un danger, elle s’est dite qu’il faut aller un peu plus loin. Il faut aller au-delà des volets de sécurité et de paix politique. Il faut combler la lacune évidente, l’incapacité de ce gouvernement de développer une stratégie économique. Il faut s’impliquer directement dans le développement de la stratégie économique. Avec tous ces malheurs qui ce sont abattus sur Haïti. La crise post-cyclonique qui est venue par surcroît. On est évidemment aux abords d’une explosion sociale. Et la seule façon d’éviter cette explosion, c’est de créer des emplois le plus rapidement que possible. C’est un peu ça le sens du rapport de monsieur Paul Collier. Le seul problème que j’ai avec ce rapport, est qu’il veut que tout passe par le gouvernement. Ce qui alourdirait le processus. Et diminuerait l’impact rapide qu’il veut lui-même créer. Il a parlé de l’agriculture. Il a parlé de la sécurité alimentaire. Qui pour moi a beaucoup plus de potentiel de création d’emploi que les infrastructures et HOPE II. Il croit que la communauté internationale doit être impliquée directement dans le développement d’une telle stratégie.
RB : Si ces suggestions ont acceptées, allons-nous voir l’arrivée de techniciens dans ce domaine ?
JB : C’est certain ! Ils devront envoyer des techniciens pour s’assurer de la bonne marche de l’implantation et de la matérialisation de la stratégie économique.
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Re: L’économiste et banquier international Jacques Bernard,
RB : Etes-vous d’accord avec la notion avancée par Paul Collier, que toutes visions et projets à moyen et à long terme soient voués à l’échec. Mais que les projets à court terme avec des bénéfices substantiels visibles attribuables au gouvernement, soient seuls capables de réussir ?
JB : Dans cette conjoncture, vu la dégradation économique, sociale et environnementale d’Haïti, nous ne pouvons pas nous payer le lux de penser seulement qu’au long terme. Des actions à court terme sont nécessaires pour redonner confiance au peuple haïtien et éviter le chaos social. Il faut que ces actions fassent partie d’une stratégie pour jeter les bases d’un développement économique durable à plus long terme. Les actions qu’il vise requièrent certainement des interventions directes et un certain niveau de coordination de la part du gouvernement avec les autres partenaires privés. Il n’est pas nécessaire que tout passe par le gouvernement. Il y a tout un système de financement déjà établi par les bailleurs de fonds avec les ONG qui fonctionnent en Haïti et qui desservent presque toute la population haïtienne. Ce système de financement marche assez bien. Aller dispenser ces fonds à travers le gouvernement, créerait certainement des goulots d’étranglements qui ralentiraient l’impact rapide qu’il recherche lui-même. Sur ce point, je suis en parfait désaccord avec Paul Collier. La proposition de Collier n’exclut en rien les avantages des mesures économiques sur le moyen et long terme. Pour pouvoir arriver dans le moyen et le long terme, nous devons dans le court terme créer des emplois pour apaiser la pression sociale.
RB : Dans le domaine de l’emploi, Paul Collier limite les options que dans la construction, le maintien des infrastructures et l’expansion des zones franches (les mangues et l’industrie vestimentaire) .
Etes-vous d’accord avec ce point de vue ?
JB : Quand il parle de création d’emploi, il cite les infrastructures, les mangues et l’industrie vestimentaire. Les 4 secteurs qu’il vise créeront tous des emplois. D’ailleurs l’agriculture qu’il a cité, sans pour autant développer un programme spécifique pour ce secteur, a plus de potentiel de création d’emploi que les autres secteurs. Le point faible du rapport, est de laisser à l’Etat la stratégie agricole, alors qu’il reconnaît le manque de capacité de l’Etat dans le développement d’une stratégie économique. C’est évidemment la raison pour laquelle nous importons tous ce que nous consommons. Nous n’avons pas une stratégie agricole viable. Nous n’exportons plus nos produits agricoles. Les huiles essentielles étaient totalement mortes. Pierre Léger a pu raviver ces produits. Il n’y a pas eu de stratégie de développement agricole pendant les 50 dernières années. Il est temps que nous ayons une stratégie viable pour développer le secteur agricole et assurer la sécurité alimentaire.
