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Claude Levi-Strauss et les musulmans , voici des extraits du livre de

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Claude Levi-Strauss et les musulmans ,  voici des extraits du livre de Empty Claude Levi-Strauss et les musulmans , voici des extraits du livre de

Message  piporiko Mar 17 Nov 2009 - 11:38

Claude Levi-Strauss et les musulmans


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voici des extraits du livre de Claude Levi-Strauss , “Tristes tropiques” à propos de l’islam et des musulmans :


« les brefs contacts que j’ai eus avec le monde arabe m’ont inspiré une indéracinable antipathie. » .


« Plus précisément encore, il m’a fallu rencontrer
l’Islam pour mesurer le péril qui menace aujourd’hui la pensée
française. Je pardonne mal au premier de me présenter notre image, de
m’obliger à constater combien la France est en train de devenir
musulmane […] »




« ll m’a fallu rencontrer l’Islam pour mesurer le
péril qui menace aujourd’hui la pensée française. Je pardonne mal au
premier de me présenter notre image, de m’obliger à constater combien
la France est en train de devenir musulmane. Chez les Musulmans comme
chez nous, j’observe la même attitude livresque, le même esprit
utopique, et cette conviction obstinée qu’il suffit de trancher les
problèmes sur le papier pour en être débarrassé aussitôt. A l’abri d’un
rationalisme juridique et formaliste, nous nous construisons
pareillement une image du monde et de la société où toutes les
difficultés sont justiciables d’une logique artificieuse, et nous ne
nous rendons pas compte que l’univers ne se compose plus des objets
dont nous parlons. »



Un extrait plus long :


C’était surtout l’Islam dont la présence me tourmentait
(…). Déjà l’Islam me déconcertait par une attitude envers l’histoire
contradictoire à la nôtre et contradictoire en elle-même : le souci de
fonder une tradition s’accompagnait d’un appétit destructeur de toutes
les traditions antérieures. (…)



Dans les Hindous, je contemplais notre exotique image,
renvoyée par ces frères indo-européens évolués sous un autre climat, au
contact de civilisations différentes, mais dont les tentations intimes
sont tellement identiques aux nôtres qu’à certaines périodes, comme
l’époque 19000, elles remontent chez nous aussi en surface.



Rien de semblable à Agra, où règnent d’autres ombres :
celles de la Perse médiévale, de l’Arabie savante, sous une forme que
beaucoup jugent conventionnelle. Pourtant, je défie tout visiteur ayant
encore gardé un peu de fraîcheur d’âme de ne pas se sentir bouleversé
en franchissant, en même temps que l’enceinte du Taj, les distances et
les âges, accédant de plain-pied à l’univers des Mille et une Nuits (…).



Pourquoi l’art musulman s’effondre-t-il si complètement
dès qu’il cesse d’être à son apogée ? Il passe sans transition du
palais au bazar. N’est-ce pas une conséquence de la répudiation des
images ? L’artiste, privé de tout contact avec le réel, perpétue une
convention tellement exsangue qu’elle ne peut être rajeunie ni
fécondée. Elle est soutenue par l’or, ou elle s’écroule. (…)



Si l’on excepte les forts, les musulmans n’ont
construit dans l’Inde que des temples et des tombes. Mais les forts
étaient des palais habités, tandis que les tombes et les temples sont
des palais inoccupés. On éprouve, ici encore, la difficulté pour
l’Islam de penser la solitude. Pour lui, la vie est d’abord communauté,
et le mort s’installe toujours dans le cadre d’une communauté,
dépourvue de participants. (…)



N’est-ce pas l’image de la civilisation musulmane qui
associe les raffinements les plus rares - palais de pierres précieuses,
fontaines d’eau de rose, mets recouverts de feuilles d’or, tabac à
fumer mêlé de perles pilées - servant de couverture à la rusticité des
moeurs et à la bigoterie qui imprègne la pensée morale et religieuse ?



Sur le plan esthétique, le puritanisme islamique,
renonçant à abolir la sensualité, s’est contenté de la réduire à ses
formes mineures : parfums, dentelles, broderies et jardins. Sur le plan
moral, on se heurte à la même équivoque d’une tolérance affichée en
dépit d’un prosélytisme dont le caractère compulsif est évident. En
fait, le contact des non-musulmans les angoisse. Leur genre de vie
provincial se perpétue sous la menace d’autres genres de vie, plus
libres et plus souples que le leur, et qui risquent de l’altérer par la
seule contiguïté.



