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Une analyse du journal Le devoir : Haiti; Un État sinistré

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Message  Marc H Dim 31 Jan 2010 - 0:53

Le gouvernement haïtien peut-il vraiment diriger les efforts de reconstruction du pays ?

Guillaume Bourgault-Côté 30 janvier 2010 Amérique


À défaut d'engagements clairs, la conférence de Montréal s'est conclue cette semaine sur un consensus répété à tout vent: le gouvernement haïtien est souverain et sera au coeur du processus de reconstruction. Fort bien. Mais ce gouvernement a-t-il les capacités nécessaires pour mener l'opération? La communauté internationale peut-elle lui confier ses milliards sans mot dire? Pas sûr, répondent des experts.

Ottawa — Le tout avait des allures de profession de foi. Tour à tour, Lawrence Cannon, Hillary Clinton et Bernard Kouchner ont juré publiquement lundi au premier ministre haïtien, Jean-Max Bellerive, que son gouvernement serait la pierre d'assise de la reconstruction du pays ravagé. Et pour ceux qui auraient raté la conférence de presse, la déclaration finale de la rencontre établit comme premier principe que les «Haïtiens sont maîtres de leur avenir».

Convoquée moins de deux semaines après la catastrophe du 12 janvier, la conférence de Montréal sur Haïti ne pouvait logiquement accoucher d'engagements précis et chiffrés. L'ampleur des dommages demeure inconnue et les opérations de premiers secours ne sont pas terminées. «La priorité demeure d'offrir à boire et à manger à la population», a d'ailleurs rappelé M. Bellerive.

Dans les circonstances, les participants rassemblés rue University ont semblé satisfaits des progrès enregistrés au cours de la journée. Celle-ci a surtout servi à planifier une rencontre plus importante des pays donateurs (en mars, à New York), mais elle a tout de même permis de dégager quelques principes généraux qui guideront le processus de reconstruction d'Haïti.

Craintes

Engagement de 10 ans des pays amis, nécessaire efficacité de l'aide et transparence des résultats, inclusion des Haïtiens dans toutes les étapes de la reconstruction, les intentions nobles sont légion. Mais il en est une qui soulève des questions: le gouvernement haïtien a-t-il les capacités nécessaires pour relever le titanesque défi de rebâtir le pays?

«L'État haïtien était déjà défaillant avant le tremblement de terre», juge Laënnec Hurbon, sociologue réputé, directeur de recherche au CNRS et professeur à l'Université Quisqueya de Port-au-Prince. Il rappelle que le «gouvernement actuel était déjà très contesté, qu'il gouvernait avec partisanerie». Impossible alors de se fier à lui pour gérer la remise sur pied d'un pays à genoux, dit-il depuis Paris.

On a bien senti lundi après-midi à Montréal les craintes des bâilleurs de fonds, qui veulent certes respecter la souveraineté du gouvernement, mais sans pour autant renier leur droit de regard sur les milliards qui sont promis. Souverain, Haïti, mais surveillé.

C'est pourquoi la déclaration de Montréal fait aussi état du droit des partenaires de la reconstruction (États, organisations nationales, internationales et régionales, institutions financières) de «cerner [avec l'État haïtien] les secteurs prioritaires et les responsabilités qui en découlent».

Selon la secrétaire d'État américaine, Hillary Clinton, «la bonne approche à suivre sera déterminée dans les prochaines semaines». Elle a cité comme exemple l'après-tsunami, «où le gouvernement de l'Indonésie a travaillé avec la Banque mondiale, les Nations unies et les pays donateurs».

Autorité provisoire

Directeur de la branche haïtienne du National Democratic Institute, l'ancien politicien et diplomate québécois Gérard Latulippe ne croit absolument pas que le gouvernement haïtien puisse agir comme maître d'oeuvre de la reconstruction. «Il n'a plus aucune capacité à secourir son peuple, à le nourrir, à lui obtenir du travail, à lui fournir des soins de santé, une éducation décente, à le protéger contre les gangs qui prennent le contrôle de la rue», écrivait-il cette semaine dans une lettre ouverte.

Depuis plus d'un an qu'il vit en Haïti et observe la solidité des instances démocratiques, M. Latulippe estime que, «s'il est vrai de dire que l'État était un peu plus stable depuis quelques mois, les capacités qu'il avait de livrer les services de l'État étaient très faibles. On dit souvent que ce sont les ONG qui font vivre Haïti: c'est un problème structurel», affirme-t-il depuis Washington, où nous l'avons joint cette semaine.

