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LE RETOUR A L'INFAMIE D'AVANT 1946

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Message  piporiko Mer 1 Juin 2011 - 6:41

LE RETOUR A L'INFAMIE D'AVANT 1946
HAITI: LE RETOUR A L'INFAMIE D'AVANT 1946
Par Joël Léon
Le 14 mai
dernier a consacré la «marche-arrière» d'Haïti, point. Un triste retour à la
réalité qui a prévalu dans le pays avant le « mouvement de 1946 », quand des
hommes, à cause de leur épiderme, furent condamnés par l'élite bourgeoise à être
des « intouchables » dans leurs propres pays, où ils représentent plus de 95% de
la population. Ceci pour dire qu'il y a eu une contradiction profonde entre les
pratiques discriminatoires d'avant 1946 et l'idéal égalitaire de Jean Jacques
Dessalines introduit dans les mœurs haïtiennes le 1er Janvier 1804. Le mouvement
de 1946, quoique kidnappé et détourné par les « noiristes » et les « pragmatiques »,
s’était fait, il faut le signaler, à titre de simple rectification d’un mal
coloriste historique, avec comme principe fondateur «tout homme est un homme ».
Cette rectification renvoyait à la question historique et percutante du
fondateur d'Haïti: « Et les pauvres nègres dont leurs pères sont en Afrique,
n'auront ils donc rien ?». Ceci dit, il n’y a pas à redire de l'essence
idéologique progressiste du mouvement de 46 de transformer « la condition
humaine ».

L'accession de Michel Martelly à la présidence met fin à l'illusion nationale et
progressiste des années 90, la brève période où le peuple qui chassa la dynastie
duvaliérienne du pouvoir en 1986, jouait son rôle historique de faiseur
d'histoire en plaçant triomphalement au pouvoir Jean Bertrand Aristide, le
prêtre des pauvres. L'expérience n'a duré que sept mois. Le vautour du nord,
dans sa gloutonnerie coutumière avait en effet fait appel à ses sbires armés en
uniforme. Le résultat fut catastrophique sur le plan humain : plus de 5000
cadavres en trois ans de répression sauvage et des milliers de déplacés,
prisonniers, torturés...sans mentionner l'exode massif des cadres techniques et
politiques vers les cieux plus cléments des États-Unis d'Amérique et du Canada.
Le « retour à la démocratie » organisé en octobre 1994, sous le manteau des
Nations Unies, en réalité des Américains, avait été totalement piégé. Le
président (légitime) ramené dans les fourgons de l’armée américaine avait les
mains et pieds liés; visiblement l'international était aux commandes. Les
bourgeois haïtiens gagnèrent encore. Ceux-là qui complotèrent à hauteur de plus
de 30 millions de dollars pour la perpétuation et l'exécution du coup d'état de
1991, reçurent des primes pour leurs forfaits. L'USAID avait loué la résidence
du leader putschiste, Raoul Cedras, pour la somme de 120.000 dollars américains
par an. Aujourd'hui encore, M. Cedras perçoit cet argent après qu'il eut été
déclaré « combattant de la liberté » par l'ancien président américain Jimmy
Carter en 1997.
Les
bourgeois de souche européenne et arabe qui maintiennent les descendants
d'esclaves haïtiens dans une crasse insupportable tout en vivant dans un luxe
insolent, ont ouvertement repris du service en Haïti le 14 mai dernier, pour
prendre leur ultime revanche. Haïti est parmi les rares pays capitalistes, si ce
n'est pas le seul, où les composantes de la classe dominante sont viscéralement
contre tout processus de production massive de biens au profit de l'importation
à outrance et combat toute tentative de fiscalisation et de réglementation de
leurs activités « commerciales ». Les riches ne paient pas en Haïti, ils ne
créent pas de jobs non plus ; par contre ils complotent en permanence contre
toute expression de changement dans le pays. Ce comportement a conduit le peuple
haïtien à vivre dans la honte de deux invasions militaires, suivies d'occupation,
en une seule décennie.
Le dernier
coup d’Etat et coup de massue à la volonté populaire a eu lieu en février 2004,
l'année même marquant le bicentenaire de l'indépendance nationale. La mafia
internationale s’empressa de placer ses pions au pouvoir, des hommes tels que:
Gérard Latortue, René Préval et aujourd'hui Michel Martelly. D'où vient ce
dernier?
Certains
observateurs étrangers, dans leurs interventions, parlent d'un «phénomène
Martelly». Il n'y a pas un phénomène politique Martelly en Haïti. Les chiffres
ne plaident nullement pour un soi-disant homme extraordinaire. D'ailleurs, le
fait d’avoir été élu président avec une infime minorité de la population, soit
«15.23% de l'électorat», renvoie à la subconscience le réflexe d' un «petit chef
d'état». Les conditions dans lesquelles ces élections ont été organisées sont du
reste considérées comme une catastrophe. Sur le plan logistique, quoiqu’ayant eu
près de 40 millions de dollars à sa disposition, le conseil électoral provisoire
(CEP) a battu tous les records de brigandage aux urnes dans les annales
électorales en Haïti, y compris durant l'époque des baïonnettes au 19e siècle.
Sur le plan politique, balayant la principale force politique du pays, « Fanmi
Lavalas», par des moyens illégaux et honteux, ces élections restent et demeurent
une méprisable mascarade. Par-dessus le marché, l'arrogance de l'international à
dicter sa loi expose à nu le scandale d'un plan anti-Haïti.

