Un bon texte d'un GNB
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Un bon texte d'un GNB
SI M PA RELE
" Ils ont voté..."
La chronique de l’écrivain et critique littéraire Lyonel Trouillot
dimanche 9 août 2009,
Radio Kiskeya
Il y a des gens aujourd’hui au pouvoir qui fredonnaient autrefois « ils ont voté… et puis après ? » de Léo Ferré. Il était question dans la chanson de « fumer le scrutin de liste jusqu’ au mégot du dégoût » de l’artiste. Les gens changent avec le temps…
Le vote de la Chambre des députés est honteux. Il est honteux parce qu’en si grande majorité on ne peut pas changer d’opinion en si peu de temps. Cela s’est rarement vu. Un vote serré aurait été plus convaincant. Il est honteux parce qu’il est précédé d’allées venues, « rale mennen vini » « pale nan zòrèy » avec l’ Exécutif et des secteurs qui s’opposaient ouvertement à la loi initiale et menaient contre elle une campagne acharnée et coûteuse . Il est honteux parce qu’il est aussi précédé de rumeurs de dons de voitures, de prêts, d’amitiés soudaines. On veut croire que ces rumeurs sont fausses, les députés ne nous ont pas aidé.
Les conséquences de ce vote seront nombreuses. Entre autres, la perte de confiance dans cette législature. Ceux qui ont tenu jusqu’au bout, qu’on partage ou non leur opinion, ont fait preuve de conviction. A mes yeux ceux-là seuls sont respectables en cette affaire, avec eux, dans l’autre camp, ceux qui avaient voté contre la loi dès le départ. Les autres, ils auront du mal à convaincre qu’ils ont trouvé soudain de nouvelles convictions. Et ce n’est pas le charabia où passent Jésus et Barrabas et des phrases apprises par cœur d’un manuel d’initiation à l’économie, qui les aidera à persuader le pays qu’ils ont voté dans le but de protéger les travailleurs et de faire avancer la société.
La perte de confiance dans l’institutionnel entraîne le choix d’autres moyens. C’est une donnée avec laquelle on plaisante. Les tenants du pouvoir ne se rendent-ils pas compte de la montée du mécontentement, de la perte de confiance en eux et en l’institutionnel ? Ou s’en moquent-ils tout simplement ? Mais chaque fois qu’un soldat de la mission de plus en plus répressive des Nations Unies tapera sur un citoyen haïtien, ouvrier ou étudiant, qui, frustré, gagnera les rues, ce citoyen pourra dire : merci, messieurs les députés. Chaque fois qu’un citoyen haïtien dira : pourquoi, pour qui irais-je voter ? Ce ne sont pas nos intérêts qu’ils défendent mais les leurs, le pays pourra dire : merci, messieurs les députés, pour votre contribution au renforcement de la confiance en nos institutions.
Le pire, dans tout cela, c’est que ceux-là mêmes, qui ont su leur faire changer de position, soit par persuasion, en leur faisant un cours primaire sur l’économie, soit par d’autres moyens qui relèvent de la petite histoire et de la survie individuelle, ne doivent pas avoir de l’estime pour ces élus toupies-yoyos. On sait de quelles boutades certains de nos responsables politiques sont capables, on les imagine en train de rire et d’en inventer de bonnes… On sait aussi que les grands acheteurs n’ont pas souvent de respect pour leurs affiliés, comme les policiers n’ont pas forcément de respect pour les indicateurs.
Malgré tout, il faut essayer de garder confiance dans les institutions démocratiques. Il viendra le temps des élections. Que ce vote honteux nous serve de leçon. De l’extrême droite à l’extrême gauche, ce qu’on demande à un élu, c’est d’avoir des convictions et de ne pas se faire payer par le contribuable pour dire oui et non en même temps. Il y a dans cette chambre quelques députés qui ont compris cela. Pou yo nou di onè respè.
LYONEL TROUILLOT
" Ils ont voté..."
La chronique de l’écrivain et critique littéraire Lyonel Trouillot
dimanche 9 août 2009,
Radio Kiskeya
Il y a des gens aujourd’hui au pouvoir qui fredonnaient autrefois « ils ont voté… et puis après ? » de Léo Ferré. Il était question dans la chanson de « fumer le scrutin de liste jusqu’ au mégot du dégoût » de l’artiste. Les gens changent avec le temps…
Le vote de la Chambre des députés est honteux. Il est honteux parce qu’en si grande majorité on ne peut pas changer d’opinion en si peu de temps. Cela s’est rarement vu. Un vote serré aurait été plus convaincant. Il est honteux parce qu’il est précédé d’allées venues, « rale mennen vini » « pale nan zòrèy » avec l’ Exécutif et des secteurs qui s’opposaient ouvertement à la loi initiale et menaient contre elle une campagne acharnée et coûteuse . Il est honteux parce qu’il est aussi précédé de rumeurs de dons de voitures, de prêts, d’amitiés soudaines. On veut croire que ces rumeurs sont fausses, les députés ne nous ont pas aidé.
Les conséquences de ce vote seront nombreuses. Entre autres, la perte de confiance dans cette législature. Ceux qui ont tenu jusqu’au bout, qu’on partage ou non leur opinion, ont fait preuve de conviction. A mes yeux ceux-là seuls sont respectables en cette affaire, avec eux, dans l’autre camp, ceux qui avaient voté contre la loi dès le départ. Les autres, ils auront du mal à convaincre qu’ils ont trouvé soudain de nouvelles convictions. Et ce n’est pas le charabia où passent Jésus et Barrabas et des phrases apprises par cœur d’un manuel d’initiation à l’économie, qui les aidera à persuader le pays qu’ils ont voté dans le but de protéger les travailleurs et de faire avancer la société.
La perte de confiance dans l’institutionnel entraîne le choix d’autres moyens. C’est une donnée avec laquelle on plaisante. Les tenants du pouvoir ne se rendent-ils pas compte de la montée du mécontentement, de la perte de confiance en eux et en l’institutionnel ? Ou s’en moquent-ils tout simplement ? Mais chaque fois qu’un soldat de la mission de plus en plus répressive des Nations Unies tapera sur un citoyen haïtien, ouvrier ou étudiant, qui, frustré, gagnera les rues, ce citoyen pourra dire : merci, messieurs les députés. Chaque fois qu’un citoyen haïtien dira : pourquoi, pour qui irais-je voter ? Ce ne sont pas nos intérêts qu’ils défendent mais les leurs, le pays pourra dire : merci, messieurs les députés, pour votre contribution au renforcement de la confiance en nos institutions.
Le pire, dans tout cela, c’est que ceux-là mêmes, qui ont su leur faire changer de position, soit par persuasion, en leur faisant un cours primaire sur l’économie, soit par d’autres moyens qui relèvent de la petite histoire et de la survie individuelle, ne doivent pas avoir de l’estime pour ces élus toupies-yoyos. On sait de quelles boutades certains de nos responsables politiques sont capables, on les imagine en train de rire et d’en inventer de bonnes… On sait aussi que les grands acheteurs n’ont pas souvent de respect pour leurs affiliés, comme les policiers n’ont pas forcément de respect pour les indicateurs.
Malgré tout, il faut essayer de garder confiance dans les institutions démocratiques. Il viendra le temps des élections. Que ce vote honteux nous serve de leçon. De l’extrême droite à l’extrême gauche, ce qu’on demande à un élu, c’est d’avoir des convictions et de ne pas se faire payer par le contribuable pour dire oui et non en même temps. Il y a dans cette chambre quelques députés qui ont compris cela. Pou yo nou di onè respè.
LYONEL TROUILLOT
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