Selon M. Latulippe — qui a évité la mort de peu le 12 janvier — un État aussi faible ne peut pas gérer toute la reconstruction. D'autant moins quand la légitimité politique du gouvernement touche à sa fin, des élections étant prévues pour 2010. M. Latulippe milite donc pour qu'une autorité provisoire soit créée et mène «la reconstruction physique, la relance de l'économie locale, la mise en place d'une fonction publique efficace et la reconstruction du système politique».

Une tâche immense qui n'a de chance de réussite que si «le processus [de décision] est élargi pour inclure des représentants de tous les secteurs de la société haïtienne», dit Gérard Latulippe en donnant l'exemple québécois des états généraux, où le panel de discussions est assez large pour donner une légitimité aux consensus dégagés.

Une autorité provisoire, c'est l'un des exemples que retient Jocelyn Coulon, directeur du Réseau francophone de recherche sur les opérations de paix du CERIUM. «La catastrophe actuelle se superpose à une crise politique permanente, dit-il. Malgré de gros efforts de l'ONU et d'autres partenaires, le système politique est paralysé. Le président est élu légitimement, mais les premiers ministres n'arrêtent pas de se succéder. La législature ne fonctionne pas. Dans ces circonstances, on peut se poser la question de la pertinence d'avoir une autorité provisoire qui pourrait accompagner la reconstruction et rétablir les liens entre les factions politiques.»

Jocelyn Coulon cite l'exemple du Cambodge, qui a confié à l'ONU en 1992-1993 l'administration du pays, le temps d'opérer la transition politique post-guerre civile. Une situation semblable pourrait fonctionner en Haïti, dit-il, si la classe politique haïtienne accepte le principe d'être accompagnée.

Défaillant

«Je ne vois pas comment on pourrait compter sur l'État haïtien tel qu'il est actuellement, sans qu'il y ait un changement important qui se produise, pour répondre à cette situation grave», confie Laënnec Hurbon. Selon lui, la «reconstruction» du pays doit surtout être une «refondation». L'idée n'étant pas de faire table rase du passé («il y a une histoire à respecter»), mais de saisir «l'opportunité» du séisme pour repartir sur de nouvelles bases, notamment politiques.

M. Hurbon cite comme exemple l'abandon, au fil des ans, des villes et des campagnes par un État haïtien très centralisé. Gérard Latulippe parle du même phénomène résumé par l'expression «République de Port-au-Prince». «Le gouvernement fait tout son possible pour éviter d'accorder la moindre autonomie aux collectivités territoriales, dit Laënnec Hurbon. C'est le type de situation qu'il faut changer si on veut réussir à réellement relancer Haïti et que la population adhère. Sinon, dans cinq ans, nous pourrions bien être au même point qu'avant le 12 janvier.»

Le sociologue posait donc la question cette semaine dans le quotidien français Le Monde: «L'aide internationale peut-elle produire des effets positifs durables en s'appuyant sur un État défaillant? Si l'on admet que les pays donateurs ne doivent pas être des États qui viennent se substituer à l'État haïtien [...], il faudra, sur la base d'un sursaut de la société civile et des partis politiques, proposer de mettre en place une représentativité nationale» qui regrouperait tous les secteurs sociaux, en vue d'un «partenariat avec la communauté internationale».

Rôle central pour l'ONU

Et au coeur de cette structure mixte, encore floue, beaucoup voient l'ONU jouer un rôle central. «Nous sommes clairement dans une situation où l'État a besoin d'aide», analyse Carlo Dade, directeur de la Fondation canadienne pour les Amériques (Focal), qui a vécu cinq ans entre Washington et Port-au-Prince. «Le gouvernement est affaibli, c'est évident. Or l'expérience nous dit qu'il faut travailler avec lui si on veut des résultats. Il faut lui donner les ressources, humaines et financières, pour le renforcer et lui permettre de fonctionner normalement. En même temps, vous avez des centaines d'organisations qui sont sur place et des dizaines de pays qui veulent aider... Il faut nécessairement quelqu'un qui s'occupe de la coordination, et c'est clairement l'ONU qui pourrait le faire» sans donner l'impression de vouloir imposer une tutelle, dit-il.

Montréal n'était qu'une ébauche: New York servira à trouver la structure de gouvernance la plus efficace pour s'assurer que la reconstruction d'Haïti soit porteuse. Reste d'ici là à trouver cet équilibre entre la reconnaissance de la souveraineté du gouvernement haïtien et la nécessaire assurance que la «refondation» du pays permette réellement un pas en avant. Peu importe qui mène la danse.
Source : Journal Le Devoir Montréal
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