L'accession de Michel Martelly à la présidence est plutôt le résultat du cynisme
singulier de l'international dans ses acrobaties agressives à contrôler l'espace
haïtien. Les néo-colons des États-Unis, de la France, du Canada et du Brésil ont
tout fait pour préparer la voie à l'émergence de la droite, peu importe l'homme,
y compris l'insolent Michel Martelly, crédité de seulement «15.23% de
l'électorat». Par contre, il y a des raisons normatives permettant d'expliquer
cette marche-arrière politique d'Haïti.
En premier
lieu, c’est l'incohérence flagrante d'une «classe politique» vieillie et
fatiguée, d'ailleurs sans projets et enfermée dans une logique stérile de
conquête du « pouvoir pour le pouvoir » engendre sa faiblesse et la fait sombrer
trop souvent dans la pratique des volte-face (flip-flop). Depuis 2004,
ceux qui font de la politique en Haïti abandonné leur raison d'être pour
s'aligner totalement sur l'international. Ce qui a étrangement conduit à une
uniformité répugnante chez les hommes politiques autour d'un soi-disant «idéal
républicain», en chute libre partout dans le monde. Historiquement, il a
toujours existé dans le pays un camp national où des gens vivaient encore mûs
par l'idéal dessalinien. De nos jours ils sont ridiculisés partout, à l'étranger
comme en Haïti. Cette référence indigène qui a toujours préservé l'âme nationale
des assauts du «blanc» est en situation difficile et frise même la disparition.

Il y a
aussi l'infantilisme idéologique et politique du secteur se réclamant du «camp
progressiste», qui depuis 1986 s'autodétruit en commettant des bévues indignes
du militantisme populaire. Mentionnons d'abord le fonctionnement
anti-démocratique des cadres politiques de ce secteur, consistant à
individualiser les décisions politiques ; comportement dû à un manque de
pratiques démocratiques au sein des organisations et l'absence de toute
expérience à partir des tâches pratiques. Le militant progressiste perçoit le
camarade dirigeant comme un adversaire, parce qu'il n'a jamais reçu au sein
d'une organisation l'éducation nécessaire relative à l'importance d'une culture
de discipline et de respect vis-à-vis des dirigeants organisationnels. Le cadre
politique, jamais intégré dans aucune structure digne de ce nom, se positionne
en fonction de ses intérêts et rêves personnels dépourvus d'essence populaire et
patriotique, l’éloignant ainsi davantage des vrais militants. Cet état de choses
a conduit partiellement à l'échec des expériences de 1991 et de 2004. Le pouvoir
n'était pas conçu comme une expérience politique en mutation, pour la première
fois entre les mains des masses. Au contraire, il était perçu comme une pratique
gouvernementale traditionnelle où les luttes d'influence ont noyé l'aspect
fondamental du processus en cours qu'étaient la consolidation du pouvoir et les
revendications fondamentales des masses. L'ivresse du pouvoir conduisit à des
luttes politiques intestines qui dépassèrent largement, au moins dans sa
férocité verbale, l'hostilité à l'endroit des adversaires politiques de droite
qui allaient assassiner, faire disparaître et emprisonner sous la torture des
milliers de militants en 1991 et en 2004.
Le
gouvernement qui vient de quitter le pouvoir le 14 mai dernier est responsable
de la vassalisation de toutes les institutions nationales et de la perpétuation
de l'occupation. Sans la présence des forces multinationales, l'ancien président
René Preval n'aurait pu terminer son mandat. Aussi, il a accepté sans
considération aucune toutes les dictées de l'international en échange de pouvoir
conserver le pouvoir après la fin de son mandat, en devenant premier ministre à
la manière de Vladimir Putine en Russie et, en plaçant Jude Célestin, son
beau-fils, au palais comme président. L’ironie, c'est que l'ancien président
n'était pas suffisamment de droite. Aussi, l'international lui a préféré Michel
Martelly au détriment du candidat du président sortant.

