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Editorial: Construire ce pays qui est nôtre

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Message  gwotoro Mer 13 Juin 2007 - 22:43

Construire ce pays qui est nôtre

Par Sabine Manigat
sabine.manigat@lematinhaiti.com


Il y a des ponts qui attendent. De par sa situation sur la nationale Sud, on connaît bien le cas de celui de GrandGoâve ; mais il y a aussi le cas des innombrables passes dans le sud, du côté de Peredo par exemple dans le département du Sud-Est ; ou dans le département du Centre autour de Hinche. Et puis il y a les cas qui laissent perplexes comme celui du pont nécessaire sur les Trois Rivières, à la sortie de Port-de-Paix, en allant vers Jean-Rabel.

Impossible, en arrivant sur les lieux, de ne pas se poser la question : comment la vie peut-elle continuer sans ce pont ? Et les gens du coin, qui savent pourquoi et comment, de commenter à manière de renchérissement sur les autres nombreux et autrement sérieux inconvénients de cet abandon de la région par l’État : les terres abondantes non irriguées, le courant électrique rarement disponible malgré les fleuves et le vent en abondance, l’isolement périodique de villages et de bourgs après chaque crue.

Il y a des routes qui attendent. La route dite des rails à la sortie sud de la capitale est en construction, mais on avance sans se presser. Les Cayes-Jérémie en est une autre, en construction elle aussi certes. Mais l’une des plus urgentes est sans doute celle qui mène au Plateau Central ; n’est-elle pas nominalement la route nationale No 3, qui relie en principe le centre du pays à sa capitale et à son principal littoral politique et économique ? Les travaux auraient pratiquement commencé, à en croire la presse, mais on se perd dans cette affaire tant il y a de tronçons à considérer : Mirebalais-Hinche, MirebalaisCroix-des-Bouquets, Mirebalais-Belladères aussi puisqu’il faudra bien un jour arrêter de tourner le dos à la frontière…

Il y a aussi des villes qui attendent. Des petites villes et des plus grandes. Villes déchues comme Miragoâne, ou encore Saint-Marc, déversoirs de ruraux en quête de vie, si longtemps vouées à l’interlope qu’il est difficile de les nommer sans évoquer la contrebande. Villes endormies comme Les Cayes, dans l’attente d’un réveil économique annoncé, mais si lent à se concrétiser. Et puis il y a Ouanaminthe. Le scandale. Il faut y être allé pour le croire.

Ouanaminthe, c’est le comble du non-État. Pas même une villerue, mais plutôt un amas de bicoques et quelques édifices épars qui prétendent à la fonction de bâtiments administratifs. Ouanaminthe « se yon savann » qui s’étale devant la frontière qui la sépare – c’est bien le mot – de la ville de Dajabon avec ses édifices publics, ses écoles et son hôpital. Et ces écoles, cet hôpital, nos compatriotes les fréquentent quotidiennement, autant que faire se peut. On prend ce qu’il faut là où on le trouve et, ma foi, là-bas l’offre est bien plus avantageuse que de ce côtéci. À noter que ce genre de pratique participe souvent de la dynamique frontalière et n’a en ce sens rien d’exceptionnel. Le choc, c’est l’absence de réciprocité. Alors, Ouanaminthe fait-elle ou non partie de la république d’Haïti ? Qui s’offusque de son abandon ? Qui connaît ce pays perdu, oublié de Dieu et de l’État ?

Reste que Ouanaminthe, c’est aussi la ville martyre, la ville du massacre de 1937, la ville des cent vexations aux Haïtiens et des mille démissions de ses gouvernements. La ville des rapatriements et la ville du trafic des personnes par « buscones » et passeurs interposés. C’est pour toutes ces raisons et pour beaucoup d’autres que Ouanaminthe devrait figurer parmi les plus hautes priorités de la république. Il ne s’agit pas de nationalisme, il s’agit de dignité tout court. Car, enfin, Ouanaminthe, la non-ville, c’est surtout un peuple vital, têtu, optimiste envers et contre tout et qui ne manque pas une occasion de souligner que des deux côtés de la frontière « se menm moun yo », de rudes travailleurs qui se font exploiter et se laissent diviser par ceux d’en haut. Il ne s’agit pas de romantisme, il s’agit du témoignage sur ce que j’ai vu et entendu.

Il est grand temps de construire ce pays. On nous parle de maillage routier et d’électricité à gogo. Tant mieux ! Cependant, pour avoir un pays, il nous faut avant tout construire la communauté par la communication entre les Haïtiens, la reconnaissance mutuelle qu’elle entraîne, le sentiment d’appartenance qu’elle doit tisser de Jérémie à Ouanaminthe et de Port-de-Paix à Anse à Pitres. Le sens de pays qu’elle doit nous insuffler à tous, devant le monde. Les solidarités qui doivent en découler pour que Ouanaminthe rejoigne le pays et que, ce qu’elle est, soit la préoccupation de tous. Routes et ponts ne sont que les – indispensables – vecteurs de cette construction.

mercredi 13 juin 2007

gwotoro
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