RB : Comme vous venez de le démontrer ce rapport a une faiblesse dans le domaine qui peut créer le plus d’emplois. Mais monsieur Ban Ki-moon c’est avec ce rapport qu’il entre en Haïti la semaine prochaine. Ne serait-il pas mieux d’introduire aussi la stratégie de développement agricole qui a le potentiel de faire d’une pierre deux coups, la création d’emploi et la sécurité alimentaire ?
JB : Il a mentionné l’agriculture sans offrir une stratégie. Je crois que vous avez raison. Il faut un complément de stratégie agricole ajouté à ceci. Pour un tel plan il faudrait viser quatre paramètres. Il y a le paramètre de la productivité agricole. Il est inconcevable qu’au XXIe siècle le paysan haïtien continue à utiliser la houe comme instrument agricole. Il faut introduire de la modernité dans ce domaine. Il y a l’irrigation, où la plus part des canaux sont ensablés. Il y a un effort qui se fait ponctuellement dans ce sens, mais pas sur toute l’étendu du territoire pour irriguer toutes les terres cultivables. Il y a le paquet technologique, les engrais, les semences, un service de distribution rapide avec le crédit pour donner efficacement accès à ces produits. Je crois que ces 4 éléments peuvent entrer dans la formulation d’une stratégie pour amener la production agricole à un niveau adéquat rapidement. La sécurité alimentaire peut être accomplie. Il faudra concentrer énormément de ressource pour qu’à court terme on ait un résultat satisfaisant.
RB : Pensez-vous qu’avec l’état de l’économie paysanne, il ne serait pas obligatoire pour commencer, de passer par la subvention pour donner accès au paquet technologique et aux intrants agricoles ?
JB : Certainement, ceci a été essayé dans un pays d’Afrique avec un succès extraordinaire. Quand ce gouvernement a commencé à subventionner les engrais et les semences, il a eu énormément de problème avec le FMI et la Banque Mondiale qui se sont retirés. Quand finalement le model a réussit. Et pour chaque dollar d’investissement subventionné, l’agriculteur tire 2 dollars. Face à ce succès les institutions internationales sont revenues. Et ce model a été adopté un peu partout en Afrique de l’Ouest.
JB : Dans cette conjoncture, vu la dégradation économique, sociale et environnementale d’Haïti, nous ne pouvons pas nous payer le lux de penser seulement qu’au long terme. Des actions à court terme sont nécessaires pour redonner confiance au peuple haïtien et éviter le chaos social. Il faut que ces actions fassent partie d’une stratégie pour jeter les bases d’un développement économique durable à plus long terme. Les actions qu’il vise requièrent certainement des interventions directes et un certain niveau de coordination de la part du gouvernement avec les autres partenaires privés. Il n’est pas nécessaire que tout passe par le gouvernement. Il y a tout un système de financement déjà établi par les bailleurs de fonds avec les ONG qui fonctionnent en Haïti et qui desservent presque toute la population haïtienne. Ce système de financement marche assez bien. Aller dispenser ces fonds à travers le gouvernement, créerait certainement des goulots d’étranglements qui ralentiraient l’impact rapide qu’il recherche lui-même. Sur ce point, je suis en parfait désaccord avec Paul Collier. La proposition de Collier n’exclut en rien les avantages des mesures économiques sur le moyen et long terme. Pour pouvoir arriver dans le moyen et le long terme, nous devons dans le court terme créer des emplois pour apaiser la pression sociale.
RB : Dans le domaine de l’emploi, Paul Collier limite les options que dans la construction, le maintien des infrastructures et l’expansion des zones franches (les mangues et l’industrie vestimentaire) .
Etes-vous d’accord avec ce point de vue ?
