Haiti en Marche - La Minustah dans le collimateur

La Minustah dans le collimateur</B>

PORT-AU-PRINCE, 6 Avril - Les casques bleus onusiens sont les principales victimes des émeutes qui ont agité pendant deux jours (jeudi 3 et vendredi 4 avril) la ville des Cayes (190 km au sud de la capitale haïtienne).

Leur campement a été envahi par des manifestants qui ont tout emporté.

Ensuite pendant 48 heures, la force internationale a essuyé aux côtés de la police nationale d'Haïti (PNH) les tirs et rafales d'armes automatiques de la part de commandos armés que le gouvernement a identifiés comme étant liés au trafic de la drogue et autre activités illicites (contrebande et autres) qui se donnaient presque libre cours dans les ports et sur les côtes du pays jusqu'aux dernières dispositions de l'actuel pouvoir d'intensifier la guerre contre la corruption sous toutes ses formes.

Le bilan est de 4 morts et plus d'une vingtaine de blessés (AFP).

Aucune victime rapportée chez les soldats onusiens et les policiers haïtiens.

Cependant la plupart des morts et des blessés seraient plutôt des membres de la population qui ont été victimes soit de tirs croisés entre les forces de l'ordre et les individus armés, soit de coups reçus à l'arme blanche.

La Minustah face à face avec tous ses ennemis...

Toujours est-il que ce n'est pas par hasard que ce qui a commencé comme une marche contre la vie chère s'est tout de suite transformé en une violente attaque contre la Minustah (Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti), une force internationale militaro-civile de quelque 10.000 membres postée dans le pays depuis les violences politiques qui ont amené au renversement brutal du président Jean-Bertrand Aristide en février 2004 et se sont poursuivies les années suivantes.

Jeudi et vendredi la Minustah s'est retrouvée face à face avec tous les ennemis qu'elle a accumulés depuis son arrivée dans le pays en juin 2004.

La manifestation de quelques milliers de petits jeunes de la cité cayenne et de ses environs a été habilement récupérée par ceux-là qui restent depuis longtemps tapis dans l'ombre rongeant leurs freins.

Ce sont (dans l'ordre chronologique) des anciens militaires et policiers limogés, additionnés des paramilitaires qui venaient renforcer leurs rangs à chacun de ces putschs militaires ou militaro-civils que le pays a connu pendant ces vingt dernières années depuis la chute de la dictature trentenaire des Duvalier.

Ils sont les premiers à avoir été mis en déroute par la force onusienne. On se souvient de l'opération contre la petite troupe du soi-disant colonel Remissainte Ravix réfugiée dans l'ancienne villa du président Aristide à Tabarre. Puis de l'exécution spectaculaire de Ravix lui-même qui s'était allié à un ancien tueur à gages surnommé Grenn Sonnen .

Une révolution qui aura mangé ses petits!...

Ce n'est pas sans mal que la Minustah mettra fin à cette saga, d'autres chocs avec ces anciens militaires devront encore avoir lieu au commissariat de Petit Goâve (sud) dont ils s'étaient emparés, ainsi que dans le Plateau central qui avait été le haut lieu de la lutte armée contre le pouvoir Aristide.

Car ils revendiquent l'honneur d'avoir débarrassé le pays de ce que les ennemis de ce dernier appellent " la dictature Aristide. "

Encore une révolution qui aura mangé ses petits!

Le nettoyage devait ensuite se poursuivre aux Gonaïves (nord) avec la disparition des principaux agitateurs de cette époque tourmentée dont les uns trouveront la mort, d'autres pourrissent en ce moment derrière les barreaux.

Puis la force internationale se tourna vers l'autre camp. Nous voulons dire les gangs armés commettant des crimes parmi les plus abominables, mais qui sous couvert de leur loyauté au président renversé le 29 février 2004, trouvaient un asile sûr dans les quartiers populaires de la capitale.

Le kidnapping a les bras encore plus longs...

Cette guerre fut plus longue et plus dure. Egalement pour la population. De cette époque date le phénomène du kidnapping. Mais la réalité prouvera que ces gangs n'ont été qu'un instrument passager et que le kidnapping a les bras encore plus longs.

C'est d'ailleurs le seul adversaire que la Minustah ne peut encore arriver à mâter!