Plutôt que de parler de tolérance, il vaudrait mieux
dire que cette tolérance, dans la mesure où elle existe, est une
perpétuelle victoire sur eux-mêmes. En la préconisant, le Prophète les
a placés dans une situation de crise permanente, qui résulte de la
contradiction entre la portée universelle de la révélation et de la
pluralité des fois religieuses. Il y a là une situation paradoxale au
sens “pavlovien”, génératrice d’anxiété d’une part et de complaisance
en soi-même de l’autre, puisqu’on se croit capable, grâce à l’Islam, de
surmonter un pareil conflit. En vain d’ailleurs : comme le remarquait
un jour devant moi un philosophe indien, les musulmans tirent vanité de
ce qu’ils professent la valeur universelle de grand principes -
liberté, égalité, tolérance - et ils révoquent le crédit à quoi ils
prétendent en affirmant du même jet qu’ils sont les seuls à les
pratiquer.



Un jour à Karachi, je me trouvais en compagnie de Sages
musulmans, universitaires ou religieux. A les entendre la supériorité
de leur système, j’étais frappé de constater avec quelle insistance ils
revenaient à un seul argument : sa simplicité. (…) Tout l’Islam semble
être, en effet, une méthode pour développer dans l’esprit des croyants
des conflits insurmontables, quitte à les sauver par la suite en leur
proposant des solutions d’une très grande (mais trop grande)
simplicité. D’une main on les précipite, de l’autre on les retient au
bord de l’abîme. Vous inquiétez-vous de la vertu de vos épouses ou de
vos filles pendant que vous êtes en campagne ? Rien de plus simple,
voilez-les et cloîtrez-les. C’est ainsi qu’on en arrive au burkah
moderne, semblable à un appareil orthopédique (…).



Chez les Musulmans, manger avec les doigts devient un
système : nul ne saisit l’os de la viande pour en ronger la chair. De
la seule main utilisable (la gauche étant impure, parce que réservée
aux ablutions intimes) on pétrit, on arrache les lambeaux et quand on a
soif, la main graisseuse empoigne le verre. En observant ces manières
de table qui valent bien les autres, mais qui du point de vue
occidental, semblent faire ostentation de sans-gêne, on se demande
jusqu’à quel point la coutume, plutôt que vestige archaïque, ne résulte
pas d’une réforme voulue par le Prophète – “ne faites pas comme les
autres peuples, qui mangent avec un couteau“ - inspiré par le même
souci, inconscient sans doute, d’infantilisation systématique,
d’imposition homosexuelle de la communauté par la promiscuité qui
ressort des rituels de propreté après le repas, quand tout le monde se
lave les mains, se gargarise, éructe et crache dans la même cuvette,
mettant en commun, dans une indifférence terriblement autiste, la même
peur de l’impureté associée au même exhibitionnisme. (…)



[S]i un corps de garde pouvait être religieux, l’Islam
paraîtrait sa religion idéale : stricte observance du règlement
(prières cinq fois par jour, chacune exigeant cinquante génuflexions
[sic]) ; revues de détail et soins de propreté (les ablutions
rituelles) ; promiscuité masculine dans la vie spirituelle comme dans
l’accomplissement des fonctions religieuses ; et pas de femmes.



Ces anxieux sont aussi des hommes d’action ; pris entre
des sentiments incompatibles, ils compensent l’infériorité qu’ils
ressentent par des formes traditionnelles de sublimations qu’on associe
depuis toujours à l’âme arabe : jalousie, fierté, héroïsme. Mais cette
volonté d’être entre soi, cet esprit de clocher allié à un déracinement
chronique (…) qui sont à l’origine de la formation du Pakistan (…).
C’est un fait social actuel, et qui doit être interprété comme tel :
drame de conscience collectif qui a contraint des millions d’individus
à un choix irrévocable (…) pour rester entre musulmans, et parce que
qu’ils ne se sentent à l’aise qu’entre musulmans.



