Forum Haiti : Des Idées et des Débats sur l'Avenir d'Haiti


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Message  Invité Mer 16 Fév 2011 - 12:08

Rappel du premier message :

Pour que nul n’en ignore :

Le tremblement de terre ! Haiti est sous les décombres .Nous avons besoin d’aide .Et pourtant ceux qui profitent de nos malheurs –quelle que soit la couleur de leur peau – sont encore à l’œuvre :

Voici Mamahdi et Pierre, deux ressortissants de la Cote d’Ivoire .Voici Jofhua de Sierra Leone .Ils font tous partie du contingent des occupants dont la présence avilit le pays .Et voici Milord ,le français ,un Gaulois aux yeux bleus ,un homme au cœur d’or et qui vit avec eux dans le meme complexe .Ils sont tous chez nous , disent- ils , pour nous aider à nous comporter en civilisés .L’omniprésence du tremblement de terre et ses conséquences épouvantables !!Tout le monde est aux aguets .On ne sait plus où se terrer pour s’abriter du mauvais temps.

Le gaulois Milord ,l’arrogant, fit dresser une tente dans la grande cour du complexe pour recevoir les sinistres qui ne savent plus où donner la tête .Ils ont faim et ils sont sales et couverts de poussière .Bon nombre d’entre eux sont blessés et réclament des soins d’urgences .Le gaulois Milord se démene comme un beau diable pour leur venir en aide .Il y est arrivé en passant de porte en porte et en demandant du secours aux voisins haïtiens encore tout étonnés de l’ampleur du désastre , de la catastrophe .Paix relative dans un moment de desespoir atroce .Mais pas pour logtemps .

Une lettre arrive de toute urgence à la maison du propriétaire du complexe :

Monsieur,

« Nous n'avions payé nos loyers pour nous retrouver dans cette situation difficile .Je trouve injuste qu’un Français s’arroge le droit de planter dans votre cour une tente pour abriter des sinistres .Ce n’est pas cette mode de vie que nous envisagions quand nous entrâmes dans un contrat de loyer avec vous .Nous vous donnons acte de notre désapprobation de cet acte arrogant du Français qui pense que nous devons baisser notre standard de vie pour venir au secours de ces haïtiens .Nous exigeons que vous preniez immédiatement les mesures nécessaires pour faire déguerpir les sans –abris qui sont bien connus pour etre des voleurs et des bandits.

Recevez Monsieur, nos salutations distinguées.

Mamahdi et Pierre, de la cote d’ivoire.

Jofhua, de Sierra Leone.
-----------------------------------------------------------------
Reponse du propriétaire ,un haïtien Gaulois selon les partisans de la haine :

Messieurs,

J'ai l'honneur d'accuser la reception de votre lettre . Je comprends vos inquietudes . Nous vivons les heures d'une terrible tragédie que le pays n’a jamais vécues dans son histoire .Si vous insistez et s’il faut que j’ordonne le déguerpissement des sinistrés de la cour , je le ferai tantôt quand j’aurai trouvé une place convenable sur l’une de mes propriétés à Pétionville ou ils pourront prendre refuge de la compassion de ceux qui étaient venus pour les aider .Je vous donne-moi aussi acte de ma décision irrévocable :

Votre contrat ne sera pas renouvelé à la date de son expiration le mois prochain.

Recevez messiers mes salutations distinguées.
Le Gaulois des aigris.
-----------------------------------------------------------------------------------------
Merde et merde !

Ces gars-là sont chez nous .Imaginez ce qu’ils seraient capables de faire si nous étions chez eux .Trois africains et pas un seul n’avait trouvé dans son cœur un sentiment de pitié pour nos concitoyens face à leurs malheurs. Je ne doute pas qu’ils auraient eu la meme attitude chez eux .Allez messieurs ! Parlez-moi de l’Afrique .Des frères de la race .Allez-y .Et laissez, dans votre générosité panaméricaine, les sinistrés et les sans-abris à la merci des vents et du « goudoukouglou » pour porter secours à l'étranger car leur vie est bien plus précieuse que celle des haïtiens .Venez à leur aide parce que ça les dérange, la présence de tous ces sales haïtiens pauvres et sans-abri.

Mwin ta di nou sa Kassayol te di bef la wi, bann congo. Chita sou internet ap radote pale sa nou pa konen epi kontinye bay manti ak sa nou ranmasse lan liv pwopagann.Se pou ayisyen ke mwin santi'm blesse le yo blesse se pou ayisyen mwin soufri le yap soufri .Mwin pagin okenn kod lonbrit ki mare ak etranje poum paka di se le se fanmi lakay mwin ap soufri ke'm soufri tou . Kelkeswa koule po li ,a l'etranger, je dedie avec force et courage le mot de Cambronne !


Dernière édition par deza le Mer 16 Fév 2011 - 17:16, édité 2 fois

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Message  Maximo Jeu 24 Mar 2011 - 12:48

Dans l'après-midi du même jour, les forts de la ville du Cap annoncèrent, chacun par une salve, la fête de l'empereur qui devait être célébrée le lendemain. Les barges armées répétèrent ce salut. Le 25 juillet, jour de la saint Jacques, les autorités civiles et militaires se réunirent a l'hôtel du général Christophe, pour se rendre au palais impérial. Elles devaient former le cortège de Sa Majesté qui avait annonce, la veille, qu'elle assisterait à l’office divin Mais Dessalines, qui, depuis son entrée au Cap, exprimait à ses favoris intimes, combien il était mécontent du faste que déployait Christophe, prétexta une indisposition pour ne pas se rendre à l’église. Il craignait que pendant la cérémonie, Christophe ne fut, même en sa présence, l'objet de l’attention publique. Le général Christophe se rendit à l’église, accompagne des autorités de la ville, et se tint a cote du trône de l’empereur qui était dresse près du grand autel. Apres la cérémonie, le cortège se rendit au palais impérial. Dessalines accueillit tous les fonctionnaires avec une noble politesse, et écouta avec le plus grand calme le discours suivant que lui adressa le général Christophe:



"Sire,



"La fête de Votre Majesté revient sous les plus heureux auspices. Ce jour si cher voit, dans toute l’étendue de l’empire, tous les cœurs haïtiens, portés vers leur vengeur et leur libérateur, lui payer ce tribut d'éloges, de respect, d'amour et de reconnaissance qui est du à la véritable vertu, au cœur paternel de Votre Majesté qui donne, tous les jours, à son peuple, des marques de sa sollicitude, et qui consacre, pour son bonheur et sa félicité, les travaux, les veilles, les fatigues et tous les immenses devoirs qu'entraine l’art de gouverner. Aussi, au-dedans de vos états, les fruits de la plus touchante concorde, l’aimable fraternité de la douce égalité qui règne, forment le gage précieux de la prospérité et de la durée de votre empire.



"Grâces immortelles vous soient rendues, Jacques le bien-aimé, père du peuple. La postérité vous confirmera ces titres chers et sacrés, que vos contemporains se plaisent a vous donner. Que le Dieu tout-puissant, protecteur de notre cause sacrée, daigne répandre sur vos jours ses saintes bénédictions, ainsi que sur ceux de Sa Majesté l’impératrice et de toute votre auguste famille, et qu'il vous conserve longtemps à la tendresse de votre armée et du peuple, votre seconde famille.



"Je me félicite d'être auprès de Votre Majesté l’écho de la voix publique, et je profite de la solennité de ce jour pour renouveler à Votre Majesté Impériale les assurances du plus profond respect, du plus sincère attachement et de la parfaite soumission dont je suis pénétré."



Sa Majesté répondit à son excellence le général Christophe :



"... que le vœu de son cœur avait toujours été la prospérité de son peuple, et que son bonheur serait la plus douce récompense de ses veilles et qu'il n'y avait que le mérite et les services rendus à la cause publique par son excellence le général Christophe qui pussent égaler l’estime et l’amitié de Sa Majesté et la confiance entière qu'elle mettait en lui.



L'administrateur principal de la division du Nord, Roumage jeune, prononça ensuite le discours suivant, au nom du corps administratif:



"Sire,



"Nos cœurs éprouvent une bien douce satisfaction, en ce jour qui est l’anniversaire de votre auguste fête, en vous témoignant le bonheur que nous éprouvons de vous posséder au milieu de nous. Grâces soient rendues a la Divinité de nous avoir conserve un héros dont les jours nous sont si précieux ! Vous êtes le vrai fondateur et le sauveur de notre liberté et de notre immortelle Indépendance, vous qui avez tout sacrifié pour notre patrie, afin de la soustraire à la tyrannie sous laquelle on voulait la replonger. Après nous avoir donné l’indépendance, vous ne cessez de travailler à la défense de notre liberté, et de consacrer entièrement votre temps a la prospérité et a la gloire de votre empire.



"Déjà nous voyons, pour chacun de nous, l’aurore du bonheur; permettez donc, en reconnaissance des bienfaits dont vous nous avez combles et des services que vous avez rendus à notre chère patrie, de présenter à Votre Majesté nos hommages respectueux; permettez-nous de vous prier d'agréer, en ce jour mémorable, l’assurance sincère de notre gratitude et des sentiments d'attachement, de fidélité et de dévouement que nos cœurs renferment pour vous. Puisse le ciel couronner d'un succès complet toutes vos entreprises, protéger votre personne sacrée, ainsi que celle de notre digne impératrice, qui est notre idole, et assurer la prospérité de votre auguste famille; qu'il conduise à leur fin les travaux que vous ne cessez d'entreprendre pour la félicité publique qui fait votre sollicitude continuelle. Tels sont les vœux que nous ne cessons d'adresser pour votre gloire, et dont l’accomplissement peut seul assurer notre bonheur".



Sa Majesté en répondant a l’administrateur exprima aux officiers civils combien était grande la bienveillance qu'il leur portait.



Sa Majesté salua les fonctionnaires qui étaient réunis autour de lui, et se retira dans ses appartements particuliers, au milieu des cris de Vive l’Empereur !



En même temps, on achevait de servir une table dans une vaste pièce richement décorée. L'empereur se représenta dans la salle de réception, et invita tous les fonctionnaires à le suivre. Il les conduisit dans la pièce du festin et s'assit a l’extrémité nord de la table, ayant a ses cotés leurs excellences les généraux Christophe, Bazelais, chef de d’état-major de Sa Majesté, Romain, Martial Besse, Capoix et Yayou. Capoix s'était rendu du Port-de-Paix au Cap, des qu'il avait appris que l’empereur y était arrivé. Yayou était parti de Marchand ou il avait été mande, et accompagnait l'empereur dans sa tournée. Les officiers de la cour, ceux de l’état-major de la division du Nord, les employés d'administration, les négociants étrangers assistaient au banquet. Au dessert, les toasts suivants furent portés. Par l'empereur: A la Liberté et a l’indépendance d'Haïti! Par le général Christophe : A l'Empereur et a notre auguste Impératrice! Par le général Bazelais: Au général Christophe et à tous les généraux de l’armée ! Par l’adjudant-général Mentor: Aux Etats-Unis et aux négociants américains, amis de notre Independence.' Par une députation spéciale du commerce américain : Aux Peuples libres de l’ univers, et à la conservation du Gouvernement et de l’indépendance d'Haïti! Le festin se termina par plusieurs couplets en harmonie avec la circonstance que chanta Chanlatte, le secrétaire-général. Le repas s'était prolongé jusqu'au commencement de la nuit. Le palais fut magnifiquement illuminé de feux aux couleurs diverses. De nombreuses dames y arrivèrent, accompagnées des officiers de l’état-major de l'empereur et de celui du général Christophe. Un orchestre composé de nombreux jeunes gens du Cap que Christophe enthousiasmait par l’état de son imagination fit retentir les appartements d'une musique harmonieuse et brillante, et Sa Majesté l'empereur ouvrit le bal par un rond de carabinier. Nos jeunes filles excitèrent la plus vive admiration des étrangers par leur beauté, leurs grâces et leur mise élégante. L'empereur qui aimait la danse avec passion, s'y livrait avec une sorte de délire; il tenait la main gauche dans son gilet et sautait sur un pied. Le général Christophe, qui ne prenait point part aux plaisirs de la danse, se tenait isolé, grave, portant un habit bleu de ciel garni d'or, et ayant une attitude belle et fière. Pas un des généraux n'était aussi brillant que lui. Il promenait sur toute la société bondissante des regards sévères. Tout a coup, l’empereur fit un saut et s'étendit ensuite presque par terre, aux genoux de sa danseuse. La musique répétait le refrain ; L'empereur vini voir Couloute danser">. Dessalines, dont les yeux étincelaient, était ivre de plaisir. Christophe dit assez haut pour être entendu d'un général qui se tenait près de lui: "Voyez Sa Majesté ! N'est-il pas honteux que nous ayons à notre tête un tel sauteur ? Ces paroles qui furent entendues de quelques favoris de l’empereur lui furent rapportés après le bal. Déjà, à la fête de l’indépendance du 1er janvier 1805, à Marchand, Christophe avait dit à Pétion les mêmes paroles sur Dessalines. Celui-ci, contenant sa fureur, s'écria: "Je n'ignore pas les propos de M. Christophe, il croit sans doute que sa Ferrière peut le mettre à l’abri de mes coups! Eh bien ! je le couvrirai d'honneurs, je le laisserai grandir! Qu'il se soulève ! Mon bras sera assez long pour l’atteindre partout".



Dessalines témoigna à Capoix toutes sortes de bienveillances et parut avoir oublié les rapports qui lui avaient été faits centre lui. Il l’exhorta à abattre Christophe en lui tendant un piège. Capoix, quoique ennemi personnel de Christophe, se refusa à commettre un crime. Dès lors, l’empereur résolut sa perte et le livra a la haine implacable de Christophe contre laquelle il l’avait un peu protégé jusqu'alors. Quelques hommes scélérats conseillèrent à Dessalines, mais sans succès, de faire empoisonner Christophe par le médecin Justamont, Français qui avait été sauvé" du massacre en 1804
.











(1) Gazette du Cap.







III Couloute était une des maitresses de l'empereur, jeune femme de Jérémie, sur laquelle le peuple avait composé un carabinier.








Thomas Madiou Tome III




Dernière édition par Maximo le Dim 27 Mar 2011 - 7:34, édité 1 fois
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Message  Maximo Dim 27 Mar 2011 - 7:15

Les étrangers qui se trouvaient au Cap avaient été flattés de l'accueil qu'ils avaient reçu au palais impérial d'après les ordres de Dessalines, ils avaient été entourés de toutes sortes de considérations. Du reste, les Anglais n'applaudissaient pas seuls a notre indépendance; les Américains qui avaient des relations avec notre île la fêtait aussi, même dans leur pays. Ecoutons la Gazette d’Haïti de cette époque : "Parmi les hommes qu'attirent sur nos rivages les précieuses denrées de notre fertile territoire, il en est que l’intérêt seul ne gouverne pas entièrement et qui ne sont pas étrangers au cri de la nature et a celui du droit des gens, en même temps qu'ils cherchent a obtenir un gain ici que tout honnête négociant à droit d'espérer d'un commerce équitable. Messieurs Jacob Lewis, Samuel J. Ogden Washington Morton, écuyers, principalement intéressés dans l’armement du convoi américain parti du Port-au-Prince et arrivé a New-York le 18 mai dernier, ont donné à bord: navire l'"Indostan", à l'occasion de l’heureuse arrivée de ce convoi, un diner de plus de cent personnes parmi lesquels se trouvaient I’ honorable Rufus King, le juge Living le général Stevans, le général Morton, Mr. Woodworth, procureur général de l’Etat, Mr Riken, procureur du district, et plusieurs des magistrats de la ville. Plusieurs toasts, portés pendant le repas, au bruit du canon, font voir que la cause de la liberté de tous les hommes et particulièrement celle de l'indépendance de notre pays, trouve encore des partisans dans la classe des hommes vraiment éclairés, et qu'un esprit de vertige et d'anciens préjugés n'ont pas entièrement aveuglés sur le sort de leurs semblables. On ne sera peut être pas fâché de trouver id les vœux de cette compagnie respectable pour notre gouvernement. Voici les toasts, ainsi que la gazette de New York les a rapportes : "A la Liberté, ce beau présent du ciel aux hommes ! Dans quelques lieux qu'il se trouve des hommes, puissent-ils jouir de sa douce présence"!



"Au gouvernement d’Haïti fondé sur les seules bases légitimes de toute autorité, le choix du peuple! Puisse-t-il être aussi durable que ses intentions sont pures !"..



On ne devrait pas s'étonner, qu'à cette époque, les Américains fissent des vœux pour la prospérité agricole d'Haïti et parussent admirer nos institutions. Depuis l'évacuation des troupes françaises, ils faisaient, conjointement avec les Anglais, presque tout le commerce d'Haïti. Sous les capitaines-généraux Leclerc et Rochambeau, ils avaient été privés des avantages dont ils jouissaient sous Toussaint Louverture; et de 1802 à décembre 1803, ils avaient toujours souhaité la chute de la domination française. Depuis la proclamation de l'indépendance d'Haïti, ils avaient été replacés chez nous dans leurs anciennes prérogatives. Ce n'était pas véritablement la philanthropie qui les portait à cette bienveillance, à notre égard, en 1805; c'était l'intérêt, car ils maintenaient alors, comme aujourd'hui, dans la servitude ou la dégradation, les Noirs et les hommes de couleur de l'Union.



Jacob Lewis et la plupart des autres convives avaient des relations commerciales avec nous et avaient obtenu toutes nos commandes de munitions; par des démonstrations d'admiration, ils voulaient continuer a se faire bien venir de Dessalines qui faisait leur fortune. Dans leur pays, ils étaient sans entrailles pour les Noirs et les hommes de couleur, et en réclamant sous le président Boyer, le solde d'un compte que devait à Jacob Lewis le gouvernement de 1804, ils traitèrent de monstre et de barbare, Dessalines dont le système était pour eux en 1805, un modèle d'administration. Néanmoins quels qu'aient été les motifs des Américains pour nous donner des louanges en 1805, nous devons nous féliciter des égards qu'ils nous témoignaient alors, sans être tenus de les approfondir. Mais aujourd'hui que nous sommes plus avancés en civilisation, que notre organisation est meilleure, ils ne font entendre leurs voix que pour nous condamner, quoiqu'ils entretiennent toujours avec nous des relations commerciales assez actives. L'humanité gémit en voyant la marche ascendante des préjugés américains à l'égard de notre race, préjugés barbares, maintenant, en 1848, au sein d'une République qui pratique la démocratie la plus large, un système d'esclavage beaucoup plus dur que celui de l'antiquité et uniquement basé sur l’épiderme.



"Dans les temples protestants d'Amérique, dit M. Roger de Beauvoir, vous verrez encore les noirs, à l’heure qu'il est, parqués dans un endroit à part."



Cependant nous ne devons pas oublier les nobles efforts que font les quakers américains pour parvenir à l'abolition de la servitude dans les états méridionaux de l'Union, efforts encouragés et soutenus de quelques hommes d'élites qui siègent au Congrès.



Dessalines, reconnaissant combien était puissante l’influence dont jouissait au Cap le général Christophe, se résolut à flatter son ambition et l’intéresser à son gouvernement en le comblant de ses plus hautes faveurs. Christophe les accepta pour travailler avec plus de sécurité à la ruine de l’empereur. Dessalines, qui avait le génie de la guerre, n'avait nulle idée d'administration, et depuis la paix, au lieu de s'entourer d'hommes de moralité et d'expérience, il se laissait gouverner par ses passions qu'incitaient encore quelques hommes immoraux. Il était devenu, depuis qu'il ne doutait plus de l’existence d'une conspiration, d'un caractère totalement absolu, et la moindre contrariété l’irritait jusqu'à la fureur. L'adjudant-général Mentor qui s'étudiait toujours à se tenir à ses cotés, s'efforçait d'atteindre à une haute position. II ne cessait néanmoins de répéter que toute son ambition ne consistait qu'à demeurer auprès de la personne de Sa Majesté. Les hommes de l’époque ont cru, pendant longtemps, qu'il avait été un agent secret du gouvernement français, travaillant à susciter la guerre civile dans l'empire. II était parvenu à inspirer à Dessalines des inquiétudes relativement à la fidélité des hommes de couleur. II lui disait, toutes les fois qu'il en trouvait l'occasion, que ces derniers ne rêvaient qu'aux moyens de détruire l’indépendance d'Haïti pour livrer le pays aux Blancs, leurs pères. D'une autre part, il exprimait à quelques hommes de couleur que Dessalines était un ignorant, un affreux tyran, ne cherchant que l’occasion de dévorer ceux qui lui étaient supérieurs en connaissances. Comme il savait que David Troy ne pouvait qu'être très hostile a l’empereur, il lui dit un jour, en le rencontrant dans une rue : "Est-ce qu'un ignorant tel que Dessalines est fait pour nous commander. Des hommes tels que nous devraient être a la tête du gouvernement. J'organise un parti contre l’empereur; sois des nôtres, tu acquerras une haute position quand j'aurai réussi. Je veux que Dessalines commette tant d'injustice que le peuple soit oblige de se soulever contre lui." David Troy qui connaissait sa perfidie, et qui, de son coté, travaillait les esprits contre Dessalines en faveur de Geffrard tout en mettant en avant le nom de Christophe, lui répondit: "Si vous avez une liste des personnes entrées dans votre conspiration, n'y portez pas man nom; je suis convaincu que vous ne réussirez pas. De la manière dont se conduit Dessalines, sous l’influence de vos conseils, vous parviendrez à le faire succomber; mais sa chute entrainera votre mort. Vous n'êtes qu'un Martiniquais n'ayant pas même fait la révolution dans ce pays; vous n'y avez pas de racines; vous n'êtes point connu des troupes et des montagnards, vous n'exercerez sur eux aucune influence." David Troy se sépara de lui, en lui disant qu'il n'était point hostile à l’empereur.



Juste Chanlatte et Boisrond Tonnerre s'efforçaient de neutraliser l’influence qu'acquérait à la cour l'adjudant-général Mentor; mais ils étaient, eux aussi, animés de mauvaises passions; ils étaient peu propres à faire entrer Dessalines dans la voie de la légalité. Le chef de l’état-major général, Bazelais, accablé sous le poids des fatigues qu'il avait supportées pendant la guerre civile et celle de l’indépendance, se montrait dégouté de la vie, et ne s'occupait que de ses devoirs militaires.



II existait alors dans l’empire deux partis qui agissaient sourdement et activement. Celui de Christophe auquel se ralliaient dans le Sud, en se servant de son nom, pour réussir, mais avec l’arrière-pensée de le combattre, les Geffrard, les Ferou, les Wagnac et la plupart des officiers sous leurs ordres; et celui de l’empereur dont les officiers les plus dévoués étaient les Gabart, les Bazelais, les Charlotin, les Boisrond Tonnerre, les Chanlatte, les Diaquoi, les Vernet, dans 1'Artibonite; dans le Sud, les Bazile, les Moreau ou Coco Herne, les Guillaume Lafleur et les Lhérisson, directeur des domaines, et dans 1'Ouest, Lamarre, colonel de la 24e du Petit-Goave, Germain frère, commandant de l’arrondissement du Port-au-Prince, et Inginac, directeur des domaines.



Dans le département du Nord, les frères Roumage. Rouanez jeune, et les autres principaux citoyens du Cap étaient dévoués à Christophe. Capoix, au Port-de-Paix, se tenait isolé, en garde et contre l’empereur et centre Christophe. Au Port-au-Prince, le général Pétion, peu attaché à Dessalines, mais n'ayant nulle confiance en Christophe, ne voulait pas se prononcer; du reste il ne s'était pas encore abouché avec Geffrard et ignorait les véritables dispositions de celui-ci a l’égard de Christophe. Boisrond Tonnerre et Chanlatte dont l’existence était liée pour ainsi dire a celle de l’empereur et qui étaient disposés à sacrifier leurs jours pour sa conservation, surtout Boisrond, étaient si corrompus qu'ils travaillaient à la perte de Sa Majesté, en voulant la servir, par les violentes mesures qu'ils lui faisaient prendre. Moreau avait exaspéré Geffrard par l’opiniâtreté de ses dénonciations, qui étaient favorablement accueillies. II l’accusait auprès de Dessalines d'être un ami des Blancs, d'en avoir beaucoup sauvé, de négliger son devoir, de laisser décroitre les produits en négligeant la culture, de tolérer la licence dans les troupes. Geffrard, au contraire, était un officier de la plus grande sévérité; il s'efforçait de réprimer les abus; il est vrai que lors du massacre des Blanches, il en avait sauve beaucoup. II se justifiait en disant qu'il avait pris les armes contre les soldats de la France, mais non contre des femmes et des enfants. Une sédition venait d'éclater parmi les troupes de la garnison des Caves; il l’avait énergiquement réprimée, quoiqu'il ne fût pas partisan du système par lequel on passait aux verges le soldat. Un grenadier de la 13e demi-brigade des Cayes avait été condamné à recevoir une centaine de coups de verges; les compagnies d'élite de la 17e, autre corps de la garnison, s'ameutèrent et voulurent s'opposer a l’exécution. Elles méconnurent, et même menacèrent leurs officiers. Geffrard, apprenant qu'il y avait sédition dans les troupes, se présenta sur la place d'armes, imposa aux soldats par son attitude et son langage énergique, fit passer aux verges le militaire coupable, sous ses yeux, fit incarcérer les principaux agitateurs, et rétablit le prestige de la discipline.