JB : Quand il parle de création d’emploi, il cite les infrastructures, les mangues et l’industrie vestimentaire. Les 4 secteurs qu’il vise créeront tous des emplois. D’ailleurs l’agriculture qu’il a cité, sans pour autant développer un programme spécifique pour ce secteur, a plus de potentiel de création d’emploi que les autres secteurs. Le point faible du rapport, est de laisser à l’Etat la stratégie agricole, alors qu’il reconnaît le manque de capacité de l’Etat dans le développement d’une stratégie économique. C’est évidemment la raison pour laquelle nous importons tous ce que nous consommons. Nous n’avons pas une stratégie agricole viable. Nous n’exportons plus nos produits agricoles. Les huiles essentielles étaient totalement mortes. Pierre Léger a pu raviver ces produits. Il n’y a pas eu de stratégie de développement agricole pendant les 50 dernières années. Il est temps que nous ayons une stratégie viable pour développer le secteur agricole et assurer la sécurité alimentaire.
RB : Comme vous venez de le démontrer ce rapport a une faiblesse dans le domaine qui peut créer le plus d’emplois. Mais monsieur Ban Ki-moon c’est avec ce rapport qu’il entre en Haïti la semaine prochaine. Ne serait-il pas mieux d’introduire aussi la stratégie de développement agricole qui a le potentiel de faire d’une pierre deux coups, la création d’emploi et la sécurité alimentaire ?
JB : Il a mentionné l’agriculture sans offrir une stratégie. Je crois que vous avez raison. Il faut un complément de stratégie agricole ajouté à ceci. Pour un tel plan il faudrait viser quatre paramètres. Il y a le paramètre de la productivité agricole. Il est inconcevable qu’au XXIe siècle le paysan haïtien continue à utiliser la houe comme instrument agricole. Il faut introduire de la modernité dans ce domaine. Il y a l’irrigation, où la plus part des canaux sont ensablés. Il y a un effort qui se fait ponctuellement dans ce sens, mais pas sur toute l’étendu du territoire pour irriguer toutes les terres cultivables. Il y a le paquet technologique, les engrais, les semences, un service de distribution rapide avec le crédit pour donner efficacement accès à ces produits. Je crois que ces 4 éléments peuvent entrer dans la formulation d’une stratégie pour amener la production agricole à un niveau adéquat rapidement. La sécurité alimentaire peut être accomplie. Il faudra concentrer énormément de ressource pour qu’à court terme on ait un résultat satisfaisant.
RB : Pensez-vous qu’avec l’état de l’économie paysanne, il ne serait pas obligatoire pour commencer, de passer par la subvention pour donner accès au paquet technologique et aux intrants agricoles ?
JB : Certainement, ceci a été essayé dans un pays d’Afrique avec un succès extraordinaire. Quand ce gouvernement a commencé à subventionner les engrais et les semences, il a eu énormément de problème avec le FMI et la Banque Mondiale qui se sont retirés. Quand finalement le model a réussit. Et pour chaque dollar d’investissement subventionné, l’agriculteur tire 2 dollars. Face à ce succès les institutions internationales sont revenues. Et ce model a été adopté un peu partout en Afrique de l’Ouest.
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Re: L’économiste et banquier international Jacques Bernard,
RB : Si Haïti, dans le marcher des mangues, peut être compétitif, mais face à la Chine et au Bangladesh dans l’industrie vestimentaire, peut-il en faire autant ?
JB : Je dirai que oui, mais pas dans tous les domaines de l’industrie vestimentaire. Si nous parlons de production à très grande échelle, Haïti ne pourra pas être compétitif. Nous avons un avantage, c’est la proximité du marcher américain. Pour des models qui changent assez souvent, dont la production n’est pas sur une grande échelle, nous avons un avantage. Il y a maintenant en Haïti plusieurs compagnies coréennes de couture qui se sont établies. Ils sont très satisfaits de la performance de leurs usines. La Coré est voisine de la Chine. Il y a une compagnie chinoise qui envisage un investissement assez important dans la zone franche de Ouanaminthe. S’ils investissent en Haïti, il faut croire que nous offrons certains avantages qu’ils n’ont pas et qu’ils veulent exploiter.
RB : HOPE II est le projet ciblé par Paul Collier comme une opportunité sans pareil offerte à Haïti par les Etats-Unis.
Pouvez-vous nous donner quelques détails sur ce projet ? Et les bénéfices qu’Haïti peut en tirer ?
