Jean Claude Duvalier retournera-t-il en Haiti ?

Pourquoi Jean-Claude Duvalier est-il contraint au silence dans son exil parisien

Le nom de l'ancien président Jean-Claude Duvalier défraie la chronique depuis que la Suisse a annoncé l'éventualité d'une remise partielle de ses fonds bloqués dans les banques helvétiques après sa chute du pouvoir en 1986. S'il se confirme, le décaissement des comptes bloqués de M. Duvalier avoisinerait les 7 millions de dollars américains.

Il s'agirait, pour une grande part, des fonds placés en Suisse du temps de sa présidence à vie, entre 1971 et 1986.
Alors que, de la Suisse à Haïti en passant par les États-Unis, les organisations des droits humains et des victimes présumées du régime de M. Duvalier se mobilisent pour s'opposer à la décision des autorités helvétiques, l'ancien chef de l'État ne dit mot.

Joint par téléphone maintes fois dans son exil parisien, l'ancien président Jean-Claude Duvalier se refuse à toute interview. De même que la plupart de ses avocats qui préfèrent travailler dans l'ombre.
Jamais Jean-Claude Duvalier ne dira non à une demande d'interview au sujet de la procédure en cours d'instruction au niveau des institutions bancaires helvétiques. Néanmoins, il lui suffit de quelques mots pour accuser une fin de non recevoir.
M. Duvalier est, en effet, toujours en observation. L'ancien président à vie suit toujours l'évolution des réalités haïtiennes avant de s'exprimer. Pourtant, en Haïti, les jours se suivent et ne se ressemblent pas. Mais pour l'ancien raïs, le temps de parler n'est jamais propice. Tout au moins, à la date d'aujourd'hui.

Le débit des propos de l'ex-président Duvalier est d'une rapidité telle qu'on risque à la fin de tout oublier. Et attention ! Ce n'est pas la peine de chercher à le retenir très longtemps au téléphone. Pour cause, l'ancien chef de l'État se vante toujours d'un agenda très chargé. « J'ai passé toute la nuit au téléphone avec Haïti », nous avait-il confié au cours d'un entretien téléphonique.
Lorsqu'on insiste pour savoir ce qu'il pensait des mobilisations en cours en Haïti contre l'éventualité d'un déblocage de ses avoirs en Suisse, la réponse de M. Duvalier est cinglante : « Ils auraient mieux faire de s'occuper de la misère du peuple haïtien ». Et d'ajouter « Les fonds que la Suisse s'apprête à débloquer, ce n'est pas mon argent ». Il s'agit, a-t-il précisé, « des fonds de Mme Simone Ovide Duvalier qui seront destinés à la Fondation François Duvalier », fondation dont le siège est en Haïti.

Depuis qu'il a laissé le grand hôtel parisien de l'avenue des Champs Élysées qui lui tenait lieu de résidence, Jean-Claude Duvalier n'apparaît presque plus en public. L'ancien président haïtien ne se déplace que très rarement dans la capitale française.
Ces sorties occasionnelles sont généralement motivées par des invitations. Soit à l'occasion d'une réception ou pour une cérémonie spéciale…Stratégie ou fauxsemblant, M. Duvalier ne se déplace que rarement, sinon presque pas dans son véhicule personnel.
Pour ces déplacements, souvent ces hôtes viennent le chercher et l'accompagnent la plupart du temps dans sa résidence parisienne. Démocratie française oblige, M. Duvalier donne à ces interlocuteurs l'impression d'un homme ouvert et tolérant. Ceux qui le côtoient parlent, en effet, de quelqu'un qui accepte le débat contradictoire.
Il faut également faire remarquer que Jean-Claude Duvalier n'a pas que des ennemis en Haïti.
D'importantes personnalités haïtiennes, lorsqu'elles sont de passage à Paris, demandent, en effet, à rencontrer l'ancien chef de l'État. Quoi qu'il arrive, les services français des renseignements généraux surveillent très peu les activités de l'ancien dictateur. « On n'a pas eu, jusqu'ici, d'indices qui impliqueraient M. Duvalier dans des tentatives de déstabilisation d'Haïti », indique-t-on auprès de ces services. Toutefois, Baby Doc semble être contraint à un devoir de réserve notamment sur les questions de politique intérieure d'Haïti.
Malgré l'âge (58 ans) qui pourrait encore lui inspirer beaucoup d'ambitions politiques, l'exprésident Jean-Claude Duvalier est atteint par la maladie. « Son état physique est préoccupant », nous a confié un ressortissant haïtien qui l'a souvent rencontré.
L'ancien président Jean-Claude Duvalier, dont l'arrivée en France remonte à 1986, est devenu, malgré lui, l'exemple type du concept « Immigration choisie » à la française. En fait, selon un agent des services français des renseignements généraux, M. Duvalier n'a en France aucun statut.

Quoiqu'il partage sa vie depuis plusieurs années avec une Française, l'ancien président n'est reconnu ni comme réfugié politique ni non plus comme résident. Il n'a pas non plus, précise-t-on, de statut subsidiaire. Mais soyons rassurés, realpolitik est ainsi faite, l'ancien chef de l'État ne risque pas d'être expulsé vers Haïti, son pays d'origine.
D'ailleurs, M. Duvalier n'est pas compté au nombre des Haïtiens vivant en situation irrégulière sur le sol français.
Après tout, n'est pas qui veut ancien président de la République !
Source: Le Matin

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