Ensuite, la drogue. D'ailleurs la distance n'est pas longue entre celle-ci et les premiers adversaires qu'on a crû peut-être trop tôt avoir définitivement abattus. La drogue a toujours été la principale source de financement des coups d'état en Haïti. De 1986 à nos jours.

Pas étonnant donc que parmi les principales têtes d'affiches recherchées par la DEA américaine figurent des anciens commissaires de police et commandants de troupes insurrectionnelles et paramilitaires. Suivez mon regard.

Pour finir, rappelons que la dernière résolution du Conseil de sécurité donne également mission à la Minustah d'assurer la surveillance de toutes les entrées du territoire haïtien, à la fois terrestres et maritimes.

Ce tableau suffit amplement à dépeindre les événements violents qui viennent de se dérouler aux Cayes, métropole d'un département sur les côtes duquel les trafiquants ont établi depuis longtemps leurs bases, et ceci au gré des pouvoirs successifs, y compris le Lavalas.

Comme les pirates de La Tortue...

Un autre facteur empêchant tout développement dans cette partie du pays, telle la magnifique côte du sud-ouest (Port-Salut et compagnie) qui est l'idéal pour une industrie touristique à l'échelle internationale. Mais les trafiquants de drogue (comme les pirates d'autrefois à La Tortue) ne permettraient jamais qu'on vienne les déranger ou les déloger!

La Minustah devait donc faire face la semaine dernière à tous ses ennemis d'hier et d'aujourd'hui mais aujourd'hui tous ligués contre elle.

Les anciens militaires qui ne se sont pas résolus à déposer les armes (nous ne voulons pas dire qu'ils sont tous dans ce cas-là, il y a ceux qui ont intégré la police nationale, il y a d'autres qui ne sont que des nostalgiques d'une époque mais restent de bons pères de famille)...

En tout cas, voici ceux-là qui voulaient en finir avec Cité Soleil au lendemain de la chute d'Aristide le 29 février 2004 qui aujourd'hui fourbissent leur remords et leurs armes dans l'ombre aux côtés de leurs adversaires d'hier, les mêmes anciens gangs qui ont été chassés à leur tour des quartiers populaires de Port-au-Prince par la Minustah et qui ont pu se réfugier à l'intérieur du pays.

Et comme au temps des Cacos...

Ajoutez les grands réseaux de la drogue qui sont bouleversés par les nouvelles dispositions prises par les autorités nationales pour permettre toujours plus largement les interventions de la DEA américaine dans le pays...

Et vous avez le cocktail explosif qui a fait l'actualité en fin de semaine aux Cayes. Et qui peut rebondir à n'importe quel moment en n'importe quel autre point du territoire. Dans une sorte de mouvement d'encerclement en vue d'une nouvelle marche sur la capitale comme au temps de nos Cacos d'autrefois. Ou tout simplement comme le 29 février 2004...

On peut parier que ces prochains mois la Minustah n'aura pas beaucoup de temps pour jouer les Tourista!

Marcus, 6 Avril 2008

J'ai toujours cru que ce pretexte de la cherté de la vie n'etait qu'un camouflage qui dissimulait les vrais conflits.Alors on se demande dans ces conditions quand aura-t-on la paix dans ce pays?Je suis triste pour les nostalgiques qui revent encore de l'haiti des années 50.Que c'est triste.

Et voilà le fond de l'histoire.

Les gens perspicaces sentaient ces menées des forces ombrageuses de la nation.

Cette insécurité qui emprunte plusieurs visages, y compris un faux nationalisme.

Tous ces mécontents qui ont intéret à ce que le pays ne cesse de patauger dans cette mare immonde d'exclusion, de misère, de faim et maintenant de klorox, d'acide de batterie et de galettes d'argile.

Car la sécurité implique l'arrèt de leurs activités et les énormes profits qui s'en dégagent, que ce soit dans la vente des produits illicites, illégaux et ceux de la contrebande.

On doit souhaiter que ceux parmi les notres, qui n'ont pas la capacité de comprendre ces malheureuses subtilités, apprennent une fois pour toutes que les jeux politiques et les manigances des politiciens magouilleurs sont des casse-tetes que les novices et les naifs ne peuvent déceler aisément.

La sagesse conseille à ceux qui n'y voient grand'chose de suivre et d'observer et surtout d'appréhender avant de s'exprimer dans un langage inconnu.