Dessalines, jusqu'au milieu de 1805, avait été juste et équitable envers ses lieutenants; il avait fait de vrais efforts pour éteindre toute espèce de préjugés de castes, pour établir une parfaite union entre l’homme de couleur et le Noir. II avait même fait fusilier plusieurs individus qui avaient cherche à exciter le Noir contre l’homme de couleur. Mais depuis qu'il avait appris qu'on tramait contre son autorité, il avait totalement changé de conduite, et la malveillance trouvait accès auprès de sa personne. Ne mettant plus aucun frein a ses passions, il voyageait suivi d'histrions, de danseurs, de musiciens et même de courtisanes. Danseur infatigable, des qu'il arrivait en un endroit, il donnait un bal. Sous Toussaint Louverture, pour plaire au gouverneur-général, chacun s'approchait de la sainte table; sous Dessalines, on se faisait une gloire de bien danser. L'empereur, se livrant à des plaisirs scandaleux, oublia qu'il était le chef de l’Etat. La plus grande immoralité régnait autour de lui. D'une gaité parfois grotesque, il disait aux dames qui fréquentaient la cour, combien il admirait soit leur beauté, soit leur laideur. A son exemple, les officiers de son état-major entretenaient des concubines dans chacune des villes de l’empire, et le général Geffrard qui condamnait sa conduite, se livrait aussi, aux Cayes, a ce dérèglement de mœurs. Comme les enfants naturels jouissaient des mêmes droits civils que les enfants légitimes, les citoyens ne se mariaient pas la plupart. En ne prenant pas en considération l’esprit de la loi qui doit toujours être interprété en faveur de la morale, l’enfant adultérin même pouvait être reconnu par l’auteur de ses jours. Cependant sans le mariage il n'y a pas de famille, et sans famille pas de société. Le général Christophe qui, lorsqu'il devint roi, proscrivit le concubinage, condamnait des lors ce dérèglement de mœurs. Quand l’empereur entrait dans une ville, les femmes honnêtes étaient dans de graves inquiétudes, car leur vertu était menacée non seulement par lui, mais encore par les officiers de son état-major. Beaucoup de mères de famille tenaient leurs filles renfermées pour les soustraire aux regards de ceux qui étaient assez puissants pour les posséder, impunément, par la violence.


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Message  Maximo Mer 30 Mar 2011 - 14:47

Les troupes, quant à l’habillement, étaient dans un état pitoyable; elles avaient été vêtues avant l’expédition de l’Est, comme nous l’avons déjà dit, mais, à présent, elles étaient presque nues. L'empereur ne donnait quelque soin qu'a la 4e demi-brigade qui avait son cantonnement à Marchand. Cependant le ministre des Finances avait employé des sommes considérables à des acquisitions de drap et de toile pour 1'habillement de l’armée. Mais les administrations étaient livrées à une sorte de pillage, et l’empereur, plongé dans les plaisirs, négligeait de réprimer efficacement ces désordres qui se commettaient d'une manière scandaleuse. II eut fallu, pour les faire cesser, qu'il n'eut pris aucune part aux dilapidations. Quand il passait les troupes en revue, il leur disait: "Vous rivalisez de nudité avec les bouteilles." Le soldat humilié de ces affronts dévorait son indignation. Quand on se rappelle que Dessalines avait été simple grenadier, qu'il avait vécu de l’existence du soldat, qu'il était parvenu à sa haute dignité en passant par tous les grades, on est vivement surpris du peu de sollicitude qu'il portait à l’armée. Essentiellement homme de guerre, il avait toujours eu des entrailles pour le soldat; il savait que les troupes sont humiliées d'être négligées, qu'elles ont droit de se plaindre, quand elles ne sont ni vêtues, ni payée, parce qu'elles versent leur sang pour la patrie, et que la gloire qu'elles acquièrent rejaillit en entier sur leur chef. Il savait que lorsqu'elles souffrent, elles deviennent accessibles aux suggestions des agitateurs de tous genres; cependant en 1805, il fermait l’oreille aux plaintes de l’armée, et la narguait même de sa nudité. Ceux des hommes de l’époque qui existent encore et qui lui ont été dévoués jusqu'au dernier moment, assurent que ses favoris, voulant le perdre, le poussaient à dessein dans une fausse voie, et le portaient à ne pas habiller les troupes, afin qu'elles se soulevassent. Mais la nation, en général, jugeait, à cette époque, qu'il était ébloui par la toute-puissance, et qu'il était séduit par les douceurs de la paix auxquelles il se livrait sans aucune préoccupation des intérêts généraux. Comme il se passionnait pour toutes les choses qu'il aimait, il mettait aux plaisirs la même ardeur qu'il avait employée pendant la guerre. Heureusement pour la génération qui vécut sous son gouvernement, il était sobre, car s'il s'était livre aux liqueurs fortes, ses violents instincts l’eussent porté à des excès abominables. La passion qui le dominait était celle des femmes. Accessible à la générosité, il pardonnait facilement, et ceux qui avaient été l’objet de sa clémence n'avaient plus à redouter d'être de nouveau poursuivis. Dans son essai sur les causes de la révolution et des guerres civiles d'Haïti, publié à Sans-Souci en 1819, sous les yeux de Christophe, devenu roi, Vastey s'exprime ainsi qu'il suit relativement à l’époque de Dessalines :(1)

"Un désordre général eut lieu dans l’empire. Les finances désorganisées, les troupes sans paye et sans habillement, la vérification des titres de propriétés poussée à l’extrême, sans un juste examen, la corruption des gens qui occupaient les fonctions les plus éminentes, un mécontentement général qui se manifestait sourdement dans le peuple et les troupes ménageaient l’Etat d'une subversion prochaine.

"Toutes ces calamites étaient encore envenimées et aggravées par les complices de Pétion, les partisans des Français qui arrivaient de tous cotes et se rendaient dans l’Ouest et le Sud pour préluder au grand drame qui devait avoir lieu®. Dans ce débordement de mœurs corrompues, le général en chef Christophe cherchait, en vain, à y opposer une digue; il avait maintenu, autant qu'il était en son pouvoir, plus d'ordre et de régularité dans l’administration et la discipline parmi les troupes. Sa conduite privée, ses mœurs régulières avaient fait tourner tous les regards vers lui; il était l’espoir des gens de bien et des pères de famille. L'Empereur n'apportait aucun remède à ces maux; il les ignorait complètement, il était aveuglé par sa prospérité et par les flatteurs, ses alentours, qui lui cachaient les gémissements du peuple. Ces vils flatteurs, ces hommes corrompus et méchants ne s'occupaient que de futilité, de danses, de bagatelles, d'intrigues de femmes; ils étaient bien éloignés de vouloir lui donner des conseils salutaires qui pouvaient lui faire ouvrir les yeux sur sa situation, et le sauver du péril qui le menaçait, et consolider son gouvernement. L'empereur se jetait lui même dans le piège que lui tendaient ses ennemis qui l’entrainaient a négliger ses devoirs et a commettre des actions indignes de lui, pour lui faire perdre l’amour et la vénération du peuple, et être immolé ensuite avec plus de facilité."


Les lieutenants de l’empereur, par les violences auxquels ils se livraient, faisaient naitre dans le peuple un véritable mécontentement. Ainsi que sous Toussaint Louverture, le laboureur était maintenu au travail sous la verge et le bâton, et le citoyen qui ne le dénonçait pas à l’autorité, lorsqu'il était parvenu à sa connaissance qu'il s'était refugie en ville, était condamné à douze gourdes d'amende. Le commandant de la place du Port-au-Prince, le colonel Bedouet, ne le cédait pas, en sévérité, à Germain Frère. Mademoiselle Miss, d'une famille respectable, fut accusée d'avoir donne asile à une cultivatrice. Elle fut mandée au bureau de la place, condamnée et passée aux verges, parce qu'elle ne put pas, tout de suite, compter douze gourdes d'amende. Cet acte de rigueur fit éclater la plus violente indignation. Quand le peuple rugira contre Dessalines, Bedouet n'échappera à la mort qu'en se cachant.

Sa Majesté l’Empereur était toujours au Cap. Les autorités de cette ville l’y retenaient en lui donnant chaque jour de nouvelles fêtes. Par une ordonnance du 26 juillet. Dessalines nomma Christophe, général en chef de l'armée d'Haïti, dignité que celui-ci ambitionnait depuis longtemps, André Vernet, ministre des Finances et de l’Intérieur, et Etienne Elie Gerin, ministre de la Guerre et de la Marine Vernet et Gerin avaient déjà été nommés ministres, le premier depuis 1804, et le second, aussitôt après la publication de la constitution. Par une ordonnance du 28 juillet. les départements du Nord, de l’Ouest et du Sud, furent partages chacun en deux divisions. La première division du Nord fut confiée au général Paul Romain, devenu divisionnaire; elle renfermait les arrondissements du Port-de-Paix et de la Marmelade; la seconde division comprenait les arrondissements du Cap et de Ouanaminthe; elle fut confiée au général François Capoix. L'empereur voulait détruire la grande influence que ses lieutenants exerçaient dans tout l’empire. II affaiblissait leur puissance en subdivisant les provinces qui leur étaient confiées et en leur opposant les officiers sur la fidélité desquels il croyait pouvoir compter. Actuellement l’autorité de Christophe, devenu généralissime des armées d'Haïti, répandue sur tous les généraux de l’empire, s'affaiblissait d'autant plus qu'elle s'étendait et agissait moins directement sur un quartier. Capoix, enlevé aux habitants du Port-de-Paix sur lesquels il avait une puissante influence, fut obligé de se tenir au chef-lieu de la seconde division du Nord, sous les yeux de Christophe. La première division de l’Ouest, confiée au général Louis Gabart, qui possédait toute la confiance de l’empereur, comprit les arrondissements des Gonaïves et de Dessalines, capitale de l'empire. Le général Pétion conserva le commandement de la seconde division de l’Ouest, comprenant les arrondissements du Port-au-Prince et de Jacmel. L'autorité du général Geffrard fut restreinte au commandement en chef de la première division du Sud, comprenant les arrondissements d'Aquin et des Cayes. La seconde division du Sud, comprenant les arrondissements de l'Anse-à-Veau et de Jérémie, fut confiée au général Jean-Louis François, assez dévoué à l’empereur, quoique celui-ci se fut efforcé, mais sans succès, de répandre le trouble dans sa famille.


(1) Nous savons que Vastey était le chef des bureaux de Vernet, ministre des Finances, en 1804, 1805 et 1806, sous Dessalines.

(2) Vastey écrivait sous 1'influence de Christophe qui, en 1807, après avoir échoué devant le Port-au-Prince, sauvé par les généraux Yayou et Pétion, se proclama le vengeur de Dessalines. Cependant il avait sanctionné, en 1806, comme général en chef, tous les actes qui avaient été publics au Port-au-Prince, contre Dessalines; mais alors il n'était pas encore en lutte avec Pétion, qu'il représenta, dès que commença la guerre civile, aux populations du Nord et de l’Artibonite, comme un ambitieux, un traître.
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Message  Maximo Sam 2 Avr 2011 - 10:27

Les lieutenants de l’empereur, par les violences auxquels ils se livraient, faisaient naitre dans le peuple un véritable mécontentement. Ainsi que sous Toussaint Louverture, le laboureur était maintenu au travail sous la verge et le bâton, et le citoyen qui ne le dénonçait pas à l'autorité, lorsqu'il était parvenu à sa connaissance qu'il s'était réfugié en ville, était condamné à douze gourdes d'amende Le commandant de la place du Port-au-Prince, le colonel Bedouet, ne le cédait pas, en sévérité à Germain Frère, Mademoiselle Miss, d'une famille respectable, fut accusée d'avoir donné asile à une cultivatrice. Elle fut mandée an bureau de la place, condamnée et passée aux verges, parce qu'elle ne put pas, tout de suite, compter douze gourdes: d'amende. Cet acte de rigueur fit éclater la plus violente indignation. Quand le peuple rugira contre Dessalines; Bedouet n'échappera à la mort qu'en se cachant.

Sa Majesté l’Empereur était toujours au Cap. Les autorités de cette ville l’y retenaient en lui donnant chaque jour de nouvelles fêtes. Par une ordonnance du 26 juillet Dessalines nomma Christophe, général en chef de l’armé d'Haïti, dignité que celui-ci ambitionnait depuis longtemps; André Vernet, ministre des Finances et de l’Intérieur, et Etienne Elie Gerin, ministre de la Guerre et de la Marine Vernet et Gerin avaient déjà été nommés ministres, le premier depuis 1804, et le second, aussitôt après la publication de la constitution. Par une ordonnance du 28 juillet les départements du Nord, de l'Ouest et du Sud, furent partagés chacun en deux divisions. La première division du Nord fut confiée au général Paul Romain, devenu divisionnaire; elle renfermait les arrondissements du Port-de-Paix et de la Marmelade; la seconde division comprenait les arrondissements du Cap et de Ouanaminthe; elle fut confiée au général François Capoix. L'empereur voulait détruire la grande influence que ses lieutenants exerçaient dans tout l'empire, II affaiblissait leur puissance en subdivisant les provinces qui leur étaient confiées et en leur opposant les officiers sur la fidélité desquels il croyait pouvoir compter. Actuellement l’autorité de Christophe, devenu généralissime des armées d'Haïti, répandue sur tous les généraux de l’empire, s'affaiblissait d'autant plus qu'elle s'étendait et agissait moins directement sur un quartier. Capoix, enlevé aux habitants du Port-de-Paix sur lesquels il avait une puissante influence, fut obligé de se tenir au chef-lieu de la seconde division du Nord, sous les yeux de Christophe. La 1ere division de l’Ouest, confiée au général Louis Gabart, qui possédait toute la confiance de l’empereur, comprit les arrondissements des Gonaïves et de Dessalines, capitale de l'empire. Le général Pétion conserva le commandement de la seconde division de l'Ouest, comprenant les arrondissements du Port-au-Prince et de Jacmel. L'autorité du général Geffrard fut restreinte au commandement en chef de la première division du Sud, comprenant les arrondissements d'Aquin et des Cayes. La seconde division du Sud, comprenant les arrondissements de l'Anse-a-Veau et de Jérémie, fut confiée au général Jean-Louis François, assez dévoué si l'empereur, quoique celui-ci se fut efforcé, mais sans succès, de répandre le trouble dans sa famille.

On apprit au Cap qu'un navire américain la "Louisiana" avait appareillé, sortant d'un de nos ports, sans avoir payé les droits d’exportation. Dessalines, à cette occasion, décréta, le 1er aout 1805, "vu le départ furtif de la Louisiana, que tout capitaine étranger, à son arrivée dans un des ports de l’île, serait tenu de faire cautionner son bâtiment par une maison de commerce haïtienne ou américaine, expressément commissionnée ad-hoc, de laquelle il confierait le dépôt de la vente des marchandises par lui sinon le bâtiment et les marchandises seraient confisqués." Le 30 aout, l’empereur rendit un décret déterminant le tarif des frais de justice, les taxes des notaires et officiers de l’état-civil, le tarif des droits curiaux, le tarif des frais d'impression, le prix des écoles et pensions particulières. Chaque enfant externe qui apprenait seulement à lire et à écrire payait 4 liv. 2 s. 6 d. par mois; celui qui apprenait à lire et à écrire, etc. par mois, 8 liv. 5 s. 0 d. Chaque enfant pensionnaire, logé, nourri, apprenant à lire et à écrire, par an, 825 livres. Les instituteurs de l’Etat n'étaient point compris dans ce règlement.

II apprit que des négociants, intéressant à leurs spéculations des commandants militaires, recevaient toujours à leur consignation les navires les plus importants par leur chargement, au détriment de leurs collègues et au mépris des arrêtés du ministre des Finances. Pour mettre fin à ces abus scandaleux, il décréta, le six septembre, que chaque consignataire serait saisi, à tour de rôle, et suivant l’ordre du numéro de sa patente, de la vente et de la responsabilité des marchandises des bâtiments étrangers. Nul négociant, de quelque nature que fut sa réclamation, ne pouvait prétendre à une quantité de navires excédant le nombre de ceux reçus par les autres consignataires. Avant la publication de ce décret, d'après les ordres de l’empereur aux administrateurs, ce système de consignation existait comme nous l'avons vu. Presque tous les actes de cette époque ne faisaient que sanctionner ce qui était déjà mis en pratique, d'après les instructions, souvent verbales, de l’empereur.

Les lois et les décrets rendus par Dessalines étaient habituellement discutés par son conseil privé, compose de Juste Chanlatte, secrétaire-général, tenant presque toujours la plume, de Mentor, de Boisrond Tonnerre, de Diaquoi, d'Alexis Dupuy. Quand Dessalines se trouvait à Marchand, le conseil se composait, outre ses secrétaires, de Jean-Jacques Chareron, administrateur à St-Marc, homme de probité et de capacité, de Louis Auguste Daumec, procureur général impérial, de Jean-Baptiste, juge et chef de la justice à St Marc, homme vertueux, mais sans énergie. Quand il était au Cap, il adjoignait au conseil, toujours composé de ses secrétaires, le général Christophe, le citoyen Charrier, les frères Roumage, César Télémaque et Beaubert. Dessalines, qui présidait toujours le conseil, se faisait lire les anciens règlements concernant la loi qu'il voulait rendre. Quand il désirait apporter un changement aux anciennes dispositions, il exposait son opinion et disait: "Ce serait mieux ainsi; qu'en pensez-vous, messieurs ?" On était presque toujours de son opinion. Cependant sa manière de voir était quelquefois combattue. Alors il se montrait mécontent, et disait: "J'entends qu'il en soit comme je veux; écrivez, monsieur le secrétaire-général." Juste Chanlatte s'empressait de rendre sa pensée et de lui en donner lecture. Quand la loi qu'il voulait décréter n'avait aucun rapport avec celles qui avaient existé, il exposait clairement sa pensée, en langage Créole, et demandait aux membres du conseil leurs opinions. Ils lui répondaient: "Très bien ! Très bien !" et la loi était votée. Les séances du conseil duraient une heure, une heure et demie, quelquefois deux heures.

Dessalines partit du Cap et retourna à l’Artibonite, laissant Christophe et Capoix dans une complète mésintelligence, l’un surveillant l’autre. Capoix alors à Laxavon, commandant la seconde division du Nord, entretenait des agents dans la partie espagnole et s'efforçait d'y susciter des révoltes en faveur d'Haïti. Mais les populations hispano-indigènes demeuraient fideles aux Français. La lettre suivante de Capoix, adressée à Christophe, nous fait connaitre quels étaient les renseignements qu'on avait alors, dans l’ancienne partie française, sur la province de St-Yague :




FRANCOIS CAPOIX



General de division, commandant la deuxième division du Nord, A Son Excellence le général en chef de l’armée d'Haïti Monseigneur,

D'après les rapports du général Brave, j'ai l’honneur de vous annoncer qu'il y a ici un Espagnol, sortant de Mock, qui déjà était avec nous. II a déclaré qu'il s'était sauvé d'ici en allant à la maraude; et comme il ne fut pas bien traite dans la partie de St-Yague, il est revenu se rendre a nous et a déclaré que les Noirs n'y ont pas beau jeu, tant esclaves que libres, et qu'on les prend toujours pour les envoyer a Sto-Domingo. Le général Brave lui a fait des questions sur les Français; il a répondu qu'il n'y en a pas du tout a St-Yague, et que les Espagnols seuls habitent cet endroit. Il a déclaré aussi que tous les Espagnols des hattes sont à se réunir pour former une cavalerie, dans le but de venir prendre leurs camarades qui sont ici, à Laxavon, avec nous, et qu'ils sont à achever un fort a St-Yague même ou il y a déjà six pièces de canon en fer. Cet Espagnol se nomme Juste Capeyant; on le retient en prison en attendant de nouveaux ordres de vous.

Mon général, rien de plus qui soit digne de votre attention.

J'ai l’honneur d'être avec respect.



F. CAPOIX
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Message  Maximo Mar 5 Avr 2011 - 14:01

L'empereur, parvenu à Marchand, envoya au Port-au-Prince Vernet, ministre des Finances. Le plus grand désordre régnait toujours dans l'administration. Dessalines, ne sachant pas lire, s'en rapportait au ministre des Finances qui lui-même était gouverné par Vastey, le chef de ses bureaux. Le ministre des Finances et de l’Intérieur était dans l’obligation de parcourir, chaque année, les principaux quartiers de l'empire, pour vérifier les comptes des administrateurs. Du Port-au-Prince il se rendit à Léogane. Vastey trouva très irrégulièrement tenus les comptes de l’administrateur de cette ville. II était descendu chez celui-ci qui l'avait accueilli avec distinction. Au sortir d'un bain qui lui avait été prépare, il trouva sur sa table un rouleau de doublons. II fit au ministre des Finances un rapport favorable à l’administrateur. Vernet continua sa tournée. Des employés dont les comptes étaient parfaitement en règle, mais qui avaient négligé de faire à Vastey quelques gratifications, furent destitués peu de temps après. La plupart des agents de Dessalines, ne cherchant qu’à satisfaire leurs intérêts, lui créaient, de tous cotés, de nombreux ennemis, Mais si un souverain recueille toute la gloire qu'acquièrent ses sujets, il est, d'une autre part, responsable des maux qu'ils endurent. Dessalines disait de Vernet: "Mon pauvre compère ne s'occupe qu'a faire de bons déjeuners et sa partie de bête; il s'en rapporte à Vastey dont la bourse se remplit chaque jour." Et il ne prenait néanmoins à 1'égard de Vastey qu'il aimait, aucune mesure de rigueur.



Pendant son dernier séjour dans le Nord, il avait acquis la conviction que son ennemi le plus redoutable était Christophe, que néanmoins il ménageait, ne pouvant l'abattre sans en venir à une lutte, car la garnison et les citoyens du Cap eussent soutenu celui-ci dans sa résistance. D'une autre part, il ne doutait pas que Geffrard ne prit les armes dans le Sud, si Christophe se soulevait dans le Nord. Avant d'agir contre ces deux généraux auxquels cependant il ne refusait pas ses faveurs, il songea à s'assurer de la fidélité du général Pétion dont l'influence était immense sur les populations de l'Ouest, tant des villes que des campagnes, et dont la loyauté généralement connue lui inspirait quelque confiance. En s'attachant Pétion, il se rendait maitre de l'opinion de l'Ouest et pouvait contenir le Sud. Ce résultat obtenu, il lui devenait facile, soutenu du peuple et des troupes de l’Artibonite, d'assaillir Christophe et de le terrasser. II résolut d'attacher Pétion à sa destinée par les liens du sang. II témoigna de la froideur à Mentor qui l'obsédait de perfides conseils, et parla, de nouveau, de l'union étroite qui dut exister entre le Noir et le Jaune. II avait une demoiselle, la princesse Célimène, jeune et gracieuse, dont l'éducation avait été soignée depuis sous le gouvernement de Toussaint Louverture. C'était une des personnes les plus accomplies de l’époque. II se résolut à la marier au général Pétion et en fit part a l’impératrice qui en éprouva une vive satisfaction. II partit de Marchand plein de cette idée qui lui souriait. Le long de la route, il fut gai, bienveillant; jamais son entourage ne l’avait vu sous de plus agréables influences. Quand il parvint au Port-au-Prince, il fit au général Pétion qui s'était transporté au devant de lui, au portail St-Joseph, un accueil plein d'affabilité. Dans la soirée qui suivit son arrivée, il donna un grand bal et fit illuminer toute la ville. Le lendemain, les autorités civiles et militaires, selon l'usage, se réunirent pour le saluer, dans la grande salle de réception.



L'empereur fit entrer dans ses appartements particuliers le général Pétion et plusieurs de ses favoris les plus intimes, après les avoir accueillis avec une noble politesse. II leur parla de l’union Etroite du Noir et du Jaune, comme chose essentielle au bonheur de l’empire. II ajouta qu'il souhaitait que le peuple haïtien devint bronzé par la fusion des deux races noire et jaune. II annonça qu'il favoriserait cette fusion par des alliances dans sa propre famille, et qu'il aurait l’intention de donner au général Pétion la main de la princesse Célimène, sa fille. Tous les regards se portèrent sur Pétion que ces paroles avaient profondément déconcerté, II demeura consterné. Tout dans son attitude annonçait qu'il n'accueillait pas le projet de Sa Majesté. II répondit qu'il n'aimait pas le mariage. Dessalines l’exhorta à réfléchir sur ce qu'il venait d'entendre et lui dit que le bonheur du pays en dépendait. II sortit de la salle, la physionomie sombre, croyant avoir deviné que Pétion ne voulait pas entrer dans sa famille. Son projet était patriotique et en harmonie avec sa conduite passée.



