Désarmement et Sectarisme !
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Désarmement et Sectarisme !
Désarmement et Sectarisme !
EDITORIAL
PORT-AU-PRINCE, 16 Avril - Une fois assez avancé le désarmement des gangs de quartiers populaires (Cité Soleil, Martissant), la Commission Nationale de Désarmement, Démantèlement et Réinsertion (CNDDR) se trouve sous pression de récupérer aussi les armes illégales détenues dans d'autres secteurs de la société à Port-au-Prince.
Nous avons appris que le président de la commission, Alix Fils-Aimé, se trouve en négociation avec ces derniers pour les amener à remettre aussi leurs armes.
Il s'agit d'armes détenues illégalement. La Constitution autorise chaque citoyen à avoir une arme pour sa propre défense. Mais au plus fort des violences urbaines et de la vague de criminalité qui ont ravagé le pays pendant les deux années qui ont suivi le renversement brutal du populaire président Jean-Bertrand Aristide, des citoyens qui en ont les moyens se sont procuré jusqu'à des armes de guerre pour assurer leur protection et celle de leurs proches ou de leurs entreprises.
Ce sont ces armes-là que le gouvernement les invite en ce moment à remettre.
A ce qu'on dit, aucune ne l'aurait encore été.
D'un côté, Fils-Aimé s'entend répondre : qu'est-ce qui garantit que les violences ne reprendront pas avant longtemps ?
A quoi il ne peut fournir une réponse définitive à 100 pour 100.
Tandis que de l'autre côté, on lui fait comprendre que l'Etat ne peut avoir une politique de deux poids et deux mesures.
Une impasse insoluble...
Voici donc la commission prise entre deux feux.
Mais à notre avis, c'est aussi parce que la question est mal posée.
Ainsi formulée, la commission enferme le débat comme auparavant dans le même cercle vicieux, dans une impasse insoluble : quartiers populaires versus quartiers privilégiés.
Or l'Etat ne peut procéder par des catégories aussi renfermées sur elles-mêmes.
Un Etat démocratique ne peut verser dans aucun sectarisme. Ni dans un sens, ni dans l'autre.
Que faire ?
Elémentaire, mon cher Watson. L'Etat doit s'adresser à l'universalité des citoyens. Tous ceux généralement quelconques qui détiennent des armes illégales sont invités à contacter la commission de désarmement. Celle-ci évaluera chaque cas pour savoir quelle solution apporter. Il en est qui peuvent être autorisés à garder l'arme en question pour une raison ou une autre, après régularisation de leur permis.
Ceci est d'autant plus plausible que le désarmement dans les quartiers populaires paraît avoir assez bien progressé. Du moins il nous semble. C'est aux responsables politiques (ainsi qu'à la Police nationale et à la mission onusienne de maintien de la paix/Minustah) de donner une réponse plus exhaustive à ce sujet.
Refuser toute pression...
Tout comme nous ne pensons pas que la commission de désarmement devrait agir sous la pression d'aucun secteur quel qu'il soit, si elle veut garder sa crédibilité et sa neutralité.
Ni des secteurs proches des quartiers populaires l'accusant de favoritisme...
Ni des gros bonnets qui seraient prêts à tout pour garder leur arsenal.
Par contre l'Etat est-il capable de donner aujourd'hui à ces derniers la garantie formelle que leur sécurité n'est plus personnellement menacée ?
Du fait aussi que jusqu'ici - du moins depuis l'arrivée des forces internationales de maintien de la paix au lendemain des événements de février 2004 - on n'a pas enregistré d'expédition punitive de la part des quartiers riches contre les masses des bidonvilles.
Avant la chute d'Aristide, des barons de la haute étaient soupçonnés d'armer leurs propres gangs au sein des masses pour dresser ces dernières les unes contre les autres.
L'Autorité de l'Etat...
Mais aujourd'hui on ne peut et on ne doit plus procéder à partir de cette base de revanche réciproque. Directement ou indirectement. L'approche doit être juste et équitable.
