Haiti en Marche: Les Haitiens en attente d'un miracle ?

Les Haïtiens espérent-ils un miracle pour nous sortir du néant?

</B>PORT-AU-PRINCE, 8 Décembre – Plusieurs dizaines de milliers de compatriotes ont défilé ce samedi 8 décembre en hommage à Notre Dame du Perpétuel Secours, la sainte patronne de Port-au-Prince, la capitale d’Haïti, qui est créditée d’un miracle qui avait mis fin à une épidémie de petite vérole (en créole maladie « vérét ») frappant cruellement le pays dans les années 1880.

L’appel avait été adressé à la Vierge lors d’un pélerinage le 8 décembre 1882.

Le message fut repris le 8 décembre 1942 sous la présidence de Elie Lescot (une sorte d’ultra-conservateur qui alla jusqu’à embrasser une campagne de persécution lancée contre le vodou haïtien par l’épiscopat catholique lors aux mains du clergé breton).

Rappelant le « miracle » de 1882, Lescot dédia officiellement Haïti à Notre Dame du Perpétuel Secours lors d’une cérémonie semblable le 8 décembre 1942.

C’est en souvenir de ces deux dates (1882 et 1942) que le pélerinage de ce samedi était organisé.

Un vrai miracle...

Cependant il n’est un secret pour personne qu’il y a un message plus spécial derriére cette commémoration.

Haïti aujourd’hui encore attend un vrai miracle.

Ce n’est pas la petite vérole le probléme. Ni même le VIH-Sida.

Le probléme qui nous tracasse le plus profondément, qui nous taraude, c’est une absence totale de repére. Ce n’est même plus la confusion, c’est le vide total. On est un bateau sans gouvernail lancé à travers des obstacles les plus périlleux.

En surface, ces obstacles s’appellent le chômage (touchant prés de 80%), la misére en constante augmentation, l’insécurité qui plus ça finit plus ça menace à chaque fois de reprendre...

Ces obstacles aujourd’hui ce n’est pas la terreur gouvernementale comme ce fut trop souvent le cas...

C’est l’injustice sociale criante, certes, le partage inégal pas seulement des richesses mais de toutes les opportunités et quelle que soit sa valeur personnelle.

Et pourtant le probléme le plus tracassant aujourd’hui ce n’est pas la division sociale ni même politique, qui a dominé nos esprits toutes ces derniéres années.

La question préjudicielle...

Non, notre mal le plus secret aujourd’hui c’est le vide. Cette absence de réponse de quelque côté que nous nous tournions...

Tout effort semble devoir être vain si nous ne remontions en amont, à la racine de la question. Comme on dit en droit, question préjudicielle, c’est-à-dire qui doit être tranchée avant toute chose. Oui, les Haïtiens ont rarement été aussi unis comme on l’a vu ce samedi, toutes catégories sociales confondues. Unis dans la priére. Mais aussi, dans un même sentiment de néant.

Et c’est ce qui a mis plus de 100 mille compatriotes dans les rues de Port-au-Prince ce samedi 8 décembre 2007.

Leurs vœux ne sont pas moins pressants que ceux de leurs ancêtres de 1882 en proie à l’épidémie de petite vérole.

Ni leurs implorations plus légéres, moins lourdes de signification. Ils sont pas naïfs au point de croire que leurs conditions pourraient changer du jour au lendemain, que le pain et le vin vont couler à flot et la hausse des prix à la consommation disparaître comme par un coup de baguette magique...

Un repére enfin...

Non la vraie priére c’est pour une réponse. D’ordre spirituel mais aussi et d’abord bien réel. Une direction. Un repére enfin. L’Eglise a un mot: la bonne nouvelle. Bòn nouvél la.

Mais ce n’est pas qu’elle soit bonne qui importe tellement aujourd’hui, mais qu’elle soit!

Que la parole soit! Mais une parole signifiante. Autrement dit, qui nous délivre du néant. Car le néant, comme nous le vivons (et si cruellement, et à la fois dans tous les sens aujourd’hui) - ne peut accoucher que du néant.

Bref c’est ce miracle-là qui est souhaité aujourd’hui, du moins à notre sens. Et pas n’importe lequel, vous dira tout observateur averti de la réalité haïtienne.

Un fil d’Ariane...

Toutefois ce vide, il n’est pas né tout seul. Et cela aussi doit être pris en compte.

Car c’est le même vide qui nous empêche d’envisager une porte de sortie, un fil d’Ariane qui nous conduise hors de ce labyrinthe qui mentalement semble nous emprisonner davantage encore que l’esclavage dans la colonie de Saint Domingue auquel nous avons échappé à tout jamais grâce au courage et surtout à l’intelligence de nos ancêtres, c’est le même qui dirige aussi la main du kidnappeur qui n’hésite pas à assassiner son otage âgé seulement de 7 ans.

Un néant préfabriqué...

Comment comprendre une telle inhumanité si ce n’est par l’absence de toute boussole, de toute identification qui vaille, de toute signification de soi-même. Tu es néant, tu frappes par le néant, tu restes néant et tu retourneras en néant.

Mais surtout il n’est pas vrai que ce soit la conséquence directe de la misére, ni du chômage, ni des prix à la hausse, ni de l’exploitation, ni même de l’injustice sociale.

Non.

Il existe une autre réaction bien différente à tous ces problémes-là. Une réaction bien réelle à tous ces problémes réels.

Et qui sait si ce néant ne doit pas servir à nous détourner au contraire de ces autres réactions plus naturelles. Plus directes.

Un sorte de néant préfabriqué. Donc pas aussi occasionnel ou conjoncturel qu’on peut croire.

En tout cas, du moins en Haïti, ça ne saurait être un simple phénoméne de civilisation (pourquoi devrions-nous récolter de la civilisation que ce qu’elle a de pire?) du genre: grâce aux nouvelles technologies de la communication (TIC), le monde est un village, donc tous les hommes de la terre partagent la même pensée, nous sommes tous des citoyens du monde, égal-égaux, pourquoi penser par soi-même etc. Big brother s’en occupe pour nous et pour nous tous généralement quelconques et aux quatre coins du monde. Amen.

The real thing...

N’est-ce pas de cette pensée-là (si on doit l’appeler pensée) que nos nouvelles générations ont été abreuvées mine de rien.

Or contrairement à leurs homologues des pays du Nord, ils sont loin de vivre cette réalité, the real thing .

De là à dire que ce vide a été sciemment implanté (et qu’il continue de l’être), il n’y a qu’un pas que vous franchirez si vous l’estimez approprié...

C’est là un aspect de la question. Il en reste bien d’autres. Il reste nos élites et elles en tout cas ne sont pas nées de la derniére pluie...

Donc soumission ou démission?

Mais voilà qui nous emméne déjà bien trop loin. Et seul un miracle pourrait en effet nous tirer de ce dilemme.

Mais comme répond l’oracle à Perceval parti à la recherche du Saint Graal (autre icône célébre): le Graal, il est en toi! Bref, la sagesse comme la liberté ne se donne pas, elle se gagne.

Haïti en Marche, 8 Décembre 2007

Se kote mize ap taye banda ou jwen legliz ak tout bondieuserie.Se mirak viej la pa fe yon ti kout pye,manifestel..Kom pa aza se moun ki pa kon ni li ni ekri laviej al les saints toujou paret.