Pétion fit cette réponse à l’empereur, dut-il encourir toute sa disgrâce, parce que l'un de ses aides de camp, le capitaine Chancy, lui avait déjà avouée que la princesse Célimène, éperdument éprise de lui, s'était laissée succomber à ses séductions.



Pétion retourna a son hôtel, accompagne des officiers de son état-major. II paraissait plein de préoccupations. Ceux de ses amis auxquels il confia ce qui venait de se passer dans les appartements de l’empereur, blâmèrent la réponse qu'il avait faite. II leur dit qu'il avait bien saisi la pensée de Dessalines qui eut voulu, par cette union, symboliser l’alliance étroite du Noir et du Jaune, mais qu'il n'aimait pas le mariage. II trompait ses amis, de même qu'il avait présenté à l’empereur un faux prétexte; il ne voulait pas divulguer le secret que lui avait confie Chancy, secret dont nous verrons bientôt le triste éclat.



Du reste cette proposition de mariage demeura alors inconnue à la généralité des citoyens; elle ne sortit pas du cercle des intimes du général Pétion; et l’empereur, de son coté, n'en parla jamais publiquement.



Pétion, en déclarant à Dessalines qu'il n'aimait pas le mariage, lui avait cependant exprime un sentiment qu'il éprouvait profondément. Malgré les instances de ses meilleurs amis, il ne voulut jamais s'unir à une femme par les liens légitimes. II mourut sans même avoir reconnu une enfant conçue sous son toit, avant ses derniers moments. La belle figure de cette jeune personne qui a grandi sous les yeux de la population contemporaine de Pétion reproduisait tous les traits de ce général.



Dessalines qui était entré au Port-au-Prince, sous de si bonnes influences, était redevenu sombre et agité; il se montrait très préoccupé de la correspondance qui existait entre Christophe et Geffrard. II disait qu'on travaillait, de toutes parts, à sa ruine, qu'on ne le secondait pas, que chacun s'efforçait d'obtenir des richesses, par n'importe quel moyen, que l’empire ressemblait a une ville prise d'assaut et livrée au pillage, que ceux qui auraient du le soutenir le trahissaient et le rendaient odieux aux populations; mais qu'heureusement pour Haïti et pour lui, Dieu l’avait doué de courage et lui avait donne des baïonnettes. II se plaignait de ce que les biens qui avaient appartenu aux Blancs et qui auraient du entrer dans les domaines, devinssent la propriété de nombreux particuliers qui, des avant la révolution, avaient un bien-être. "On trouve, disait-il, des protecteurs, des complaisants, pour se faire mettre en possession de ces biens, n'est-ce pas voter impunément ? Eh bien ! De même que je fais fusilier ceux qui volent des poules, des denrées et des bestiaux, je ferai mourir ceux qui permettent, par complaisance qu'on se mette en possession des biens de l’Etat. Qu'on ne pense pas que je tienne un vain langage, car sur ma foi de Jean-Jacques, c'est ce que je ferai." La veille de son départ pour Marchand, il s'exprima énergiquement en présence des généraux Bazelais, Martial Besse, Mentor, du commandant de 1'arrondissement Germain Frère, du commandant de la place Bedouet, de l’administrateur Ogé et du directeur des domaines Inginac, réunis au palais, contre ceux des habitants des villes qui mettaient tout en œuvre pour s'emparer des biens des colons sacrifies en 1804. "Nous avons fait la guerre pour les autres, dit-il; avant notre prise d'armes contre Leclerc, les hommes de couleur, fils de Blancs, ne recueillaient point les successions de leurs pères; comment se fait-il, depuis que nous avons chasse les colons, (pie leurs enfants réclament leurs biens ? Les Noirs, dont les pères sont en Afrique, n'auront donc rien ? J'ai su qu'il n'y a pas dans tout le Sud cent habitations ou maison séquestrées, et cependant j'en ai fait disparaitre toutes les familles de colons. Ah ! Messieurs, si cela doit continuer ainsi les affaires iront fort mal. On ne se contente pas de dilapider l’Etat, on conspire, on veut se soulever centre moi, mais qu'on prenne les armes et on le paiera cher. Est-ce qu'on aurait déjà oublie la guerre civile sous Toussaint et Rigaud! J'ai, dans chaque localité, des gens sur lesquels je puis compter; tant pis pour les insensés qui s'agiteront." Il était plein de colère.
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Message  Invité Mar 5 Avr 2011 - 14:10



Je ne suis plus énervé comme avant à cause de ces élections bidon et une ingérence étrangère agressive qui arrivait à peine à cacher son mépris de l'électorat et de l'intelligentsia économique et sociale. Maintenant que c'est finie la farce démocratique je suis heureux de retourner à mon forum favori.L'etude assidue de ces textes ,je crois,peut nous aider a comprendre ce qui se passe aujourd'hui sous tous les noms d'emprunt que lui decernent nos mercenaires et nos amis de l'imposture .

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Message  Maximo Jeu 7 Avr 2011 - 15:04

Il dit au directeur des domaines: "Sans doute il n'y a plus de biens domaniaux dans la, 2e division militaire de l’Ouest; d'après vos rapports de complaisance, (« Vastey, les Blanchet auront mis en possession des biens de l’Etat les fils des colons au préjudice de mes pauvres Noirs Prenez garde à vous, Nègres et Mulâtres, nous avons tous combattu contre les Blancs; les biens que nous avons conquis, en versant notre sang, appartiennent à nous tous j'entends qu'ils soient portagés avec équité." Inginac voulut répondre; mais Dessalines lui imposa silence, L'empereur toujours agite annonça qu'il ne tarderait pas à s'occuper d'une révision générale de toutes les mises en possession qui avaient été délivrées. II annonça à Inginac qu'il l’enverrait à Jacmel avec mandat de vérifier les titres de propriété et de punir les contrebandiers et les prévaricateurs. II lui remit plusieurs lettres dans lesquelles on accusait l'administrateur, le directeur de la douane, le trésorier de Jacmel d'avoir transigé avec leur devoir, et beaucoup de citoyens d'avoir obtenu, par la complaisance des autorités, des mises en possession. II confia a Inginac une lettre à l’adresse de Magloire Ambroise, commandant de l’arrondissement de Jacmel, et lui ordonna de partir.



Le lendemain, l’empereur prit la route de la province du Sud, disant hautement qu'il ne tarderait pas à sévir contre les agitateurs.



Ce fut à cette époque que le général Gabart mourut à St-Marc, le 30 octobre 1805. L'empereur fut profondément affligé de cette perte. Gabart et Clervaux, tous les deux hommes de couleur, avaient été ses premiers compagnons d'armes. D'après le dire de nos vieillards, Gabart était brave comme jamais homme ne le fut. Par sa mort Dessalines perdit un de ses bras; Gabart s’était identifié à ses mœurs, à son caractère, à son système; son existence était un reflet de celle de l'empereur: c'était, pour ainsi dire, la même âme animant deux corps. Ses restes furent déposés dans l’église de St-Marc et son cœur, transporté a Marchand, fut enterré au fort Culbutez. Dessalines fit graver sur sa tombe l’inscription suivante :






CI-GIT



LOUIS GABART,






Général de division, conseiller d'état commandant en chef la 1ere division de l’Ouest, chef-lieu de l’empire d'Haïti, né le 28 octobre 1776, dans la paroisse de St-Martin du Dondon, département du Nord, décédé a St Marc, département de l’Ouest, le 30 octobre 1805, 2e année de l’indépendance d'Haïti, et la première du règne glorieux de Jacques 1er. Tant qu'il vécut, il consacra ses moments à la liberté de son pays et mérita le titre d'ami de son souverain.



Soldat, si tu aimes la gloire, repose un instant tes regards sur sa tombe, et plains celui qui fut un héros avant d'avoir atteint l’âge ou les grands hommes se font même deviner.



Gabart était âgé de vingt-neuf ans. Madame Marie Elisabeth, mère de Sa Majesté l’Impératrice, mourut à 1'Artibonite, à l’âge de 56 ans, le 2 novembre 1805. Ses funérailles eurent lieu a Dessalinesville, le lendemain, avec la plus grande solennité.



Le général de division Pétion avait, dans son état-major, un jeune officier instruit, d'une haute taille, bien fait, ayant une noble figure, qu'il affectionnait beaucoup. C'était le capitaine Chancy, âgé de 23 ans, dont nous venons de parler, neveu de Toussaint Louverture, celui que nous avons vu figurer dans les rangs subalternes, à l’arrivée de l’armée française. Dès 1802, la princesse Célimène aimait avec passion le capitaine Chancy. Celui-ci, qui répondait à son amour, l’appelait sa fiancée à la cour de Toussaint Louverture et disait souvent à Dessalines qu'il deviendrait un jour son gendre. Dessalines était alors très flatté des attentions que portait à sa fille le neveu du gouverneur. Mais depuis qu'il était devenu empereur, il s'était prononcé contre ce mariage, en déclarant que son sang ne se mêlerait jamais avec celui de Toussaint Louverture. Chancy avait l’habitude de se rendre à Marchand toutes les fois que le général Pétion y expédiait des dépêches. Ses voyages, du Port-au-Prince à la capitale, devinrent plus fréquent; il renoua clandestinement ses liaisons avec la fille de l’empereur et les rendit si étroites que le bruit circula que la princesse était devenue enceinte. Ce bruit parcourut la province de l’Artibonite et parvint aux oreilles de Dessalines qui, après avoir traversé l’Ouest et le Sud, était revenu à Marchand. II se sentit outragé; il n'eut jamais pensé qu'un de ses sujets eut méprisé la mort au point de porter le déshonneur dans sa famille. II se renferma dans son palais, tellement exaspéré que la plupart de ses amis les plus intimes n'osèrent l’approcher. II formait mille projets de vengeance; tantôt il voulait faire périr sa fille, tantôt il voulait mander a Marchand le capitaine Chancy, et le livrer, sous ses yeux au dernier supplice. Pendant qu'il était en proie a ces cruelles et douloureuses pensées, Mentor auquel n'échappa jamais l’occasion de le porter au mal pour le perdre, s'approcha de lui et lui dit: "Sire, je ressens toute votre douleur! Cet affront ne peut être lavé que dans le sang; un mulâtre seul pouvait concevoir l’affreuse idée de jeter le déshonneur dans la famille de Votre Majesté. Jamais un de vos sujets noirs n'eut commis un tel crime!" Dessalines fit entendre un profond soupir; le mot de mulâtre sortit de sa bouche, avec aigreur, pour la première fois, depuis la proclamation de l’indépendance. Sagest, citoyen vénéré dans le quartier de l’Artibonite, qui lui avait sauvé la vie, a l’époque des Français, se rendit au palais et s'efforça de le calmer: "Sire, nous partageons toutes vos douleurs; mais l’offense que Votre Majesté a reçue n'est pas irréparable" Dessalines se leva et voulut le chasser de sa présence. "Pardon, Sire, continua Sagest, non elle n'est pas irréparable! La souveraineté que vous exercez vous permet ce que ne pourraient faire la plupart des pères de famille dans une pareille circonstance: donnez la main de la princesse au capitaine Chancy.— "II ne l’épousera pas", s'écria Dessalines plain de fureur, Peu de jours après, il envoya en mission, au Port-au-Prince, le colonel Daran, de son état-major, avec une compagnie de dragons, commandé par Prophète.



Daran et Prophète laissèrent les dragons à la Source Matelas, distante de sept lieues du Port-au-Prince et entrèrent seuls en cette ville. Germain Frère manda aussitôt le capitaine Chancy au bureau de l’arrondissement. II annonça au jeune officier qu'il serait envoyé à Marchand auprès de Sa Majesté; mais qu'en attendant son départ, il serait emprisonné. Daran et Prophète le conduisirent à la geôle et le firent mettre au cachot. Dès que le général Pétion apprit qu'il avait été incarcéré, il lui envoya ses propres pistolets de poche dans une boite à manger, et lui fit dire que, l’empereur persistant à ne pas lui accorder la main de sa fille, il ne lui restait plus qu'à se donner la mort. Dans la nuit qui suivit, des dragons qui étaient de service à la geôle, accoururent au cachot du prisonnier, au bruit d'une détonation. Chancy s'était ôté la vie d'un coup de pistolet. Pétion, après en avoir averti Germain Frère, fit transporter le cadavre prés de sa demeure, dans une maison, rue Américaine, pour lui rendre les honneurs funèbres. Le corps demeura exposé, pendant toute la nuit. Des dames et beaucoup de jeunes filles firent des prières et chantèrent des cantiques jusqu'au jour. Des malintentionnés firent circuler le bruit qu'on voulait massacrer les hommes de couleur. De jeunes militaires qui aimaient Pétion, en grand nombre, noirs et jaunes, qui savaient que les jours de ce général, seuls, pouvaient être exposés, se réunirent chez lui, et y demeurèrent jusqu'a ce qu'on eut donne la sépulture à Chancy. En séduisant la fille de l’empereur, cet infortuné jeune homme s'était précipité, de son propre mouvement, au devant de la mort. Des lors, Dessalines commença à se montrer sourdement hostile à Pétion, quoiqu'il eut enfin compris le refus qu'avait fait ce général de la main de sa fille; d'une autre part, il s'établit entre lui et Mentor une si grande intimité que celui-ci partagea son lit. On a beaucoup accuse Dessalines d'avoir conçu le projet d'égorger la population de couleur. Cette accusation n'est fondée sur aucun fait; elle est, en outre, victorieusement combattue par tous les actes de sa vie. Dessalines, en 1805 et en 1806, devait être convaincu de l'impossibilité de la réalisation d'un tel projet. Les hommes de couleur qui commandaient des arrondissements, des divisions militaires et de nombreux régiments, exerçaient sur les troupes et les cultivateurs une influence incontestable qu'ils s'étaient acquise pendant la guerre centre les Français; ils étaient assez puissants pour contrarier tout ce qui pouvait être tenté contre eux. Dessalines n'eut pu réussir à accomplir leur destruction, s'il en avait conçu l’idée. Dans le Sud et dans l’Ouest, Geffrard, Ferou, Gerin et Pétion étaient aimés et respectés du peuple; presque toutes les administrations étaient dirigées par des hommes de couleur : Vernet était aux Finances et à l’Intérieur, Gerin à la Guerre et a la Marine, Boisrond Tonnerre, Chanlatte, Charéron, Bazelais, Dupuy, Charlotin, les principaux officiers de son état-major, étaient hommes de couleur, et un septième de la plupart des corps était composé de Mulâtres qui vivaient fraternellement avec les Noirs à coté desquels ils n'avaient cessé de combattre les Blancs. Dessalines savait que les hommes de couleur du Sud, soutenus des masses noires de ce département, en 1799 et 1800, eussent vaincu Toussaint, s'ils avaient eu a leur tête un chef plus habile que le général Rigaud. Ce qui surtout ne pouvait permettre de rêver à ces immolations infructueuses, c'était la crainte alors grave d'une nouvelle invasion française. Dessalines sentait profondément que la patrie avait besoin des bras de tous ses enfants. D'une autre part, le général Ferrand avait pousse ses avant-postes presque jusqu'au Mirebalais, vers le Sud, et jusqu'aux environs de Ouanaminthe, dans le Nord, et faisait fréquemment des excursions sur les terres de l’empire. II n'attendait que de nouvelles forces pour entreprendre la conquête de l’ancienne partie française, et si la guerre civile avait éclate parmi les Haïtiens, il les eut attaqués résolument et eut obtenu des succès. Dessalines, se défiant d'un grand nombre d'officiers, noirs et de couleur, qui contrariaient, de tout leur pouvoir le système alors établi par lequel il n'y avait qu'un chef absolu et des troupeaux de sujets embrigadés et aveuglement obéissants, s'efforçait de se défaire d'eux, sans cependant songer à entreprendre l’extermination de toute une caste. Les généraux qui, de leur coté, travaillaient à la ruine de l’empereur, pour rallier a leur parti, les hommes éclairés et humains noirs et jaunes faisaient propager que Dessalines voulait massacrer les Mulâtres. Celui-ci, ne comprenant pas qu'à toutes les paroles qui sortent de la bouche d'un Chef d'Etat le vulgaire attache une haute importance, semblait confirmer ce qui se disait par des propos contre tel ou tel Mulâtre. Dessalines avait, au contraire, toujours exercé de l’humanité à l’égard de l’homme jaune; sous Toussaint, il le favorisa autant qu'il fut en son pouvoir. Les désordres affreux et insupportables introduits dans l’administration générale, par son peu de capacité comme Chef d'Etat, la cupidité insatiable de ses agents et non la crainte du massacre des hommes de couleur, ont fait naitre l’insurrection qui l’a abattu. Dans différents quartiers de Ville, particulièrement dans le Sud, ceux qui voulaient hâter la chute de l’empereur inquiétaient les populations par toutes sortes d'alarmes. Les autorités du Sud qui, en général, étaient hostiles a Dessalines, les entretenaient en leur donnant, à dessein, trop d'importance. Geffrard, Ferou et la plupart des autres anciens lieutenants de Rigaud nourrissaient contre Dessalines une animosité implacable qui datait de la guerre civile. Tantôt des femmes prétendaient avoir entendu dire des gens, qu'elles ne connaissaient jamais, que les Noirs dussent massacrer les Jaunes; tantôt des étrangers même qui avaient intérêt au bouleversement du pays répandaient ces bruits. Le colonel de la 18e demi-brigade de Jérémie, Bazile Dukeroite, qui avait la réputation, dans la Grand’ Anse, d'être tout dévoué à Dessalines, était l’objet de la haine, de la malveillance et des persécutions de ceux qui mettaient tout en œuvre pour culbuter l’empereur. La lettre suivante fait connaitre les moyens que, des le mois de juin 1805, on employait pour agiter le pays.



Jérémie, 22 juin 1805 Le chef de brigade Bazile, commandant la 18e



A. Sa Majesté" J. Jacques 1er



"Je. ne puis taire plus longtemps à Votre Majesté les propos destructeurs qu'on se plait à répandre pour ternir mon honneur et me perdre, surtout, depuis mon retour du Nord.



"Le général Ferou étant malade et voulant aller prendre les eaux, me confia le commandement de l’arrondissement de la Grand'Anse, en son absence; et j'ai mis le plus grand soin à maintenir l’ordre et la tranquillité publique. Dernièrement, à l’arrivée du général Geffrard, mon 1er bataillon reçut l’ordre, de même que moi, d'aller prendre garnison à Tiburon. J'avais déjà donne connaissance au général Ferou que, me trouvant malade, j'étais dans la nécessite d'aller changer d'air à la campagne, ce qu'il avait approuvé. Quelques jours après le départ du général Geffrard, étant sur mon habitation pour changer d'air, de faux bruits coururent dans la ville que je devais y entrer pendant la nuit, à la tête de trois colonnes, pour égorger tous les hommes de couleur. Le bruit courait qu'ils avaient été égorgés dans le Nord, et que j'avais mission de porter le même coup ici. Le citoyen Croquignole qui répandait ce bruit, répondit à la sœur de l’administrateur Gas qui le sollicitait d'en parler à son frère, qu'il ne pouvait l’en prévenir parce qu'il serait mal vu de sa couleur. J'ai été prévenu de ce que je viens de vous dire par un officier de couleur de ma demi-brigade, lequel apercevant ce mouvement, se rendit, pendant la nuit, auprès de moi, pour me prévenir que les hommes de couleur en ville, étant très inquiets, s'étaient réunis armés dans une maison. Le lendemain, je me rendis en ville auprès du commandant de la place, lui demandai des nouvelles; il me répondit qu'il n'y avait rien d'extraordinaire. Je lui ai demandé alors quel sujet avait porté les hommes de couleur à se réunir et à passer la nuit en armes. II me répondit qu'il ne savait rien de tout cela. Alors je me rendis chez l’administrateur Gas ou je trouvai le commandant Thomas Durocher qui me demanda ce que je faisais sur ma ferme. Je lui répondis: "Vous ne devez pas ignorer que c'est pour cause de maladie". "Eh bien! me répondit-il, je vous engage a rentrer en ville, car de mauvais bruits se répandent sur votre compte." Je me suis empressé d'en avertir le général Ferou qui était en tournée, afin qu'il revint en ville pour rétablir la tranquillité. Le lendemain, le citoyen Laforest, nouvellement arrivé d'Europe, est venu m'avouer que, depuis trois jours, les hommes de couleur avaient été dans les plus vives alarmes, à cause de ce que l’on m'avait attribué, et dont on voyait alors le contraire. Vous verrez que ces bruits, dont quelques négociants, les employés d'administration et le chef de bataillon Nicolas Régnier avaient connaissance, tandis que les autres chefs de bataillon et officiers du corps n'en savaient rien, n'étaient que des calomnies contre moi pour me perdre dans votre esprit et dans celui des autres chefs. Aussi je demande à Votre Majesté la grâce de me retirer du Sud ou je serai victime et de m'appeler dans le Nord. Je ne puis pas non plus vous taire que le citoyen Bergerac Trichet, ci-devant administrateur principal de cette commune, venant des Cayes, a rapporté au général Ferou que le général Magloire et l’administrateur de Jacmel, ne pouvant rendre leurs comptes, ont mis le feu a l’administration, et que l’adjudant-général Papallier lui avait dit que, s'il lui fallait rendre ses comptes, il en ferait de même aux Cayes, et qu'il se refugierait à Jérémie pour faire résistance, et qu'il aurait demandé a lui Bergerac quel était l’homme qui pourrait le plus lui nuire dans ses projets à Jérémie, et qu'il lui aurait répondu que c'était le colonel Bazile, et que tout de suite l’adjudant-général Papallier avait dit qu'il serait facile de s'en défaire en lui faisant sauter la tête. Le général Ferou a répondu qu'il saurait empêcher les intrigants d'entrer dans son arrondissement pour troubler l’ordre, et en rendrait compte a son supérieur. II m'a tout de suite fait appeler pour me raconter tout cela, en me disant que si on lui demande de ses officiers supérieurs aux Cayes, il ne les enverra point, et vous fera connaitre son motif.



"Je serai toujours avec fidélité et le plus profond respect, jusqu'a la mort."



On voit par cette lettre alors toute confidentielle combien Dessalines songeait peu à un massacre d'hommes de couleur; car ce qui tourmente le plus Bazile faussement accusé de vouloir commettre ce crime, c'est la crainte d'être perdu dans l'esprit de l’empereur et des gens de bien.






(1) Ferrand se disposait à nous attaquer en 1808, pendant la guerre civile entre Christophe et Pétion, quand les indigènes-espagnols se soulevèrent contre la France.






(1) Quelques-uns de nos vieillards assurent que Pétion, s'apercevant que Dessalines se perdait, ne voulut pas lier sa destinée à la sienne.


Dernière édition par Maximo le Lun 11 Avr 2011 - 14:14, édité 1 fois
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Message  dilibon Sam 9 Avr 2011 - 8:57

Apre bal, tanbou lou. L’Histoire bégaie. Par Hugues St. Fort

En décembre 1990, une majorité d’électeurs haïtiens choisit d’élire à la présidence Jean-Bertrand Aristide (JBA), un prêtre d’origine humble qui avait longtemps défendu dans la sphère publique ses revendications de justice, d’inclusion sociale, et de droit à une existence digne d’êtres humains. Dans la liesse populaire qui s’ensuivit, un fameux diplomate américain mit en garde la majorité des Haïtiens en lançant ce proverbe créole bien connu : « Apre bal, tanbou lou ». On connait la suite. Si j’ai choisi de rappeler cet épisode inoubliable de l’histoire contemporaine d’Haïti, ce n’est pas pour célébrer la « duplicité » de l’ambassadeur américain, Alvin Adam, plus connu sous le nom de « Bourik chaje », mais pour montrer comment l’Histoire peut sembler se répéter en Haïti. Il me semble en effet qu’on peut adresser la même mise en garde aux partisans de Sweet Micky-Michel Martelly qui célèbrent aujourd’hui la victoire du chanteur devenu président. Au populisme de gauche qui avait porté JBA au pouvoir, succède aujourd’hui un populisme inspiré par l’extrême-droite qui ne dit pas son nom.

Bien sûr, la comparaison s’arrête là car, si la menace à peine voilée de Bourik chaje s’est matérialisée quelques huit mois plus tard, quand les cerveaux de l’extrême-droite haïtienne financèrent le coup d’état du général Raoul Cédras avec les destructions de vies humaines qui s’ensuivirent, on ne saurait imaginer qu’un tel sort est réservé à Sweet Micky et à ses partisans. En effet, les auteurs de la « victoire » de ce dernier demeurent cette même extrême-droite haïtienne qui revient au pouvoir cette fois plus forte que jamais puisqu’elle a l’aval du « peuple ». Et tout le monde sait que la volonté du peuple est sacrée, même quand elle a été manipulée, n’est-ce pas ? Surtout quand on a la force des armes pour renforcer cette volonté.