Juste et équitable, c'est-à-dire évaluer les besoins en sécurité de chaque secteur individuellement. Et en même temps garantir vis-à-vis de tous indistinctement l'Autorité de l'Etat.
C'est aussi à cela que devrait veiller une société civile qui se respecte. Hélas !
Mais plus que tout, la CNDDR ne doit tomber dans aucun piège clientéliste. Le Désarmement n'est pas à vendre au plus offrant. Ni politiquement afin de gagner les faveurs de tel cacique soucieux avant tout de plaire à sa masse électorale.
Ni d'aucun nabab qui irait se vanter ensuite qu'il est au-dessus des lois de la république.
Ce n'est pas du show business...
Pour finir, la commission ne devrait pas travailler non plus dans l'empressement (l'heure de l'urgence commence à diminuer pour laisser place à une stratégie plus affinée), mais davantage par la persuasion, à plus forte raison que l'Etat lui-même ne saurait encore prétendre pouvoir garantir la sécurité à tous et à chacun.
Autrement dit, la commission ne doit pas donner dans le shobiz, ce n'est pas un travail pour gagner des voix électorales. Ni les grands titres d'une presse locale trop avide de sensationnel.
Une fois sécurisés les points qui étaient jusqu'ici les plus critiques et avoir conforté les positions acquises, c'est-à-dire en mettant réellement hors d'état de nuire les chefs de gangs les plus nuisibles, la commission devrait plutôt ouvrir des investigations afin de localiser avec plus de précision ceux, quels qu'ils soient, qui détiennent des armes illégales, à commencer par les plus redoutables de ces dernières.
Et non perdre son temps à des discussions oiseuses qui risquent de ne mener à rien sinon à des compromis individuels et peu soucieux de la restauration de l'Autorité de l'Etat qui est avant toute chose la principale contribution attendue de la commission de désarmement.
Et puis celle-ci ne doit pas oublier qu'elle a aussi pour mission la réinsertion, outre le désarmement.
Editorial, Mélodie 103.3 FM, Port-au-Prince
EDITORIAL
PORT-AU-PRINCE, 16 Avril - Une fois assez avancé le désarmement des gangs de quartiers populaires (Cité Soleil, Martissant), la Commission Nationale de Désarmement, Démantèlement et Réinsertion (CNDDR) se trouve sous pression de récupérer aussi les armes illégales détenues dans d'autres secteurs de la société à Port-au-Prince.
Nous avons appris que le président de la commission, Alix Fils-Aimé, se trouve en négociation avec ces derniers pour les amener à remettre aussi leurs armes.
Il s'agit d'armes détenues illégalement. La Constitution autorise chaque citoyen à avoir une arme pour sa propre défense. Mais au plus fort des violences urbaines et de la vague de criminalité qui ont ravagé le pays pendant les deux années qui ont suivi le renversement brutal du populaire président Jean-Bertrand Aristide, des citoyens qui en ont les moyens se sont procuré jusqu'à des armes de guerre pour assurer leur protection et celle de leurs proches ou de leurs entreprises.
Ce sont ces armes-là que le gouvernement les invite en ce moment à remettre.
A ce qu'on dit, aucune ne l'aurait encore été.
D'un côté, Fils-Aimé s'entend répondre : qu'est-ce qui garantit que les violences ne reprendront pas avant longtemps ?
A quoi il ne peut fournir une réponse définitive à 100 pour 100.
Tandis que de l'autre côté, on lui fait comprendre que l'Etat ne peut avoir une politique de deux poids et deux mesures.
Une impasse insoluble...
Voici donc la commission prise entre deux feux.
Mais à notre avis, c'est aussi parce que la question est mal posée.
Ainsi formulée, la commission enferme le débat comme auparavant dans le même cercle vicieux, dans une impasse insoluble : quartiers populaires versus quartiers privilégiés.
Or l'Etat ne peut procéder par des catégories aussi renfermées sur elles-mêmes.