JB : Nous avions eu à travers le temps toute sorte d’avantage tarifaire avec les Etats-Unis. Dans les années 80 nous avions eu le CBI. On a eu après HOPE I et maintenant HOPE II. Ceci nous offre des avantages tarifaires. La valeur ajoutée haïtienne réduite à un minimum, nous permettre de recevoir des produits semi-finis pour les compléter et mettre le label haïtien dessus. Ces produits pourront entrer sans tarif aux Etats-Unis. Ceci représente un avantage énorme. Il faut se rappeler que dans les années 80, nous avions plus de 100 milles ouvriers travaillant dans la sous-traitance. Avec les déboires politiques qui ont commencé à partir de 1986, nous avons perdu une grande partie de cette industrie. Et nous somme réduit à près d’une vingtaine de milliers d’ouvriers actifs. Il y a un potentiel extraordinaire et assez rapide pour augmenter l’emploi dans la zone métropolitaine et d’autres zones franches que le gouvernement devra établir un peu partout là où il y a un port, pour attirer des investissements étrangers. Il y a un avantage énorme à augmenter le pouvoir d’achat de la population, en lui offrant l’emploi. L’ouvrier haïtien qui travail dans une usine de sous-traitance est différent de celui qui n’a jamais travaillé dans ce genre d’usine. Il sait ce que c’est que la production. Il sait ce que c’est que la qualité. Il a une formation acquise qui fait de lui un ouvrier très productif. Quand ces ouvriers laissent la sous-traitance pour aller travailler quelque part d’autre, ils sont plus productifs. Nous avons énormément d’avantage et de bénéfice à tirer de HOPE II.
RB : Dans les années 50 et 60, on a vu la Hamco exporter un volume énorme de viande de veau, à partir d’Haïti vers les Etats-Unis. Le volume dépassait de mille coudées la quantité de veau produite en Haïti. La viande de veau venait d’Argentine avec un label haïtien. Est-ce que dans l’industrie vestimentaire ce même phénomène ne peut pas se produire pour la Chine, le Bangladesh etc. ?
JB : Il faut quand même qu’il y ait une valeur ajoutée en Haïti pour qu’on puisse mettre le label haïtien. Si non le jeu est faussé. Avec HOPE II la valeur ajoutée est réduite à un minimum. L’avantage que cela nous donne c’est de recevoir des produits semi-finis y mettre la valeur ajoutée et les envoyer aux Etats-Unis sans tarif.
RB : Le talon d’Achille de l’industrie vestimentaire en Haïti est le problème des ports, le coût et la fiabilité des sources d’énergie électrique. Paul Collier suggère la création d’enclaves pour en réduire le coût.
Etes-vous d’accord avec cette approche ?
JB : Ce qu’il mentionne, existe déjà en Haïti. La création d’enclave, c’est le parc industriel. Il pense à quelque chose de plus grandiose que ce que nous avons maintenant en Haïti. Il y a énormément d’avantage à tirer de ceci. Si on a un regroupement d’usine, on peut installer une plante électrique pour les alimenter, au lieu d’avoir des centaines de génératrices à 300 kilowatts chacune. Une usine de 10 mégawatts réduirait le coût de l’électricité. Il y a un avantage économique à regrouper les usines dans un pays où il n’y a pas l’infrastructure nécessaire. Il serait plus facile et moins coûteux de créer cette infrastructure pour servir les parcs industriels, en eau et électricité. Même pour la sécurité, un regroupement d’usine dans un parc industriel est plus facilement protégé. Je suis entièrement d’accord avec cette approche.
RB : Il y a un problème politique pour les investisseurs qui voudraient avoir une exploitation plus efficace des usines en ayant 24 heures de production. La loi sur le travail ne le permet pas.
Compte tenu de la sécurité des travailleurs, quelle est la solution ?
JB : J’ai expérimenté ceci. J’avais des usines électroniques en Haïti pendant 14 ans. Je travaillais des fois 24 heures sur 24. La loi n’interdit pas de travailler 24 sur 24. La loi veut que l’on paye 50% de plus de salaire aux ouvriers qui travaillent l’après-midi et la nuit. Ceci augmente le coût de la main-d’œuvre de 50%, c’est énorme. Ce que l’on demande c’est de maintenir le même salaire pour toutes les heures de travail.