Haïti est entrée dans une phase décisive de son histoire. L’extrême-droite haïtienne a finalement réussi son rêve le plus cher : prendre le contrôle politique, économique et stratégique de la société haïtienne. Elle va se dépêcher de se donner les moyens de sa politique en réintégrant l’armée d’Haïti au sein des institutions haïtiennes. Elle possèdera la légitimité de la violence puisque c’est le « peuple » qui l’aura élu. La Minustha n’aura plus sa place puisque le pays sera enfin « stabilisé ». Avec les forces armées à ses côtés, l’extrême-droite haïtienne deviendra plus puissante qu’elle ne l’aura jamais été. Il est à parier que Raoul Cédras, Michel François et compagnie seront de retour bientôt, et que l’alliance avec les néo-duvaliéristes se consolidera. Sweet Micky lui-même sera vite dépassé par l’évolution rapide de la machine extrémiste, s’il ne l’est pas déjà.

Avant de continuer, je voudrais répéter ce que j’avais dit dans une de mes interventions : je ne suis pas – loin de là – un partisan déçu de Mirlande Manigat. En fait, elle et son mari sont responsables du triomphe de l’extrême-droite haïtienne parce que, bien au courant de l’histoire haïtienne, du fonctionnement des institutions du pays, du processus démocratique, des questions relatives à certains concepts fondamentaux tels les concepts de pouvoir, d’influence ou de contrôle à la sauce haïtienne, ils ont laissé pourrir leur parti politique, le RDNP, en le monopolisant sans préparer une relève. Comme mes compatriotes aiment le dire, ils paient les conséquences de leurs inconséquences. Il est temps que se forment en Haïti des partis politiques dignes de ce nom et que le processus démocratique se mette en place. Mirlande Manigat a perdu logiquement les élections parce qu’elle n’a jamais été populaire en Haïti. De son côté, Sweet Micky a gagné les élections parce qu’il est adulé en tant que chanteur populaire. Mais, c’est tout. Qu’on ne vienne pas me dire que sa campagne électorale a été brillante. Il a gagné parce qu’il est Sweet Micky, le chanteur qui a joué sur la soif d’obscénité chez les foules haïtiennes. Ce ne sont pas ses promesses de candidat qui l’ont porté au sommet. Depuis 1990, aucun homme politique n’a gagné d’élection présidentielle haut la main sans une forte popularité chez les masses haïtiennes. Sweet Micky ne serait jamais élu s’il n’avait gagné cette popularité en tant que chanteur célébrant l’obscénité. Ceux qui soutiennent l’argument selon lequel on n’a pas besoin d’être éduqué pour postuler au sommet de l’état ne comprennent absolument rien à ce qui se passe. Je leur recommande de lire les quatre articles que j’ai publiés sur ces forums sur la question de l’intellectuel haïtien au cours des quatre semaines écoulées.

La tendance qui se dessine chez plusieurs sur nos forums de discussion consiste à dire : donnons à Sweet Micky-Michel Martelly une chance pour que Haïti commence à voir le bout du tunnel. Rassemblons-nous autour de lui, ne le critiquons pas au moins pendant ses cent premiers jours. Malheureusement, Sweet Micky n’est plus le maitre du jeu. Les forces extrémistes qui sont derrière lui et qui l’ont propulsé à la présidence sont déjà maitres de lui. Même dans les démocraties occidentales rompues aux questions du processus démocratique, le chef élu dans des conditions ambigües devient pieds et poings liés aux forces destructrices qui l’ont mis au pouvoir. Sweet Micky ne saurait constituer et ne constituera pas une exception. Il n’aura pas de voix au chapitre. Podyab, Sweet Micky ! Il s’est lancé dans la politique peut-être parce que tout le monde en faisait autant (Wyclef Jean…) et que cela paraissait un jeu. Après tout, le pays donnait l’impression d’une grosse farce : on faisait du n’importe quoi, impunément, sans honte et sans responsabilité. Mais le voilà pris à son propre jeu. Il ne peut plus s’en sortir. Il fera tout son possible pour donner l’impression que c’est lui qui dirige le pays mais la vérité éclatera bien vite. Beaucoup vont déchanter. Les pouvoirs de décision et d’orientation de l’économie haïtienne appartiendront plus que jamais aux institutions internationales et aux puissances que tout le monde connait et qui délègueront leurs décisions aux élites traditionnelles qui auront une mainmise plus complète sur les structures économiques du pays.

Haïti peut-elle se dégager de l’emprise de l’extrême-droite qui vient de prendre le pouvoir avec la victoire de Sweet Micky, pouvoir qu’elle avait perdu en 1994 quand Aristide était revenu avec les Marines. Difficile à dire. La société civile a encore la tête sous l’eau. Les classes moyennes commencent peut-être à peine à émerger. Il leur faudra du temps pour s’en remettre après la dévastation du 12 janvier 2010. La réapparition prochaine de l’armée d’Haïti ne favorisera pas les choses. Etant donné son passé, cette armée ne tardera pas à rétablir la violence et la brutalité dans la vie de tous les jours. Il est même possible de voir réapparaitre une force de répression civile, genre tonton makout, chimè, atache, etc. Il va falloir que les progressistes haïtiens consentissent à faire un travail de longue haleine pour gagner la confiance des masses populaires et paysannes. L’éducation va constituer la base de tout développement positif. Au cœur de cette éducation, la question de la langue sera centrale. Les masses devront travailler avec les progressistes et poser ensemble les problèmes, les enjeux et l’avenir du pays. La langue créole sera évidemment la langue de travail à l’école. Le français viendra plus tard puisque la Constitution proclame que le créole et le français sont les deux langues officielles de la république. Il ne sert à rien de vilipender la langue française comme cela est courant chez beaucoup de mes compatriotes. Ce n’est pas la langue française qui est responsable de nos malheurs et il est temps que nous cessions de répéter de telles inepties. Il est évident d’autre part que le créole ne constitue aucunement un frein à notre développement économique et social.

Contacter Hugues St. Fort à : Hugo274@aol.com


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Message  Invité Dim 10 Avr 2011 - 9:09


Parfois un article s’annonce intéressant par l’information contenue dans ses premiers paragraphes quand brusquement on se rend compte au cours de la lecture que l’auteur dans son désir de plaire à un public particulier de son environnement intellectuel s’est efforcé ,sans crier gare, d’ajouter à son menu des épices exotiques de l’imagination partisane qui rendent son produit indigeste a la majorite des lecteurs .Je n’allais pas le faire mais mon sens du devoir n’a poussé à le faire .Au nom de la sanité morale et cérébrale et pour sauvegarder la probité de la logique du raisonnement, nous avons besoin de dire non à Monsieur Saint-Fort durant cette tentative infructueuse de persuasion qui vise à nous embourber à l’intérieur de raisonnements rudimentaires de l’apocalypse idéologique .

Monsieur Saint-Fort n’est pas du tout convaincant .Il n’est pas crédible ou il se soucie fort peu de ce lien de l’esprit et de l’imagination qui existe entre auteur et public de la lecture si un message doit etre reçu et compris a l’avantage de celui qui le propose. En son cas précis, le développement, le dénouement et conclusion forcée de l’auteur sont passés à côté de la verite .Les prémisses de de ses hypothèses ou assomptions, ce ne sont que ça après tout, tend à induire en erreur ceux qui n’ont pas encore l’habitude et l’expérience de l’argumentation dialectique et des maniements de la logique rigoureuse de la pensée abstraite. Le phénomène n’est pas nouveau .On le rencontre souvent chez l’intello haïtien qui possède un bagage assez mince en tant que mauvais troubadours et colporteurs d’idées rances qui se propagent sous la protection de l’ombrelle d’un titre honorifique quelconque .Il en est ainsi des colonisés du tiers-monde, en général.

Je ne suis pas tout à fait sûr que Monsieur Hugues Saint-Fort a bien saisi la dialectique de l’enseignement ponctuel de ce qui vient de se passer au sein de l’impromptu du déséquilibre de nos politiques de petites tribus en situation de conflits et de guerre permanente .Il nous demontre un aveuglement qui m’étonne car il a hésité à rentrer dans le vif du sujet qui aurait accordé une certaine authenticité pédagogique à ses réflexions. Il a tout simplement accepté les cartes que les prédateurs lui ont refilées et, à partir du plateau d’un promontoire instable de l’intellect, il essaie de dégager dans la mêlée des ambitions et des manipulations externes aussi bien qu’internes les augures de notre avenir. A la porte de ces grivoiseries de l’impudeur de l’analyse qui veulent se frayer un passage à travers l’opacité de la déraison cultuelle, on a le droit de s’arrêter un moment pour observer le défilé du faux et de son cortège de trivialités obscènes.

Je demeure toujours perplexe quand un intello apparemment de bonne eau déclare du haut de sa tour que nous rentrons dans une autre phase décisive de notre vie de peuple. Et ce genre d’affirmation, on les entend on les lit souvent après qu’un autre larron ait profité de la confusion qui règne parmi les grands acteurs de la comédie pour s’empare de l’objet de la convoitise insensée des chapelles de la bande au pouvoir ou de celles communément appelées « opposition » grâce à liberté poétique du verbe suspect de nos politiques. C’est quoi une opposition sous la tente du grand cirque ou nous livrons bataille pour le pouvoir politique absolu ? Les clowns ou les fous du décor n’arrivent pas à nous distraire, à nous faire rire quand leurs pitreries ressemblent de plus en plus à la manifestation des moments de note vie.

Il est donc tout à fait naturel qu’un compétiteur malchanceux exhibe dans la circonstance un talent de mauvais magicien au moment de la transe intellectuelle car les arguments qu’ils nous offrent pour étayer les propositions de base de son raisonnement sont faux. Les prémisses de ses incantations et de ses prophéties appartiennent à la blanchaille de la logique intellectuelle pastorale ou provinciale du milieu ambiant. Je ne sais si j’exagère quand je l’accuse d’etre un peu méchant de sa part de procéder ainsi à nous offrir un barrage d’arguments partisans et de préjugés cultivés dans la marmite chaude du parti-pris et de la bouffonnerie politique.

Point n’est besoin d’etre censeur du verbe ou justicier de la rhétorique pour déduire après soumission des idées à la loupe grossissante de la critique impartiale que les résolutions ou conclusions de l’auteur sont aussi puériles les unes que les autres. Allons donc faire plus ample connaissance avec la logique et le rationnel de l’investigateur impatient qui veut saisir en notre compagnie les conséquences socio-politiques du machiavélisme électoral sans admettre que les dés que nous avons en main sont truqués .Pour ce faire, établissons tout d’abord que Monsieur Saint-Fort a commencé son diatribe –analyse avec la victoire indiscutable du nouveau président- élu .

Cependant, et à notre grand chagrin, il se sert de cet évènement pour corrompre notre jugement et nous jeter de la poudre aux yeux. La conclusion qu’il nous offre n’émane pas du constat de la prépondérance du vouloir populaire en faveur du candidat gagnant sorti des urnes de la providence électorale ni de l’histoire ete la compétence de nos dirigeants à travers notre histoire. Le présidentiel est mieux loti intellectuellement que beaucoup de ces farceurs qui ont dirigé la destinée du pays par les armes et/ou par la ruse. En politique haïtienne l’expérience et la compétence n’ont jamais été un critère valable de succès :
Le contraire est vrai tout au long des péripéties qui ont jalonne notre chemin pour aboutir à la conquête du pouvoir.

L’auteur essaie de nous faire accroire à son insu, qu’il garde une indépendance d’inquisiteur, une étrange distance à la fois rationnelle et qualitative d’observateur impartial par rapport aux évènements en cours au seuil d’un réquisitoire qu’il néglige d’identifier comme tel. Il fait tout ça en essayant maladroitement de nous fourrer dans la camisole étroite de force de sa logique partisane .Il veut sans en avoir l’air nous attacher au visage, et sans façon, des œillères de sa chicane qui doivent servir à donner à notre intelligence le panorama directionnel d’une vision limitée de notre situation. Il n’a pas voulu aborder l’organisation des élections, le nexus de l’affaire, qui a contribué à la réussite politique de Michel Martelly. Sommes-nous en droit de lui poser cette question ?

Que veut-il vraiment dire en désignant la victoire de Martelly comme un couronnement des vœux les plus secrets de l’Extrême droite ?Quand l’auteur nous propose sans aucun respect de notre intelligence en alerte que l’extrême-droite- ou ce qu’il nomme ainsi dans le pêle-mêle d’un rationnel mondain –a gagné les joutes électorales , il me semble qu’il a lu un petit manuel de notre histoire ou des pages importantes de notre vécu ont été supprimées ou déchirées avec malice calculée . Sait-il le nombre de citoyens de cette « extrême-droite » qui n’ont pas voté Michel Martelly à cause d'une perception de sa moralité publique ? J’ai la nette impression – pour paraphraser une sagesse de chez nous - que l’auteur refuse de dire au docteur ce qui lui fait mal …

Dois-je lui rappeler qu’il parle de cette meme extrême-droite que les révolutionnaires de 46 appelaient apatrides, exploiteurs, réactionnaires, oligarchies et enfin bourgeois quand fatigués des excès du verbe du ressentiment nous ne pouvions trouver d’autres titres péjoratifs du vocabulaire marxiste pour caractériser, étiqueter et démoniser un fait économique et social mal appréhendé par les dérives de la raison émotionnelle? On le sait bien .Tout le monde qui savait lire ou écrire à cette époque s’efforçait d’analyser à partir de la vigie branlante de leurs sentiments personnels ou ceux des cénacles idéologiques .L’émotion ne peut jamais remplacer la raison .Ainsi, nous avions assiste à la débâcle de ces idéologues du changement quand ils ont enfin pris le contrôle de l’appareil politique :
Ils ont accouche du Duvaliérisme qui, grosse de griefs en fin de règne, a eu une fausse couche prématurée dans les rues de notre société .On peut, sans se tromper sur la nature du phénomène, appeler l’éclatement de cet appendice que l’on prétendait causer tant mal, Aristide - Lavalasse.

Maintenant, je vous le demande Monsieur Saint –Fort, existe-t-il vraiment une extrême droite au sein du vacuum idéologique haïtien ? Vous pensez vraiment qu’il existe une extrême gauche au pays des mercenaires ambitieux, des envieux, égoïstes indifférents, des cyniques aux instincts criminels au pays des Ali-Babas incapables d’adhérer entre eux-mêmes au protocole de la turpitude du métier? Quelle est donc l’idéologie sociale et politique de cette extrême droite que vous aviez comparée avec l’Extrême gauche de 1990 que symbolise l’arrive d’Aristide au pouvoir sous la protection des marins américains… ? Vous plaisantez, n’est-ce pas ? Vous aviez encore perdu l’opportunité de nous dire que vous compreniez le rôle des vrais pouvoirs en place c’est-à-dire que ces deux mouvements sont tous les deux financés et contrôlés par l’étranger.

Monsieur Saint-Fort, s’il était sincère et fidèle à la rigueur et aux exigences des règles de l’analyse logique et rationnelle aurait dû éviter de nous exposer à l’ostentation des artifices mis en place par l’imposture pour nous cacher la verite .Je ne vois dans tout ça qu’un malencontreux effort pour déséquilibrer le gouvernement Martelly qui n’est pas encore rentre en fonction mais qui sert de bouc émissaire à l’imagination rancunière et revancharde battue à plate couture sur son propre terrain . Monsieur Saint-Fort, le procureur sans procès, tend à légitimer une défaite des Manigat ou de la RNDP à travers les passe-passe d’une rhétorique scabreuse afin de ne pas indiquer aux lecteurs que cette fois-ci encore les élections ont été manipulées et financées par l’étranger. L’amertume du vaincu qui le pousse vers les régions de l’Apocalypse est vraiment lamentable.

Michel Martelly ne peut etre la catastrophe finale de nos iniquités .Nous avons encore beaucoup de chemin à parcourir pour y arriver malgre les excitations épisodiques de notre intellectualité de la fourberie et du ressentiment. S’il y a l’ombre fugitive d’un conflit idéologique , il réside sans nul doute au niveau des intérêts particuliers des ambassades étrangères qui nous mènent par le bout du nez depuis la dite révolution populaire de 1986.En fait, Monsieur le procureur de notre avenir , le renvoi de Jude Celestin de la course électorale aurait dû vous mettre la puce à l’oreille et à celle de tout citoyen averti meme s’il aime ou déteste l’administration Preval .Il faut etre totalement dans les pommes ou un demeuré pour ne pas réaliser qu’à partir de cette décision d'un mauvais coup de théâtre de l’International ,les élections n’étaient plus qu’une farce de mauvais gout. Le problème d’Haiti n’est pas l’extrême-droite de notre imagination puisqu’elle n’existe qu’au niveau de nos émotions et de nos prétentions de conquête sociale jamais satisfaites.

Les maux de mon pays, le problème de mon pays à la dérive, c’est bien la mainmise de l’international sur la conscience politique du pays .Et les Manigat, les dinosaures d’une vieille idéologie fatiguée et agonisante des années 40, ont perdu la bataille au profit d’un populiste du Centre, Michel Martelly Le peuple, meme - manipulé nous dit –on- vient de prononcer son jugement défavorable au statu quo et à ses dérives traditionnelles : Il en a marre de ses sauveurs...Gauche ou droite. Comme on disait autrefois dans les cas de force majeure ou le crétinisme et la délinquance scolaire faisaient route ensemble, main dans la main, dans les allées interdites de l'école buissonnière.
Mention en lettre rouge :

Remis à ses parents ! Oui, vous n’êtes pas un partisan déçu de Mirlande Manigat…
Tant d’ingénuité tirée par les cheveux pour dire :
J’ai perdu et je prévois le pire parce que le peuple dégouté a rejeté ma cour, toutes mes avances.
Michel Martelly n’est d’aucune extrême droite .Il est du Centre.
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Message  Maximo Lun 11 Avr 2011 - 14:20

Le directeur des domaines de l’Ouest, B. Inginac, était arrivé à Jacmel accompagné de deux de ses employés Flon et Toulme. II avait pour instructions de vérifier les comptes de l’administration et les mises en possession des biens qui avaient appartenu aux colons sacrifiés ou proscrits. Après un examen sévère, il trouva les deux tiers des mises en possession tout à fait irréguliers; il en fit aussitôt son rapport à Dessalines. II s'adjoignit une commission de vérification qu'il composa du général Magloire Ambroise, de l’adjudant-général Lacroix, du chef de bataillon Gabriel Raimond. II vérifia la caisse du citoyen Fabre, trésorier particulier, vieillard généralement estimé à Jacmel. Fabre avait prêté l’argent de la caisse publique à plusieurs négociants qui trafiquaient avec St-Thomas. Inginac, voulant le tirer du plus grand embarras, prolongea, à dessein, son opération, pendant plusieurs jours, afin de lui procurer le temps de réunir assez de fonds pour combler le déficit. II vérifia ensuite les comptes de toutes les administrations. Les autorités de Jacmel dénoncèrent à Dessalines, qu'au lieu de sévir contre les dilapidateurs, le directeur des domaines les favorisait. L'empereur, croyant Inginac incapable de trahir son devoir, n'ajouta pas foi à ce rapport.

Apprenant que plusieurs maisons de commerce frustraient à l’Etat la plupart de ses droits d'importation et d'exportation, Inginac se transporta à la douane, plaça des garnisaires à bord des navires déjà chargés et se fit remettre un état fidèle des denrées qui avaient été embarquées, Sur sa demande, on lui confia les livres de la douane et particulièrement ceux de pesage. Le chiffre des produits embarqués fut trouvé beaucoup plus élevé que celui porté sur les registres de la douane. Inginac fit confisquer au profit de l’Etat la différence qui existait entre les deux chiffres. II y avait en rade, entre autres navires, un trois-mâts le "Chesapeck", et deux bricks l’Orion", et le "Decatur", à la consignation d'un négociant, Thomas Tuart, Anglais Européen, établi à Jacmel depuis trente ans, homme obscur, devenu riche par la contrebande depuis 1804, et considéré comme Haïtien. En chargeant ces trois bâtiments, Thomas Tuart avait enlevé à l’Etat une somme de 24.000 piastres. Inginac établit saisie sur les navires et ne les laissa appareiller qu'après que Thomas Tuart eut payé les 24.000 piastres de droit qu'il avait frustrées, et une somme pareille à titre d'amende. Tuart versa au trésor public 48.000 piastres. En même temps, le feu prit au magasin de l’Etat et le consuma. II fut dit, a l’époque, que les administrateurs avaient porté sur leurs livres, comme existant en magasin, des denrées dont ils avaient disposé, et qu'ils avaient eux-mêmes incendie le magasin de l’Etat pour ne pas rendre leurs comptes.

Dans la plupart des ports ouverts au grand commerce, les négociants étrangers, en corrompant les agents de douane, faisaient débarquer, par contrebande, la plus grande partie des marchandises qu'ils importaient. Ils exportaient les denrées par le même moyen. Ils faisaient de rapides fortunes, et suscitaient toutes sortes d'embarras à ceux des agents du gouvernement qui refusaient de transiger avec eux. Ces derniers étaient sans cesse en lutte avec la corruption que les étrangers répandaient de toutes parts, et succombaient quelquefois sous leurs attaques réitérées par de fausses dénonciations.

Le système par lequel les navires qui arrivaient dans nos ports, étaient consignés par ordre de numéros, produisait dans le commerce le plus violent mécontentement. Les négociants que ce système contrariait s'en plaignaient amèrement et communiquaient au peuple leurs dispositions hostiles. L'obligation de charger les navires en trois espèces de denrées, café, sucre et coton, nuisait aussi aux opérations commerciales. Pour l’expédition des navires qui ne pouvaient appareiller que chargés de ces trois espèces de denrées, l’administration éprouvait les plus grandes difficultés. Au Port-au-Prince, l’administrateur principal Ogé était assailli de réclamations auxquelles il n'osait faire droit quoiqu'elles fussent souvent fondées; il en perdait la raison; il craignait Dessalines, disait-il, comme le tonnerre. Le général Pétion se prononçait hautement contre ces sortes de mesures qui ne pouvaient que ruiner le commerce. Le navire le "Turnboule", capitaine Webster, occasionna un grand scandale avant de quitter le port. N'ayant besoin que d'un chargement de café et contraint d'embarquer du sucre et du coton, il vendit sur le wharf, à raison de deux gourdes, le sucre qu'il avait acheté quatre gourdes, et se défit de la plus grande partie de son coton en le jetant a la mer.

Du Port-au-Prince on adressait des pétitions a l’empereur et on lui demandait avec instances l’abrogation des décrets qui régissaient le commerce. En les recevant, Dessalines entrait en fureur et disait qu'il avait des baïonnettes et qu'il saurait faire exécuter ses arrêtés, qu'il lancerait ses grenadiers sur ceux qui ne s'y soumettraient pas. Bazelais et Charlotin lui exposaient en vain qu'il était injuste de contraindre le commerce à acheter ce dont il n’avait pas besoin. Au milieu de ses plaintes et de ses emportements, il disait que la corruption atteignait même la classe des laboureurs. Alors quelques employés qui n'appartenaient pas à son entourage l’exhortèrent à donner des soins a l’éducation morale et religieuse du peuple, afin qu'il ne put être séduit par le langage des mauvais citoyens. II leur répondit qu'ils étaient dans l’erreur; que les indigènes ne pouvaient être bien dirigés que par la crainte des châtiments et de la mort surtout; qu'il ne les conduirait que par ces moyens et que sa morale était la baïonnette. Juste Chanlatte, Boisrond Tonnerre et Cangé applaudirent à son langage.

Le cœur et l’esprit des masses n'étaient pas cultivés. On n'employait à leur égard que la force; au lieu d'administrer, au lieu de porter le peuple au travail par l’éducation religieuse qui lui fait comprendre ses devoirs, on mettait en pratique la contrainte. Presque tous les généraux, dans leurs lettres a l’empereur, lui demandaient l’emploi des moyens les plus rigoureux. C'était un reste du système de la servitude, alors que le Blanc confondait l’esclave avec le bétail. Christophe et Pétion découvraient ce qu'il y avait de vicieux dans cet ordre de choses; plus tard le premier, tout en contraignant violemment, il est vrai, le peuple au travail, instituera des académies; le second morcellera les terres de l’Etat, conquises sur les colons, les concédera au peuple, fondera un lycée et de nombreuses écoles nationales

Mentor qui avait fini par éprouver ce qu'il y avait de chimérique dans ses projets ambitieux, s'était rallié au parti du général Christophe en lequel il reconnaissait un grand avenir. Quand il entendait Dessalines se prononcer contre l’éducation du peuple, il disait à l’écart à ceux qui parlaient d'améliorations morales et intellectuelles : "Ne voyez-vous pas que Dessalines est un barbare, un tyran abominable ? II est loin de penser comme le général Christophe qui a sa place, eut apprécié vos observations et vous en aurait su gré".