Grande religion qui se fonde moins sur l’évidence d’une
révélation que sur l’impuissance à nouer des liens au-dehors. En face
de la bienveillance universelle du bouddhisme, du désir chrétien de
dialogue, l’intolérance musulmane adopte une forme insconsciente chez
ceux qui s’en rendent coupables ; car s’ils ne cherchent pas toujours,
de façon brutale, à amener autrui à partager leur vérité, ils sont
pourtant (et c’est plus grave) incapables de supporter l’existence
d’autrui comme autrui. Le seul moyen pour eux de se mettre à l’abri du
doute et de l’humiliation consiste dans une “néantisation” d’autrui,
considéré comme témoin d’une autre foi et d’une autre conduite. La
fraternité islamique est la converse d’une exclusive contre les
infidèles qui ne peut pas s’avouer, puisque, en se reconnaissant comme
telle, elle équivaudrait à les reconnaître eux-mêmes comme existants.



(…) Ce malaise ressenti au voisinage de l’Islam, je
n’en connais que trop les raisons : je retrouve en lui l’univers d’où
je viens ; l’Islam, c’est l’Occident de l’Orient. Plus précisément
encore, il m’a fallu rencontrer l’Islam pour mesurer le péril qui
menace aujourd’hui la pensée française. Je pardonne mal au premier de
me présenter notre image, de m’obliger à constater combien la France
est en train de devenir musulmane. (…) Si, pourtant, une France de
quarante-cinq millions d’habitants s’ouvrait largement sur la base de
l’égalité des droits, pour admettre vingt-cinq millions de citoyens
musulmans, même en grande proportion illettrés, elle n’entreprendrait
pas une démarche plus audacieuse que celle à quoi l’Amérique dut de ne
pas rester une petite province du monde anglo-saxon. (…) [I]ls firent
et gagnèrent un pari dont l’enjeu est aussi grave que celui que nous
refusons de risquer.



Le pourrons-nous jamais ? En s’ajoutant, deux forces
régressives voient-elles leur direction s’inverser ? (…) [I]ci, à
Taxila, dans ces monastères bouddhistes que l’influence grecque a fait
bourgeonner de statues, je suis confronté à cette chance fugitive
qu’eut notre Ancien Monde de rester un ; la scission n’est pas encore
accomplie. Un autre destin est possible, celui, précisément, que
l’Islam interdit en dressant sa barrière entre un Occident et un Orient
qui, sans lui, n’auraient peut-être pas perdu leur attachement au sol
commun où ils plongent leurs racines. (…)



[C]‘est l’autre malheur de la conscience occidentale
que le christianisme (…) soit apparu “avant la lettre” – trop tôt (…) :
terme moyen d’une série destinée par sa logique interne, par la
géorgaphie et l’histoire, à se développer dorénavant dans le sens de
l’Islam ; puisque ce dernier – les musulmans triomphent sur ce point –
représente la forme la plus évoluée de la pensée religieuse sans pour
autant être la meilleure ; je dirais même en étant pour cette raison la
plus inquiétante des trois [bouddhisme, christianisme et islam]. (…)



Aujourd’hui, c’est par-dessus l’Islam que je contemple
l’Inde ; mais celle de Bouddha, avant Mahomet qui, pour moi européen et
parce que européen, se dresse entre notre réflexion et des doctrines
qui en sont les plus proches comme le rustique empêcheur d’une ronde où
les mains prédestinées à se joindre, de l’Orient et de l’Occident ont
été par lui désunies. Quelle erreur allais-je commettre, à la suite de
ces musulmans qui se proclament chrétiens et occidentaux et placent à
leur Orient la frontière entre les deux mondes ! (…) L’évolution
rationnelle est à l’inverse de celle de l’histoire : l’Islam a coupé en
deux un monde plus civilisé. Ce qui lui paraît actuel relève d’une
époque révolue, il vit dans un décalage millénaire. Il a su accomplir
une oeuvre révolutionnaire ; mais comme celle-ci s’appliquait à une
fraction attardée de l’humanité, en ensemençant le réel il a stérilisé
le virtuel : il a déterminé un progrès qui est l’envers d’un projet."



(Tristes tropiques, Presses Pocket, Paris, 2007, pp. 475-490)

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