Il y a-t-il un moyen de protéger les ouvriers contre l’insécurité ? Je crois que la Minustah et la police doivent faire un travail beaucoup plus adéquat, pour la protection des vies et des biens. J’offrais le transport à mes employés avec mes deux autobus.
D’ailleurs une loi a été déposée au parlement pour corriger cette situation par le sénateur Boulos. Il y a des démarches pour que cette loi soit votée. Cette loi faciliterait la tache aux investisseurs. Avec le départ du sénateur Boulos la loi a été mise en veilleuse. Il y a des efforts qui se font pour reconsidérer cette loi. Avec HOPE II, il faut qu’on ait cette loi pour en tirer le maximum de profit.
RB : Le rapport de Paul Collier s’est-il préoccupé de création d’enclave pour faciliter uniquement l’exploitation du projet HOPE II ? Ou est-ce une approche pour le développement ?
JB: Le développement économique est un concept intégré qui touche à tous les secteurs, pour maintenir la balance entre les secteurs pour permettre leur développement harmonieux. Ce qu’il propose n’est pas un programme de développement économique. Ce qu’il propose ce sont des actions ponctuelles, visant certains secteurs de l’économie pour la création rapide d’emploi. Ceci peut donner du temps pour une planification à moyen et long terme.
Quelle est la crainte de la communauté internationale ? Nous sommes à un point où le pays peut véritablement exploser. Détruit littéralement par 4 cyclones, avec 50 ans de mauvaise gouvernance, nous avons détruit notre environnement. Les Haïtiens dépendent entièrement des transfères de la Diaspora, de l’aide étrangère pour survivre. Il nous faut à tout prix viser le court terme, pour créer le plus d’emploi possible pour apaiser la pression sociale et planifier sur le moyen terne. C’est tout le mérite du rapport de Paul Collier. Ce qu’il propose n’est rien de nouveau. Un gouvernement qui se respecte devrait être normalement en mesure de le faire lui-même. La mauvaise gouvernance du pays, le choix des priorités, nous ont conduit à un carrefour où l’international nous dit qu’il faut que nous nous y mêlions, parce que Haïti représente un danger pour la Caraïbe. Nous avons un voisin qui a fait des efforts économiques. S’il y a une explosion en Haïti, la République dominicaine aura un prix à payer.
RB : Compte tenu du fait que l’équilibre macroéconomique soit un souci majeur pour ce gouvernement. Pensez-vous qu’il s’engagera dans la subvention des intrants agricole ?
JB : J’irai plus loin. Ce n’est pas une question de chois. C’est une nécessité. Je crois que le pays peut argumenter sont point de vu, que cette objectif de subvention même temporaire rencontre l’objectif de la communauté internationale. Il n’y aura pas de contradiction entre les deux.
Le budget haïtien est financé à 60% par la communauté internationale. Les Américains sont en train de nourrir un million d’enfants. Qu’arrivera-t- il, si cette subvention s’arrête ? Je ne vois aucun conflit s’il y a une subvention qui a un aspect productif.
RB : Le FMI étant par principe opposé aux subventions, quelle sera sa réaction face à un programme de subvention entrepris par le gouvernement haïtien ?
JB : Il y a un pays de l’Afrique qui l’a fait, ce pays a réussit. Et d’autres pays de l’Afrique sont en train d’appliquer ce model. Je crois que dans l’environnement de crise globale que nous vivons, il y a beaucoup de flexibilité, qu’il y en avait, il y a peut être deux ou trois ans de cela. C’est une nouvelle réalité que nous vivons aujourd’hui. Des 1 milliards 600 millions à peu près 400 millions son utilisés pour l’importation de nourriture. Si nous pouvions produire ces 400 millions de dollars que nous recevons de la Diaspora, ce sera 400 millions de dollars de devises que nous utiliserons pour importer des équipements agricoles pour le développement du pays. C’est une nécessité absolue. Dans le rapport de Collier bien qu’il l’ait mentionné, il a un peu négligé l’importance du secteur agricole. C’est un secteur qui demanderait un développement un peu plus long dans son rapport.
RB : Je te remercie Jacques pour ta participation brillante à l’émission. J’espère pouvoir t’inviter pour une prochaine fois.