En ordonnant de fermer, dans l’empire, les loges de francs-maçons, Dessalines souleva contre lui l’indignation d'un grand nombre d'hommes de quelque instruction. Cependant les maçons se réunissaient secrètement et se livraient à leurs travaux. Parmi ceux du Port-au-Prince, on distinguait des hommes qui presque tous ont joué plus tard, en Haïti, des rôles supérieurs : les citoyens Auguste Nau, B. Inginac, Sabourin, Noel Piron, Dieudonné, Almanjor, Antoine Gérin, Monnier, Perdriel, Fresnel, Jean-Pierre Boyer, Jean Thézan, Jn.-Fs. Lespinasse. Ils se réunissaient habituellement, en passant par des portes dérobées, dans une maison en face du Réservoir, près de la Terrasse. Pour n'être pas dénoncés à Dessalines, ils avaient soin d'inviter à leurs banquets quelques profanes influents, le colonel Germain Frère, commandant de l’arrondissement, le chef de bataillon Bedouet, commandant de la place, un aide de camp de Pétion, nommé Dormans, le colonel Destrade, le lieutenant-colonel Apollon, Moreau, négociant. Quant au général Pétion qui ne voulut jamais se faire initier au secret des signes maçonniques, purement conventionnels, il n'ignorait pas leurs réunions et les tolérait contrairement aux instructions qu'il avait reçues. Dessalines avait en horreur la Franc-maçonnerie. II ne voulait pas comprendre ce qu'il y a de sublime dans cette institution dont le but est de rendre les hommes meilleurs en établissant parmi eux la plus étroite fraternité. II confondait les maçons avec les vaudous, (sorciers de nos campagnes) qu'il faisait fusilier quand on les arrêtait. Apres son entrée au Port-au-Prince, en 1803, à la tête de l’armée indigène, ayant appris qu'il y avait une loge ou se réunissaient des francs-maçons, il avait aussitôt ordonné au chef de bataillon Bedouet d'aller briser leur temple, à la tête d'une compagnie de grenadiers. Ce qui avait été sévèrement exécuté. II s'imaginait que les francs-maçons ne se réunissaient que pour conspirer contre lui. Leur société, parce qu'elle était mystérieuse, lui inspirait toutes sortes de défiances.
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Message  Invité Mer 13 Avr 2011 - 10:33

Je relis les textes en vrac parce que le temps me manque .Je ne puis m'empecher ces commentaires :

J'ai toujours dit que les peres fondateurs sont dignes de notre reconnaissance .Cependant,ils ne peuvent meriter notre gratitude servile .Cela equivaudrait a nous mettre dans un etat mental d'inferiorite qui nous rendrait incapable d'accomplir des oeuvres ,des exploits a la grandeur de leur imagination .Il s'agit d'egaler le c ourage de nos anceters en confrontant les defis de l'existence .En notre cas precis nous n'arrivons meme pas a les imiter au niveau de vecu journalier .

Mwin toujou di e la sajess di sa tou ke moun pa fe pitit pou yo sott menmjan avek yo.Si w w pakon li w voye yo lekol pou yo sa kon li pou you sa vini sa w pat ye sa w patgen opotinite pou ye .Sekonsa progre sosyal ka fett kote kigen vizyon peyi .

L'intelligence active ne peut jamais etre bornee par la stagnation du vil parti-pris qui ne peut en fin de compte que denigrer l'esprit libere et affranchi .Le parti-pris fait echec a l'action positive du renouvellement permanent et necessaire du destin national a travers le genie de chaque generation.La routine et la stagnation tuent meme les civilisations les plus solides ,les plus prometteuses.

CAVEAT EMPTOR.

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Message  Maximo Jeu 14 Avr 2011 - 7:19

Le général Pétion était tombé dans une disgrâce réelle, quoique non avouée de l’empereur, depuis les déplorables circonstances qui avaient amené la mort du capitaine Chancy. Cependant Dessalines avait une si grande confiance en sa loyauté qu'il le jugeait incapable d'entrer dans une conspiration centre lui. La vie pleine de simplicité que menait Pétion, son horreur du faste et des pompes cérémonieuses, avaient fait naitre cette confiance en Dessalines, qui voyait ses autres généraux démontrer la plus grande ostentation. Le général Capoix, au lieu de douze guides que lui accordaient les ordonnances, en avait un escadron brillamment vêtu.



Le colonel Germain Frère, faisant ce qu'il croyait qui put flatter les passions bonnes ou mauvaises de l’empereur, mettait tout en œuvre pour contrarier le général Pétion, lui susciter des embarras et même le compromettre. Néanmoins la ville de Port-au-Prince était toujours très animée; ses habitants s'adonnaient aux plaisirs de tous genres; comme on s'attendait, à chaque instant, à l’arrivée d'une nouvelle expédition française, et que l’on était déterminé à faire le sacrifice de ce que l’on possédait sur le littoral, pour se réfugier dans les montagnes, on dissipait en folles dépenses ce que l’on gagnait. II y avait presque chaque soir des concerts et des représentations théâtrales. On jouait des mélodrames que composaient de jeunes Haïtiens, sur les principaux épisodes de notre guerre nationale. De nombreuses salves d'applaudissements retentissaient dans la salle quand les acteurs disaient les triomphes des armes indigènes. Le colonel Germain Frère assistait le plus souvent à ces représentations, la tête chargée d'un bonnet a poil sur lequel il était écrit en lettre rouges: Haïti, tombeau des Français. Les barbacos ou parties de plaisir à la campagne, avaient lieu fréquemment dans les environs du Port-au-Prince. Les différents cercles qui formaient la société de cette ville, s'y rendaient en cavalcades ou en voitures. Les dames coiffées de véritables madras de l’Inde, revêtues de robes de soie, de pierreries et de riches colliers, se montraient infatigables à la danse. L'or et l’argent étaient apportés avec abondance sur des tables dressées dans de belles allées de manguiers, et les officiers supérieurs jouaient des sommes considérables. Les jeunes gens de l’époque portaient de larges habits, des pantalons de nankin très amples, de longs jabots, et des chapeaux à larges bords. Ils avaient des bottes à la hussarde garnies de petits poignards, et de nombreuses breloques à leurs chaines de montre.



A un barbaco donne sur les bords de la Grande-Rivière du Cul-de-sac par le colonel Germain Frère, les dames et les cavaliers se livrèrent aux plaisirs les plus licencieux. Le général Pétion qui y avait été invite, se tenait isolé de la foule, assis sous un arbre, auprès de sa compagne, Mademoiselle Joute Lachenais. "Quoi, s'écria Germain Frère, armé d'une bouteille de vin rouge, d'où vient que le général Pétion refuse de prendre part à nos plaisirs?". Et, sans respect pour le divisionnaire, son supérieur, il s'approcha de sa compagne et répandit sur sa robe la liqueur que contenait la bouteille. Pétion pâlit d'indignation, contint sa fureur, monta aussitôt en voiture et rentra au Port-au-Prince. De ce moment, il rompit ses relations avec Germain Frère et ne communiqua avec lui que pour le service public. II fut contraint néanmoins de dévorer cet affront, car Germain, quoique sous ses ordres, était plus puissant que lui auprès de l’empereur. Mais quand les troupes prendront les armes contre Dessalines, Pétion, dominant le mouvement insurrectionnel par l’ascendant de ses talents et de son courage, se trouvera sans influence pour sauver Germain Frère.



Il avait pour médecin un Blanc français, nomme Pujol, qu’il avait sauvé du massacre, en 1804, Le bruit se répandit que ce médecin avait reçu l’ordre de l’empoisonner. Pétion l’exhorta à fuir le pays, en lui disant qu'on le rendrait responsable de ce bruit, et l’en punirait en le faisant périr tôt ou tard. Pujol, qui l’aimait, ne voulut pas se séparer de lui, et refusa de s'embarquer. Mais il fut ensuite mandé à Marchand et contraint de s'y établir.



Pétion s'aperçut que ses moindres démarches étaient surveillées par les agents secrets de Germain Frère: il paraissait redouter d'être victime d'un guet-apens. Germain Frère n’envoyait, pour monter la garde au bureau de la division militaire, que des soldats disposés à exécuter tous les ordres qu’il eut pu leur donner. Négligeant entièrement les affaires publiques, sous l’influence d'un profond dégout, ne faisant aucun effort pour neutraliser les excès auxquels se livrait Germain, Pétion, qui aimait la marine, passait ses journées à faire construire, sous ses yeux, une belle goélette qu'il appela plus tard l’Indien". Souvent il allait passer la nuit à bord d'un petit bâtiment qui était toujours mouillé en face de sa maison bâtie sur le rivage de la mer. Se tenant sans cesse sur ses gardes, et ne pouvant contenir l’élan que Germain Frère donnait à ses passions, il voyait s'amonceler sur la tête de ce dernier les orages qui devaient le foudroyer.



Ce fut vers cette époque que Thomas Marie-Jeanne cet ancien colonel de la 12e demi-brigade, qui avait été emprisonné en 1803, pour avoir pillé quelques maisons de la rue des Fronts-Forts, lors de l’entrée de l’armée indigène au Port-au-Prince, tenta inutilement de s'évader. Germain Frère le fit conduire vers l’habitation Jonc, dans la plaine du Cul-de-Sac, ou il fut exécuté. On annonça à Dessalines que Thomas Marie-Jeanne avait formé le projet de soulever les cultivateurs de la montagne du Grand-Fond. Peu de jours après, deux indigènes-espagnols, devenus soldats de la 12e demi-brigade, qui étaient sortis du Port-au-Prince, pour aller travailler à la campagne, furent fusillés. Les troupes avaient en vain fait entendre le cri de grâce. Ces Espagnols étaient d'anciens prisonniers, conduit nos soldats, en 1805, de la partie de l'Est, dans l’ancienne partie française. On les avait accusés d'avoir cherché à gagner Santo-Domingo.



Dana les derniers jours de décembre 1805, la plupart des généraux de l’empire et de nombreux colonels et chef de bataillon s'étaient réunis à Marchand pour assister à la fête de l’Indépendance du 1er janvier 1806. Le soleil du 1er janvier brilla de tout son éclat. Le troisième anniversaire de l’Indépendance fut célébré avec pompe.







Le peuple et l’armée jurèrent avec enthousiasme et orgueil de vivre libres et indépendants. Les haines politiques qui divisaient les citoyens furent un moment oubliées en présence de ce serment solennel, car il formulait l’horreur de toute domination étrangère dont étaient animés tous les cœurs.



Les généraux partirent de Marchand et se rendirent dans leurs commandements respectifs, rêvant la plupart aux moyens d'abattre Dessalines. Le mécontentement était devenu tel qu'une révolte sur un point quelconque de l’empire devait produire un embrasement général. Ce mécontentement provenait non pas de l’établissement de l’empire mais de la violation des droits des citoyens, droits consacrés dans la Constitution, du mépris de leur vie et de leurs propriétés dont on disposait arbitrairement, des actes de brutalité auxquels se livraient impunément un grand nombre des lieutenants de l’empereur, des violences exercées sur des femmes respectables, de la conviction fortement éprouvée qu'on était livré totalement à la discrétion du chef du gouvernement et de son entourage. Voila ce qui poussait à la révolte les hommes de lumière ayant le sentiment de la métaphysique de la liberté. Le peuple des villes et des campagnes, les troupes eussent peut-être soutenu Dessalines dont la grande gloire militaire les avait enthousiasmés, s'il n'y avait pas eu une désorganisation générale dans l’administration. Les cultivateurs subissaient le travail forcé, et il arrivait quelquefois que le quart leur revenant dans les produits ne leur était pas distribué. Les officiers supérieurs influents empêchaient leurs plaintes de parvenir à l’empereur. Le soldat, de son coté, n'était ni payé, ni habillé, et très irrégulièrement rationné; cependant il était caserné, soumis sévèrement au code pénal militaire, et n'ayant guère la faculté de se livrer à une industrie pour subvenir à son entretien. Le peuple, quand il n'est pas tourmenté par ces persécutions qui l’atteignent même dans sa vie privée, et qu'il est l’objet de la sollicitude d'un gouvernement prévoyant sans cesse ses premiers besoins, accepte souvent le despotisme. Mais le joug qu'il portait déjà avec impatience, sous Dessalines, n'était point allégé par une administration intelligente et paternelle. Dessalines, bon capitaine, pendant la guerre, éblouissant les populations par ses victoires, n'avait pas, au sein de la paix, assez de capacités administratives pour les contenter tout en les despotisant. D'une autre part, les officiers de l’armée du Sud, qui avaient lutte contre lui sous Rigaud, et qui ne s'étaient soumis à son autorité, pendant la guerre nationale, que pour sauver la cause de la liberté, profitaient de toutes ses fautes pour aigrir contre lui les populations. Les instincts invincibles d'absolutisme de Dessalines, ses folles dépenses qui ne lui permettaient pas de servir efficacement contre les prévaricateurs et les contrebandiers, la corruption profonde de beaucoup de ses agents tant civils que militaires, le désordre introduit, à dessein, à force de séductions, dans l’administration, par les négociants étrangers courant après de rapides fortunes, l’ambition de plusieurs de ses lieutenants qui exploitaient contre lui tous ses écarts, avaient amené cet état de choses déplorable qui, en s'écroulant, divisa le pays en deux parts et fit naitre une guerre intestine longue et cruelle.
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Message  Maximo Dim 17 Avr 2011 - 12:52

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Message  Maximo Dim 17 Avr 2011 - 12:53

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Message  Maximo Dim 17 Avr 2011 - 12:53

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Message  Maximo Dim 17 Avr 2011 - 12:55

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Message  Maximo Dim 17 Avr 2011 - 12:55

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Message  Maximo Lun 18 Avr 2011 - 6:46

Avant le retour de Vernet à l’Artibonite, le colonel Germain Frère l’invita à passer une journée sur l’habitation Santo, sucrerie de la plaine du Cul-de-Sac. II lui fit servir, avec le café, un sucre qui avait eu le temps d'être fabriqué, d'une heure après minuit à six heures du matin. Les cannes qui l’avaient fourni n'avaient été coupées qu'à une heure du matin. Tant étaient prodigieux les résultats du travail forcé auquel étaient assujettis les cultivateurs.



Le mécontentement de la nation allait croissant par la désorganisation qui pénétrait de plus en plus dans les administrations. D'une autre part, la plupart des grands de l’empire, qui avaient en vain sollicité des titres de distinction et des cordons, abandonnaient Sa Majesté qui se privait d'un fort appui en ne voulant pas créer une aristocratie. II n'existait entre le peuple et l’empereur aucune classe intermédiaire. Mentor lui disait souvent qu'il était tel que Pharamond, le premier de tous les guerriers, l’élu d'un peuple d'hommes libres. La gloire de Dessalines, que les feux de la guerre pouvaient relever en la surdorant, se ternissait au sein de la paix. Boisrond Tonnerre l’excitait sans cesse contre ses principaux lieutenants. II n'aimait ni Christophe, ni Geffrard, ni Pétion, et il répétait souvent que ce dernier jouait le rôle de Sixte Quint. A cette époque, Pétion, souffrant de douleurs rhumatismales, se montrait rarement en public. Boisrond Tonnerre n'hésitait pas à perdre, dans l’esprit de l’empereur, n'importe quel citoyen qu'il soupçonnait de conspirer. Si les talents pouvaient absoudre de l’immoralité, il mériterait d'immortelles couronnes; il a puissamment contribue à notre glorieuse émancipation par ses écrits étincelants d'énergie révolutionnaire. La rivalité qui existaient entre les deux castes noire et jaune formant la nation haïtienne, se témoignait par une foule de petits faits, malgré les efforts qu'avait déployés Dessalines pour l’anéantir; l’empereur avait parfaitement compris qu'en entretenant les animosités de castes, il minerait la nationalité haïtienne. II venait de faire emprisonner le colonel Giles Bambara qui avait tenu des propos de castes, dans les mornes du Petit-Goave. Giles mourut dans les cachots. Une discussion avait eu lieu, au Port-au-Prince, dans les galeries de l’église, entre deux officiers noirs, Michel Tendant et Bastien. Chervain, homme de couleur, ainsi que Bedouet, homme de couleur, avait été présent à la scène. On prétendait qu'il eut dit a Bedouet: "Allons-nous en; cela ne nous regarde pas; ne mettons pas le doigt entre l’arbre et l’écorce". Michel Tendant dénonça Bedouet, commandant de la place, d'avoir entendu ce propos et de n'avoir pas fait punir Chervain. Dessalines manda, a Marchand, Bedouet et Michel Tendant. Des que ce dernier se présenta devant l’empereur, il se jeta à ses pieds lui demandant justice, les larmes aux yeux. Dessalines le releva et ordonna de conduire Bedouet au cachot, au fort de La Fin du Monde. Bedouet qui n'avait point été entendu éclata énergiquement contre l’ordre de l’empereur. II déclara que Chervain n'avait rien dit, en sa présence, et que Sa Majesté devrait assez connaitre ses sentiments pour ne pas le condamner sans l’avoir écouté, que depuis quelque temps, elle éloignait d'elle ses vieux compagnons d'armes, ceux qui avaient été a ses côtés, dans les bois, dans les montagnes, pendant les dangers de la guerre de l’Indépendance, pour se placer sous l’influence de vils flatteurs qu'on ne voyait sur la scène que depuis l’expulsion des Français. Montrant du doigt les hommes qui étaient auprès de Dessalines, il dit: "De tous ceux qui vous entourent, je n'ai vu avec vous, pendant la guerre, que les Bazelais, les Roux, les Diaquoi, les Charlotin; que les Français viennent encore nous attaquer, ou que le peuple se soulève, vous nous trouverez toujours à vos côtés, tandis que vos flatteurs vous abandonneront." Dessalines que ces paroles avaient irrité davantage le fit trainer au cachot. L'impératrice avait été témoin de cette scène. Pendant un mois que Bedouet demeura en prison, elle lui envoya chaque jour une abondante et délicate nourriture. Elle finit par obtenir sa grâce en disant à Sa Majesté que les paroles qu'elle avait entendues étaient des vérités dont elle dut profiter. Bedouet fut renvoyé au commandement de la place du Port-au-Prince, et Michel Tenant, de lieutenant, fut fait chef de bataillon dans la I2e demi-brigade. Quoique Dessalines inspirât une grande terreur, ses vieux compagnons d'armes lui parlaient avec audace et contenaient souvent ses fureurs par la fierté de leur attitude, Lubin Hudicourt, par son énergie, avait été réintégré dans son grade d'officier supérieur. A cette époque, Inginac, directeur des domaines de l’Ouest, contre lequel une femme porta des plaintes, faillit tomber en disgrâce. II avait refusé de la mettre en possession d'un bien qu'elle réclamait sans être munie d'aucun titre. Elle avait invectivé contre lui, et il l’avait chassée de sa présence en la traitant de Messaline. Elle s'était rendue à Marchand, et s'était plainte à l’empereur d'avoir été appelée une Dessalines. Le directeur des domaines, mandé à Marchand, fut contraint d'abandonner ses bureaux, et de s'y transporter en hâte. S'il ne fut pas plongé dans les cachots, c'est que le général Bazelais parvint à faire comprendre à Dessalines ce que l’on entendait par une Messaline. En même temps, un administrateur, accusé de prévarications, avait été appelé à la capitale pour rendre ses comptes. Dessalines lui ordonna, en présence de son état-major, de calculer, sous ses yeux, à haute et intelligible voix. L'administrateur obtint, à la fin de plusieurs colonnes successives, des zéros et retint des unités. Dessalines, l’interrompant, s'écria : "Je ne m'étonne pas que vous ayez été dénoncé, puisqu'en ma présence vous osez tout retenir, et ne laisser à l’Etat que des zéros." L'administrateur retourna dans ses foyers sain et sauf; mais il fut destitué peu de temps après.



L'empereur sortit de la salle où il se trouvait, attiré dans la cour du palais, par les menaces que se faisaient deux officiers qui se querellaient, Poulu, ancien officier de Rigaud, et Laurore Gabart, capitaine dans la 4e demi-brigade. II leur commanda de se battre sous ses yeux. Ils se placèrent à vingt-cinq pas l’un de l’autre et vidèrent leur différend au pistolet; ils usèrent une douzaine de cartouches chacun, et le combat continua jusqu'à ce que l’un des deux succombât. Quand Poulu reçut le coup mortel, tourna sur lui-même et tomba, Dessalines, jouissant de ce barbare spectacle, s'écria: "Quelle belle pirouette!" Bigot,| ancien officier du Sud, nouvellement revenu dans le pays, eut le courage de dire, en présence de Dessalines qui était très hostile a Rigaud, "que c'était ainsi que mourait un rigaudin."



Dessalines nomma général de brigade le chef de bataillon Vaval, de la 15e d'Aquin et lui confia le commandement de Nippes, sous les ordres de Jean-Louis François. Francisque qui était depuis longtemps colonel de la 15e vit Vaval, son chef de bataillon, devenir son supérieur en grade. II se plaignit amèrement de ce passe-droit, et toute la 15e, partagea son mécontentement. A l’époque, on prétendit que cette injustice avait été exercée envers Francisque parce qu'il était homme de couleur. Le général Guillaume Lafleur, commandant de l’arrondissement d'Aquin, quoique dévoué à Dessalines, jugea sa conduite, en cette circonstance, très impolitique. L'empereur n'avait fait ce passe-droit à Francisque que parce qu'il n'avait nulle confiance en sa fidélité.



II ne tarda pas à apprendre la mort du général de division Jean-Louis François, commandant de la seconde division du Sud. Jean-Louis François fut regretté de tous les citoyens de sa province. C'était un homme du plus noble caractère; quand la mort le surprit, il n'avait démontré aucune disposition hostile à l’égard de Dessalines qu'il n'estimait pas. Cependant il ne conspira jamais contre l’empereur qui lui témoignait toutes sortes de confiance. Ancien officier de Rigaud, il avait combattu, sous ce général, le parti colonial, les Anglais et Toussaint Louverture. II se souleva, au Haut du Cap, contre les Français, en 1802, quand le général Pétion déploya le drapeau de l’indépendance; il était alors officier supérieur dans la 13e demi-brigade coloniale. II devint colonel quand le général Geffrard pénétra dans le département du Sud, à la tête de ce corps; et en 1803, au camp Gérard, pendant la guerre de l’indépendance, Dessalines le nomma général de brigade, le même jour qu'il donna ce grade à Gérin, à Moreau ou Coco Herne, à Férou. Nous avons vu qu'il devint divisionnaire sous l’empire. Le général Geffrard, apprenant sa mort, se transporta à l'Anse-à-Veau et commanda les troupes qui lui rendirent les honneurs funèbres. Son corps fut enterré au pied de l’arbre de la liberté de l’Anse-à-Veau. Les agitateurs répandirent que Dessalines l’avait fait empoisonner; il était mort des suites de nombreuses blessures qu'il avait reçues, Presque dans chaque combat, il avait été atteint de la balle.



Presque aussitôt après la mort de Jn-Ls François, le général Geffrard étouffa une révolte avec une grande énergie. Le mécontentement qui régnait dans les montagnes, s'était témoigné par une prise d'armes. Un laboureur, Germain Pico, occupait une petite propriété dans le voisinage du fort des Platons; il se résolut à se soulever centre Dessalines, quoiqu'il fut entièrement étranger au mouvement insurrectionnel que préparait le général Geffrard. II se fit plusieurs centaines de partisans et attendit, pour s'emparer du fort des Platons, qu'une occasion favorable se présentât. Peu de semaines après, il y eut une fête sur une des habitations du voisinage. Le fort était occupé par une compagnie de la 17e demi-brigade. La plupart des soldats l’abandonnèrent et allèrent à la fête. Pendant qu'ils dansaient et chantaient avec les cultivatrices, Germain Pico, à la tête d'une bande de paysans, se précipita dans le fort et s'en rendit maitre. II contraignit à la fuite ceux des soldats qui se présentèrent pour reprendre la position. Des que cette nouvelle parvint aux Cayes, le général Moreau écrivit au général Geffrard qui était encore à l’Anse-a-Veau, pour la lui annoncer, et s'achemina sur les Platons, à la tête des 13e et 17e demi-brigades. II parvint au pied du morne sur l’habitation Leprêtre, le lendemain au coucher du soleil. Il fit faire halte à la brigade pour y passer la nuit, et remit l’attaque au lendemain matin. Pendant que les soldats mettaient leurs armes en faisceaux, le général Geffrard, sortant de l'Anse-a-Veau, apparut avec son état-major sur l’habitation. Il blâma sévèrement le général Moreau d'avoir compromis le succès de l’expédition en suspendant sa marche, et lui fit observer que, pendant la nuit, Germain Pico pourrait abandonner le fort, après en avoir enlevé toutes les munitions. Il fit remettre les troupes en bataille et les divisa en trois colonnes. Le colonel Bedouet reçut l’ordre de tourner le fort en passant par l’habitation Titon, à la tête de la 17e. Le général Geffrard, en personne, s'avança, à la tête de la cavalerie par la grande route. Quand il parvint près du fort, il fut accueilli par un coup de canon à mitraille. Pico, le voyant néanmoins s'avancer audacieusement, abandonna les remparts avec tous les siens et gagna les bois. Les soldats des 13e et 17e, en pénétrant dans le fort, trouvèrent, hors des magasins et disposées pour être enlevées, plus de cent caisses de poudre. Plusieurs colonnes de troupes furent lancées à la poursuite de Germain Pico. Quelques jours après, il eut la tête tranchée par un montagnard, nommé Blaise, vieil officier africain.