L'accession de Martelly au pouvoir est un paradoxe. Arrivé en 3e position après
les premiers résultats préliminaires du CEP, le candidat de Repons peyizan
bénéficiait de l’intervention de l'ambassadeur américain et des instances
internationales qui ont contraint publiquement l'institution électorale à revoir
sa copie pour parachuter Martelly au second tour. De mémoire d'analyste
politique, je n'ai jamais vu un comportement aussi vulgaire et brutal. Le
président actuel a toujours été le valet de la bourgeoisie haïtienne, d'ailleurs
il s'en est toujours enorgueilli. Donc, sa prise de pouvoir marque le retour
brutal de la réaction aux affaires, cette fois-ci sans intermédiaire. Son
premier acte majeur officiel a été la désignation d'un premier ministre. Comme
on s'y attendait, il a fait choix d'un commerçant pour diriger le gouvernement,
en la personne de Daniel Gérard Rouzier. Comme Martelly, M. Rouzier fut un grand
artisan des deux derniers coup d'état dont ont été victime Jean B. Aristide et
le peuple haïtien. Voilà qu’aujourd'hui on le présente comme un légaliste et un
démocrate convaincu, quelle ironie!
M. Rouzier
se veut un modernisateur qui a réussi dans le business, c'est à dire un grand
bourgeois. Cependant, E-power, une petite compagnie d'électricité dotée de 30
mégawatt, créée par le premier ministre désigné au coût de 57 millions de
dollars respecte la logique traditionnelle en mettant sa production électrique
au service de la « république de Port-au-Prince ». Ne pouvait il pas créer une
plus grande compagnie, lorsqu'on considère qu'un bourgeois comme Gilbert Bigio
est à la tête d'un empire de plus d'un milliard de dollars à lui seul ? Des amis
étrangers éprouvent toujours beaucoup de difficultés à comprendre la logique
minimaliste qui anime les élites haïtiennes. Comment est-ce qu’un pays qui s'est
imposé à la face du monde comme « mère de toute liberté » a pu produire tant de
minimalistes ? Donc, la décentralisation d'Haïti n'est pas pour demain.
Transférer le pouvoir politique à la bourgeoisie haïtienne est une aberration
dans un pays où la classe dominante a échoué lamentablement. Haïti est un pays
d'importation qui dépense plus de 2.727 milliards de dollars américains
annuellement pour l'achat de toutes sortes de biens à l'étranger pour la
consommation locale. Parallèlement, le pays exporte à l'extérieur pour une
bagatelle de 530.2 millions de dollars l'an.
D'après ce
qu'on écrit, « Haïti est une économie de libre marché», donc capitaliste, et il
est aussi normal qu'une poignée d'individus s'approprie légalement des richesses
du pays. Pour créer ces richesses, les bourgeois ont besoin d'une force de
travail qualitative et quantitative. Cela permet à des milliers d'hommes et de
femmes de trouver un emploi, d’ailleurs précaire, afin de subvenir maigrement
aux besoins de leurs familles : c’est là le seul «avantage» pour les masses. Les
richesses d'Haïti sont confisquées par une poignée ne dépassant pas 20 familles,
et le taux de chômage touche plus de la moitié de la population. Donc, la classe
dominante haïtienne ignore tout de sa mission historique de créer des emplois.
Pour la récompenser l'international et l'oligarchie ont décidé de remettre le
pouvoir à ses représentants, en la personne de Gérard Rouzier, pour perpétuer
davantage le pillage du pays et la paupérisation des masses.
Dans
l’esprit de l'international et de la droite, la stratégie la plus compatible
avec leur visées consiste à remettre le pays aux commerçants, surtout avec
l'échec constaté de la classe moyenne au pouvoir depuis 1946. Cette nouvelle
réalité va propulser les éléments de la classe intermédiaire, exclusivement
noire, au bord de l'explosion. Le secteur public qui absorbe une grande majorité
d'entre eux n'offre plus de sécurité. Sous prétexte de corruption qui a toujours
marqué l'administration publique haïtienne et les pressions du Fonds monétaire
international (FMI), le gouvernement va procéder à des révocations massives dans
ce secteur. Donc, l'observateur lucide s'attend à un effet de boomerang. Une
classe moyenne non-satisfaite, alliée à une masse de pauvres en guenille
constitue une équation explosive qui, historiquement a toujours conduit à des
changements en profondeur au sein de la société. On s'attend à une
radicalisation des revendications populaires contre la gestion des riches. Pour
freiner le mouvement, le gouvernement va procéder comme d'habitude à la
répression sauvage des mouvements sociaux, déjà l'un des proches de Martelly
s'organise dans ce sens.
D' après
des informations dignes de foi qui circulent à Port-au-Prince, la capitale
d'Haïti, le bras-droit de Martelly, Roro Nelson, croit qu'il est impossible de
diriger Haïti sans avoir recours à une Milice. Pour cela, il est déjà en contact
avec les dirigeants de différentes « bases »( groupes criminels) opérant à la
capitale en vue de les coopter et de les domestiquer dans le cadre d'un projet
de sécurité nationale. Le président lui-même n'a jamais caché son animosité à
l'endroit des groupes sociaux et militants de gauche dans le pays. Ses
ramifications avec l’extrême-droite pendant la période terrible du premier coup
d'état de 1991 sont documentées. Participant à toutes les manifestations de
soutien du groupe paramilitaire FRAPPH, il a été d'un grand support aux
putschistes militaires en animant les rues avec de la musique et des slogans
incendiaires contre le peuple qu'on massacrait. D'après le prêtre progressiste
assassiné en 1994, Jean-Marie Vincent, Martelly patrouillait les rues avec les
militaires au cours de la nuit à la recherche de militants Lavalas cachés. Il
représente la droite brutale dans toute sa laideur. De toute évidence, les
riches sont au pouvoir pour de bon!

Joël Léon

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