Un Etat démocratique ne peut verser dans aucun sectarisme. Ni dans un sens, ni dans l'autre.
Que faire ?
Elémentaire, mon cher Watson. L'Etat doit s'adresser à l'universalité des citoyens. Tous ceux généralement quelconques qui détiennent des armes illégales sont invités à contacter la commission de désarmement. Celle-ci évaluera chaque cas pour savoir quelle solution apporter. Il en est qui peuvent être autorisés à garder l'arme en question pour une raison ou une autre, après régularisation de leur permis.
Ceci est d'autant plus plausible que le désarmement dans les quartiers populaires paraît avoir assez bien progressé. Du moins il nous semble. C'est aux responsables politiques (ainsi qu'à la Police nationale et à la mission onusienne de maintien de la paix/Minustah) de donner une réponse plus exhaustive à ce sujet.
Refuser toute pression...
Tout comme nous ne pensons pas que la commission de désarmement devrait agir sous la pression d'aucun secteur quel qu'il soit, si elle veut garder sa crédibilité et sa neutralité.
Ni des secteurs proches des quartiers populaires l'accusant de favoritisme...
Ni des gros bonnets qui seraient prêts à tout pour garder leur arsenal.
Par contre l'Etat est-il capable de donner aujourd'hui à ces derniers la garantie formelle que leur sécurité n'est plus personnellement menacée ?
Du fait aussi que jusqu'ici - du moins depuis l'arrivée des forces internationales de maintien de la paix au lendemain des événements de février 2004 - on n'a pas enregistré d'expédition punitive de la part des quartiers riches contre les masses des bidonvilles.
Avant la chute d'Aristide, des barons de la haute étaient soupçonnés d'armer leurs propres gangs au sein des masses pour dresser ces dernières les unes contre les autres.
L'Autorité de l'Etat...
Mais aujourd'hui on ne peut et on ne doit plus procéder à partir de cette base de revanche réciproque. Directement ou indirectement. L'approche doit être juste et équitable.
Juste et équitable, c'est-à-dire évaluer les besoins en sécurité de chaque secteur individuellement. Et en même temps garantir vis-à-vis de tous indistinctement l'Autorité de l'Etat.
C'est aussi à cela que devrait veiller une société civile qui se respecte. Hélas !
Mais plus que tout, la CNDDR ne doit tomber dans aucun piège clientéliste. Le Désarmement n'est pas à vendre au plus offrant. Ni politiquement afin de gagner les faveurs de tel cacique soucieux avant tout de plaire à sa masse électorale.
Ni d'aucun nabab qui irait se vanter ensuite qu'il est au-dessus des lois de la république.
Ce n'est pas du show business...
Pour finir, la commission ne devrait pas travailler non plus dans l'empressement (l'heure de l'urgence commence à diminuer pour laisser place à une stratégie plus affinée), mais davantage par la persuasion, à plus forte raison que l'Etat lui-même ne saurait encore prétendre pouvoir garantir la sécurité à tous et à chacun.
Autrement dit, la commission ne doit pas donner dans le shobiz, ce n'est pas un travail pour gagner des voix électorales. Ni les grands titres d'une presse locale trop avide de sensationnel.
Une fois sécurisés les points qui étaient jusqu'ici les plus critiques et avoir conforté les positions acquises, c'est-à-dire en mettant réellement hors d'état de nuire les chefs de gangs les plus nuisibles, la commission devrait plutôt ouvrir des investigations afin de localiser avec plus de précision ceux, quels qu'ils soient, qui détiennent des armes illégales, à commencer par les plus redoutables de ces dernières.
Et non perdre son temps à des discussions oiseuses qui risquent de ne mener à rien sinon à des compromis individuels et peu soucieux de la restauration de l'Autorité de l'Etat qui est avant toute chose la principale contribution attendue de la commission de désarmement.
Et puis celle-ci ne doit pas oublier qu'elle a aussi pour mission la réinsertion, outre le désarmement.
Editorial, Mélodie 103.3 FM, Port-au-Prince
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