Geffrard s'était hâté d'étouffer cette révolte parce qu'elle avait éclaté en dehors de son influence, et que l’homme qui en avait été le chef, s'il avait réussi, eut méconnu son autorité aussi bien que celle de l’empereur. Après cet événement, l’influence de Geffrard prit une plus forte consistance. II se prépara à prendre les armes contre Dessalines. La plupart des autorités des Cayes lui étaient aveuglément dévouées et on se proposait d'arrêter l’empereur à sa première tournée dans le Sud.
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Message  Maximo Mar 19 Avr 2011 - 16:41

Si Dessalines n'y venait pas, Geffrard devait, en prenant les armes, donner aux autres points de l’empire le signal de l’insurrection. Vénéré des troupes et du peuple du Sud, il se faisait rendre aux Cayes les honneurs qui n'étaient dus qu'au chef de l’Etat. Christophe agissait de même, au Cap, comme nous l’avons vu. Geffrard, en visitant le fort des Platons qu'il avait fait construire, disait quelquefois aux soldats ; "Bientôt nous verrons si l’empereur sait encore faire la guerre". Le dérèglement qui existait alors dans les mœurs, l’avait aussi atteint. Quoique marié, il entretenait plusieurs maitresses, qui rivalisaient de faste avec celles de Dessalines. Les habitants des Cayes donnaient des concerts et des bals presque chaque soir, et y déployaient le plus grand luxe. Les concubines de l’empereur, ainsi que celles de Geffrard, n'allaient en promenade qu'en cavalcades ou en voitures, escortées d'officiers de tous grades. Mademoiselle Euphémie Daguille portait ses dépenses que le trésorier des Cayes était obligé de solder à des chiffres très élevés. Elle se faisait appeler l’Amie de l’empereur; ses têtes de lettres, imprimées aux frais de l’Etat, portaient:




Liberté ou la Mort







EMPIRE D'AITI





Aux Cayes le...



Euphémie Daguille, Amie de Sa Majesté Jacques, Empereur d’Haïti.







On appelait aussi les amies du général Geffrard, les concubines de ce dernier.







Sur le rapport du ministre de la Guerre et de la Marine. L’empereur avait rendu un décret sur la navigation, le 1er février 1806. Gerin qui l’avait fait, et dont les connaissances maritimes étaient aussi bornées que la petite baie qui s'étend entre Pestel et les Cayemites, n'y avait guère stipule que des dispositions concernant les pêcheurs, leurs filets, les caboteurs, formulant en articles ce qui se passait chaque jour sous ses yeux, le long du rivage. Cependant l’avait étendu ses vues sur quelques dispositions vraiment utiles. L'article 6 portait : "Tous capitaines et officiers qui seront par nous brevetés à l’avenir, seront astreints à subir un examen préalable et admis à prouver qu'ils ont servi en qualité d'officier marinier sur les bâtiments de l’Etat pendant six mois au moins, ou sur un autre bâtiment de quinze hommes d'équipage au moins, et cela pendant six mois dans chaque grade, en tout dix-huit mois de service, comme officier marinier, sous-lieutenant et lieutenant, avant que d'être reçus capitaines."



L'article 7 était ainsi conçu : "Les examens et réceptions seront faits par un comité de marine, qui sera tenu en présence du commissaire des guerres et de la marine, composé des deux plus anciens capitaines de la marine militaire, d'un capitaine d'artillerie, d'un chef de mouvement des ports, d'un maitre de mathématiques ou d'hydrographie et qui poseront des questions de théorie et de pratique, sur la manœuvre, au candidat, sur le mouillage, l’appareillage, le canonnage et quelques notions sur le pilotage et la variation de la boussole. Si les examinateurs ne trouvent pas le candidat suffisamment instruit, ils le renverront à un autre jour avec des instructions par écrit; dans le cas que les réponses fussent satisfaisantes aux questions, elles seront envoyées au ministre de la marine qui sollicitera le brevet de moi; il en sera à peu près de même pour les capitaines de cabotage.



Les articles 20, 21 et 22 étaient conçus ainsi qu'il suit:



Art. 20. Les enrôlements pour l’armée navale se feront par la presse et le temps du service des marins ne sera point limité.



Art. 21. La manœuvre des bâtiments exigeant une ponctuelle obéissance et toute la célérité dans les mouvements, le commandant ne souffrira point de réplique; tout subordonné qui aura hésité d'obéir, et par le défaut d'exécution, aura compromis la sureté des bâtiments ou des personnes, sera puni d'un châtiment exemplaire, (passe a la bouline) et jugé d'après le code, si le délit l’exige.



Art. 22. Tout article du code pénal militaire est applicable aux marins comme aux troupes de terre.



Pendant que l’empereur, froissant beaucoup d'intérêts, se livrait à ses moindres caprices, il apprit l’arrivée à Jacmel du célèbre Miranda, qui se dirigeait vers la Cote-Ferme pour la soulever contre l’Espagne. Il envoya l’ordre au général Magloire Ambroise de lui faire l’accueil le plus distingué, de lui fournir des armes et des munitions, et de lui permettre de recruter de jeunes Haïtiens. II lui fit parvenir le conseil, s'il voulait réussir, de mettre en pratique, dans la province de Venezuela, les moyens violents qui avaient amené le triomphe des armes indigènes, moyens terribles et efficaces qu'on ne voit employer, dans l’histoire, que lorsque l’aristocratie, résistant avec opiniâtreté aux plus justes réclamations, porte les peuples au désespoir). Les indépendants de la Nouvelle Grenade n'avaient pas assez souffert pour sentir le besoin d'une révolution radicale. Apres la trahison de Dumouriez, Miranda, un de ses lieutenants les plus distingués, avait été arrêté, jugé et absous. Plus tard il fut réintégré en prison, et à la fin de 1797, il fut mis en liberté; mais il reçut l’ordre de quitter le territoire français. Il passa en Angleterre ou il prépara son expédition contre les colonies espagnoles. II se rendit ensuite aux Etats-Unis ou il se procura trois navires armés, entre autres une corvette de 30 canons. Il était venu à Jacmel pour organiser ses équipages, accompagne de 200 jeunes Américains. Il partit d'Haïti dans les premiers jours de mars, et se rendit a la Cote-Ferme. De nombreux Haïtiens, qui avaient accepté les périls de cette expédition lointaine, s'y distinguèrent la plupart.



Dessalines recevait a Marchand des dénonciations, de tous cotés, principalement contre les officiers du département du Sud. Le chef d'escadron Borgella, commandant de la place d'Aquin, avait été dénoncé par Boisrond Tonnerre d'avoir favorisé la fuite de plusieurs Blancs pendant le massacre de 1804. Borgella avait hautement applaudi a la conduite du général Jean-Louis François qui avait arraché à la mort presque tous ceux de l’arrondissement d'Aquin. Dans le même quartier, le citoyen Fremont, administrateur, s'était aussi distingué, en cette circonstance, par une belle action. Voyant des soldats conduire à la mort un petit blanc de dix ans, il l’avait retiré de leurs mains en leur donnant vingt gourdes, et l’avait ensuite clandestinement embarqué. Borgella se rendit à Marchand, dans le courant d'avril. Geffrard, son ami, lui avait recommandé de tout nier avec audace devant l’empereur. Depuis quelque temps, Dessalines se laissait dominer par toute la violence de son caractère. Il n'y avait plus dans l’empire l’ombre d'une administration; l’on voyait de toutes parts des prévaricateurs qui, sans honte, levaient la tête, et, à certains intervalles, des exécutions. Une douzaine de ces Polonais qui avaient été épargnés et qui étaient employés à l’arsenal de Marchand, craignant d'être sacrifiés tôt ou tard, s'évadèrent pour atteindre la partie de l’Est. Ils furent arrêtés et Dessalines les fit périr tant par le fouet que par le sabre. Leur exécution émut la plupart des habitants de Marchand. L'empereur leur avait fait appliquer, avec son inflexibilité ordinaire, les peines établies par les lois qui régissaient l’empire, car s'ils avaient atteint la partie espagnole, ils eussent grossi le nombre des ennemis de la patrie. L'empereur, très agité, se promenait dans ses galeries. David Troy, qui, de chef de bataillon, avait été fait soldat dans la 4e demi-brigade, était de faction à une des portes du palais. Dessalines appela Borgella, et Boisrond Tonnerre s'avança au-devant de ce dernier et lui tendit la main; Borgella lui refusa la sienne avec indignation. David Troy, en présence de Dessalines, applaudit au mouvement de Borgella. "Est-il vrai, commandant, que vous avez sauvé des Blancs ?". — "Non, sire".-"Cependant d'après les rapports que j'ai reçus..." — "Non, sire".— "On t'a faussement accuse, car si tu en avais sauvé, tu n'aurais pas refusé la main à Boisrond Tonnerre. Tu n'ignores pas que c'est lui qui t'a dénoncé; retire-toi, et sois bon citoyen". Boisrond Tonnerre demeura humilié. Le secrétaire du général Pétion, Boyer, était en ce moment à Marchand. II y était venu pour assister aux noces de son frère, le citoyen Souverain. II était descendu chez Pujol, l’ancien médecin de Pétion. Au milieu d'une belle nuit, couché dans le même lit que Pujol, il entendit frapper à la porte de la chambre qu'il occupait : on appelait le médecin pour donner des soins a un malade. Pujol se leva et alla ouvrir la porte. Dès qu'il se présenta dans la rue, il fut assailli par plusieurs hommes et tue à coups d'épée. Un des assassins dit, en se retirant: "Tu ne me demanderas plus le doublon que je te devais." Le cadavre fut trouvé, le lendemain, étendu contre la porte. On ne connut jamais les coupables.



Dessalines et son entourage dont la conduite était si scandaleuse, s'efforçaient cependant de mettre un frein aux passions du peuple. Pour l’empêcher de se livrer aux excès des liqueurs fortes, l’empereur se résolut à faire démolir la plupart des guildives, du moins celles qui n'appartenaient pas à l’Etat. Dans le Sud, particulièrement, on consommait immodérément le tafia dont la propriété est d'énerver l’homme et de l’abrutir. L'empereur rendit le décret suivant:







Liberté ou la Mort



DECRET IMPERIAL







Jacques, Empereur premier d'Haïti et chef Suprême de l’armée, par la grâce de Dieu et la loi constitutionnelle de l’Etat,



Voulant remédier aux dommages que divers spéculateurs nan autorises apportent à l’exploitation des guildives de l’Etat,



Décrète ce qui suit :



Art. 1er. Toute guildive appartenant ou à l’Etat ou aux particuliers, qui aura été relevée ou établie antérieurement à l’arrêté de son Excellence le ministre des Finances relatif à l’affermage des guildiveries, sera conservée et continuera de fabriquer.






Art. 2. Toutes celles qui auront été réparées ou entreprises par des particuliers, postérieurement à l’arrêté pré cité, sans une permission expresse signée de ma propre main ou de celle de Son Excellence le Ministre des Finances, *« considérées comme illicites et par conséquence démolie.



Art. 3. Dans un mois, a compter du jour de la publication du présent décret, tous les entrepreneurs particuliers qui n'auront pas satisfait au désir de l'article 2, seront poursuivis extraordinairement et auront leurs manufactures confisquées au profit de l’Etat.



Art. 4. Le présent sera lu, publié et affiché partout ou besoin sera, a la diligence des administrateurs.



Ordre aux généraux commandants de division et d'arrondissement, de prêter main forte a l’exécution du



présent décret.



Au palais impérial de Dessalines, le 2 mai 1806, an



3e de I’ indépendance, etc.







DESSALINES







Par l’Empereur:



Le Secrétaire Général, JUSTE CHANLATE






(1) Le secrétaire de Pétion, qui a plusieurs fois raconté ce trait devant son père, a dit qu'il avait reconnu les assassins. Mais il ne voulut jamais les nommer. Sans doute il craignait de flétrir certaines familles (dont la plupart des membres étaient étrangers à ce crime), auxquelles appartenaient les assassins.



(1) Dessalines lui avait fait dire : "Boule cails, coupe tètes." (Incendiez tout et coupez les têtes).
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Message  Maximo Jeu 21 Avr 2011 - 9:35

Dans le département du Sud, les autorités civiles et militaires qui étaient, la plupart, hostiles à Dessalines, ne s'efforcèrent pas de faire exécuter ce décret: les guildives continuèrent à fonctionner, et Dessalines, quand il se tendra dans le Sud, en aout, sera oblige lui-même de les faire démolir par les officiers de son état-major. Le bois de campêche, qu'il avait aussi défendu d'abattre, continuait a être exploité, sans aucune opposition de la part des autorités. Le peuple commençait à témoigner hautement son mécontentement; les femmes que l’on employait dans les travaux publics chantaient un carabinier dont le refrain était: "l’Empereur ménagé manmans pitits" (Empereur, ménagez les mères de famille.) Le mécontentement général, loin de calmer Dessalines, l’irritait davantage. Un Blanc français nommé Noblet, ancien trésorier à Miragoane, sous Rigaud, était revenu dans le pays, après les massacres de 1804. Comme il s'était montré partisan de la liberté générale, Dessalines lui avait accordé la vie. Mais, vers cette époque, il fut mandé à Marchand, et il fut baïonnetté pour avoir osé rentrer en Haïti après la publication qui anathématisait les Français.

La conspiration qu'avait ourdie le général Geffrard conjointement avec Christophe, ne devait pas tarder à éclater. Nous avons déjà vu que le général Christophe avait fait proposer à Geffrard, par Bruno Blanchet, de renverser Dessalines. Geffrard, de plus en plus mécontent de l’empereur, qu'excitait contre lui Boisrond Tonnerre, s'était résolu à se soulever sans plus tarder. Aussitôt après le retour en Haïti des colonels Bigot et Dartiguenave, anciens officiers de l’armée du Sud, Boisrond Tonnerre avait suggéré à Dessalines la pensée que Geffrard voulait favoriser la rentrée de Rigaud dans le pays. Dès cette époque, l’empereur était devenu encore beaucoup plus hostile à Geffrard.

A la fin de décembres 1805, Geffrard s'était concerté avec Pétion sur les moyens d'abattre Dessalines. Aussitôt après la prise d'armes du Sud, l’Ouest devait se prononcer aussi bien que le Nord. L'empereur, qui, par instinct, découvrait la conjuration, avait voulu faire arrêter Geffrard, en le mandant à Marchand; mais il en avait été dissuadé par plusieurs des officiers qui formaient son entourage. En retournant aux Cayes, en avril 1806, Borgella s'était arrêté au Port-au-Prince et avait été charge par Pétion de transmettre, verbalement, à Geffrard, ses dernières dispositions toutes favorables à l’insurrection. Pétion venait aussi de s'aboucher, à St Marc, par l’intermédiaire de Boyer, son secrétaire, avec Blanchet, l’agent de Christophe.

Les choses étaient dans cet état à la fin de mai 1806. Presque tous les officiers subalternes et supérieurs, noirs et jaunes, de la province du Sud, avaient été gagnés contre Dessalines. Le général Geffrard, tout en se livrant aux plaisirs, méditait profondément les moyens d'exécuter son projet. Mais il fut atteint d'un violent vomissement, et, le 31 mai, rendit la vie dans le sein de sa famille. Aussitôt on répandit qu'il avait été empoisonné par les ordres de l’empereur; cependant aucune circonstance ne donnait quelque fondement à ce bruit. Beaucoup de personnes des Cayes ont assuré qu'il mourut d'un abcès à l’estomac, formé par suite d'une chute de cheval survenu aux Platons pendant une partie de chasse. La garnison et presque tous les habitants des Cayes assistèrent à ses funérailles qui furent célébrées avec la plus grande pompe. Sa mort répandit le deuil, de tous cotés, dans la province du Sud. Son corps fut transporté dans la forteresse des Platons et y fut enterré; ses entrailles furent déposées au centre de la place d'armes des Cayes, à une légère distance, à l’est de l’arbre de Liberté. II avait 45 ans.

Ne en 1761 sur l’habitation Périgny, quartier de la plaine à Pitre, hauteurs du camp Perrin, commune des Cayes, il avait pour père un homme de couleur, Nicolas Geffrard, et pour mère une Africaine sénégalaise, nommée Julie Coudro. Il grandit sur l’habitation de son père, se livrant aux exercices de la chasse jusqu'au moment qu'éclate la révolution. Par les soins de sa famille, il apprit à lire et à écrire; il s'exprimait avec facilite, et quoique d'une humeur fougueuse, il était généralement doux et aimable dans ses relations. Sergent dans la compagnie Massé des l’aurore de la révolution (1790), il devint lieutenant en 1793, fit la campagne du camp Dérivaux dans les rangs républicains, sous les ordres du général Rigaud, entra dans la légion de l’Egalité, au grade de capitaine de chasseur, prit part à plusieurs actions glorieuses contre les royalistes de la Grand’ Anse et fut nommé, en l’an 4, par le général français Desfourneaux, chef de bataillon et commandant du camp Périn. Il marcha en l’an 5 contre Jérémie, en passant par les mornes de Plymouth. II fut élevé au grade de colonel, par le général Rigaud, pendant la guerre civile de 1799 et prit le commandement du 4e régiment du Sud. Il se fit toujours remarquer à la tête des troupes par un coup d'œil sur, un grand courage et une sévérité, à l’endroit de la discipline, poussée jusqu'à la dureté. Au moment de la chute de Rigaud, il s'échappa, par un trait d'audace, des mains de Dessalines, partit de Cavaillon, traversa les mornes de Plymouth, atteignit le Corail, puis Jérémie et se rendit à Cuba, fuyant la proscription. Il demeura en cette ile, a St-Yague, jusqu'à l’arrivée à St-Domingue de l’expédition française de 1802. Il revint dans le pays avec les autres refugiés rigaudins, mouilla au Port-au-Prince, se rendit ensuite à St-Marc, s'enrôla simple soldat dans les troupes françaises et combattit Toussaint Louverture, pendant toute la guerre de trois mois. Après la soumission de Toussaint Louverture, il s'achemina vers le Sud pour embrasser ses parents qu'il n'avait pas vus depuis la chute de Rigaud. Mais aussitôt après son arrivée à l'Anse-à-Veau, il apprit que les colons, qui se redressaient, par le triomphe des armes françaises, projetaient de l’arrêter. Il se transporta au Cap ou, par ce qui se passa sous ses yeux, il découvrit le projet du gouvernement de rétablir l’esclavage. Il se rallia a Pétion des que celui-ci prit les armes contre les Français, au Haut du Cap. Dessalines, proclamé général en chef par les insurgés, le rétablit dans son grade de colonel et l’envoya porter la guerre dans le Sud contre les Français. Apres la prise de l’Anse-à-Veau, en janvier 1803, il fut promu au grade de général de brigade. II parvint à faire accepter l’autorité de Dessalines par les indépendants du Sud qui avaient en horreur le général en chef depuis la guerre civile entre Toussaint et Rigaud. Il conduisit la guerre qu'il fit aux Français avec une rare habileté, loin des regards de Dessalines, livré à ses propres ressources : il fut le héros de la guerre de l’indépendance dans le département du Sud. Quand la mort le surprit, il se disposait, comme nous l’avons vu, à prendre les armes contre l’empereur dont le système gouvernemental était contraire à ses principes. On a dit, sans raison, qu'il avait été empoisonné par les ordres de Dessalines. L'espèce humaine semble toujours croire, en effet, qu'un être extraordinaire ne puisse mourir naturellement, par un simple accident de santé.

Apres la mort de Geffrard, la conspiration dont il était l’âme dans le Sud et qui devait éclater aux Cayes, à la première arrivée de l’empereur en cette ville, n'eut plus aucune suite. Les conjurés, tremblant pour leurs têtes, cessèrent de se réunir; l’indiscrétion d'un seul pouvait les perdre tous, Aucun d'eux ne se montra assez faible pour dévoiler à l’autorité les secrets de la trame. Cependant, le général Moreau acquit la certitude, par ses espions, qu'il y avait eu un projet d'insurrection.

L'empereur, n'ignorant pas que son autorité fut ébranlée dans le Sud, résolut de s'y transporter pour déjouer ses ennemis et les frapper au cœur. Il partit de Marchand et parvint au Port-au-Prince, plein de fureur, paraissant ne voir autour de lui que des conspirateurs, et parlant de foudroyer ceux qui résisteraient à ses volontés. Peu de jours après son arrivée, il reçût la nouvelle de la mort du général Geffrard; il parut en être affligé, et le lendemain, il fit chanter un service funèbre en la mémoire de ce général. Cependant dans la soirée qui suivit, il donna un bal, prétextant qu'il avait besoin de quelques distractions pour chasser les chagrins dont il était assailli. Il dit à ses favoris que Dieu, en enlevant Geffrard, avait été plus pressé que lui. Du Port-au-Prince, il s'achemina sur Jacmel, traversa le morne Campan et s'arrêta sur le morne de la Crête-à-Piton pour visiter les fortifications qu'il y avait fait élever. De la il atteignit Jacmel ou il fut magnifiquement accueilli. Dans la semaine qui suivit le jour de son entrée en cette ville, on lui dénonça Thomas Thuat, qu'on accusait toujours de se livrer à la contrebande. Après avoir fait faire une visite domiciliaire en sa demeure par des agents de police, Dessalines se convainquit de la véracité des rapports qui lui avaient été adressés. Il fit assassiner Thomas Thuat, pendant une nuit, par des officiers de son état-major et par des dragons de l’Artibonite qui l’escortaient. Les magasins de Thomas Thuat furent séquestrés au profit de l’Etat; sa caisse pleine d'or et d'argent fut livrée à Dessalines. Les sommes que celui-ci en retira furent employées à créer une maison de commerce éphémère sous la raison sociale Innocent et Co1. Un citoyen de Jacmel fut chargé par l’empereur de gérer cette nouvelle maison. L'empereur fit encore vérifier tous les titres de propriété même ceux des citoyens qui avaient déjà été régulièrement mis en possession de leurs biens. Il quitta Jacmel après avoir excité beaucoup de mécontentement, traversa le Grand-Goave et le Petit-Goave sans s'arrêter. Il ne demeura quelques jours dans chacun des quartiers de Miragoane, de l'Anse-a-Veau, du Petit-Trou, des Baradères et du Corail que pour visiter les fortifications de l’intérieur.



(1) Note fournie par Mr Inginac, Le prince Innocent était un fils de l’empereur.
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Message  Maximo Ven 22 Avr 2011 - 8:02

A l'Anse-à-Veau, il avait ordonné de transporter au fort Desbois les restes de Jean-Louis François déposés au pied de l’arbre de la Liberté qui s'élevait sur la place d'armes. De Jacmel au Corail, il avait fait bruler plus de deux millions de bois de campêche, coupés et mis en tas pour être exportés, contrairement à ses arrêtés. Yayou et Lamarre avaient eux-mêmes fait bruler les bois coupés dans les quartiers de Leogane; mais partout ailleurs, l’empereur, trouvant dans les populations une forte résistance à l’exécution de ses ordres et une mauvaise volonté bien marquée de la part des autorités locales, avait été obligé de les faire bruler par les officiers de son état-major. Il avait pris cette mesure parce que dans la plupart de ces quartiers, on abandonnait les cultures principales, celles du cacao et du café, pour se livrer à la coupe des bois. Il disait dans son indignation : “Je sais bien que les gens du bas de la Cote (du département du Sud) veulent se soulever centre moi; eh bien ; je leur pousse l'épée aux reins pour les porter à prendre les armes; je ne les redoutes pas. J'attends qu'ils campent pour que je les culbute; ce sont de mauvais indigènes; ils sacrifient tout à leurs intérêts particuliers; Ils veulent tout pour eux et rien pour les autres. Mais je les attends de pied ferme; je ferai rentrer dans les domaines beaucoup de propriétés dont on s'est rendu maître par des enquêtes que la mauvaise foi ou la complaisance a formulées. Je vois qu'ils sont courroucés; que m'importe !" II entra à Jérémie sous l'influence de ces fâcheuses dispositions. II y apprit que le général Férou, qui avait été l'ami et l'admirateur de Geffrard, avait trempé dans la conspiration que ce dernier avait organisée. Férou commandait 1'arrondissement de la Grand’ Anse, dont Jérémie est le chef-lieu. Comme il était alors malade, Dessalines en profita pour lui annoncer qu'il avait besoin de quelque repos après les importants services qu'il avait rendus à la patrie. II confia le commandement provisoire de 1'arrondissement à Bazile, colonel de la 18e, et celui de la place à René, les seuls officiers sur le dévouement desquels il put compter. II était toujours sous 1'influence d'une grande agitation d'esprit. Il s'écria, en traversant la place d'armes, à la vue de plusieurs groupes d'hommes de couleur et de Noirs : "Quand donc ces conspirateurs se soulèveront-ils ?" Exclamation qui peint bien 1'impatience de son humeur, son peu d'aptitude au gouvernement et ses tendances à trancher toutes les difficultés par le sabre. Il était las des ménagements qu'il était contraint d'observer, quoiqu'il fût certain de l'existence d'une conspiration; il eut préféré à ces sourdes menées une révolte qui lui eut fourni, à ce qu'il pensait, l'occasion de se défaire de ceux qui lui portaient ombrage. Il chargea Lhérisson, officier d'administration, homme de couleur, qui réunissait toute sa confiance, de la vérification des titres de propriété et des mises en possession dans l'arrondissement de la Grand’ Anse, et partit de Jérémie, après y être demeure huit jours. Il prit la route des Cayes, traversa les Irois, les Anglais, la Chardonnière, le Port-à-Piment, les Coteaux et le Port-salut. Dans tous ces lieux, il fit bruler tous les bois de campêche que les habitants avaient coupés pour l'exportation. Il entra aux Cayes le 1er aout, ayant laissé derrière lui des populations irritées contre son autorité. Le peuple de cette ville l'accueillit sans enthousiasme. Le désordre y était à son comble, ainsi que dans les campagnes environnantes; la police ne se faisait plus, le travail des champs était négligé; la discipline se relâchait dans les rangs des troupes de la garnison; la comptabilité des administrations irrégulièrement tenue était dans la plus grande confusion Le général Moreau Coco-Herne commandait provisoirement la division depuis la mort de Geffrard, l'adjudant-général Papalier, retiré de l'administration des Finances, était adjoint à l'arrondissement, l’adjudant-général Bauregard commandait la place, le chef de bataillon Louis Boisquenez était administrateur des Finances, Boisrond Canal, frère de Boisrond Tonnerre, était directeur de la douane, Eugene Hais, contrôleur, Labbé, garde-magasin, Constant, trésorier, Chalviré, président du tribunal de première instance'1'. Les magasins de l'Etat étaient vides de denrées, les caisses du trésor épuisées, et la plupart des domaines nationaux enlevés à l'Etat par des mises en possession irrégulières.