JB : Merci Bob, bonsoir aux auditeurs
JB : Je dirai que oui, mais pas dans tous les domaines de l’industrie vestimentaire. Si nous parlons de production à très grande échelle, Haïti ne pourra pas être compétitif. Nous avons un avantage, c’est la proximité du marcher américain. Pour des models qui changent assez souvent, dont la production n’est pas sur une grande échelle, nous avons un avantage. Il y a maintenant en Haïti plusieurs compagnies coréennes de couture qui se sont établies. Ils sont très satisfaits de la performance de leurs usines. La Coré est voisine de la Chine. Il y a une compagnie chinoise qui envisage un investissement assez important dans la zone franche de Ouanaminthe. S’ils investissent en Haïti, il faut croire que nous offrons certains avantages qu’ils n’ont pas et qu’ils veulent exploiter.
RB : HOPE II est le projet ciblé par Paul Collier comme une opportunité sans pareil offerte à Haïti par les Etats-Unis.
Pouvez-vous nous donner quelques détails sur ce projet ? Et les bénéfices qu’Haïti peut en tirer ?
JB : Nous avions eu à travers le temps toute sorte d’avantage tarifaire avec les Etats-Unis. Dans les années 80 nous avions eu le CBI. On a eu après HOPE I et maintenant HOPE II. Ceci nous offre des avantages tarifaires. La valeur ajoutée haïtienne réduite à un minimum, nous permettre de recevoir des produits semi-finis pour les compléter et mettre le label haïtien dessus. Ces produits pourront entrer sans tarif aux Etats-Unis. Ceci représente un avantage énorme. Il faut se rappeler que dans les années 80, nous avions plus de 100 milles ouvriers travaillant dans la sous-traitance. Avec les déboires politiques qui ont commencé à partir de 1986, nous avons perdu une grande partie de cette industrie. Et nous somme réduit à près d’une vingtaine de milliers d’ouvriers actifs. Il y a un potentiel extraordinaire et assez rapide pour augmenter l’emploi dans la zone métropolitaine et d’autres zones franches que le gouvernement devra établir un peu partout là où il y a un port, pour attirer des investissements étrangers. Il y a un avantage énorme à augmenter le pouvoir d’achat de la population, en lui offrant l’emploi. L’ouvrier haïtien qui travail dans une usine de sous-traitance est différent de celui qui n’a jamais travaillé dans ce genre d’usine. Il sait ce que c’est que la production. Il sait ce que c’est que la qualité. Il a une formation acquise qui fait de lui un ouvrier très productif. Quand ces ouvriers laissent la sous-traitance pour aller travailler quelque part d’autre, ils sont plus productifs. Nous avons énormément d’avantage et de bénéfice à tirer de HOPE II.
RB : Dans les années 50 et 60, on a vu la Hamco exporter un volume énorme de viande de veau, à partir d’Haïti vers les Etats-Unis. Le volume dépassait de mille coudées la quantité de veau produite en Haïti. La viande de veau venait d’Argentine avec un label haïtien. Est-ce que dans l’industrie vestimentaire ce même phénomène ne peut pas se produire pour la Chine, le Bangladesh etc. ?
JB : Il faut quand même qu’il y ait une valeur ajoutée en Haïti pour qu’on puisse mettre le label haïtien. Si non le jeu est faussé. Avec HOPE II la valeur ajoutée est réduite à un minimum. L’avantage que cela nous donne c’est de recevoir des produits semi-finis y mettre la valeur ajoutée et les envoyer aux Etats-Unis sans tarif.
RB : Le talon d’Achille de l’industrie vestimentaire en Haïti est le problème des ports, le coût et la fiabilité des sources d’énergie électrique. Paul Collier suggère la création d’enclaves pour en réduire le coût.
Etes-vous d’accord avec cette approche ?
JB : Ce qu’il mentionne, existe déjà en Haïti. La création d’enclave, c’est le parc industriel. Il pense à quelque chose de plus grandiose que ce que nous avons maintenant en Haïti. Il y a énormément d’avantage à tirer de ceci. Si on a un regroupement d’usine, on peut installer une plante électrique pour les alimenter, au lieu d’avoir des centaines de génératrices à 300 kilowatts chacune. Une usine de 10 mégawatts réduirait le coût de l’électricité. Il y a un avantage économique à regrouper les usines dans un pays où il n’y a pas l’infrastructure nécessaire. Il serait plus facile et moins coûteux de créer cette infrastructure pour servir les parcs industriels, en eau et électricité. Même pour la sécurité, un regroupement d’usine dans un parc industriel est plus facilement protégé. Je suis entièrement d’accord avec cette approche.