Aussitôt après l'arrivée de Dessalines, le général Moreau, qui ambitionnait le commandement de la première division du Sud, lui déclara qu'il avait la certitude que Christophe avait été en correspondance avec Geffrard pour renverser le gouvernement. L'empereur, pour s'en assurer, ordonna à Dupuy, un de ses secrétaires, de faire l'inventaire des papiers du général Geffrard qui avaient été saisis. Dupuy trouva beaucoup de pièces pouvant compromettre de nombreuses familles, plusieurs lettres de Christophe. Il dit cependant à Dessalines que la correspondance de Geffrard était toute d'amitié, et sauva ainsi un grand nombre d'individus de tous grades et de toutes conditions. Les papiers furent disposés en liasses et déposés dans le cabinet particulier de l'empereur. Ceux de ses secrétaires que Christophe avait gagnés portèrent toute son attention sur le général Rigaud et lui persuadèrent que Geffrard avait formé le projet de le rappeler dans le Sud. Soupçonnant les principaux habitants des Cayes d'avoir été instruits de tout ce qui s'était tramé contre lui, il leur fit éprouver toutes sortes de vexations. Il chassa des régiments la plupart des officiers et sous-officiers que le général Moreau lui désigna comme ayant été dévoués à Geffrard, et fit passer d'un corps à un autre une foule de militaires. Il ne craignit pas d'humilier publiquement tous ceux qui avaient été attachés à la personne de Geffrard. Il fit soldats les anciens secrétaires de ce général, qui, d'après les règlements impériaux, avaient rang d'officiers dans l'armée, par assimilation. Cette conduite excita d'autant plus l'indignation des citoyens qu'il avait donné des grades d'officier à tous ceux qui avaient été attachés au général Jean-Louis François, même à ses serviteurs.

Dessalines, voulant vérifier sévèrement les comptes de l'administration, ainsi que les titres de propriété, envoya chercher Inginac qui était au Port-au-Prince, par une lettre en date du 15 aout, pour lui confier cette tâche difficile. Comme il avait besoin d'un citoyen habile et dévoué, il ne pouvait mieux s'adresser qu’à Mr Inginac. Celui-ci avait déjà séquestré, au Port-au-Prince, 562 propriétés. Le 21 aout, Inginac reçut la lettre de l'empereur. Le 23 du même mois, il alla saluer le général Pétion, commandant de la division militaire, lui annonça son départ pour les Cayes, lui recommanda sa famille et prit la route du Sud, sous l'influence de tristes pressentiments. Chemin faisant, il reçut une autre lettre de Dessalines ainsi conçue :


Au palais des Cayes, le 18 aout 1806,


an 3e de l'indépendance.


Jacques, Empereur 1er d'Haïti, au Directeur des domaines


Inginac, de la 2e division de l'Ouest


"Si vous n'avez pas reçu ma lettre du 15 courant, laquelle vous enjoignait de vous rendre ici immédiatement, vous voudrez bien ne pas perdre de temps à vous y rendre, attendu que j'ai un pressant besoin de vous."

Inginac accéléra sa marche et parvint aux Cayes le 26 aout dans l'après-midi. Apres être descendu chez le chef d'escadron Voltaire, son ami, il alla rendre ses hommages à l'empereur qui se montrait impatient de le voir. Celui-ci, dès qu'il l'aperçut, s'approcha de lui et lui dit: "Je vous ai fait venir ici pour que vous mettiez un ordre parfait dans l'administration des finances et celle des domaines. Si vous trahissez ma confiance, votre tête tombera comme celle d'un canard; ainsi prenez garde à vous; vous êtes ici dans le pays des traîtres, des flatteurs, des séducteurs, je veux faire maison nette dans toutes les administrations. On vole, on pille l'Etat; on conspire même contre moi; tant pis pour ceux qui se mettront en évidence." Comme il se proposait de sévir contre le chef d'escadron Voltaire, il ordonna à Inginac d'abandonner sa maison et d'aller prendre logement chez l'adjudant-général Papalier. Celui-ci vivait en mésintelligence avec Inginac; Dessalines les rapatria. Inginac se retira chez Papalier, et y établit ses bureaux après avoir pris lecture de la lettre suivante que lui avait adressée l'empereur:


Monsieur le Directeur,

"La confiance que j'ai en vous m'a fait vous appeler ici pour que vous fassiez rendre compte par l'administrateur Quenez de son administration, depuis l'époque qu'il en a pris les rênes. En conséquence, vous vous ferez présenter tous les livres, pièces, etc. concernant cette affaire, afin de travailler à leur dépouillement et de me dresser un compte qui doit me mettre sous les yeux l'état des différentes branches de ce service, avec les observations que vous croirez propres, en vous conformant aux lois et aux ordres qu'il vous produira. Vous vous conformerez aussi à ma lettre du 15 courant. Rappelez-vous que j'espère que ma confiance dans cette occurrence ne sera point trompée.

"Signe: DESSALINES

(1) Vers le milieu de 1805, nous avons vu que Dessalines avait institué des tribunaux.

(1) Nous appelons vulgairement en Haïti le département du Sud, le Bas de la cote, parce que c'est la partie inférieure de l'ancienne partie française de notre île.



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Message  Maximo Dim 24 Avr 2011 - 7:25

L'arrêté de l'empereur concernant les guildives en date du 2 mai 1806 qui n'avait jamais été mis en vigueur dans le Sud par le mauvais vouloir des autorités et par les résistances des populations y fut alors rigoureusement exécuté. L'arrêté portait, comme nous l'avons vu, que les guildives appartenant à l'Etat ou aux particuliers qui auraient été relevées ou établies antérieurement à l'arrêté du ministre (les Finances relatif à l'affermage des guildives, seraient conservées et continueraient à fonctionner; que celles qui auraient été réparées ou entreprises par des particuliers postérieurement à l'arrêté précité, sans une permission signée de la propre main de l'empereur ou du ministre des Finances, seraient considérées comme illicites et par conséquent démolies. Cet arrêté avait pour but de contraindre les populations du Sud à abandonner la culture de la canne pour celles du café. Les produits de la canne, tels que le sirop, le tafia et un peu de sucre, se consommaient dans le pays et ne fournissaient rien à la caisse publique par l'exportation. L'empereur, mal conseillé, donna un effet rétroactif au décret, et fit détruire toutes les guildives, même celles qui existaient depuis plus de dix ans avant l'arrêté du ministre des Finances et qui appartenaient à des officiers supérieurs influents. II souleva de toutes parts le plus grand mécontentement. En cette circonstance, il n'eut aucune considération pour personne. Cédant d'abord aux instances de mademoiselle Euphémie, sa maitresse, il lui avait fait la promesse de respecter une guildive qu'elle possédait non loin de la ville; mais pendant un bal qu'elle lui donna, alors qu'il dansait avec elle, ses soldats, par ses ordres, allèrent démolir l'établissement. En se séparant d'elle après la fête, il lui annonça que sa guildive avait été détruite. Plusieurs hommes ardents s'étaient présentés dans le bal pour l'assassiner. Soit qu'ils fussent déconcertés à l'aspect du fondateur de l'Indépendance, soit qu'ils ne trouvassent pas une occasion favorable, ils ne tentèrent même pas l'exécution de leur projet. Depuis l'arrivée de l'empereur aux Cayes, des fêtes étaient célébrées chaque jour, par les autorités; les officiers supérieurs des quartiers environnants affluaient en ville, accompagnés de leurs maitresses ou amies et en grand cortège. Dessalines, se promenant, une après-midi, sur le balcon du palais des Cayes, porta ses regards vers les Quatre Chemins et découvrit un nuage de poussière qui roulait avec rapidité vers la ville. Peu a peu, le nuage se dissipa, et il aperçût une dame richement parée, en voiture, accompagnée de vingt cavaliers, tous officiers soit supérieurs soit subalternes. Il s'informa avec étonnement de ce que pouvait être cette dame qui faisait cet étalage de toilette et d'équipage. On lui dit que c'était l’amie du général Guillaume Lafleur, commandant de l'arrondissement d'Aquin, qui arrivait aux Cayes pour assister à une fête. Il fut très mécontent de ce que des officiers de l'empire accompagnassent les maitresses de ses généraux; il dit que c'était avilir l'épaulette. Il dépêcha aussitôt au-devant de la cavalcade un officier avec ordre de la disperser. L'officier partit et atteignit le cortège. Aussitôt ceux qui le formaient tournèrent bride vers Aquin, et l’amie du général Lafleur entra seule en ville. Dessalines, quoiqu'il donna: l'exemple de ces scènes scandaleuses, les condamnait quand ses généraux l’en rendaient témoin.



Inginac avait ouvert son bureau de vérification en la demeure de l'adjudant-général Papalier. Les livres des administrations de la 1ere division du Sud étaient dans le plus affreux désordre; des bâtiments étrangers avaient appareillé du port des Cayes, chargés de nos denrées, sans avoir payé aucun droit à l'Etat, et cependant ce fait n'avait pas été dénoncé à Dessalines par les autorités. Le droit sur le cabotage ne figurait nulle part; les magasins de denrées et d'approvisionnements étaient entièrement dégarnis; il n'y avait pas de numéraire au trésor; on n'y trouvait que des bons souscrits, par divers, en faveur de l'Etat. Il n'existait pas de registres de douane, et il n'y avait pas de cadastre pour les domaines. La confusion régnait de toutes parts, et cependant les employés étaient nombreux dans chaque administration. Des magasins de denrées avaient été vidés par la fraude, et les employés disaient que le café avait été enlevé par la crue des eaux. Le bureau de vérification était composé des citoyens Fremont, administrateur d'Aquin, Avignon, garde-magasin des domaines des Cayes, Malval ainé, chef de bureau de l'administration des Cayes, Bruno Pic de Père, chef des bureaux du contrôle, Massieu, préposé de l'administration des Coteaux, Jacques Flon, employé des bureaux d'Inginac. II fonctionnait de huit heures du matin à midi, et d'une heure de relevée à six heures du soir. Boisrond Canal, directeur de douane, frère de Boisrond Tonnerre, fut accusé d'avoir été l'auteur de la plupart de ces prévarications par sa profonde corruption. Il fut consigné chez lui; les scellés furent apposés sur ses papiers et son mobilier, et il fut remplacé par le citoyen Sully. Boisrond Canal ne trouvait pas de commisération devant l'empereur, parce que Boisrond Tonnerre l'avait accusé d'avoir trempé dans la conjuration de Geffrard. Ce dernier avait tenu, à son égard, cette infâme conduite, parce que Canal avait refusé de faire honneur à plusieurs de ses mandats.



Inginac était aussi chargé d'anéantir les donations, testaments, ventes, faits par les Blancs en faveur des indigènes.



Dessalines, agissant sous ('influence de son entourage, attirait sur sa tête la foudre qui devait l'écraser. La plupart des officiers de son état-major avaient l'espoir de jouir des propriétés qu'Inginac ferait rentrer dans les domaines. Mentor était bien d'opinion qu'on annulât les contrats passés par les Blancs en faveur des indigènes, mais il avait conseillé à Dessalines de partager les biens domaniaux entre les soldats et les laboureurs, au lieu de les livrer en jouissance aux principaux officiers, ses favoris. Lorsqu'un peuple à conquis par les armes, sur ses oppresseurs, sa liberté et son indépendance, les propriétés des anciens dominateurs, doivent être partagées entre tous les guerriers, au lieu d'appartenir exclusivement au gouvernement fondé par le nouvel ordre de choses: tel était le raisonnement de Mentor. Les opinions de Mentor sur la propriété que Dessalines n'accueillait pas étaient justes et raisonnables; la masse de la nation eut du, dès lors, être propriétaire, comme elle le devint en 1811 sous le président Pétion, car il y avait en la possession de l'Etat assez de terres pour satisfaire chaque guerrier, sans fouler aux pieds les droits des anciens propriétaires noirs et jaunes.



Pour exécuter les ordonnances de l'empereur, il fallait léser les intérêts de presque tous les citoyens propriétaires. Tout annonçait que cette vérification ferait naître un soulèvement. Dessalines, qui ne craignait pas de le provoquer, en éprouvait cependant de vagues inquiétudes. Se promenant, un soir, vers la fin d'aout, sur la place d'armes des Cayes, accompagné des généraux Martial Besse, Bazelais, Guillaume Lafleur et d'Inginac, directeur des domaines de l'Ouest, il demanda à ce dernier ce qu'il avait remarqué de saillant depuis qu'il avait commencé ses opérations de vérification. Inginac lui dit que les prévaricateurs n'avaient nul amour de l'indépendance, qu'ils ne songeaient pas à transmettre une patrie à leurs descendants; qu'ils ne rêvaient qu'aux moyens de s'enrichir pour se retirer ensuite à l'étranger. Dessalines répondit: "Quel remède a tout ce mal ? J'écraserai les os à tous ces gens-la, c'est ce que je suis décidé à faire, qu'en pensez-vous, Messieurs ? N'est-ce pas la terreur seule qui les contiendra ?" Martial Besse et Bazelais lui dirent, qu'au lieu de mettre toujours en pratique la terreur, il vaudrait mieux moraliser le peuple, l’instruire, le porter à un travail régulier; qu'il vaudrait mieux ne plus enrôler indistinctement tous les jeunes gens qui souvent, dans les casernes, se corrompent par le jeu et les liqueurs fortes. Dessalines soutint que les indigènes ne comprendraient rien à toutes ces choses. Alors ceux qui l'accompagnaient lui dirent: "Puisque vous avez formé des soldats qui ont vaincu les héros des Pyramides et de Marengo, pourquoi ne, formeriez-vous pas des citoyens instruits et de moralité ?" Dessalines, flatté d'entendre vanter ses talents militaires, promit de réfléchir à ces conseils. Il demanda au général Guillaume Lafleur son opinion. Celui-ci lui dit: "Je ne contrarierai pas votre manière de voir; mais vos commères, vos amies, vos laquais s'engraissent, tandis que vos pauvres soldats ont le ventre plat et sont tout nus." Dessalines demeura fortement frappé de ces dernières réflexions. Il déclara qu'au premier janvier 1807, les abus de tous genres cesseraient, que les fonds publics ne seraient plus follements donnés aux courtisanes, qu'alors il habillerait l’armée, la paierait régulièrement et suivrait un tout autre système. Il leur laissa entendre qu'il avait besoin, avant cette époque, de se défaire de quelques hommes, qui conspiraient et le gênaient. Mais le Destin avait fixé le terme de sa carrière au 17 octobre 1806. Il rentra au palais satisfait de sa promenade,



Néanmoins, persistant dans son système de vérification des titres de propriété, il rendit, quelques jours après, un décret relatif aux testaments et aux autres actes portant donation de biens fonds.






JACQUES 1er, EMPEREUR D'HAITI ET CHEF SUPREME DE L'ARMEE, PAR LA GRACE DE DIEU ET LA LOI CONSTITUTIONNELLE DE L'ETAT;



Considérant que les tribunaux ont jusqu'à, ce jour homologué indistinctement tous les testaments qui leur ont été présentés; Considérant qu'au mépris de l'ordonnance du sept février 1804 qui fixe l'époque qui annule les ventes, testaments et donations faites par les blancs, ces tribunaux n'ont cessé, depuis leur installation, d'homologuer et insinuer de tels actes;



Décrète:



Art. 1er. A l'avenir lorsqu'un testament ou tout autre acte portant donation aura été présenté soit à l'homologation, soit à l’insinuation, le tribunal civil, avant de faire droit, donnera connaissance à l'administrateur principal de la division, de la demande en homologation dudit testament, à l'effet de s'assurer si l'Etat n'est pas fondé à réclamer contre ladite demande.



Art. 2e. A l'avenir, aucun notaire ne pourra passer des actes portant vente ou donation, qu'au préalable le vendeur ou le donateur n'ait produit, outre ses titres de propriété, un certificat de l'administrateur principal de la division qui atteste que le dit donateur ou vendeur est le légitime propriétaire, et que le bien qu'il veut vendre ou donner n'appartient ni en tout ou en partie aux domaines de l'Etat.



Art 3e. Dans aucun cas le tribunal ne pourra homologuer ou insinuer aucun acte portant donation que le requérant en justice n'ait produit le certificat mentionné en l’article précédent.



Art. 4e. Les dispositions du présent décret s'étendent sur les actes mêmes passés entre Haïtiens, etc., etc., etc.



Donné aux Cayes, le 1er septembre 1806, an 3e de l'indépendance et de notre règne le second.



Signé: DESSALINES.



Par l'Empereur :



Pour le secrétaire général absent,



Signé: BOISROND TONNERRE.
b]


[b]1)Nous avons vu qu'à cette époque on disait Mlle ***l'amie de tel général, pour designer la maitresse de ce général.
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Message  Maximo Mar 26 Avr 2011 - 12:23

Le lendemain (2 septembre), l'empereur fit publier un décret relatif aux droits d'importation et d'exportation et aux rétributions accordées aux directeurs de douane, capitaines de port, commissaires de marine, trésoriers et interprètes. Le même jour fut publié le tarif des prix annuels et moyens des marchandises importées des ports du dit empire. Ces décrets furent les derniers de l'empereur.

Dessalines destitua ensuite plusieurs bons fonctionnaires. II confia provisoirement, au général Moreau, le commandement de la première division du Sud; à l'adjudant-général Papalier, le commandement de l'arrondissement des Cayes, et maintint le colonel Bauregard au commandement de la place. Ces officiers reçurent pour instructions de visiter ou de faire visiter scrupuleusement tous les navires qui entreraient dans un des ports de la première division du Sud, et de trancher la tête au général Rigaud sur le pont du navire qui le ramènerait. Il craignait qu'il ne fût délivré par le peuple ou les troupes, si on lui donnait le temps de débarquer. Pendant cet intervalle, les opérations de la vérification des comptes administratifs et des titres de propriété continuaient activement. Inginac suivait les instructions de l'empereur avec la plus sévère exactitude. Beaucoup de titres qu'il trouvait irréguliers étaient anéantis. Le mécontentement était général, mais il se témoignait sourdement. Néanmoins sa demeure était sans cesse remplie de flatteurs et de dénonciateurs; il était accablé de prévenances et de cadeaux de tous genres; chacun s'efforçait de le gagner pour sauver sa propriété. Des hommes liés d'une vieille amitié se dénonçaient mutuellement pour se faire bien venir. Pour mieux procéder à ses opérations, il fit dresser un cadastre général des propriétés urbaines et rurales. Il se procurait des renseignements de tous cotés. Bégon, chef de division de la marine, commandant du port, lui remit une note exacte des bâtiments qui étaient entrés dans la rade des Cayes et qui en étaient sortis. Dessalines signala à Inginac la maison indigène Barreau, et la maison étrangère Mackintosh, comme ayant fait de fortes contrebandes et lui enjoignit de s'occuper particulièrement de celle de Mr Mackintosh. Il lui écrivit à cet effet les lettres suivantes:



Au palais impérial des Cayes, le 6 septembre 1806



Jacques 1er, empereur d'Haïti, au Directeur

des Domaines Inginac, charge de la vérification

de la comptabilité de la 1ere division du Sud.



"Je reçois à l'instant, monsieur, le compte des droits

dus par monsieur Barreau, négociant en cette ville, s'élevant à 3.940 gourdes. J'en fais mon affaire et le garde pour en ordonner le recouvrement.



Signé: DESSALINES"



Au palais impérial des Cayes, le 8 septembre 1806,

Jacques 1er, empereur d'Haïti, à Mr Inginac, vérificateur des comptes de l'administration de la 1ere division du Sud.

"J'ai de grands renseignements, citoyen vérificateur, sur les livres et comptes de la maison Mackintosh, américaine; ainsi ne lui donnez pas de quartier, et mettez toute votre application à cette vérification. Je veux avoir à me réjouir en apprenant par vous la somme importante qu'il aura à restituer à l'Etat.



Signé: DESSALINES"



Inginac s'occupa aussitôt de la maison Mackintosh qui restitua à l'Etat plus de cent vingt mille gourdes. La maison Hopsengarther fut contrainte de restituer plus de 60.000 gourdes de droits d'entrée et de sortie. Néanmoins cette sévérité exercée envers Mackintosh irrita la population. Mackintosh était estimé aux Cayes, tant des Haïtiens que des étrangers. On l'admirait d'avoir sauvé beaucoup de Blancs, lors du massacre de 1804. Il avait reçu de ces proscrits, échappés à la mort et refugiés dans les iles voisines, une médaille d'or, en reconnaissance de sa belle conduite. Cette médaille doit se trouver dans sa famille.

Les contrebandes et les dilapidations n'étaient poussées à ce degré de scandale que parce que l'empereur en donnait l'exemple. Les dépenses de Mlle Euphémie Daguille, que le trésor public avait soldées, s'étaient élevées a mille gourdes par jour depuis l'arrivée de l'empereur aux Cayes. Comme Dessalines ne voulait pas ajouter foi a la sincérité du chiffre de ce compte, on lui exhiba la note détaillée de la sortie du trésor de ces différentes sommes, certifiées par le trésorier. Après l'avoir fait lire par Diaquoi, il ordonna de ne compter désormais a Mlle Euphémie Daguille que 800 piastres par mois. Dans chaque grande ville, les maitresses de l'empereur coutaient presque autant à l'Etat.

Les opérations de la vérification générale continuaient toujours avec une rare activité. Dessalines, satisfait d'Inginac, lui annonça qu'il le nommait grand officier de son empire et contrôleur général de toutes les opérations administratives. Il lui recommanda d'agir sans crainte et lui promit de le soutenir par ses baïonnettes et ses bouches à feu. Il lui dit de se consoler d'être haï et exécré, car lui, empereur, il l’était aussi, de n'avoir aucune inquiétude avait donné l'ordre à Wagnac, lorsqu'il aurait terminé ses opérations de vérification, de l'accompagner avec un escadron, jusqu'au pont de Miragoane, afin qu'il put sortir, sans danger, du département du Sud, et qu'à son arrivée dans l'Ouest, le général Yayou enverrait, de Léogane, au devant de lui, un escadron, sous les ordres du chef d'escadron Baude.

Ayant reconnu que le chargement forcé des bâtiments, en trois espèces de denrées, sucre, café et coton, contrariait le commerce et nuisait, par conséquent, aux intérêts du fisc, il ordonna à Inginac de permettre aux navires d'embarquer ceux des produits qui pourraient leur convenir. Il dit que c'était Christophe qui lui avait conseillé de prendre la mesure concernant le chargement des bâtiments en trois espèces de denrées, mais qu'il voyait à présent que c'était pour discréditer son gouvernement. Boisrond Tonnerre l'écoutait, s'écria : "Sans doute ! Car en fait de conspiration tous les moyens sont bons."

Inginac fit aussitôt vendre au commerce, pour le gouvernement, 500.000 livres de café qu'il avait réunies au magasin de l'Etat. Dessalines exigea qu'il lui comptât mille doublons sur le produit de la vente, et se résolut à quitté les Cayes. Il lui envoya le lendemain la lettre suivante;



Liberté ou la Mort



Le 8 septembre 180S Jacques 1er, empereur d'Haïti, au Directeur des domaines Inginac.



"Vous vous rendrez à mon bureau aussitôt mon départ, à l'effet d'empaqueter tous les papiers de correspondance, livres, appartenant au général Geffrard, et vous me les ferez parvenir à Dessalines"' par une occasion sure.