RB : Il y a un problème politique pour les investisseurs qui voudraient avoir une exploitation plus efficace des usines en ayant 24 heures de production. La loi sur le travail ne le permet pas.
Compte tenu de la sécurité des travailleurs, quelle est la solution ?
JB : J’ai expérimenté ceci. J’avais des usines électroniques en Haïti pendant 14 ans. Je travaillais des fois 24 heures sur 24. La loi n’interdit pas de travailler 24 sur 24. La loi veut que l’on paye 50% de plus de salaire aux ouvriers qui travaillent l’après-midi et la nuit. Ceci augmente le coût de la main-d’œuvre de 50%, c’est énorme. Ce que l’on demande c’est de maintenir le même salaire pour toutes les heures de travail.
Il y a-t-il un moyen de protéger les ouvriers contre l’insécurité ? Je crois que la Minustah et la police doivent faire un travail beaucoup plus adéquat, pour la protection des vies et des biens. J’offrais le transport à mes employés avec mes deux autobus.
D’ailleurs une loi a été déposée au parlement pour corriger cette situation par le sénateur Boulos. Il y a des démarches pour que cette loi soit votée. Cette loi faciliterait la tache aux investisseurs. Avec le départ du sénateur Boulos la loi a été mise en veilleuse. Il y a des efforts qui se font pour reconsidérer cette loi. Avec HOPE II, il faut qu’on ait cette loi pour en tirer le maximum de profit.
RB : Le rapport de Paul Collier s’est-il préoccupé de création d’enclave pour faciliter uniquement l’exploitation du projet HOPE II ? Ou est-ce une approche pour le développement ?
JB: Le développement économique est un concept intégré qui touche à tous les secteurs, pour maintenir la balance entre les secteurs pour permettre leur développement harmonieux. Ce qu’il propose n’est pas un programme de développement économique. Ce qu’il propose ce sont des actions ponctuelles, visant certains secteurs de l’économie pour la création rapide d’emploi. Ceci peut donner du temps pour une planification à moyen et long terme.
Quelle est la crainte de la communauté internationale ? Nous sommes à un point où le pays peut véritablement exploser. Détruit littéralement par 4 cyclones, avec 50 ans de mauvaise gouvernance, nous avons détruit notre environnement. Les Haïtiens dépendent entièrement des transfères de la Diaspora, de l’aide étrangère pour survivre. Il nous faut à tout prix viser le court terme, pour créer le plus d’emploi possible pour apaiser la pression sociale et planifier sur le moyen terne. C’est tout le mérite du rapport de Paul Collier. Ce qu’il propose n’est rien de nouveau. Un gouvernement qui se respecte devrait être normalement en mesure de le faire lui-même. La mauvaise gouvernance du pays, le choix des priorités, nous ont conduit à un carrefour où l’international nous dit qu’il faut que nous nous y mêlions, parce que Haïti représente un danger pour la Caraïbe. Nous avons un voisin qui a fait des efforts économiques. S’il y a une explosion en Haïti, la République dominicaine aura un prix à payer.
RB : Compte tenu du fait que l’équilibre macroéconomique soit un souci majeur pour ce gouvernement. Pensez-vous qu’il s’engagera dans la subvention des intrants agricole ?
JB : J’irai plus loin. Ce n’est pas une question de chois. C’est une nécessité. Je crois que le pays peut argumenter sont point de vu, que cette objectif de subvention même temporaire rencontre l’objectif de la communauté internationale. Il n’y aura pas de contradiction entre les deux.
Le budget haïtien est financé à 60% par la communauté internationale. Les Américains sont en train de nourrir un million d’enfants. Qu’arrivera-t- il, si cette subvention s’arrête ? Je ne vois aucun conflit s’il y a une subvention qui a un aspect productif.