"Signé: DESSALINES



Le même jour, il lui adressa la lettre suivante:



"Aussitôt que vous aurez fini de compulser les comptes de l'administration de cette division, vous vous ferez fournir par l'administrateur Quenez un état général des maisons appartenant à l'Etat, lesquelles seront de nouveau, en votre présence, criées et affermées. Vous demanderez l'exhibition de tous les titres de propriété relatifs aux maisons qui ont été déjà remises pendant mon séjour en cette ville pour confirmer leurs propriétaires en possession d'icelle, et ceux qui ne l'ont pas été encore doivent être astreints à votre examen, afin de vous assurer des véritables propriétaires qui seront par vous renvoyés également en jouissance de leurs biens, et vous ordonnerez de réunir aux domaines de l'Etat les propriétés dont les titres des réclamants vous paraitront illégaux, et ensuite vous m'en aviserez.

"J'ai ordonné à l'adjudant-général Papalier de vous fournir tous les moyens nécessaires dans vos opérations, tant en baïonnettes qu'en bouches à feu, si le cas le requiert.

"Je me plais à croire, Monsieur, que vous mettrez toute l'exactitude que je vous connais dans l'exécution du présent ordre.



Signé: DESSALINES



Inginac exécutera ces deux ordres avec tant de vigueur qu'il soulèvera contre lui l'animosité de toute la population des Cayes. Ce furent les dernières instructions qu'il reçut de Sa Majesté.

L'empereur, devant partir le lendemain pour le Port-au-Prince, invita à diner, au palais, le général Moreau, Papalier, Bauregard, Bourdet, colonel de la 13e, et Inginac. Papalier avait été touché des témoignages de confiance que lui avait donnés l'empereur, depuis son séjour aux Cayes et s'était entièrement éloigné de ceux qui poussaient à sa chute. Pendant le repas, Inginac obtint de Dessalines la grâce de Boisrond Canal qui devait être envoyé à Marchand pour y être jeté dans les fers, et celle d'un nommé Daniel Thomas, créole des îles du Vent qui était emprisonné depuis vingt jours, pour avoir introduit dans le pays deux gazettes renfermant des articles contre l'empereur. Celui-ci dit au sujet de Daniel Thomas : "Je le croyais déjà exécuté; puisqu'il ne l'a pas été, je le gracie; mais il quittera l'empire sur-le-champ; et s'il y revient, il sera pendu aux vergues du bâtiment qui l'y ramènera." Comme il n'y avait pas de navire en partance, Daniel demeura aux Cayes, fut surpris par la révolution qui y éclata contre Dessalines et devint plus tard en Haïti fonctionnaire public.



(1) On doit se rappeler que le bourg de Marchand avait pris le nom de Dessalines.
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Message  Maximo Mer 27 Avr 2011 - 7:39

Apres le repas, Alexis Dupuy, un des secrétaires de l'empereur, qui avait déjà parcouru les papiers de Geffrard prit à l'écart Inginac et lui dit: "Mon cher ami, il y a dans ce cabinet des pièces que vous êtes chargé d'envoyer à Marchand; vous y trouverez des lettres qui peuvent compromettre beaucoup de gens. Diaquoi et moi, nous en avons déjà soustrait plusieurs, et il nous a été impossible de faire davantage, mais j'ai l'espoir que vous ferez le reste. Faites-nous la promesse de ne pas oublier ce que je vous dis; vous sauverez la vie à beaucoup de citoyens"; Inginac lui donna sa parole qu'il achèverait la belle œuvre qui avait été commencés. Il détruisit, en effet, tous ces papiers.



Le 9 septembre, Dessalines partit des Cayes, emportant les malédictions secrètes de presque toute la population dont il avait froissé les intérêts les plus chers. Depuis la mort de Geffrard, la conspiration n'avait plus de chef dans le Sud; mais elle existait toujours dans tous les esprits. On se comprenait par le regard, par le geste. Dix hommes réunis et se déclarant en révolte sur un point quelconque de la campagne pouvaient rallier successivement les plus gros bataillons qui eussent été envoyés contre eux. Il ne fallait que déployer un drapeau pour faire courir aux armes les Haïtiens noirs et jaunes, de toutes les conditions, car l'animosité était égale dans les deux nuances qui forment notre population. Les hommes qui, en 1806, étaient déjà en position, affirment tous que Christophe et Geffrard ont été les premiers machinateurs de la chute de Dessalines et que Pétion qui n'ignorait pas leur conjuration et avait même communique avec eux verbalement par l'intermédiaire d'agents secrets, avait été longtemps irrésolu et ne s'était prononcé qu'après la prise d'armes du Sud. Bien des années après les événements d'octobre 1806, il fut dit que ce furent Geffrard et Pétion qui avaient organisé la conspiration du Sud, et parce qu'il n'existait aucune pièce constatant que Christophe y eut pris part, que celui-ci y était demeuré étranger. Il n'existe aujourd'hui aucune pièce authentique, pas même une lettre, pouvant servir de pièces à charge contre qui que ce soit, d'une date antérieure à la prise d'armes, (8 octobre 1806); et parce que peu de personnes, à l'époque, aient voulu se compromettre, en exposant par lettres, leurs projets contre Dessalines, est-ce un motif pour qu'il n'y ait pas eu de conspiration ? Cependant quand le mouvement insurrectionnel éclata, il avait été préparé de longue main. Mais par qui ? Par Christophe et Geffrard que nous indiquent nos traditions invariables à ce sujet, dans le Sud, l'Ouest, l'Artibonite et le Nord, traditions qui ne datent que de 42 ans. Et après la mort de Dessalines que voyons-nous? Tous les points de l'Empire d'Haïti adhèrent à la révolution; et ces adhésions qui ne sont que des exposés de griefs contre Dessalines sont réunies en une brochure intitulée Resistance à l'Oppression; et Christophe qui, après la bataille du 1er janvier 1807, se déclare le vengeur de l'empereur, traite celui-ci, en octobre 1806, dans son adresse à ses frères du Sud et de l'Ouest, d'hydre dévorante. Et cependant il savait, des la révolte du Port-salut, avant la mort de l'empereur, qu'il avait été proclamé par les insurgés chef suprême de l'Etat. Si l'histoire, exposant fidèlement les faits, ne planait pas, dans sa sévérité, au-dessus des passions des partis qui s'accusent mutuellement selon leurs intérêts du moment, de la chute violente de l'immortel fondateur d'Haïti, il demeurerait donc que cet événement fut un effet sans cause. Car à défaut de pièces authentiques constatant la participation à la conjuration, des 1805, des Haïtiens tant noirs que jaunes, pourquoi admettrait-on celles des versions qui sont contraires aux traditions de l'immense majorité de la population contemporaine de Dessalines, et qui ne sont basées sur aucune pièce officielle antérieure à la prise d'armes ? A l'occasion de la conspiration qui a précédé la chute de Dessalines, dont Geffrard et Christophe étaient les chefs, nous dirons qu'il y a des vérités que personne ne conteste, quoiqu'on n'en puisse fournir des preuves immédiates, et qu'il est impossible de croire qu'un mensonge absurde devienne une tradition universelle.



Quand l'empereur arriva au Petit-Goave, dans la province de l'Ouest, il dit à Lamarre, colonel de la 24e demi-brigade : "Lamarre, mon fils, tiens-toi prêt à descendre dans le Sud, à la tête de ton corps, car si les citoyens de cette province ne se soulèvent pas d'après ce que je leur ai fait, ils ne sont pas des hommes". Il atteignit le Port-au-Prince, ou, quelques jours après, il reçut une lettre de sa principale maitresse des Cayes. Quoique cette lettre n'appartienne pas à l'histoire, nous la transcrivons parce que tout ce qui concerne Dessalines ne peut que nous intéresser et jeter quelque jour sur son époque. La tête de lettre est imprimée



.



EUPHEMIE DAGUILLE,



A Sa Majesté Jacques, empereur premier d'Haïti et chef suprême de l'armée, par la grâce de Dieu et la loi constitutionnelle de l'Etat.







Monsieur Inginac était venu me prévenir qu'il envoyait auprès de vous un exprès, je m'empresse d'en profiter pour m'informer de l'état de votre santé. Si les vœux que je ne cesse d'adresser au Très-Haut, depuis votre départ, sont exaucés, vous devez en jouir d'une bonne.



Je m'attendais à recevoir de vos nouvelles lors de votre départ d'Aquin comme vous avez toujours fait; mais j'ai été trompée dans mon attente; il parait, par la compagnie que vous avez eue, que vous m'oubliez. Quant a moi, je ne pourrai jamais oublier mon cher empereur; je suis malade depuis votre départ et m'ennuye beaucoup.



Adieu mon cher et bien-aimé empereur; j'ose espérer que j'aurai la douce satisfaction de recevoir sous peu de vos chères nouvelles; en attendant recevez mon embrassement.



Votre très humble, très affectionnée et très soumise amie.



(P. M. d'emprunt) EUPHEMIE DAGUILLE.







P. S. Mes enfants ont beaucoup de regret de votre départ, ils vous assurent de leur respect.







L'empereur, qui, au lieu de s'occuper des grands intérêts du pays, ne songeait qu'à se livrer aux plaisirs, manda au palais le chef de bataillon Lys, un des beaux et braves officiers de notre armée. Il avait l'intention de le punir d'avoir fréquenté la maison d'une de ses maitresses du Port au-Prince. Les amis de Lys le considéraient comme perdu et l'exhortaient à ne pas aller au gouvernement. Lys s'y rendit résolument, portant sur lui deux pistolets de poche, et bien déterminé à donner la mort à Dessalines s'il levait la main sur lui. Des qu'il se présenta dans la grande salle du palais devant l'empereur, celui-ci lui dit: "Vous voici, monsieur Lys, j'avais besoin de vous voir;" en même temps il se promenait à travers la salle, dans une forte agitation. II retourna vers son trône, se saisit de sa cravache. Aussitôt Lys porta la main sous son habit, prit une attitude noble et fière et regarda l'empereur avec des yeux de feu. Dessalines posa la cravache sur une table, lui tourna le dos et se mit a marcher.— "Vous n'avez rien à me dire, Sire ?" L'empereur lui répondit sans le regarder : "Vous pouvez vous retirer." Lys se rendit chez ses amis qui ne s'attendaient plus à le revoir.



Dessalines qui suspectait la fidélité des jeunes gens du Port-au-Prince, les fit presque tous enrôler dans la 12e demi-brigade®. Pétion voyait avec satisfaction les jeunes gens des villes devenir soldats; il désirait même les voir en grand nombre se faire laboureurs au lieu de chercher à avoir des places dans les maisons de commerce. En effet ceux qui portent les armes et cultivent les terres sont les maîtres d’un pays.







(1) Le lecteur a du remarquer que je n'ai cite, des maitresses de Dessalines, que mademoiselle Euphémie Daguille. En nommant les autres, j'eusse donné des noms ne représentant rien. Mademoiselle Daguille fut non seulement la maitresse de l'empereur, mais un personnage vraiment historique, un cœur généreux, on peut dire presque une héroïne. Elle fit la campagne de l'Est en 1805. Souvent elle a bravé les balles et maintes fois ses mains délicates ont prodigué des soins aux blesses. Elle à joué un rôle honorable aux Cayes, pendant les jours qui ont précédé la révolte contre Dessalines.



(2) Port-au-Prince, le 26 septembre 1806, an 3e



M. B. Inginac, directeur des domaines de la 2e division de l'Ouest, et présent aux Cayes.



J'ai reçu, mon cher monsieur Inginac, la votre du 16 courant par laquelle vous m'accusez réception de celle que je vous ai écrite. Je vous donnerai pour nouvelle que nous avons tous été mis dans la 12e demi-brigade, au passage de Sa Majesté ici; mais nous avons jusqu'a ce jour la faculté de travailler dans nos bureaux et nous ne faisons pas encore de service. Vous saurez aussi, par la présente, que Sa Majesté a donné l'ordre à Mr Ogé de réunir le magasin des denrées au magasin général. Mais je pense qu'il attendra votre retour avant de rien déranger, car il n'a rien changé jusqu'a ce jour. Les flatteurs et les médisants sont, mon cher Mr Inginac, toujours jaloux du bien des autres.



J'ai reçu l'ordre aujourd'hui, de l'administrateur Ogé, de faire apporter au bureau, par tous les propriétaires, leurs titres de propriétés pour la nouvelle révision qui doit se faire par Sa Majesté l'empereur.



Je n'ai rien de nouveau à vous apprendre pour le moment que notre cadre est vide. Je vous désire une parfaite santé. Toute votre famille jouit d'une bonne santé et vous assure de ses amitiés, ainsi que ces messieurs.



Je vous prie de me croire votre dévoué.







G. ROUX







(1) Inginac a détruit aux Cayes, en septembre 1806, la correspondance de Geffrard avec Christophe.

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Message  Maximo Ven 29 Avr 2011 - 12:22

Pendant son séjour dans le Sud, au milieu des enquêtes qu'il avait fait faire pour découvrir tous les fils de la trame qui existait contre lui, Dessalines n'avait pas entendu citer le nom de Pétion. La confiance qu'il avait en ce général s'en était accrue. Comme il ne doutait pas qu'il n'eut bientôt besoin de son courage, ainsi que de son influence sur les troupes et le peuple, il le combla plus que jamais de ses attentions, et se plut a l'appeler en public le Papa bon cœur. Il s'efforça d'enflammer contre les citoyens du Sud la fureur du peuple et des soldats, en déclarant hautement qu'ils voulaient se détacher de l'unité haïtienne pour mettre à leur tête le général Rigaud qu'ils attendaient. Mais comme il existait dans l'Ouest beaucoup de sympathie en faveur des gens du Sud, ses paroles ne produisirent aucune impression sur le peuple. Pour témoigner ses bonnes intentions, il éleva à une importante dignité un citoyen vertueux, Ignace Fresnel, en lui confiant la charge de commissaire impérial. Déjà le citoyen Moreau avait été nommé Président du tribunal civil(1). Il nomma le colonel Germain Frère général de brigade et le récompensa d'avoir servi toutes ses passions. Les cultivateurs du Cul-de-sac, qui étaient soumis au travail le plus rude, ne souhaitaient que sa chute. Il partit du Port-au-Prince et parvint à Marchand. Les mots de sang et de massacre sortaient souvent de sa bouche; il paraissait se défier d'un grand nombre de ses anciens amis; Mentor presque seul possédait toujours toute sa confiance. Il y avait dans les cachots de Marchand un Haïtien nommé Dalegrand. II se trouvait sous le coup d'un décret de 1801 portant que tout indigène qui reviendrait en Haïti, après avoir été pris par un bâtiment étranger, serait fusillé en place publique. Dalegrand, capitaine d'un de nos corsaires, avait été capturé par un brick de guerre français. Ayant trouvé le moyen de s'évader, il était rentré en Haïti. Dessalines le fit fusilier, parce qu'il n'avait pas fait sauter son bâtiment. Ces rigueurs faisaient gémir le peuple qui laissait entendre des murmures menaçants. La résistance que Dessalines rencontrait de tous cotés l'irritait de plus en plus. Une femme s'était présentée au palais portant des plaintes centre un officier général. Dessalines, pour toute réponse, ordonna de la passer aux verges. Le capitaine, qui était de service au palais, fut au désespoir d'être contraint d'exterminer sa mère. Cependant l'infortunée était déjà placée entre deux haies de soldats armes de verges. Les officiers de l'état-major général, quoique habitués à d'horribles scènes, étaient consternés de ce qui allait se passer : le fils exterminer la mère ! Charlotin Marcadieux, qui seul osait prononcer des paroles de vérité devant Dessalines, se précipita dans la cour du palais et l'entendit disant aux soldats avec fureur : "Exterminez-la !" — "Arrête, monstre, lui cria Charlotin ! Serais-tu capable de commander la mort dune femme innocente ? Tu as mis les choses dans un tel état que bientôt je serais contraint de me faire immoler pour toi (1). Dessalines rentra dans ses appartements sans répondre. Charlotin renvoya la malheureuse saine et sauve. Alors une nouvelle, qui parvint à Marchand, remplit Dessalines d'une fureur difficile à peindre : les hispano-français venaient de s'emparer de Ouanaminthe. Depuis le mois d'aout 1805, ils s'étaient préparés à cette agression. Quand ils avaient assailli ce bourg, Capoix, quoique la seconde division du Nord lui fût confiée, était absent du chef-lieu de son commandement. Que faisait donc Capoix ? s’écria l'empereur. Cette circonstance exploitée par les ennemis de ce général lui nuisit considérablement. Christophe en profita pour porter le dernier coup à son rival. Il fit parvenir à Dessalines que Capoix, au lieu de donner des soins au service public, se livrait à l'intrigue, s'absentait fréquemment du Fort-Liberté et se transportait à la Grande-Rivière pour y organiser une insurrection contre le gouvernement.

Le général Christophe partit du Cap et s'achemina contre le bourg de Ouanaminthe pour le reprendre sur les Français. Mais avant qu'il y fût arrivé, Capoix qui avait eu le temps de retourner à son poste, s'en était emparé par une attaque prompte et résolue. Quand il y parvint, il trouva Capoix nageant dans l'ivresse d'une victoire. Celui-ci le reçut assis et le chapeau sur la tête; cependant Christophe était son supérieur, en qualité de généralissime des armées d'Haïti. Christophe s'en plaignit amèrement à Dessalines. L'empereur lui envoya l'ordre de surveiller activement les moindres démarches de Capoix. A la même époque, plusieurs embarcations haïtiennes avaient été capturées par des corsaires français dans les parages des Gonaïves.

Pendant cet intervalle, la plus grande fermentation existait aux Cayes et dans les campagnes environnantes. Inginac continuait ses opérations de vérification avec activité. Jeune, beau, d'une haute taille, d'une intelligence rare, il avait dans son attitude toute la fierté que donnent souvent les faveurs du souverain. Il parcourut les papiers dont lui avait parlé A. Dupuy. Il trouva beaucoup de lettres de Christophe à Geffrard, par lesquelles le premier censurait amèrement le gouvernement de Dessalines; des lettres de Férou, de Bergerac Trichet, de Vancol adressées à Geffrard, dans le même esprit que celles de Christophe; des lettres de Geffrard à Christophe et à Bruno Blanchet, qui ne laissaient pas douter de l'existence d'une conspiration contre l'empereur, des 1805. Après avoir communiqué toutes ces pièces à l'adjudant-général Papalier et au citoyen Daublas, il les fit bruler. Obligé de sévir contre les contrebandiers, les dilapidateurs, et se montrant beaucoup trop sévère dans l'examen des titres de propriété, il avait soulevé contre lui une animadversion générale. On lui adressait des lettres anonymes pleines de menaces, et les quelques hommes, qui lui portaient un peu d'intérêt, lui disaient de prendre garde aux assassins. Néanmoins, il procédait toujours sans crainte à la révision des titres de propriété, ratifiait ceux qui étaient en due forme et anéantissait ceux qu'il trouvait irréguliers, quoiqu'ils eussent été, la plupart, déjà sanctionnés par l'empereur. L'irritation allait croissante. Beaucoup d'officiers jouissaient chacun de plusieurs propriétés de l'Etat, sous prétexte que le gouvernement leur devait des logements; il loua ces biens et ne laissa à chacun d'eux qu'une maison; ce qui accrut encore la masse des mecontents. Pour ce qui concernait les propriétés rurales, il les affermait en ne laissant qu'une seule à chaque officier supérieur. Quand on demandait l’envoi en possession d'un bien, pour s'assurer des droits du réclamant, il consultait les citoyens, les autorités, et même des cultivateurs lorsque c'était une propriété rurale. Ce qu'il y avait de pénible dans sa tache, c'était de vérifier les titres que l’empereur avait déjà ratifiés, mais souvent sans un mur examen. Tous ceux qui étaient dépossédés se répandaient en invectives contre lui, se plaignaient de ce qu'il fut seul juge dans une affaire de cette importance, et travaillaient activement à la ruine d'un gouvernement qui les dépouillait ainsi. Sur ces entrefaites, vers la fin de septembre, Dessalines envoya aux Cayes, Louis Almanjor pour aider Inginac dans ses travaux et pour, en même temps, remplacer l’administrateur des finances Louis Boisquenez. Inginac eut aussi à réprimer des abus qui existaient à l'hôpital militaire. La situation de l'établissement présentait 320 malades pour lesquels on fournissait chaque jour les fonds nécessaires. Cependant quand il le visita, on ne put lui montrer dans les dortoirs que soixante soldats.

Beaucoup de campagnards propriétaires avaient été dépossédés; ceux qui ne l’étaient pas s'attendaient à l’être. Il y avait d'une part désespoir, de l’autre inquiétude. Aux Cayes, presque tous les officiers noirs et de couleur conspiraient Ils s'abouchèrent avec plusieurs habitants du quartier de Port Salut, et il fut convenu que ceux-ci donneraient le signal de la révolte dans les premiers jours d'octobre et que les troupes qui seraient envoyées contre eux se rallieraient au mouvement, au lieu de le combattre. On expédia par mer des émissaires dans le Nord, chargés de conférer avec Christophe. Celui-ci des qu'il reçut les premiers avis du projet d'insurrection songea sérieusement à se défaire de Capoix, son rival le plus dangereux.

Les hommes les plus animés contre Dessalines aux Cayes étaient, Wagnac, Voltaire, Bauregard, Racolier, Lafrédiniere, Verret et Tapiau. Lafrédiniere était un Blanc qui était devenu Haïtien pour avoir pris les armes avec les indigènes contre les Français, ses compatriotes, et dont nous avons déjà parlé en racontant la guerre de l’indépendance. Verret était aussi un Français qui avait servi dans l'ancienne 13e coloniale, et qui s'était rallié aux indigènes lors de la prise d'armes de Pétion contre Leclerc en 1802 Il entra plus tard dans l'état-major de Geffrard, au grade de colonel. A la mort de celui-ci, Dessalines le plaça auprès de Gerin à l'Anse-à-Veau. Il était à présent aux Cayes. Les partisans de l'empereur étaient peu nombreux en cette ville, et la masse de la population, inquiète des menaces que lui avait faites Sa Majesté, se croyait compromise et ne pensait devoir trouver son salut que dans la révolte. Le général Moreau qui avait remplacé Geffrard était très dévoué au gouvernement; mais il était haï, et sans capacités; il n'était que brave. Devenu petit-maitre depuis l'expulsion des Français, il ne s'occupait que de sa toilette et de ses plaisirs. Papalier n'était pas personnellement hostile à Dessalines, mais il le jugeait capable de faire exterminer les innocents comme les coupables. Beaucoup de nos anciens pensent que si l’on avait été convaincu, aux Cayes, que Dessalines se fut borné à punir les auteurs de la révolte qui va bientôt éclater, elle eut été étouffée.

II y avait en ville des réunions, chaque nuit, dans de nombreuses maisons; on travaillait l'esprit des troupes dont la fidélité était déjà ébranlée; on envoyait des émissaires dans les campagnes; on correspondait avec le Nord et l'Ouest; on préparait enfin l'insurrection. Mademoiselle Euphémie Daguille, l'amie de l'empereur, invitait Inginac à passer ses soirées chez elle; celui-ci s'y rendait régulièrement; elle lui disait qu'il existait une conspiration, que de tous cotés, on parlait de la chute prochaine de l'empereur, Elle l'exhorta à donner aux autorités peu zélées, une direction contre le mouvement qui s'organisait en lui répétant sans cesse que Dessalines avait placé en lui toute sa con fiance et que tout ce qu'il ferait serait approuvé. Inginac lui répondit qu'il ne pouvait pas sortir du cercle de ses attributions en sévissant contre les agitateurs, qu'il y avait des autorités militaires chargées de la haute surveillance, Elle lui répliquait que l'empereur, en partant, lui avait confié qu'il était son représentant. Mademoiselle Euphémie Daguille qui entretenait des espions était parfaitement avisée de ce qui se passait, tant en ville qu'à la campagne. Elle annonça à Inginac que le foyer de la conspiration était au Port-Salut, que le principal chef des conjurés de cet endroit était Mécerou, habitant propriétaire. Elle lui fit connaitre que Racolier s'agitait beaucoup en ville, parce qu'il était mécontent que Dessalines eut nommé Wagnac colonel du régiment des dragons, quand il en était le chef d'escadron le plus ancien.



1) C'est ce même Charlotin Marcadieux qui, le 17 octobre 1806, se fit sacrifier, au Pont-Rouge, sur le cadavre de Dessalines.



(1) Au Port-au-Prince, Dessalines avait nommé les citoyens Perdriel, Jeanton, Linard, Médor, Séac Jeanton aîné, juges; au Cap, le citoyen Fleury, président du tribunal civil, Beaubert, Petit, Almanjor père, juges; Bonniot, président du tribunal de commerce, Jean Isaac, juge-de-paix, et Delou, assesseur. Le 14 aout 1805, le général Pétion avait installé, au Port-au-Prince, le tribunal civil.
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