RB : Le FMI étant par principe opposé aux subventions, quelle sera sa réaction face à un programme de subvention entrepris par le gouvernement haïtien ?
JB : Il y a un pays de l’Afrique qui l’a fait, ce pays a réussit. Et d’autres pays de l’Afrique sont en train d’appliquer ce model. Je crois que dans l’environnement de crise globale que nous vivons, il y a beaucoup de flexibilité, qu’il y en avait, il y a peut être deux ou trois ans de cela. C’est une nouvelle réalité que nous vivons aujourd’hui. Des 1 milliards 600 millions à peu près 400 millions son utilisés pour l’importation de nourriture. Si nous pouvions produire ces 400 millions de dollars que nous recevons de la Diaspora, ce sera 400 millions de dollars de devises que nous utiliserons pour importer des équipements agricoles pour le développement du pays. C’est une nécessité absolue. Dans le rapport de Collier bien qu’il l’ait mentionné, il a un peu négligé l’importance du secteur agricole. C’est un secteur qui demanderait un développement un peu plus long dans son rapport.
RB : Je te remercie Jacques pour ta participation brillante à l’émission. J’espère pouvoir t’inviter pour une prochaine fois.
JB : Merci Bob, bonsoir aux auditeurs
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Re: L’économiste et banquier international Jacques Bernard,
Je ne comprends pas très bien le plaidoyer de l'economiste Bernard pour le maintien de la Constitution de 1987 qui exige des elections dispendieuses chaque deux ans pour le renouvellement d'un tiers du Senat au moment ou le peuple meurt de faim.
Un pays qui depend de l'aide exterieure pour boucler son budget de fonctionnement peut-il se payer ce luxe d'un parlement bicameral et d'un pouvoir executif a deux tetes et de tous ces ministères et ambassades ?.L'intellectuel haitien veut toujours preserver les structures qui protègent ses emplois ;est-ce pourquoi il rode toujours autour de la plaie sans oser la guerir.
Sans aucune expertise en economie et en developpement je pense que la loi hope est un leurre qui n'apportera pas le soulagement tant souhaité,surtout au moment de la contraction de l'economie aux Etats_unis.Je partage l'opinion de l'economiste concernant l'urgence pour le gouvernement de trouver des solutions aux problèmes cruciaux qui menacent la stabilité politique,mais il faut que ces solutions apportent un vrai bien-etre immediatement aux populations aux abois.Creer des emplois dans la soustraitance pour payer un salaire miserable aux ouvriers et ou les productions ne pourront pas combler la demande de la population et les benefices des entreprises ne seront pas reinvestis dans l'economie du pays est-il le meilleur moyen pou pallier à l'instabilité sociale?
La realite exige qu'on accorde la priorite à la production agricole , à l'education et à la diminution de la croissance demographique.Si on ne diminue pas cette croissance demographique et bien tous les efforts pour soulager la misère des pauvres seront vains.
Un pays qui depend de l'aide exterieure pour boucler son budget de fonctionnement peut-il se payer ce luxe d'un parlement bicameral et d'un pouvoir executif a deux tetes et de tous ces ministères et ambassades ?.L'intellectuel haitien veut toujours preserver les structures qui protègent ses emplois ;est-ce pourquoi il rode toujours autour de la plaie sans oser la guerir.
Sans aucune expertise en economie et en developpement je pense que la loi hope est un leurre qui n'apportera pas le soulagement tant souhaité,surtout au moment de la contraction de l'economie aux Etats_unis.Je partage l'opinion de l'economiste concernant l'urgence pour le gouvernement de trouver des solutions aux problèmes cruciaux qui menacent la stabilité politique,mais il faut que ces solutions apportent un vrai bien-etre immediatement aux populations aux abois.Creer des emplois dans la soustraitance pour payer un salaire miserable aux ouvriers et ou les productions ne pourront pas combler la demande de la population et les benefices des entreprises ne seront pas reinvestis dans l'economie du pays est-il le meilleur moyen pou pallier à l'instabilité sociale?
La realite exige qu'on accorde la priorite à la production agricole , à l'education et à la diminution de la croissance demographique.Si on ne diminue pas cette croissance demographique et bien tous les efforts pour soulager la misère des pauvres seront vains.
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